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L’avenir électrique du Canada: Un plan pour réussir la transition

Conseil Consultatif Canadien de l’Électricité : Rapport final

Mai 2024

Matières

Liste des figures

Membres du Conseil

Philippe Dunsky (Président)
Président
Dunsky Énergie + Climat

Pete Bothwell
Vice-président, Transition énergétique et relations avec l’industrie, Canadian Utilities Ltd. (ATCO Electric)

Jason DionNote de bas de page 1
Directeur de recherche principal, Institut climatique du Canada

Tim Eckel
Vice-président (retraité), SaskPower

Bob EltonNote de bas de page 2
Ancien PDG, BC Hydro

Judith Ferguson
Vice-présidente exécutive
Nova Scotia Power Inc.

G.D. (Gerry) Forrest
Ancien président, Régie des services publics du Manitoba

Wendy Franks
PDG, Canadian Power-to-X Partners (ancienne directrice stratégique, Northland Power)

Cheffe Sharleen Gale
Cheffe, Première Nation de Fort Nelson
Présidente, Coalition de grands projets des Premières Nations

Lesley Gallinger
PDG, Société indépendante d’exploitation du réseau d’électricité (SIERE)

John GaudetNote de bas de page 3
Ancien PDG
Maritime Electric Co.

Bruce Lourie
Président, Ivey Foundation

Stephen MacDonald
PDG
EfficiencyOne

Kerry O’Reilly WilksNote de bas de page 4
Première vice-présidente, TransAlta

Madeleine Redfern
Ancienne mairesse d’Iqaluit
Cheffe de l’exploitation, CanArctic Inuit Networks

Greg Robart
PDG, Smart Grid Innovation Network

Stéphanie Trudeau
Vice-présidente exécutive, Québec,
Énergir

Darlene WhalenNote de bas de page 5
Ancienne présidente et PDG, Newfoundland and Labrador Board of Commissioners of Public Utilities

Emily Whetung-MacInnes
Cheffe émérite, Première Nation de Curve Lake
Directrice des partenariats autochtones, Ontario
Power Generation

Résumé

L’histoire de l’électricité au Canada

L’histoire du Canada est jalonnée d’initiatives audacieuses dans le domaine de l’électricité. Depuis les premières innovations des années 1880, notamment les premières centrales hydroélectriques, lignes électriques et lampadaires du pays, jusqu’à la vague d’électrification lors de la seconde moitié du vingtième siècle et aux grandes avancées vers la décarbonation qui ont marqué les 2 dernières décennies, le Canada a rarement courbé l’échine face aux défis majeurs liés à l’électricité.

Figure 1 : 100 ans de production d’électricité au CanadaNote de bas de page 18

Graphique linéaire illustrant l’augmentation de la production d’électricité au Canada
Version texte

Graphique linéaire illustrant l’augmentation de la production d’électricité au Canada en TWh entre 1950 et 2020. La période de 1950 à 2000 est caractérisée par l’électrification, où l’offre d’électricité a été multipliée par dix pour répondre à la nouvelle demande. La période de 2000 à 2020 se caractérise par une décarbonation du système électrique, où l’intensité des émissions a diminué de 50 % et où la production n’a augmenté que marginalement. Au-delà de 2020, la trajectoire estimée de la production moyenne d’électricité jusqu’en 2050 doublera, reflétant l’augmentation rapide de la demande due à la fois à l’électrification et à la décarbonation. La fourchette prévue des trajectoires de production d’électricité est indiquée, avec un minimum d’environ 1 000 TWh et un maximum de 1 800 TWh en 2050.

Aujourd’hui, le Canada s’apprête à relever un autre grand défi : achever la décarbonation de ses réseaux existants tout en augmentant considérablement la production et la consommation d’électricité. Ce rapport traite des approches pragmatiques que le Canada doit adopter aujourd’hui pour réussir cette transition.

Le Conseil

En mai 2023, le ministre des Ressources naturelles a convoqué le Conseil consultatif canadien de l’électricité (« le Conseil ») pour formuler des recommandations sur les politiques qui permettront au secteur de l’électricité de jouer son rôle clé dans la transition du Canada vers la carboneutralité.

Le Conseil est un organisme indépendant composé de 19 chefs de file du secteur de l’électricité issus de toutes les régions du Canada. Au cours de son mandat de 12 mois, le Conseil :

  • a tenu 87 réunions, y compris le Conseil plénier et des réunions de groupes de travail
  • a entendu 117 intervenants dans le cadre de 66 séances d’information privées et de 72 mémoires écrits
  • a obtenu un consensus total sur les 28 recommandations principales adressées au gouvernement fédéral

Comme l’attestent les recommandations présentées dans le présent rapport, le Conseil a découvert qu’il existe une voie viable permettant d’atteindre ces objectifs, une voie qui tient compte des disparités régionales, préserve la fiabilité, maintient l’abordabilité et la compétitivité des coûts, respecte les droits des Autochtones et est inclusive des collectivités autochtones.

Certes, le chemin sera semé d’embûches, de risques et de compromis. Cependant, les possibilités pour l’économie canadienne, et les risques pour les générations futures si le pays échoue dans cette entreprise sont bien plus importants.Note de bas de page 6

Un double défi

Pour atteindre les objectifs du Canada, les provinces et les territoires (qui ont l’autorité suprême sur les systèmes électriques) devront relever un double défi : achever la décarbonation des systèmes d’électricité existants tout en augmentant rapidement leur capacité afin de répondre aux besoins émergents dans tous les domaines, des transports aux bâtiments en passant par l’industrie.

Décarbonation

Figure 2 : Part de la production d’électricité non émettrice par province et territoireNote de bas de page 26

Carte du Canada utilisant des diagrammes circulaires dans chaque province et territoire
Version texte

Carte du Canada utilisant des diagrammes circulaires dans chaque province et territoire pour montrer la part de la production d’électricité produite par des sources non émettrices pour chaque région en 2022. La part de l’électricité non émettrice dans chaque région est la suivante : Colombie-Britannique – 97 %, Alberta – 19 %, Saskatchewan – 21 %, Manitoba – 99 %, Ontario – 92 %, Québec – plus de 99 %, Nouveau-Brunswick – 71 %, Nouvelle-Écosse – 41 %, Île-du-Prince-Édouard – 98 %, Terre-Neuve-et-Labrador – 99 %, Yukon – 68 %, Territoires du Nord-Ouest – 83 %, et Nunavut – moins de 1 %.

Environ 4 Canadiens sur 5 vivent dans des provinces où l’électricité est déjà largement carboneutre (plus de 90 % non émettrice). À cet égard, le Canada dans son ensemble est déjà bien en avance dans la course mondiale à l’électricité propre.

Toutefois, pour d’autres régions, le défi de la décarbonation des réseaux existants est colossal, malgré les progrès significatifs réalisés au cours des années précédentes. C’est le cas notamment de l’Alberta, de la Saskatchewan, de la Nouvelle-Écosse et des collectivités nordiques et éloignées, dont la production d’électricité repose depuis toujours sur les combustibles fossiles.

Travailler avec ces régions à décarboner leurs réseaux électriques existants est un défi que les Canadiens doivent relever ensemble.

Croissance rapide

L’autre défi auquel le pays est confronté est celui de la croissance. Si le Canada veut atteindre son objectif de carboneutralité à long terme dans tous les secteurs, il sera essentiel d’augmenter rapidement l’offre d’énergie propre.

La part de l’électricité dans la consommation énergétique du Canada est actuellement d’environ 20 %. La plupart des études montrent que pour atteindre les objectifs du pays de la manière la plus rentable, la part de marché de l'électricité devra être multipliée environ par trois en une seule génération. Elle deviendrait alors la principale forme d’approvisionnement énergétique du pays.

Figure 3 : Rôle de la décarbonation de l’électricité et de la croissance de la production d’électricitéNote de bas de page 37

Schéma comparant les émissions annuelles
Version texte

Schéma comparant les émissions annuelles du secteur de l’électricité (47 Mt de CO2e en 2022) aux émissions annuelles totales du Canada en 2022 (708 Mt de CO2e). Le diagramme montre également que l’électrification et les réseaux propres pourraient potentiellement réduire les émissions de 268 Mt de CO2e en 2050.

Ce défi de la croissance, qui n’est pas sans rappeler la vague de croissance observée au cours de la dernière moitié du vingtième siècle, nécessitera un leadership et une collaboration efficaces dans l’ensemble du Canada.

Les quatre pierres angulaires du succès

Le Conseil a élaboré les mesures politiques qu’il recommande en s’appuyant sur quatre pierres angulaires qui, ensemble, jettent les bases d’une transition électrique réussie :

  1. Vélocité : Pour atteindre ses objectifs, le Canada doit développer rapidement son infrastructure d’électricité propre. Cette expansion ne saurait se concrétiser sans des mesures visant à attirer des capitaux, à impliquer les nations et les collectivités autochtones et, surtout, à réajuster les procédures d’examen et d’approbation des projets dans l’ensemble du pays et à tous les ordres de gouvernement, afin de favoriser la production accrue d’électricité propre.
  2. Abordabilité : Pour que la transition soit couronnée de succès, elle doit être abordable et compétitive en matière de coûts. L’analyse préparée pour le Conseil suggère que cela est possible, en grande partie grâce aux économies de carburant que la nouvelle électricité permettra de réaliser. Toutefois, la marge de manœuvre est étroite et de nombreuses mesures pragmatiques et avisées devront être prises pour attirer les capitaux nécessaires, réduire les difficultés liées aux projets et aider les Canadiens à utiliser l’électricité de manière plus efficace.
  3. Fiabilité : Il est essentiel de garantir la fiabilité des systèmes électriques du Canada au cours de cette transition accélérée. Pour ce faire, une plus grande souplesse des politiques de décarbonation sera nécessaire, en particulier pour les régions qui dépendent actuellement le plus des centrales électriques à combustibles fossiles, ainsi qu’un soutien financier pour les investissements destinés à améliorer la fiabilité du système.
  4. Participation des Autochtones : Une grande partie de la nouvelle infrastructure électrique du Canada sera construite sur des terres autochtones. En faisant des nations et collectivités autochtones des partenaires à part entière de ces projets, le Canada aura là une occasion unique de commencer à remédier aux inégalités qui ont longtemps prévalu dans le développement de l’énergie et des ressources, et de tirer parti d’un puissant moteur de réconciliation.

Ces 4 pierres angulaires sont étroitement liées. Par exemple, l’optimisation de la participation des Autochtones peut notamment améliorer aussi bien la vélocité que l’abordabilité de la transition, et la réussite de la transition. Sa réussite passe par la mise en œuvre de ces 4 pierres angulaires dans le cadre d’une approche équilibrée. Par ailleurs, ces 4 pierres angulaires visent le même objectif : réduire les coûts afin que la transition soit aussi rapide et rentable que possible.

Recommandations

Les recommandations du Conseil adressées au gouvernement fédéral s’articulent autour de 4 thèmes essentiels, qui visent tous à améliorer la vélocité, la fiabilité, l’abordabilité et la participation des Autochtones au processus de transition électrique :

Figure 4 : Les étapes vers une transition plus abordable, plus fiable et plus inclusive

Graphique linéaire illustratif des scénarios de trajectoire de coûts de la transition vers la carboneutralité
Version texte

Graphique linéaire illustratif des scénarios de trajectoire de coûts de la transition vers la carboneutralité jusqu’en 2050, comparant une transition énergétique à coût élevé d’environ 2 billions de dollars à une transition énergétique à faible coût d’environ 1,1 billion de dollars. Le tableau indique que l’écart entre les deux scénarios peut être comblé en prenant les mesures suivantes : 1) Aligner sur les objectifs; 2) Accélérer la croissance; 3) Soutenir la transition; et 4) Économiser pour alléger la charge.

