Repousser nos limites extérieures : La demande de 2019 du Canada aux Nations Unies concernant le plateau continental dans l’océan Arctique
L’océan Arctique est une partie immense, froide, isolée et tout à fait fascinante de l’hémisphère Nord. À des milliers de mètres sous sa surface se trouve le prolongement de notre pays appelé le plateau continental. Et maintenant, d’après une énorme quantité de données géoscientifiques sur les fonds marins, il serait possible d’ajouter 1,2 million de kilomètres carrés à la superficie territoriale de 9,98 millions de km2 du Canada.
À titre de signataire en 2003 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS), le Canada a été dans l’obligation de définir officiellement l’étendue de son plateau continental au-delà de 200 milles marins. En effet, en vertu de la Convention, les pays ont des droits sur les fonds marins et les ressources naturelles qui se trouvent sous la surface de l’océan s’ils peuvent présenter des preuves scientifiques dignes de foi que leur plateau continental s’étend au-delà de 200 milles marins de leur littoral et qu’il est un prolongement naturel de la masse continentale.
C’est pourquoi, en s’appuyant sur ces nouvelles données sur les fonds marins, une délégation canadienne de Ressources naturelles Canada (RNCan), d’Affaires mondiales Canada et du ministère des Pêches et des Océans (MPO) a présenté en mai 2019 à la Commission des limites du plateau continental des Nations Unies à New York une étude scientifique de 2 100 pages formant la présentation sur l’océan Arctique du Canada.
Transcript
Mon nom est Gordon Oakey. Je suis chercheur à la Commission géologique du Canada, et en 2016, j’ai participé à une opération menée dans l’océan Arctique à bord de deux brise-glace. Sur le brise-glace suédois Oden, j’étais responsable de superviser une grande partie du programme scientifique, soit le prélèvement d’échantillons de roche du fond marin.
Nous analysons présentement les roches que nous avons trouvées pour définir non seulement les milieux de dépôt des roches sédimentaires, mais aussi la minéralogie des roches volcaniques. Nous essayons d’établir l’âge de ces dépôts rocheux et le rôle qu’ils pourraient jouer dans la définition des limites de la marge continentale du Canada.
J’ai passé beaucoup de temps à travailler sur les navires dans l’océan Atlantique. Mais c’était la première fois que je montais à bord d’un brise-glace qui traversait l’Arctique et la première fois que j’allais au pôle Nord. J’ai eu beaucoup de plaisir à analyser ces roches : d’abord, pour déterminer ce qu’ils signifient sur le plan scientifique, mais surtout pour utiliser les connaissances scientifiques ainsi recueillies pour reculer les frontières souveraines du Canada.
L’enjeu est énorme, et les équipes de recherche de RNCan et du MPO ont consacré 15 missions et plus de dix années à un projet long et ambitieux de collecte et d’analyse des données. « Si nos limites extérieures sont acceptées, nous pourrions ajouter plus d’un million de kilomètres carrés au Canada, ce qui représente la taille de deux provinces des Prairies, souligne Mary Lynn Dickson, directrice du programme UNCLOS à RNCan. L’océan Arctique est le plus petit océan du monde, et c’est certainement le moins étudié, et donc le moins bien compris. »
Nouveaux outils, nouvelles découvertes
Les géologues et les géophysiciens de RNCan ont joué un rôle déterminant dans le levé des fonds marins pour mesurer l’épaisseur des sédiments et prélever des roches en grande profondeur.
Travaillant dans des conditions de glace parmi les plus extrêmes de la planète, les scientifiques ont dû trouver de nouvelles façons de recueillir les données. Ainsi, pour enregistrer des images à haute définition des fonds marins dans des régions inaccessibles par brise-glace, ils ont eu recours à une technique jamais utilisée : ils ont programmé un véhicule sous-marin autonome pour effectuer un levé cartographique qui a duré trois jours sur une distance de plus de 400 km. En l’absence d’outils disponibles sur le marché, les techniciens de RNCan ont mis au point de nouveaux appareils de levé pouvant être remorqués sous la glace.
Ces initiatives ont permis d’accroître les connaissances scientifiques sur l’océan Arctique de façon exponentielle.
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