Le monde invisible, évolutif et à forts enjeux de la déclaration des émissions de carbone
Imaginez que vous essayiez de mesurer quelque chose d’invisible alors que les conditions changent tous les jours. Pourtant, le suivi des émissions de gaz à effet de serre est de plus en plus important dans notre monde en perpétuel changement. Découvrez comment l’équipe hautement qualifiée de comptabilisation du carbone de Ressources naturelles Canada calcule ces estimations complexes pour l’ensemble des forêts du Canada.
Juin 2023
Bien que de nombreuses personnes comprennent l’importance de l’estimation et la déclaration des émissions de gaz à effet de serre (GES) provenant du secteur forestier canadien pour suivre les progrès réalisés vers l’objectif de carboneutralité, peu sont familiers avec la méthode utilisée. On ne peut pas mettre les forêts dans une boîte scellée pour mesurer l’augmentation et la diminution des GES. Alors, comment l’équipe d’experts de RNCan évalue-t-elle les émissions du vaste secteur forestier canadien?
Il n’existe pas d’approche simple. Même les satellites dotés de la plus haute résolution ne peuvent pas révéler les moindres changements de GES aux quatre coins des vastes forêts de 226 millions d’hectares gérées au Canada. De plus, les chiffres peuvent varier considérablement d’une année à l’autre, car les perturbations naturelles comme les feux de forêt sont plus importantes certaines années que d’autres. La comptabilisation du carbone forestier est compliquée, mais c’est le type de défi que l’équipe de comptabilisation du carbone du Service canadien des forêts (SCF) relève tous les jours.
Un sentiment d’urgence grandissant
Il est essentiel de suivre et de déclarer les émissions d’une manière scientifiquement constante, car c’est le seul moyen de les gérer. Lorsque les GES sont libérés dans l’atmosphère, ils piègent la chaleur qui modifie notre climat de multiples façons. Et la température augmente : selon le Rapport sur le climat changeant du Canada, le Canada connaît un réchauffement deux fois plus rapide que la moyenne mondiale. Les régions boisées, en particulier, sont sensibles à la mortalité induite par les changements climatiques en raison des impacts causés par les insectes et les incendies de forêt, comme on peut le constater dans bon nombre de nos forêts.
Néanmoins, nous sommes déterminés à résoudre le problème. Le Canada a signé la Convention-cadre des Nations Unies sur les Changements climatiques (CCNUCC) dans les années 1990. Le pays s’est engagé à déclarer ses émissions chaque année en suivant le guide des bonnes pratiques élaboré par des experts de renommée mondiale sélectionnés par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). L’objectif de la CCNUCC est simple : stabiliser les émissions mondiales de gaz à effet de serre, puis les réduire à un niveau permettant d’éviter toute perturbation dangereuse avec le climat mondial.
Atteindre un juste équilibre
La comptabilisation du carbone n’est pas qu’une question de chiffres, surtout lorsqu’il s’agit de la nature changeante des forêts canadiennes.
« Si l’on se limite aux valeurs des émissions, on passe à côté de l’ensemble de la situation », déclare Ben Hudson, qui dirige l’équipe chargée de la comptabilité carbone. « Les émissions provenant d’un type d’activité peuvent avoir des effets très différents sur le climat mondial. Par exemple, la production et l’utilisation de combustibles fossiles auront un impact différent de celui des activités du secteur forestier et des produits ligneux récoltés. »
Une grande différence est que dans le secteur forestier, la récolte des arbres peut créer des possibilités de réduction des émissions. Les arbres repoussent. Certains peuplements coupés se régénèrent naturellement, mais beaucoup d’autres sont reconstitués par la plantation de semis. Une fois les semis établis, ces forêts renouvelées deviennent un puits de carbone efficace, absorbant le dioxyde de carbone (CO2) de l’atmosphère, souvent à des taux plus élevés que lors de leur récolte.
Les forêts offrent un large éventail d’avantages à l’être humain (notamment des emplois, une valeur culturelle et des loisirs) et la liste des avantages liés aux écosystèmes est encore plus longue. Avec la croissance démographique rapide du Canada, la demande de produits du bois nécessaires à la construction de logements, de bâtiments commerciaux et autres continuera à augmenter. Les produits du bois ayant une longue durée de vie sont plus durables que d’autres matériaux à plus forte intensité de carbone, tels que le béton et l’acier, car la production de produits du bois émet moins de carbone. Par exemple, le bois massif, un produit en bois d’ingénierie utilisé dans la construction d’une vaste gamme de bâtiments, est extrêmement solide et durable. Les bâtiments en bois massif retiennent le carbone pendant des générations, l’empêchant de pénétrer dans l’atmosphère, et les matériaux utilisés dans leur construction peuvent être recyclés à la fin de leur utilisation.
La forêt et les arbres
Lorsqu’il s’agit de calculer les émissions de GES pour le secteur forestier canadien, l’équipe incorpore différents facteurs : des données provenant de mesures des cernes des arbres, de mesures des champs et d’observations par satellite. Ces informations sont utilisées pour estimer la réaction des forêts face aux perturbations naturelles et aux activités humaines, puis elles sont intégrées dans le modèle canadien de bilan du carbone forestier. « Nous avons accès à des informations crédibles et validées scientifiquement par des partenaires fédéraux, provinciaux/territoriaux, industriels et universitaires », explique Ben.
Le domaine est en constante évolution, car des percées scientifiques et technologiques se produisent constamment. Ceci permet d’améliorer continuellement les estimations du carbone forestier du Canada grâce aux meilleures données et méthodes disponibles.
RNCan emploie une équipe diversifiée d’experts possédant des dizaines d’années d’expérience pour soutenir une approche moderne, informée et impartiale. Leurs estimations des émissions et des absorptions de GES suivent les lignes directrices internationales et répondent aux exigences de l’examen annuel par les experts internationaux de la CCNUCC qui suit la publication des estimations nationales.
« L’exactitude et l’exhaustivité de nos estimations, ainsi que la disponibilité et l’accessibilité des informations pour les décideurs, jouent un rôle important », explique Ben. « La crise mondiale du changement climatique qui menace notre mode de vie, y compris la survie de nos forêts, ne sera pas résolue si nous ne prenons pas des décisions responsables à l’échelle mondiale. Pour de nombreuses raisons, cela signifie qu’il faut trouver le bon équilibre entre la gestion de la récolte du bois et les efforts de conservation de nos forêts et de leur biodiversité, conformément aux principes de la gestion durable des forêts. »
Le Canada joue un rôle important dans le contexte mondial. Bien que le pays ne soit responsable que de 1,5 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, le Canada possède 9 % des forêts de la planète, et les pays développés doivent faire plus d’efforts pour réduire les émissions.
Ainsi, lorsque vous suivrez un débat sur la déclaration du carbone sur les médias sociaux ou que vous lirez un article sur le rapport d’inventaire national des GES, pensez à l’importante expertise scientifique et au volume de données qui sont compilées pour ces estimations, ainsi qu’à la contribution essentielle à leur création du Service canadien des forêts de RNCan et d’autres organismes.
Pour plus de renseignements :
Impacts des changements climatiques sur les forêts canadiennes
Inventaire forestier national du Canada
Inventaire des forêts canadiennes
Inventaire officiel canadien des gaz à effet de serre
Liste des publications techniques et de recherche impliquant le modèle du bilan carbone
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