Les principales recommandations sont présentées ci-dessous. Dans la section complète des recommandations (ALIGNER sur les objectifs), chaque recommandation est assortie de détails plus importants et plus spécifiques sur la mise en œuvre.

Aligner sur les objectifs

Le paysage énergétique et politique du Canada semble solide. Seulement, l’ensemble de politiques qui se chevauchent à trois ordres de gouvernement est actuellement entravé par un manque de clarté, de cohérence et d’harmonisation. Le Conseil recommande une série de mesures capables de contribuer à une meilleure harmonisation de la trajectoire du Canada.

Figure 5 : Illustration de l’impact directionnel des recommandations liées à l’étape « Aligner sur les objectifs »

Graphique linéaire illustrant deux trajectoires pour les exigences de fonds propres
Version texte

Graphique linéaire illustrant deux trajectoires, élevée et basse, pour les exigences de fonds propres. Le graphique indique l’impact directionnel des recommandations liées à la mesure « Aligner sur les objectifs » au fil du temps, suggérant que la trajectoire plus élevée et les besoins en capitaux pourraient être réduits en alignant les politiques, les mandats et les plans qui offrent une plus grande certitude aux décideurs et soutiennent une transition moins coûteuse pour tous.

Afin d’ALIGNER sur les objectifs, le Conseil recommande ce qui suit :

  • La clarté des politiques aujourd’hui et à l’avenir : Le gouvernement fédéral devrait accélérer la clarification des règles essentielles en matière d’électricité (recommandation 1). Afin d’améliorer la clarté et d’outiller les décideurs, le gouvernement fédéral devrait encourager l’élaboration de feuilles de route en matière d’énergie aux niveaux provincial et territorial (recommandation 2), sur la base d’évaluations des trajectoires (recommandation 3).
  • Des mandats cohérents avec les objectifs climatiques : Le gouvernement fédéral devrait montrer l’exemple et veiller à ce que les objectifs de carboneutralité soient intégrés dans les mandats des autorités fédérales compétentes (recommandation 4), afin d’éviter que ces dernières ne travaillent à contre-courant.
  • Offrir une certaine souplesse aux administrations dans l’ensemble du Canada : Compte tenu de la diversité des besoins et des contextes au Canada, le gouvernement fédéral devrait faire preuve de souplesse dans la définition des règles clés (recommandation 5), notamment en modifiant les conditions des crédits d’impôt à l’investissement dans l’électricité propre (CII) afin de mettre l’accent sur les feuilles de route en matière d’énergie (recommandation 6).
  • Transparence des données et confiance : Le gouvernement fédéral devrait encourager la disponibilité de données et de modèles ouverts et transparents (recommandation 7) et communiquer les principaux indicateurs de progrès (recommandation 8) afin d’aider les intervenants à prendre des décisions fondées sur des données probantes et à renforcer la confiance du public.

Accélérer la croissance

Le Canada est dans l’incapacité de répondre à la demande d’électricité propre sans une réforme systémique de l’enchevêtrement des procédures d’approbation actuelles. Bien que nombre d’entre elles relèvent de la compétence des provinces et des territoires, le gouvernement fédéral peut à la fois montrer l’exemple et jouer un rôle critique dans la reconfiguration de ses propres procédures afin de faciliter la mise en place en temps opportun des systèmes électriques du pays.

Figure 6 : Illustration de l’impact directionnel des recommandations liées à l’étape « Accélérer la croissance »

Graphique linéaire illustratif utilisant deux trajectoires de capacité installée (GW)
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Graphique linéaire illustratif utilisant deux trajectoires de capacité installée (GW), élevée et basse, pour montrer l’impact directionnel des recommandations liées à la mesure « ACCÉLÉRER la croissance ». Le texte suggère que des niveaux plus élevés de capacité installée d’électricité propre peuvent être atteints au fil du temps en supprimant les obstacles à l’autorisation de nouveaux projets, à l’attraction de capitaux et à la participation des Autochtones.

Afin d’ACCÉLÉRER la croissance, le Conseil recommande ce qui suit :

  • Un champion de la réforme des approbations de projets d’électricité propre : Le gouvernement fédéral devrait désigner un champion qui devra rendre des comptes et sera chargé simultanément de ce qui suit : (a) mener une réforme pluri-institutionnelle afin de rationaliser, d’accélérer et d’éliminer les redondances; et (b) adopter une approche systémique pour définir et soutenir les projets d’électricité propre d’intérêt canadien (recommandation 9).
  • Une approche de l’examen des projets fondée sur les risques : Le gouvernement fédéral devrait adopter une approche fondée sur les risques pour les examens de projets, en rationalisant leur portée (recommandation 10) et en optant, dans la mesure du possible, pour une approche basée sur la de conformité (recommandation 11), démontrant ainsi l’accélération du rythme nécessaire à la transition.
  • Élimination effective des doubles emplois et exploitation des terres publiques : Le gouvernement fédéral devrait collaborer avec les provinces pour éliminer les doublons dans l’évaluation des projets en adoptant des mécanismes d’équivalence dans la mesure du possible (recommandation 12). Il devrait également définir davantage de terres de la Couronne pour accélérer le développement de projets d’électricité propre (recommandation 13).
  • Apporter des précisions sur la consultation et la mobilisation auprès des Autochtones : Le gouvernement fédéral devrait aider les promoteurs à mieux comprendre les droits des Autochtones et à reconnaître leur obligation de consulter les nations et les collectivités autochtones (recommandation 14).
  • Attirer les capitaux et la main-d’œuvre : Le gouvernement fédéral devrait aligner les politiques financières, fiscales, du travail et commerciales sur les objectifs de carboneutralité (recommandation 15), mettre en place un guichet unique pour les soutiens financiers fédéraux (recommandation 16), ainsi qu’harmoniser les codes et les normes en matière d’électricité (recommandation 17).

Soutenir la transition

Bien que la transition vers l’énergie propre soit probablement abordable pour le Canadien moyen, cette moyenne peut dissimuler des coûts et des avantages inégalement répartis. Pour certains Canadiens, principalement dans les provinces et territoires tributaires des combustibles fossiles, dans les ménages à faible revenu et dans les collectivités autochtones et éloignées, le défi sera plus grand. Le gouvernement fédéral doit apporter un soutien essentiel pour que les coûts et les avantages globaux de la transition soient répartis de manière équitable.

Figure 7 : Illustration de l’impact directionnel des recommandations liées à l’étape « Soutenir la transition »

Graphique linéaire illustratif montrant l’impact directionnel des recommandations liées à la mesure « Soutenir la transition »
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Graphique linéaire illustratif montrant l’impact directionnel des recommandations liées à la mesure « Soutenir la transition » sur les variations futures en pourcentage des coûts de l’énergie pour les consommateurs. Le graphique présente des scénarios de coûts énergétiques élevés, moyens et faibles pour les consommateurs. Le texte indique qu’un financement fédéral ciblé peut réduire les coûts pour tous les Canadiens tout en réduisant la répartition inégale entre les ménages.

Pour SOUTENIR la transition, le Conseil recommande ce qui suit :

  • L’optimisation des crédits d’impôt à l’investissement (CII) : Le gouvernement fédéral devrait apporter un ensemble de changements aux programmes de crédits d’impôt à l’investissement dans l’électricité propre, notamment en adoptant des critères de conditionnalité plus pragmatiques, la possibilité d’étendre le transport intraprovincial et l’ajustement des niveaux de crédit (recommandation 18). Ces changements visent à favoriser une répartition plus équitable des coûts et des avantages.
  • Un cadre pour l’infrastructure de transport interrégional d'électricité : Le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles devrait inciter ses homologues lors de la Conférence des ministres de l’Énergie et des Mines (CMEM) de 2024 à élaborer conjointement, puis à présenter à temps pour la CMEM de 2025, un cadre de collaboration visant à déterminer et à soutenir financièrement les projets interrégionaux de transport d’électricité. En s’inspirant du cadre des projets d’intérêt commun (PIC) de l’Union européenne, ce cadre devrait définir les composantes de la gouvernance, de la répartition des coûts et du financement (recommandation 19).
  • Soutien aux collectivités autochtones, nordiques et éloignées : Le gouvernement fédéral devrait axer son financement sur la résolution des problèmes propres à ces collectivités, sur l’adoption d’une approche coordonnée de la réconciliation économique avec les collectivités autochtones (recommandation 20), ainsi que sur le renforcement de la stabilité et du soutien des politiques dans les collectivités nordiques et éloignées (recommandation 21).
  • Soutien ciblé aux Canadiens à revenu modeste : Le gouvernement fédéral devrait considérablement renforcer son engagement initial à financer les programmes provinciaux et territoriaux d’efficacité énergétique destinés aux ménages à revenu modeste (recommandation 22).

Économiser pour alléger la charge

Accélérer la production d’électricité propre pour répondre aux besoins croissants d’une économie carboneutre est une tâche colossale. La portée et l’ampleur de cette tâche, ainsi que les investissements nécessaires, peuvent être réduites grâce à l’amélioration significative de l’efficacité énergétique et une plus grande souplesse de la demande.

Figure 8 : Illustration de l’impact directionnel des recommandations liées à l’étape « Économiser pour alléger la charge »

Graphique linéaire illustratif avec deux trajectoires de la demande d’électricité
Version texte

Graphique linéaire illustratif avec deux trajectoires de la demande d’électricité jusqu’en 2050 pour illustrer l’impact directionnel des recommandations liées à la mesure « Économiser l’énergie pour alléger la charge ». Le texte indique que l’efficacité énergétique et la flexibilité de la charge peuvent réduire la demande d’électricité, minimiser les besoins d’investissement, réduire les factures des consommateurs et améliorer la fiabilité.

Afin d’ÉCONOMISER pour alléger la charge, le Conseil recommande ce qui suit :

  • Reddition de comptes et cohérence : Le gouvernement fédéral peut redynamiser ses efforts et jouer un rôle de leader national à travers la création d’un cadre de reddition de comptes en matière d’efficacité énergétique (recommandation 23) et l’alignement des investissements fédéraux dans le logement sur les normes écoénergétiques les plus strictes (recommandation 24).
  • Soutien fédéral à la gestion de la demande : Le gouvernement fédéral devrait donner la priorité au soutien de la gestion de la demande, en réorientant certains fonds existants vers des solutions axées sur la demande, comme l’efficacité énergétique, la gestion de la pointe et la modernisation des réseaux (recommandation 25).
  • Exploiter au maximum les leviers fédéraux : Le gouvernement fédéral devrait utiliser au maximum ses propres leviers, notamment les normes en matière d’efficacité énergétique des équipements (recommandation 26), les codes de bâtiment (recommandation 27) et les règles d’approvisionnement (recommandation 28).

Les piliers : pragmatisme et collaboration

L’électricité est sur le point de jouer un rôle de premier plan dans la société et l’économie canadiennes, sous l’effet d’une nouvelle vague de croissance rapide de l’offre et de la demande d’énergie propre. Si le Canada se montre à la hauteur, il sortira de la transition énergétique sur des bases solides, avec une meilleure position dans l’économie mondiale de l’après-transition.

Le Conseil a élaboré des recommandations à cet effet, fondé sur le pragmatisme. Globalement, il s’agit d’un mélange soigneusement équilibré de directives politiques claires, de mesures visant à réduire l’imbroglio réglementaire qui ralentit le rythme de la croissance, de financements ciblés pour répondre aux besoins les plus urgents et assurer une transition équitable pour tous les Canadiens, et de nouvelles règles visant à réduire considérablement le gaspillage d’énergie afin de rendre la transition plus réalisable.

Ces recommandations reposent sur une hypothèse fondamentale : dans un environnement politique de plus en plus polarisé, les Canadiens peuvent faire fi de leurs divergences et œuvrer ensemble à l’obtention d’un résultat commun. En fin de compte, c’est peut-être l’action la plus importante de toutes.

Recommandations

Aligner sur les objectifs

Clarté des politiques aujourd’hui et à l’avenir

  • Recommandation 1 : Accélérer la clarification des règles essentielles de la politique en matière d’électricité
  • Recommandation 2 : Encourager l’élaboration de feuilles de route en matière d’énergie
  • Recommandation 3 : Promouvoir l’évaluation des trajectoires afin d’éclairer les feuilles de route en matière d’énergie

Des mandats cohérents avec les objectifs climatiques

  • Recommandation 4 : Aligner les mandats des autorités compétentes sur les objectifs de carboneutralité

Offrir une certaine souplesse aux administrations dans l’ensemble du Canada

  • Recommandation 5 : Privilégier la souplesse dans l’élaboration des politiques
  • Recommandation 6 : Mettre l’accent sur les conditions des crédits d’impôt à l’investissement dans les feuilles de route en matière d’énergie

Transparence des données et confiance

  • Recommandation 7 : Favoriser l’ouverture et la transparence des données, ainsi que de la modélisation
  • Recommandation 8 : Mettre en place des indicateurs pour suivre les progrès nationaux

Accélérer la croissance

Un champion de la réforme des approbations de projets d’électricité propre

  • Recommandation 9 : Désigner un champion chargé d’accélérer l’approbation des projets d’électricité

Une approche de l’examen des projets fondée sur les risques

  • Recommandation 10 : Rationaliser la portée des examens des projets d’électricité propre
  • Recommandation 11 : Passer à un cadre d’approbation fondé sur la conformité le cas échéant

Élimination proactive des doublons et exploitation des terres de la Couronne

  • Recommandation 12 : Conclure des ententes d’équivalence pour limiter les doublons avec les provinces
  • Recommandation 13 : Mettre en valeur de manière proactive les terres de la Couronne fédérale

Apporter des précisions sur la consultation et la mobilisation des Autochtones

  • Recommandation 14 : Clarifier et mieux faire connaître les attentes en matière de consultation des Autochtones

Attirer les capitaux et la main-d’œuvre

  • Recommandation 15 : Aligner les politiques financières, fiscales, du travail et commerciales sur les objectifs de carboneutralité
  • Recommandation 16 : Mettre en place un guichet unique pour les soutiens financiers fédéraux
  • Recommandation 17 : Harmoniser les codes et les normes en matière d’électricité

Soutenir la transition

Optimisation des crédits d’impôt à l’investissement

  • Recommandation 18 : Harmoniser les programmes de crédits d’impôt à l’investissement avec les objectifs de carboneutralité

Un cadre pour l’infrastructure de transport interrégional d'électricité

  • Recommandation 19 : Élaborer un cadre pour soutenir les projets interrégionaux de transport d’électricité

Soutien aux collectivités autochtones, nordiques et éloignées

  • Recommandation 20 : Accélérer la réconciliation économique avec les nations autochtones
  • Recommandation 21 : Soutenir les collectivités nordiques et éloignées

Soutien ciblé aux Canadiens à faible revenu

  • Recommandation 22 : Accroître le financement des programmes d’efficacité énergétique destinés aux Canadiens à faible revenu

Économiser pour alléger la charge

Reddition de comptes et cohérence

  • Recommandation 23 : Créer un cadre de reddition de comptes en matière d’efficacité énergétique
  • Recommandation 24 : Aligner les investissements fédéraux dans le logement sur les normes écoénergétiques les plus strictes

Soutien fédéral à la gestion de la demande

  • Recommandation 25 : Accorder la priorité à la gestion de la demande dans les aides fédérales

Exploiter au maximum les leviers fédéraux

  • Recommandation 26 : Mettre à jour les normes relatives aux appareils électroménagers et aux équipements
  • Recommandation 27 : Faire avancer la modernisation des codes du bâtiment
  • Recommandation 28 : Élargir la Stratégie pour un gouvernement vert

Lettre du Président du Conseil

Les Canadiens abordent la question de l’énergie sous différents angles. D’aucuns sont principalement préoccupés par l’abordabilité et la compétitivité, d’autres par les effets des changements climatiques à long terme sur l’avenir de nos enfants. Pour beaucoup, il s’agit d’une question de fiabilité : garder les lumières allumées. Pour de nombreux peuples autochtones, il est question de se défaire de l’héritage d’un développement énergétique qui s’est fait au détriment de leurs collectivités, et non pas avec ou par elles.

Toutes ces perspectives comptent. Toutes sont légitimes. Pourtant, dans nos débats de plus en plus polarisés, combien de fois en venons-nous à supposer que les autres ont « tort », qu’ils « se fichent » de notre point de vue ou qu’ils ne « comprennent pas » tout simplement?

Assurer la présidence de ce Conseil a été un immense honneur. Un honneur qui s’explique en grande partie par le fait que j’ai travaillé aux côtés de ses membres estimés qui, à l’instar d’un microcosme du Canada, ont relevé ce défi sous différents angles.

Mon point de vue est simple : L’énergie est l’épine dorsale des économies et des sociétés du monde entier. Il en a toujours été ainsi. Le monde connaît actuellement une transition énergétique rapide, sans doute sans précédent.

La manière dont nous menons cette transition — délibérément ou non, de manière réfléchie ou non, en collaboration ou non — déterminera la façon dont nous émergerons de l’autre côté : en tant que gagnants ou perdants d’un changement historique à l’échelle mondiale. Nos enfants nous remercieront, ou nous blâmeront, pour le résultat. Comme ma fille aime à le dire, « il vaut mieux essayer que ne pas essayer ».

L’électricité est sans doute la composante la plus importante de cette transition. Pourquoi? Parce que l’électricité peut être produite sans émissions, qu’elle peut être transportée sur de grandes distances, qu’elle peut être produite de diverses manières au moyen de ressources naturelles disponibles dans toutes les régions du pays et qu’elle peut être consommée de manière extrêmement efficace. Comme l’indique notre rapport, un double défi nous attend :

  • achever la décarbonation de nos réseaux existants (nous sommes déjà en avance sur la plupart des pays du monde dans ce domaine) et
  • les développer rapidement afin de proposer l’électricité propre dont les Canadiens auront besoin dans les décennies à venir.

Lors des délibérations sur les mesures à prendre pour mettre la transition électrique du Canada sur la voie de la réussite, le Conseil est parvenu à un consensus ferme sur trois paramètres précis pour nos travaux.

  • La première était un engagement à faire preuve de pragmatisme. Nous comprenons que l’électricité est un besoin quotidien vital pour tous les Canadiens et qu’elle est fournie par un ensemble de systèmes divers et de plus en plus complexes. Nos recommandations sont certes ambitieuses, mais elles ne peuvent pas être minimalistes - il n’existe tout simplement pas de réponses faciles, de solutions miracles ou de solutions universelles. Pour être efficaces, elles doivent être ancrées dans les réalités actuelles, tenir compte des complexités du monde réel et déboucher sur des actions viables à court terme. Il est incontestablement urgent d’agir face aux changements climatiques, mais aucune action ne sera durable si elle ne préserve pas l’abordabilité et la fiabilité sur lesquelles les Canadiens se sont habitués à compter.
  • Nous avons également pris conscience non seulement de la valeur, mais aussi de la nécessité de la collaboration. Les membres de ce Conseil sont issus de toutes les régions du Canada et d’horizons très divers. Ce Conseil a parfois ressemblé à un microcosme de la Confédération elle-même, avec des points de vue et des perspectives différents, concurrents, voire opposés. Pourtant, animés par le pragmatisme, nous avons créé un esprit de respect mutuel face à la multitude de points de vue qui ont été mis sur la table. Le fait que nous ayons pu parvenir à un consensus sur des recommandations aussi détaillées témoigne de ce qu’une véritable collaboration peut permettre d’accomplir. En fin de compte, même si les provinces et territoires respectifs des membres du Conseil peuvent être confrontés à des défis différents, nous sommes tous membres de la même équipe Canada.
  • Par-dessus tout, ce Conseil a été animé par un puissant désir de bien faire les choses. La transition énergétique est une occasion unique de tracer la meilleure voie possible pour les réseaux électriques du Canada, qui soutiendront les Canadiens des générations à venir dans leur vie quotidienne. Nous privilégions la voie de l’énergie carboneutre visant à accélérer le rythme et à optimiser la fiabilité, l’abordabilité, et la participation des Autochtones. Nous pensons que ces quatre principes fondamentaux serviront à tous les Canadiens alors que nous unissons nos forces pour relever ce défi.

Certains ne manqueront pas de critiquer le présent rapport. Il n’est certainement pas parfait; il ne résoudra pas tous les problèmes. En choisissant d’être ancré dans la réalité d’aujourd’hui, il n’est peut-être pas aussi audacieux que certains le souhaiteraient.

Pourtant, je suis convaincu que la vision et les recommandations qui y sont mentionnées constituent une voie pragmatique, réfléchie et réalisable. Je suis fier du travail accompli par ce Conseil et j’espère que ses recommandations serviront le Canada pour les années à venir.

- Philippe Dunsky

À propos du Conseil

Le Conseil consultatif canadien de l’électricité (« le Conseil ») a été convoqué en mai 2023 par l’honorable Jonathan Wilkinson, ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles.

Mandat

Le Conseil a été chargé de fournir au gouvernement un avis indépendant sur les principales mesures à prendre pour que le secteur canadien de l’électricité soit en mesure d’assumer son rôle central dans la réalisation des objectifs de carboneutralité du Canada, et ce, de façon abordable et fiable, et selon des modalités propices à la participation des Autochtones. Le Conseil disposait d’un an pour achever ses travaux.

Membres

Le Conseil est un organisme indépendant composé de 19 experts du secteur canadien de l’électricité, soit un échantillon représentatif d’anciens et d’actuels dirigeants de compagnies d’électricité, d’opérateurs de réseaux électriques, de producteurs d’électricité, d’organismes de réglementation des services publics, de nations autochtones et d’intervenants de toutes les régions du pays. Se référer à la section Membres du Conseil pour obtenir la liste complète des membres.

Principes

Lors de sa réunion inaugurale, le Conseil a adopté à l’unanimité une série de principes visant à orienter ses travaux. Parmi ceux-ci, on peut citer :

  • Le respect mutuel. Les membres du Conseil sont le reflet d’une grande diversité d’expériences et de points de vue. Les membres ont convenu de mettre en avant 4 qualités, notamment le respect, l’humilité, l’expertise et la sagesse, pour s’assurer que le travail du Conseil serve au mieux les intérêts des Canadiens.
  • Respect de la compétence des provinces et des territoires. Reconnaissant que le Conseil a été nommé par le gouvernement fédéral, le Conseil a convenu que son travail et ses recommandations respecteront pleinement la compétence des provinces et des territoires en matière de réseaux électriques.
  • Absence de parti pris technologique : Le Conseil a convenu d’exclure de la portée de ses travaux le développement des technologies de l’électricité, et ce, pour deux raisons. Tout d’abord, le Conseil estime qu’il n’existe pas de « bonnes » solutions en soi, mais seulement des solutions plus ou moins appropriées à une région, un contexte et un besoin donnés. Ensuite, le Conseil a convenu que les défis les plus redoutables à relever pour réussir la transition vers l’énergie propre au Canada sont principalement d’ordre structurel, découlant des politiques, pratiques et priorités existantes, plutôt que technologique.

Processus

Lors de son lancement en mai 2023, le Conseil a créé cinq groupes de travail, qui se sont réunis toutes les 2 ou 3 semaines, soit au total de 79 réunions, pendant la majeure partie de l’année :

  • Gouvernance : Planification et surveillance des réseaux électriques (12 réunions)
  • Projets : Approbation des projets et avantages pour les peuples autochtones (15 réunions)
  • Capitaux et abordabilité : Attraction des capitaux et abordabilité (17 réunions)
  • Collaboration : Planification et coopération régionales (21 réunions)
  • Innovation et fiabilité : (14 réunions)

Les groupes de travail ont à leur tour partagé leurs travaux avec l’ensemble du Conseil, qui s’est réuni en personne pendant près de 100 heures au cours de 8 réunions organisées à travers le paysNote de bas de page 7.

Un secrétariat, hébergé par Ressources naturelles Canada (RNCan) et composé d’employés affectés aux travaux du Conseil, a aidé ce dernier à effectuer des recherches et des analyses, à favoriser la mobilisation des intervenants et à fournir un soutien administratif. Il rend compte au président du Conseil.

Mobilisation

Afin de s’assurer que les recommandations du Conseil tiennent compte des divers points de vue et des différentes réalités de l’ensemble des intervenants du secteur de l’électricité au Canada, le Conseil s’est engagé auprès de plus de 100 intervenants, issus de chaque province et territoire du Canada, à s’efforcer de mieux comprendre les possibilités, les obstacles et les besoins liés aux réseaux électriques du Canada. Cela comprend :

  • 25 séances d’information d’intervenants, y compris les dirigeants des services publics, les associations du secteur de l’électricité, les organismes de réglementation, les dirigeants syndicaux et autres, à l’intention de l’ensemble du Conseil
  • 41 exposés thématiques d’intervenants à l’intention des groupes de travail du Conseil
  • 72 mémoires écrits d’intervenants en réponse à des questions écrites portant sur chacun des thèmes des groupes de travail du Conseil

En outre, les membres du Conseil ont rencontré individuellement des intervenants et des dirigeants autochtones à travers le pays, y compris des fonctionnaires provinciaux et fédéraux, des cadres supérieurs du service public et plus encore. (Vous trouvez un résumé de ce que nous avons entendu à l’annexe B.)

Le rapport

Le présent rapport représente les conclusions et recommandations finales du Conseil, qui ont été déposées auprès du ministre.

Ces conclusions et recommandations représentent le point de vue consensuel de l’ensemble du Conseil, défini dans son mandat comme prévalant « lorsque tous les membres peuvent accepter la décision proposée sur une question précise dans le contexte de l’ensemble des résultatsNote de bas de page 8 ». Il n’y a pas eu d’avis contraire.

Partie 1 : L’ère de l’électricité

Défis et possibilités du Canada

Vue d’ensemble

Aperçu global

L’énergie en transition

De par sa détermination à décarboner en grande partie ses réseaux électriques d’ici 2035 et à atteindre son objectif de carboneutralité d’ici 2050Note de bas de page 9, le Canada a rejoint la majorité des pays du monde dans la quête d’une transformation économique majeure : la transition vers l’énergie propre.

Cette transition repose sur le passage à l’électrification, c’est-à-dire la migration de nombreux besoins énergétiques essentiels des combustibles fossiles vers l’énergie électrique propreNote de bas de page 10. Cette transition est désormais bien engagée au niveau mondial, grâce à la baisse des coûts des technologies propres, à un soutien politique plus solide et à une demande croissante émanant des consommateurs et des investisseurs du monde entierNote de bas de page 11. Qu’il s’agisse des véhicules électriques, des pompes à chaleur électriques ou de l’électricité remplaçant d’autres sources d’énergie pour alimenter les processus industriels et les installations de fabrication, nous sommes probablement à l’aube d’une nouvelle ère électrique.

« L’atteinte de la carboneutralité repose sur le développement rapide du secteur de l’électricité, qui apportera d’importants avantages à la société. » [Notre traduction]

Cette transition consiste essentiellement à produire davantage d’énergie propre, à l’utiliser de manière plus productive et à la maintenir à un prix abordable. L’électrification devient la méthode privilégiée de réduction des émissions dans une grande partie du monde, et ce pour plusieurs raisons. L’électricité peut souvent être consommée de manière beaucoup plus efficace que les autres solutions, car elle puise dans des ressources que chaque région possède sous quelque forme que ce soit. De plus, elle offre souvent le coût global le plus bas et la meilleure facilité de déploiement, principalement lorsque des améliorations majeures de l’efficacité énergétique sont apportées.

L’électricité ne pourra pas satisfaire tous les besoins en énergie. Le pétrole et le gaz traditionnels, la bioénergie et l’hydrogène resteront des combustibles essentiels dans des secteurs difficiles à décarboner dans un avenir prévisible. Cependant, la tendance à l’accélération de la transition énergétique indique clairement que l’électricité est susceptible de devenir la principale filière énergétique dans le monde d’ici quelques décenniesNote de bas de page 13.

Investissement dans la transition énergétique mondiale

Figure 9 : Part des investissements annuels mondiaux dans la transition énergétique à l’horizon 2050Note de bas de page 14

Diagramme circulaire illustrant la part des investissements annuels mondiaux estimés dans la transition énergétique
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Diagramme circulaire illustrant la part des investissements annuels mondiaux estimés dans la transition énergétique jusqu’en 2050 dans le secteur de l’électricité. La fourniture d’électricité représente 70 % des investissements d’ici à 2050, l’électrification des utilisations finales 19 % et d’autres actions les 11 % restants.

L’électricité joue un rôle essentiel dans la transition vers une économie carboneutre. Selon une étude de l’Energy Transitions Commission (ETC), il faudra investir en moyenne 3 500 milliards $ par an, soit 3 % du PIB, au niveau mondial jusqu’en 2050 pour achever la transition.

L’étude d’ETC a notamment révélé que 70 % des investissements nécessaires devront être consacrés au secteur de l’électricité pour la production de nouvelles sources d’énergie, des infrastructures de livraison (transport et distribution) et le stockage. 19 % d’investissements supplémentaires seront consacrés à l’électrification de la plupart des utilisations finales (mais pas toutes), notamment par le biais de pompes à chaleur et de véhicules électriques. Les 11 % restants seront nécessaires à l’appui de l’élimination du carbone, de la production de l’hydrogène propre et d’autres initiatives de décarbonation industrielle.

Qu’est-ce que cela signifie pour le Canada?

Longueur d’avance du Canada

Le Canada a de bonnes raisons d’être optimiste dans cette nouvelle ère de l’électricité. Peu de pays abordent cette phase de la transition dans une position plus favorable. Le Canada possède l’un des réseaux électriques les plus propres au monde, avec plus de 80 % de son électricité déjà sans émissionsNote de bas de page 15 (voir figure 10), et sa vaste masse terrestre offre d’abondantes ressources énergétiques propres qui ne demandent qu’à être exploitées d’un océan à l’autre. Son secteur de l’électricité a pris des mesures importantes à ce jour, en s’efforçant d’éliminer progressivement les centrales au charbon et en réalisant des investissements significatifs dans les énergies renouvelables et d’autres technologies essentielles pour la prochaine phase de cette transition.

Figure 10 : Part de la production d’électricité non émettrice du Canada par rapport aux pays du G7 et du G20Note de bas de page 16

Diagramme à barres montrant la part de la production d’électricité non émettrice dans chaque pays du G7 et du G20
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Diagramme à barres montrant la part de la production d’électricité non émettrice dans chaque pays du G7 et du G20, classée par ordre décroissant. Le Canada se classe au troisième rang pour l’électricité non émettrice, derrière le Brésil et la France.

L’accélération de la transition du Canada vers la carboneutralité s’accompagnera à la fois d’énormes défis et de possibilités significatives. La transition influencera les investissements dans les infrastructures, reconfigurera les marchés de l’emploi et les chaînes d’approvisionnement et redéfinira la position du Canada en matière d’attraction des investissements étrangers et de compétitivité de ses exportations. Elle modifiera également les méthodes utilisées par les Canadiens pour chauffer leurs maisons et leurs bâtiments, propulser leurs véhicules et alimenter l’activité industrielle. Elle peut contribuer à redéfinir et à renforcer les relations du Canada avec les nations et les collectivités autochtones qui font partie intégrante de ce pays. Enfin, elle déterminera l’efficacité de notre réponse collective face aux changements climatiques.

En somme, il s’agit d’un projet qui marquera l’histoire du Canada. La question est de savoir si ces principaux impacts se produiront chez nous ou pour nous, si les Canadiens saisissent cette occasion de bâtir une nation et s’y attellent de manière sérieuse, constructive et collaborative, ou si nous attendons que la transition nous soit imposée, augmentant ainsi le risque de prendre du retard dans l’économie de l’après-transition et laissant la prochaine génération de Canadiens courir le risque de se retrouver dans une position défavorable sur le plan international, sous-équipée sur le plan technologique et insuffisamment préparée sur le plan économique.

Le Conseil estime que le choix est clair.

Défis du Canada

Pour que le Canada atteigne son objectif de carboneutralité, de nombreuses études ont conclu qu’en plus d’éliminer en grande partie les émissions restantes de la production actuelle d’électricité, la part de l’énergie globale fournie par l’électricité devra approximativement tripler, passant de 17 % à une proportion comprise entre 40 et 70 %Note de bas de page 17. En d’autres termes, en une seule génération, l’électricité propre doit devenir la principale source d’énergie au Canada.

Il s’agit d’un double défi : décarboner en grande partie le réseau électrique existant, tout en développant considérablement l’ensemble du réseau afin d’aider les autres secteurs de l’économie à réduire suffisamment leurs émissions d’ici 2050. Il n’y a pas assez de temps pour relever un défi puis l’autre. En effet, le Canada doit les surmonter simultanément. De plus, pour y parvenir, chaque région du pays doit disposer d’une marge de manœuvre suffisante quant à la manière dont ses réseaux électriques seront décarbonés et se développeront, afin de garantir qu’ils restent sûrs, abordables et fiables.

Les vagues de l’électricité du Canada

Même si le double défi auquel le Canada est confronté, à savoir augmenter rapidement la production d’électricité tout en décarbonant le secteur, est colossal, le secteur canadien de l’électricité s’est montré à la hauteur de la situation par le passé.

Entre 1950 et 2000, la production annuelle d’électricité au Canada a plus que décuplé, passant de moins de 50 térawattheures (TWh) à plus de 500 TWh. L’infrastructure électrique bâtie au cours de cette période a permis de faire face à l’augmentation spectaculaire de la population, à la croissance économique et à la propagation rapide de nouveaux appareils électroménagers et équipements électriques.

Figure 11 : 100 ans de production d’électricité au CanadaNote de bas de page 18

Graphique linéaire illustrant l’augmentation de la production d’électricité au Canada
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Graphique linéaire illustrant l’augmentation de la production d’électricité au Canada en TWh entre 1950 et 2020. La période de 1950 à 2000 est caractérisée par l’électrification, où l’offre d’électricité a été multipliée par dix pour répondre à la nouvelle demande. La période de 2000 à 2020 se caractérise par une décarbonation du système électrique, où l’intensité des émissions a diminué de 50 % et où la production n’a augmenté que marginalement. Au-delà de 2020, la trajectoire estimée de la production moyenne d’électricité jusqu’en 2050 doublera, reflétant l’augmentation rapide de la demande due à la fois à l’électrification et à la décarbonation. La fourchette prévue des trajectoires de production d’électricité est indiquée, avec un minimum d’environ 1 000 TWh et un maximum de 1 800 TWh en 2050.

Plus récemment, de 2000 à 2020, la demande d’électricité s’est largement stabilisée, en grande partie grâce à une volonté délibérée d’améliorer l’efficacité énergétique des principales utilisations finalesNote de bas de page 19. Au cours de cette période, plusieurs provinces ont également pris des mesures fortes afin de réduire leurs émissions de carbone liées à l’électricité, ce qui s’est traduit par une diminution des émissions de 60 % à l’échelle nationale en à peine 2 décennies, soit plus que dans tout autre secteur de l’économie canadienneNote de bas de page 20.

Figure 12 : Réductions des émissions par secteur, de 2000 à 2020Note de bas de page 21

Graphique linéaire illustrant les trajectoires des émissions du Canada par secteur
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Graphique linéaire illustrant les trajectoires des émissions du Canada par secteur de 2000 à 2020, montrant le pourcentage de réduction au fil du temps. Le graphique montre que le secteur de l’électricité a connu la plus forte diminution des émissions par rapport aux autres secteurs économiques, avec une réduction de 60 % des émissions entre 2000 et 2020.

Points de départ inégaux

Le point de départ avantageux du Canada masque d’importantes disparités régionales. Il existe en effet 3 points de départ distincts à partir desquels le Canada entame cette phase de la transition électriqueNote de bas de page 22.

  • Largement carboneutre : 85 % des Canadiens vivent dans des provinces ou des territoires où des sources d’énergie renouvelable ou nucléaire non émettrices produisent déjà la quasi-totalité de leur électricité (90 % ou plus)Note de bas de page 23. Pour ce groupe, constitué du Québec, de la Colombie-Britannique, du Manitoba, de l’Ontario et de Terre-Neuve-et-Labrador, le premier défi de la décarbonation du réseau électrique a été largement relevé et la difficulté réside principalement dans l’accroissement de l’offre.
  • En grande partie carboneutre : Pour un autre groupe composé du Nouveau-Brunswick, de l’Île-du-Prince-ÉdouardNote de bas de page 24, des Territoires du Nord-Ouest et du Yukon, l’électricité est produite à partir de nombreuses sources, avec une prédominance de l’énergie non émettrice, mais des volumes importants de combustibles fossiles sont encore utilisés. Dans ces administrations, la décarbonation des réseaux électriques se heurte encore à d’importants obstacles, mais elle est déjà en bonne voie.
  • Un plus grand défi : Le troisième groupe composé de l’Alberta, de la Saskatchewan, de la Nouvelle-Écosse et du Nunavut, dépend encore des combustibles fossiles pour la majeure partie de sa production d’électricité. Près d’un Canadien sur 5 réside dans ces administrationsNote de bas de page 25, où la consommation d’énergie renouvelable augmente certes, mais où le défi de la décarbonation des réseaux existants reste une tâche bien plus ardue.

Bien qu’ils reflètent certains choix politiques, ces points de départ sont en grande partie le fruit de la disponibilité des ressources régionales et non d’une idéologie. Il est essentiel que les décideurs politiques tiennent compte des différents points de départ de chaque région du Canada lorsqu’ils explorent des voies qui permettent au Canada d’atteindre la carboneutralité.

Figure 13: Part de la production d’électricité non émettrice par province et territoire, 2022Note de bas de page 26

Carte du Canada utilisant des diagrammes circulaires dans chaque province et territoire
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Carte du Canada utilisant des diagrammes circulaires dans chaque province et territoire pour montrer la part de la production d’électricité produite par des sources non émettrices pour chaque région en 2022. La part de l’électricité non émettrice dans chaque région est la suivante : Colombie-Britannique – 97 %, Alberta – 19 %, Saskatchewan – 21 %, Manitoba – 99 %, Ontario – 92 %, Québec – plus de 99 %, Nouveau-Brunswick – 71 %, Nouvelle-Écosse – 41 %, Île-du-Prince-Édouard – 98 %, Terre-Neuve-et-Labrador – 99 %, Yukon – 68 %, Territoires du Nord-Ouest – 83 %, et Nunavut – moins de 1 %.

La nécessité d’une politique claire

Le Canada jouit d’une avance considérable dans la course à l’énergie propre, mais ses réseaux électriques n’entament pas cette nouvelle phase d’expansion dans des conditions idéales. Les politiques fédérales, provinciales et territoriales ne sont pas encore totalement harmonisées avec les objectifs de la décarbonation et bon nombre d’entre elles doivent être révisées pour permettre au Canada d’atteindre ces objectifs de manière efficace, abordable et fiable.

Il ne sera pas facile de trouver le bon équilibre. Les politiques devront être orientées dans la bonne direction, tout en étant suffisamment souples pour tenir compte des différents points de départ des régions. De nombreux acteurs du secteur de l’électricité souhaitent procéder aux changements nécessaires, mais ils se heurtent quelquefois à des processus désuets. Par exemple :

  • La réglementation des services publics : De nombreux services publics et opérateurs de réseaux ont fait des progrès considérables quant à la réduction des émissions et sont tenus de poursuivre la décarbonation de leurs réseaux, tout en augmentant considérablement leur capacité. Dans certains cas, cependant, ces derniers et leurs organismes de réglementation ne disposent pas de mandats clairs à cet effet. En conséquence, certains services publics hésitent à proposer les investissements nécessaires, tandis que certains organismes de réglementation ne sont pas sûrs de détenir l’autorité nécessaire pour les approuver.
  • Délivrance de permis : Même si les gouvernements et les acteurs du secteur de l’électricité se hâtent de construire de nouvelles infrastructures d’électricité propre, il existe encore des processus longs et redondants d’une administration à l’autre. En outre, les autorités chargées de délivrer les permis et d’approuver les projets privilégient souvent les préoccupations locales. Étant donné que ces organismes œuvrent à la protection de l’environnement local, les processus actuels et les chevauchements réglementaires peuvent retarder des projets essentiels d’énergie propre visant à satisfaire des impératifs environnementaux plus généraux et ralentir involontairement la transition.
  • Autres : Des problèmes semblables au manque d’harmonisation compromettent la réussite dans d’autres domaines. Il s’agit notamment de l’absence d’incitatifs à la coopération intergouvernementale sur les interconnexions de transport, de soutiens financiers peu compétitifs pour attirer les capitaux, ainsi que de règles de marché et de signaux de prix qui constituent un frein à l’adoption par les consommateurs de nouveaux équipements écoénergétiques permettant de réduire les pics de consommation.

Les recommandations du Conseil traitent de ces problèmes et d’autres obstacles au progrès.

« L’absence de consensus entre les gouvernements et les différents ordres de gouvernement sur les trajectoires vers la carboneutralité entraîne une paralysie chez les investisseurs, notamment en réaction à des politiques dont la mise en œuvre effective nécessite une certaine durée, comme le système de tarification du carbone et la Règlement sur l’électricité propre. » [Notre traduction]

Energy Storage Canada

Dépolitisation de l’électricité : un appel au renforcement de la collaboration et de la cohérence

Au-delà de l’harmonisation des politiques, la prochaine phase de l’électrification du Canada nécessitera le renforcement de la collaboration intergouvernementale.

Les réseaux électriques du Canada sont régis par 10 provinces et 3 territoires, ainsi que par le gouvernement fédéral. En effet, il ne faut pas s’attendre à ce que ces 14 gouvernements distincts, dont les perspectives politiques sont en constante mutation, partagent les mêmes points de vue sur l’électricité (ou toute autre question) dans l’ensemble du pays ou au fil du temps. Cette concurrence des idées est un atout de notre démocratie.

Par ailleurs, si le Canada souhaite réussir la transition actuelle, il est essentiel de renforcer la stabilité et la prévisibilité des politiques, et ce pour deux raisons principales :

  • Premièrement, pour renforcer la confiance des investisseurs. Les fluctuations politiques créent de l’incertitude, ce qui peut ébranler la confiance des investisseurs dans la valeur des nouveaux projets. En conséquence, les capitaux d’investissement qui sont si essentiels pour une transition réussie risquent d’être transférés ailleurs ou de devenir plus coûteux pour les Canadiens.
  • Deuxièmement, pour favoriser la collaboration intergouvernementale. Le commerce de l’électricité, qui vise à tirer le meilleur parti des ressources et des modes d’utilisation complémentaires de chaque territoire, peut être un outil efficace pour réduire les coûts pour les Canadiens. Toutefois, l’amélioration des échanges nécessite une meilleure coopération, notamment en ce qui concerne la planification et la construction de nouvelles infrastructures de transport. Un environnement trop politisé pourrait mettre en péril la capacité du pays à réaliser de grands projets pluriannuels et intergouvernementaux.

Bien que le Conseil soit favorable à un débat sain, toutes les parties, à tous les ordres de gouvernement, devraient tenir compte des coûts réels des perturbations, ainsi que de la valeur significative de la stabilité dans la politique en matière d’électricité. Les gouvernements nationaux et infranationaux devront adopter une approche constructive et collaborative pour tirer parti du travail considérable déjà accompli dans tout le pays, tant par les services publics que par les gouvernements, et contribuer à la réalisation d’une transition ordonnée, abordable et fiable souhaitée par les Canadiens.

Investissements en capital

Les investissements importants nécessaires à cette transition posent également des défis majeurs. Les grands projets de production et de transport d’électricité, dont la mise en œuvre peut durer une décennie, voire plus, devront être approuvés malgré des coûts initiaux considérables. Pour servir au mieux les intérêts des Canadiens, les politiques en matière d’électricité doivent viser à éliminer les retards de procédure et les processus de délivrance de permis redondants susceptibles d’accroître l’incertitude et d’augmenter les coûts pour les promoteurs et leurs investisseurs. Par ailleurs, ces politiques doivent garantir le respect des droits des Autochtones protégés par la Constitution.

Les promoteurs de nouveaux projets d’électricité au Canada rivalisent sur un marché mondial hyperconcurrentiel pour obtenir des capitaux d’investissement, des chaînes d’approvisionnement et la main-d’œuvre qualifiée. Les pairs qui rythment le Canada, notamment les États-Unis, l’Europe et la Chine, ont déjà progressé grâce à la prise de mesures de plus en plus précises et un soutien solide, ce qui a pour effet de détourner les investisseurs des projets canadiens.

Une politique claire et intentionnelle, adaptée aux besoins en électricité carboneutre et mise en œuvre en temps opportun, est essentielle pour aider à attirer d’importants capitaux du secteur privé qui seront nécessaires pour relever le double défi de la décarbonation et de la croissance de l’électricité au Canada.

L’accélération de la transition électrique du Canada nécessitera sans aucun doute des investissements considérables à court terme, ce qui présente des risques pour l’abordabilité au moment où les Canadiens sont confrontés à l’augmentation du coût de la vie. Ainsi, de nombreuses recommandations du Conseil visent à réduire les besoins d’investissement globaux de la transition énergétique afin de maintenir les coûts à un niveau abordable pour tous les Canadiens.

L’abordabilité est tout aussi importante pour l’industrie canadienne, où l’électricité représente jusqu’à un tiers du total des coûts d’exploitation, pour les entreprises, y compris les petites et moyennes entreprises touchées par les majorations tarifaires, et pour les consommateurs résidentiels, en particulier les Canadiens à faible revenu et les autres groupes les plus vulnérables à l’augmentation des coûts.

Une responsabilité, un défi et une possibilité

Il incombe aux décideurs politiques canadiens de tracer la voie d’une transition électrique ordonnée. Les Canadiens méritent d’avoir accès à une énergie abordable et fiable, car leur sécurité et la prospérité future du pays reposent sur une abondance d’électricité propre.

Accepter cette responsabilité, c’est relever le défi de mettre en œuvre les changements majeurs nécessaires pour asseoir le pays sur des bases durables pour le reste du vingtième siècle. En relevant ce défi, le Canada peut saisir une occasion en or de bâtir une économie plus propre qui attire de nouveaux investissements et emplois, permet de tisser une relation collaborative avec les nations et les collectivités autochtones et place le Canada en bonne position pour se tailler une place de choix au sein de l’économie mondiale.

Lors de son analyse, le Conseil a découvert qu’il est possible d’atteindre l’objectif de carboneutralité en tenant compte des disparités régionales,, en préservant la fiabilité en maintenant l’abordabilité et la compétitivité des coûts, en respectant les droits des Autochtones et en favorisant la collaboration avec ces derniers. Bien que la planification de l’avenir entraîne inévitablement de fortes incertitudes, le Conseil estime que ses recommandations constituent le moyen le plus pragmatique à la disposition du gouvernement fédéral de contribuer à faire avancer le Canada dans la bonne direction, tout en offrant suffisamment de marge de manœuvre pour faire face à l’évolution de la situation.

Les risques et les obstacles qui jalonnent le parcours sont sans aucun doute importants, mais les avantages le sont tout autant.

Autres domaines d’action essentiels à la réussite de la transition électrique

La transition électrique est un projet de grande envergure. Compte tenu de son mandat et du temps limité dont il dispose, le Conseil a choisi de se concentrer sur les questions essentielles qui relèvent de son mandat. Toutefois, son analyse a mis en évidence 3 autres enjeux majeurs qui ne relèvent pas du champ d’action du Conseil, mais qui méritent une attention particulière de la part du gouvernement fédéral :

  • La main-d’œuvre et les chaînes d’approvisionnement : Même si les gouvernements atténuent les difficultés liées à la délivrance des permis et permettent d’attirer les capitaux, les projets d’électricité ne peuvent être réalisés sans certains types de main-d’œuvre qualifiée, sans le matériel approprié et sans des chaînes d’approvisionnement fiables. Les compétences adéquates sont également essentielles pour l’exploitation et la maintenance des projets et des réseaux électriques. Plus de 80 % des employeurs du secteur de l’électricité estiment qu’il sera difficile d’attirer des travailleurs au cours des 6 prochaines annéesNote de bas de page 27. Cette situation atteste de la nécessité d’une stratégie globale en matière de ressources humaines en phase avec l’engagement du Canada à aider les travailleurs de tous les secteurs à s’adapter à la nouvelle économie d’énergieNote de bas de page 28. Des efforts supplémentaires à l’échelle nationale sont nécessaires pour résoudre les problèmes liés à la chaîne d’approvisionnement.
  • Acceptabilité sociale : L’adhésion du public est essentielle à la réalisation de nouveaux projets d’énergie propre. Des politiques élaborées avec soin peuvent stimuler la participation effective des collectivités à la planification, à l’implantation, à l’examen et à l’appropriation des réseaux, des outils précieux pour obtenir l’adhésion et réduire ainsi les retards et l’incertitude, dans le respect des délais rentables de mise en œuvre des nouveaux projets d’électricité propre. Les nouvelles approches adoptées dans l’Union européenneNote de bas de page 29, aux États-UnisNote de bas de page 30 (au niveau national et dans les États de New York, de la Californie et de l’Illinois) et en AustralieNote de bas de page 31 démontrent qu’il est possible de renforcer l’appui du public.
  • Résilience : À mesure que le climat change, le Canada verra s’accroître les effets sur les infrastructures électriques essentielles, notamment la production (les effets de la sécheresse sur la production hydroélectrique), les réseaux (les tempêtes de verglas et les incendies forestiers), ainsi que la demande (les vagues de chaleur qui font monter en flèche les charges de climatisation). Les recommandations du Conseil concernant la flexibilité de la charge, l’amélioration des normes du bâtiment et le transport interrégional permettent de relever en partie ces défis. Toutefois le gouvernement fédéral doit accorder davantage d’attention à la résilience des infrastructures.

L’avenir : les pierres angulaires de la transition électrique au Canada

Le Conseil a consacré l’année de son mandat à l’examen de l’état actuel des réseaux électriques du Canada et à la façon dont ils doivent être transformés en vue d’atteindre les objectifs de carboneutralité de manière abordable, fiable et avantageuse pour les nations et les collectivités autochtones. Sa conclusion, qui fait l’objet d’un large consensus, est que l’objectif, bien que difficile à atteindre, est tout à fait réalisable.

Pour favoriser la réussite de la transition énergétique dans toutes les régions du Canada, le Conseil estime que l’approche du gouvernement fédéral devait être fondée sur les 4 pierres angulaires suivantes :

  1. Vélocité : Pour atteindre ses objectifs de décarbonation, le Canada doit accélérer la mise en place de projets d’infrastructure d’électricité propre dans les plus brefs délais.
  2. Abordabilité : Il faut préserver l’abordabilité, l’équité et la compétitivité des coûts dans un contexte de demandes d’investissement croissantes et de diversité des paysages énergétiques des provinces et des territoires.
  3. Fiabilité : Il est essentiel de préserver la fiabilité des réseaux électriques du Canada pendant cette période de changement rapide.
  4. Participation des autochtones : La priorité doit être accordée à l’implication des nations et collectivités autochtones dans la transition énergétique afin de favoriser la réconciliation économique et de tirer pleinement parti de la transition.

Ces 4 pierres angulaires que sont la vélocité, la fiabilité, l’abordabilité et la participation des Autochtones constituent les bases nécessaires à la mise en place d’un réseau électrique performant. Les conclusions du Conseil sur ces 4 pierres angulaires sont examinées ci-dessous.

Vélocité

L’électricité devient un goulot d’étranglement

Le double défi de l’électrification, à savoir la décarbonation et la croissance, exige des gouvernements, des services publics et des promoteurs la prise de mesures appropriées dans des délais plus courts que jamais. Selon les prévisions actuelles, plus de 10 gigawatts (GW) de nouvelle électricité non émettrice devront être ajoutés aux réseaux électriques canadiens chaque année d’ici 2050Note de bas de page 32.

Ainsi, la capacité de production d’électricité doit augmenter au moins trois fois plus vite qu’au cours des dernières décenniesNote de bas de page 33.

Pourtant, l’on constate que les retards de procédure représentent de plus en plus un obstacle au développement de projets. Le Canada se classe à l’avant-dernière place des 38 pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en ce qui concerne le rythme de délivrance de permisNote de bas de page 34. Si l’on ne s’attaque pas de front à ce problème, le déficit de nouvelles énergies propres pourrait devenir un goulot d’étranglement important pour l’économie du Canada, la fiabilité de ses réseaux électriques et la réalisation de ses objectifs climatiques.

Les délais de production et de transport de l’électricité à grande échelle sont longs. De même, l’ampleur et le coût de la construction des infrastructures nécessaires s’évaluent en années et en milliards de dollars. Les réductions des émissions ont également un « coût en temps ». Plus vite les gaz à effet de serre seront réduits, plus il sera avantageux de réduire les impacts des changements climatiques.

La contribution essentielle de l’électricité à la réalisation des objectifs de carboneutralité

L’électricité est la clé d’un avenir carboneutre. Selon l’Institut climatique du Canada, l’électricité propre, à la fois pour décarboner les installations existantes et pour électrifier de nombreuses utilisations finales dans les bâtiments, l’industrie et les transports, est au cœur de toutes les trajectoires possibles vers la carboneutralité du Canada, avec une contribution représentant jusqu’à 37 % des réductions requisesNote de bas de page 35,Note de bas de page 36.

Figure 14 : Rôle de la décarbonation de l’électricité et de la croissance de la production électrique

Contribution potentielle de l’électricité à l’objectif de carboneutralité d’ici 2050, par rapport aux émissions annuelles totales du Canada et aux émissions du secteur de l’électricitéNote de bas de page 37

Schéma comparant les émissions annuelles
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Schéma comparant les émissions annuelles du secteur de l’électricité (47 Mt de CO2e en 2022) aux émissions annuelles totales du Canada en 2022 (708 Mt de CO2e). Le diagramme montre également que l’électrification et les réseaux propres pourraient potentiellement réduire les émissions de 268 Mt de CO2e en 2050.

Mettre l’accent sur le tableau d’ensemble

Les cadres réglementaires actuels, visant à protéger l’environnement, constituent paradoxalement un frein aux projets d’énergie propre nécessaires à la décarbonation de l’économie et à l’atténuation des impacts des changements climatiques les plus néfastes.

La lutte contre les changements climatiques exige une certaine flexibilité pragmatique. Selon le Conseil, l’urgence climatique et la transition économique mondiale en découlant nécessitent un rééquilibrage des priorités du Canada qui tienne compte du rôle essentiel de l’électricité propre. Ce point est abordé dans ses recommandations 9 et 10 (dans la section « Accélérer la croissance »).

Pour ce faire, il est essentiel de privilégier la participation des nations et collectivités autochtones dès le début du processus afin de garantir la protection de leurs droits reconnus par la Constitution. Une participation et une consultation adéquates permettent de favoriser la réconciliation tout en contribuant à réduire les retards inutiles.

« Les mêmes systèmes réglementaires visant à empêcher les mauvaises choses de se produire nuisent aujourd’hui à la réalisation de projets importants. » [Notre traduction]

« Pour réaliser les ambitions de carboneutralité du Canada, il est essentiel de donner la priorité aux projets d’électricité revêtant une importance stratégique en accélérant les processus de délivrance de permis. » [Notre traduction]

Le Fonds atmosphérique

Bâtir rapidement pour garantir la fiabilité

Selon le Conseil, il est essentiel d’accélérer le rythme de croissance de l’électricité propre dans les plus brefs délais afin de favoriser une décarbonation à grande échelle des réseaux électriques canadiens tout en préservant la fiabilité et en maintenant les coûts à un niveau bas.

Si l’on n’accélère pas l’approbation des projets d’électricité propre, le risque de saturation de l’infrastructure actuelle du Canada s’intensifiera, nuisant ainsi à la fiabilité et ralentissant le rythme de la décarbonation.

La course vers l’attraction (et la rétention) de l’industrie

La mise en place d’une infrastructure d’énergie propre plus efficace est essentielle pour assurer la prospérité économique continue du Canada.

Les entreprises et les industries du monde entier sont en quête d’une électricité propre, fiable et abordable pour alimenter leurs activités, sous l’impulsion d’un marché qui accorde de plus en plus d’importance aux biens et services à faibles émissions de carbone. Qu’il s’agisse de la production d’acier vert et de la fabrication de véhicules électriques en Ontario, de la production de batteries et de la chaîne d’approvisionnement au Québec, de l’exploitation du gaz naturel liquéfié en Colombie-Britannique et en Alberta, de la production de potasse en Saskatchewan ou du développement de l’hydrogène dans le Canada atlantique, l’accès à l’électricité à faible teneur en carbone devient un facteur déterminant dans les décisions d’investissement.

Par ailleurs, il est primordial d’offrir un volume suffisant d’électricité propre pour permettre aux entreprises et industries canadiennes existantes de poursuivre leurs activités, que ce soit les petites et moyennes entreprises ou les grandes entreprises à forte intensité d’émissions et exposées aux échanges commerciaux.

« Le problème est qu’on a pour 10 000 MW de projets intéressants sur la table et qu’à court terme, on n’a tout simplement pas ces capacités-là. »

Pierre Fitzgibbon, Ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie du QuébecNote de bas de page 39

« Lorsque nous avons construit Keeyask [projet hydroélectrique], nous ne pensions pas avoir besoin de cette nouvelle énergie avant 2045. Nous pourrons en avoir besoin d’ici 2029 ou 2030. » [Notre traduction]

Investir dans l’électricité propre au Québec

Alors que les entreprises internationales aspirent à décarboner leurs chaînes d’approvisionnement, nombre d’entre elles sont à la recherche d’une électricité à faible coût et décarbonée pour alimenter leurs activités.

Le Québec est une région qui a déjà vu émerger de nouvelles possibilités grâce à ce nouvel avantage commercial. Au cours des 3 dernières années, cette province a été assaillie de demandes d’électricité propre de la part de grandes entreprises industrielles en vue de l’agrandissement ou de la construction de nouvelles usines. Au total, ces demandes représentent plus de 30 000 mégawatts (MW) de nouvelle énergie, soit environ les trois quarts de la capacité actuelle du service publicNote de bas de page 41.

La hausse soudaine de la demande, conjuguée à l’objectif de décarbonation de l’économie de la province d’ici 2050, a incité Hydro-Québec à s’engager dans un plan d’investissement sans précédent. Dans son plan d’action 2035Note de bas de page 42, le service public provincial s’est engagé à investir environ 170 milliards $ sur 12 ans pour renforcer son réseau existant et l’étendre à un rythme inédit. Le développement prévu comprend :

  • plus de 10 GW de nouvelle capacité éolienne
  • 4 GW de capacité hydroélectrique supplémentaire
  • 3,5 GW d’économies grâce à l’efficacité et à la gestion de la demande
  • jusqu’à 1,5 GW d’autres énergies renouvelables et de stockage
  • plus de 5 000 km de nouvelles infrastructures de transport et de distribution

Le plan 2035 d’Hydro-Québec est un acompte sur son objectif à long terme qui consiste à ajouter 150 à 200 TWh par an d’ici 2050, soit presque le double de sa production actuelle, afin de contribuer à la décarbonation de la province et de répondre à la demande croissante d’électricité abordable et carboneutre.

Une réforme du processus de délivrance de permis est nécessaire pour réduire les goulets d’étranglement

Le Canada ne peut plus se permettre de maintenir le rythme actuel. Le Conseil estime que les gouvernements sont en mesure de réduire considérablement les délais de développement des projets d’énergie propre dans ce pays. Ses recommandations à la section « Accélérer la croissance » traitent des moyens de saisir ces possibilités.

D’après le Conseil, une grande partie des goulets d’étranglement en matière de délivrance de permis sont liés aux processus provinciaux. Cela dit, le Conseil a concentré ses efforts sur la réforme des processus de délivrance de permis, car le gouvernement fédéral contribue également aux goulets d’étranglement existants et doit donner le ton en supprimant ses propres processus inutiles ou redondants. Il peut également mettre à l’essai des changements dont les provinces et les territoires pourraient s’inspirer en cas d’obstacles semblables. Le Conseil reconnaît qu’un certain nombre d’annonces faites dans le budget fédéral 2024 visent à accélérer l’approbation des projets, ce qui constitue une étape importante.

Abordabilité

L’abordabilité de l’énergie est essentielle au Canada : pour les consommateurs, notamment compte tenu de l’inflation récente à l’échelle de l’économie, et pour les entreprises et l’industrie, pour lesquelles l’énergie peut s’avérer être un facteur déterminant de compétitivité.

Comment évaluer l’abordabilité?

Pour atteindre ses objectifs de carboneutralité tout en préservant la fiabilité de ses réseaux électriques, le Canada devra considérablement augmenter ses investissements en capital. Dans la mesure où ils sont recouvrés grâce à l’assiette tarifaire, ces investissements supplémentaires exerceront une pression à la hausse sur les tarifs de l’électricité.

Bien que l’on s’attende à une augmentation générale des tarifs, le Conseil reconnaît qu’il ne s’agit là que d’une partie de l’équation. La croissance de la consommation d’électricité sera compensée par des réductions dans l’achat d’autres formes d’énergie, notamment le gaz naturel et les produits pétroliers. En conséquence, les Canadiens sont susceptibles de dépenser plus pour l’électricité et moins pour les combustibles fossiles.

La somme de ces changements, combinée à tout coût supplémentaire pour les équipements électriques, indique l’impact net sur le « portefeuille énergétique » des Canadiens. Ce portefeuille énergétique représente le montant total que les Canadiens dépenseront pour bénéficier de tous les services qu’offre l’énergie dans leur vie quotidienne.

« Il est temps de passer des coûts de l’électricité aux coûts énergétiques totaux. Les consommateurs, indépendamment de leur envergure, doivent maîtriser les coûts énergétiques totaux afin de faire les bons choix. » [Notre traduction]

Hydro One

Pour comprendre l’impact de la transition sur l’abordabilité pour les Canadiens, notamment les changements apportés à leur portefeuille énergétique, le Conseil a collaboré avec l’Accélérateur de transition, un groupe de réflexion sur l’énergie, pour mener une analyse nuancée et fondée sur des données. Le Conseil a supervisé et orienté cette analyse. Elle est résumée dans l’encadré 6 ci-dessous.

Abordabilité : Modélisation de l’impact sur les ménages canadiens

Lors de l’examen par le Conseil de l’abordabilité dans la transition énergétique du Canada, l’Accélérateur de transition a présenté une analyse indépendante de l’impact de l’électrification sur les ménages à travers le pays.

L’analyse, supervisée par le Conseil (principalement par l’entremise de son groupe de travail - Capital et abordabilité), s’est appuyée sur des études nationales et provinciales reconnues et propres au Canada qui ont modélisé des trajectoires énergétiques de carboneutralité, y compris la demande énergétique projetée et les options d’approvisionnement, ainsi que les dépenses d’investissement et d’exploitation connexes. Pour comprendre les implications futures des tarifs de l’électricité et les coûts nets de l’énergie pour les consommateurs, l’analyse a permis d’établir des estimations ascendantes des besoins en revenus pour le réseau électrique de chaque province jusqu’en 2050, puis d’élaborer une série de scénarios pour les tarifs de détail de l’électricité, la consommation de l’électricité et d’autres combustibles, ainsi que les coûts de consommation des équipements.

Constatations principales

La modélisation visait à examiner les 3 principales implications de l’électrification en termes de coûts : (1) les besoins en capitaux; (2) l’impact net sur les coûts énergétiques totaux d’un ménage moyen; et (3) la répartition de ces impacts pour différents groupes de revenus et diverses régions.

1. Les investissements en capital doublent (pour atteindre 1,4 billion $ d’ici 2050)

Les résultats de la modélisation révèlent que, selon le scénario le plus probable, il faudra investir environ 1,4 billion $ d’ici 2050 pour stimuler la croissance nécessaire du réseau électrique. À raison d’une moyenne de 55 milliards $ par an, cela représente environ le double du taux actuel de dépenses en capital.

Au-delà de ce scénario de taux moyen, l’analyse a mis en évidence un éventail de besoins potentiels d’investissement en capital allant de 1,1 à 2 billions $. Cela montre dans quelle mesure les gouvernements canadiens peuvent mener des actions ciblées pour faire baisser les coûts. Il s’agit là de l’un des objectifs des recommandations du Conseil.

Dans tous les scénarios, environ la moitié de cet investissement sera nécessaire pour la production supplémentaire d’électricité propre (à la fois pour remplacer ou moderniser l’infrastructure existante et pour construire de nouvelles installations afin de répondre à la croissance de la demande), tandis que l’autre moitié sera consacrée à l’infrastructure de transport et de distribution destinée à acheminer l’énergie jusqu’aux consommateurs.

2. Pour la plupart des ménages, les factures d’énergie diminueront d’ici 2050

L’impact net sur les ménages est fonction de 4 facteurs :

  1. l’augmentation des tarifs de l’électricité due à de nouveaux investissements en capital
  2. la baisse des dépenses liées aux combustibles fossiles, qui sont remplacées dans une large mesure par l’électricité propre
  3. la baisse de la consommation globale d’énergie, car pour la majorité des besoins (chauffage et véhicules), l’électricité peut être deux à quatre fois plus efficace que les sources d’énergie qu’elle remplacera
  4. l’augmentation des coûts des équipements, notamment des systèmes de chauffage électrique et des véhicules

Figure 15: Évolution du portefeuille énergétique, de 2024 à 2050

La modélisation indique que 7 ménages canadiens sur 10 réaliseraient des économies nettes, tandis que 3 sur 10 subiraient des augmentations nettes des coûts. Dans l’ensemble, les Canadiens pourraient s’attendre à économiser 15 milliards $ en coûts totaux liés à l’énergie, malgré un doublement du taux d’investissement dans le secteur de l’électricité.

Diagramme à barres de l’évolution en pourcentage du portefeuille énergétique des ménages
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Diagramme à barres de l’évolution en pourcentage du portefeuille énergétique des ménages de 2024 à 2050 dans le cadre d’un scénario de tarifs d’électricité moyens jusqu’en 2050. Le diagramme à barres montre, à gauche, des coûts énergétiques plus faibles (c’est-à-dire des économies) et, à droite, des coûts énergétiques plus élevés pour le portefeuille, à partir d’une ligne centrale qui ne représente aucun changement. Le graphique montre que d’ici 2050, 70 % des ménages réaliseront des économies nettes de coûts énergétiques et 30 % des ménages verront leurs coûts énergétiques nets augmenter.

La combinaison de ces facteurs a entraîné une légère baisse des coûts nets liés à l’énergie (y compris les équipements) pour le ménage canadien médian.

Selon le scénario à taux moyen, 70 % des ménages canadiens devraient réaliser des économies nettes à l’horizon 2050 (Figure 15) d’environ 1 500 $ par an en moyenne. Plus précisément, 6,3 millions de ménages verraient leurs dépenses en énergie augmenter (soit une augmentation globale de 8 milliards $). Parallèlement, 15 millions de foyers se partageraient une économie nette de 23 milliards $. Au total, les ménages canadiens devraient économiser 15 milliards $ par an grâce au passage à l’électricité.

3. Distribution : Bien que la plupart des Canadiens fassent des économies, certains doivent faire face à des coûts moyens plus élevés

Bien que la plupart des ménages canadiens devraient voir leur facture énergétique totale diminuer malgré l’augmentation des investissements dans le secteur de l’électricité, les moyennes peuvent dissimuler de grandes différences entre les consommateurs.

Les ménages à faible revenu en profitent un peu moins

Si 70 % des ménages canadiens devraient réaliser des économies nettes, ce chiffre tombe à 58 % pour les ménages à faible revenuNote de bas de page 43. Cela s’explique principalement par le fait qu’une plus grande proportion de ménages à faible revenu ne possède pas de véhicule personnel et ne bénéficiera donc pas des économies liées à l’électrification des transports. La modélisation n’a pas ventilé les incidences sur les collectivités autochtones, mais d’un point de vue statistique, celles-ci ont tendance à être confrontées à des taux plus élevés de pauvreté énergétiqueNote de bas de page 44.

Deux provinces ont plus à perdre qu’à gagner

Les ménages actuellement chauffés au gaz naturel dans les provinces où les projections des tarifs de détail de l’électricité sont les plus élevées (notamment l’Alberta et la Saskatchewan) sont beaucoup plus susceptibles d’être confrontés à des coûts énergétiques globaux plus élevés, en partie parce que ces administrations pratiquent déjà des tarifs d’électricité élevés. Cela est également dû à l’hypothèse de la modélisation selon laquelle le chauffage serait converti en électricité, une hypothèse que le Conseil ne considère pas comme une solution optimale pour tous. Cela dit, l’augmentation de leurs tarifs au fil du temps serait moins importante que dans les autres provinces et le coût total de l’énergie serait toujours inférieur à celui payé dans les Maritimes à l’heure actuelle.

Le point de vue du Conseil

Le Conseil a jugé cette analyse pertinente dans l’ensemble. Cette analyse a fourni des renseignements précieux sur les trajectoires de transition possibles vers l’avenir carboneutre du Canada, sur leurs implications pour les investissements dans les filières énergétiques et sur les incidences des coûts connexes. Les résultats sont globalement cohérents avec d’autres études crédibles et constituent un point de départ important dans la réflexion sur les interventions stratégiques. Une telle modélisation doit cependant être considérée comme un aperçu ponctuel d’un système très complexe, qui indique clairement l’état final (2050), mais ne tient pas compte des incidences intermédiaires, qui peuvent évoluer de manière non linéaire.

Le Conseil reconnaît que le travail de modélisation a été limité à certains égards (en raison des hypothèses de l’étude des trajectoires, de la disponibilité des données et du temps limité pour effectuer des analyses supplémentaires). Ainsi, bien que les résultats soient ventilés par province, ils ne tiennent pas compte des incidences sur les régions nordiques du Canada. De même, si les résultats ciblent les ménages (et sont ventilés par niveau de revenu), ils ne tiennent pas compte des entreprises et l’industrie. Enfin, par souci de simplicité, la modélisation du portefeuille énergétique repose sur l’hypothèse d’une électrification totale du chauffage et des transports, alors que dans certaines circonstances d’autres solutions peuvent s’avérer plus optimalesNote de bas de page 45.

Abstraction faite de ces mises en garde, le Conseil estime qu’il existe suffisamment de preuves pour suggérer que la plupart des Canadiens verront leurs coûts énergétiques globaux diminuer grâce au passage à l’électricité, si celui-ci est bien exécuté, malgré le doublement requis des investissements dans le secteur de l’électricité.

Néanmoins, l’intervention des pouvoirs publics sera nécessaire pour surmonter les effets inégaux des coûts à court terme et assurer une transition efficace et équitable. Du point de vue du Conseil, ces résultats soulignent la nécessité de concentrer les efforts sur (1) la réduction au minimum des coûts globaux, de sorte que les répercussions sur l’abordabilité pour tous les Canadiens se traduisent par des économies nettes; et (2) la résolution des problèmes d’équité, principalement pour les ménages à faible revenu et certaines régions du pays qui risquent davantage de voir leurs coûts augmenter.

Comment garantir l’abordabilité?

Pour le Conseil, mettre l’accent sur l’abordabilité implique se focaliser sur deux points :

  • Le coût global : réduire autant que possible les besoins d’investissement; et
  • L’équité : soutenir ceux qui pourraient supporter un fardeau disproportionné.

Coût global

La transition du Canada vers la carboneutralité se fera à grand renfort de capitaux. L’investissement global nécessaire pour décarboner entièrement la production nationale d’électricité, tout en l’augmentant pour répondre à la nouvelle demande, est estimé à environ 1,4 billion $, y compris les capitaux privés et des financements provenant de plusieurs ordres de gouvernement (voir Abordabilité : Modélisation de l’impact sur les ménages canadiens et la Figure 15).

Le montant total général se situe dans une large fourchette potentielle, de 1 100 à 2 000 milliards $, soulignant la possibilité d’une action stratégique visant à exercer une pression à la baisse sur les coûts.

Une meilleure planification peut contribuer à la réduction des coûts

Une meilleure planification offre plus de certitude aux services publics, aux promoteurs et aux investisseurs. Cela peut réduire considérablement les risques financiers et, par extension, le coût du capital. Une meilleure planification permet d’orienter efficacement les investissements vers les projets essentiels à la transition, d’éviter une mauvaise répartition des ressources et de rationaliser davantage le processus de décarbonation.

« Les gouvernements doivent démontrer que le Canada est un pays propice aux affaires. La confiance des investisseurs est primordiale pour attirer les investissements privés. » [Notre traduction]

ATCO

Le Conseil estime qu’une meilleure planification et une prévisibilité optimale du marché peuvent exercer une pression à la baisse sur les coûts. Ce point est abordé dans les recommandations du Conseil à la section « Aligner sur les objectifs ».

Des processus rationalisés peuvent favoriser la mise en place rapide des projets d’électricité

Les obstacles à la mise en place de projets d’énergie propre au Canada entraînent des retards et des incertitudes de plus en plus importants.

« Il est essentiel d’accélérer les projets d’énergie propre hautement prioritaires en remédiant aux lourdeurs administratives, aux doublons, aux chevauchements, à l’insuffisance des ressources et aux exigences trop strictes en matière d’information qui entraînent des retards inutiles. » [Notre traduction]

Association des producteurs d’électricité de l’Ontario

Le Conseil estime que des améliorations significatives des processus d’approbation des projets et la mobilisation auprès des Autochtones peuvent exercer une pression à la baisse sur les coûts et attirer le capital-risque nécessaire lors des premières phases de développement. De même, la consultation des nations et collectivités autochtones, ainsi que l’établissement de partenariats avec celles-ci peuvent réduire l’incertitude, les perturbations et les retards. Ces points sont abordés dans les recommandations à la section « Accélérer la croissance ».

L’efficacité énergétique et la gestion axée sur la demande peuvent limiter les coûts

Une transition rentable repose sur l’optimisation et non sur la maximisation. Des améliorations significatives de l’efficacité énergétique et de la flexibilité de la charge peuvent réduire considérablement le besoin de nouvelles infrastructures électriques coûteuses, de sorte que l’ampleur et la vélocité de la mise en place de l’énergie propre soient plus réalisables et plus abordables.

Entre 2000 et 2019, l’efficacité énergétique a connu une amélioration de 12,3 %, ce qui a permis de réduire la demande énergétique annuelle de 815 pétajoules et d’économiser 23,2 milliards $ pour la seule année 2019Note de bas de page 46. À l’avenir, les recherches indiquent que l’adoption de codes du bâtiment à consommation énergétique nette zéro pourrait permettre aux ménages de réaliser des économies de 3 milliards $ par anNote de bas de page 47. La Nouvelle-Écosse offre un autre exemple concret d’économies réalisées par les ménages et les pouvoirs publics : un investissement de 173 millions $ sur une période de trois ans dans la gestion axée sur la demande par les contribuables devrait permettre d’éviter des dépenses futures de 542,8 millions $ pour l’approvisionnement. Cet investissement devrait également entraîner la réduction de la facture énergétique moyenne des consommateurs de l’ordre de 1 à 8 %Note de bas de page 48.

« La forme d’énergie la plus durable est le kilowattheure que vous n’avez pas besoin de produire. » [Notre traduction]

Efficacité Manitoba

L’efficacité énergétique et la gestion axée sur la demande (GAD) améliorent également la fiabilité du réseau électrique en réduisant la pression sur les réseaux électriques et en facilitant la gestion des pointes de demande grâce à des charges flexiblesNote de bas de page 49. La priorité accordée à l’efficacité énergétique et à la GAD profite également aux consommateurs de tous les secteurs, puisqu’elle permet de réduire les factures d’énergie, de rendre les logements plus abordables et d’améliorer la compétitivité des entreprises.

Le Conseil estime que des gains importants en matière d’efficacité énergétique et de GAD peuvent réduire les coûts de manière significative. Ce point est abordé principalement dans une série de recommandations à la section « Économiser pour alléger la charge ».

Équité

Il est essentiel de réduire les coûts totaux, mais l’équité est tout aussi importante pour la réussite globale de la transition énergétique du Canada. L’atteinte de l’objectif de carboneutralité du Canada sera un défi beaucoup plus grand pour certaines régions et pour certains Canadiens à faible revenu, qui pourraient avoir du mal à se procurer les équipements plus coûteux qui permettent d’économiser de l’énergie et de réduire les factures à long terme.

Le Conseil estime que les mesures visant à accélérer la transition vers l’électricité propre doivent prendre en compte ces effets de répartition, ce qui devrait inclure le transfert d’une partie des coûts des contribuables vers l’assiette fiscale, afin d’équilibrer les coûts globaux. La recommandation 18 du Conseil aborde cette question.

Incidences sur les ménages à faible revenu

La modélisation de l’abordabilité réalisée pour le Conseil suggère qu’environ 6 ménages à faible revenu sur 10 réaliseront des économies nettes grâce au passage à l’électricité. Toutefois, les ménages à faible revenu, en particulier ceux qui se chauffent au gaz ou qui ne possèdent pas de véhicule, sont plus vulnérables aux augmentations de prix.

Le Conseil estime que le gouvernement fédéral, en collaboration avec les provinces et les territoires, peut contribuer à aider un plus grand nombre de ménages à faible revenu à réaliser des économies nettes et à réduire au minimum les coûts nets. Ainsi, le gouvernement fédéral peut les aider à accéder à des possibilités des économies qu’ils auraient autrement dû renoncer. La recommandation 22 du Conseil aborde ce point.

Incidences sur les provinces tributaires des combustibles fossiles

Comme le suggère l’analyse, certaines provinces, en particulier celles qui dépendent le plus des combustibles fossiles aujourd’hui, sont plus susceptibles de voir leurs coûts augmenter pendant la transition. Cela vaut particulièrement pour l’Alberta, la Saskatchewan et la Nouvelle-Écosse, les administrations mentionnées précédemment (voir section « Défis du Canada ») comme étant confrontées aux plus grands défis sur la voie de la décarbonation.

Le Conseil estime que le gouvernement fédéral peut contribuer à minimiser les augmentations de coûts dans certaines provinces afin d’éviter d’accentuer les disparités régionales en matière de coûts. Plus précisément, le Conseil soutient fermement que les CII du gouvernement fédéral applicables à l’électricité devraient privilégier davantage les provinces qui ont le plus besoin d’investissements pour atteindre leurs objectifs de décarbonationNote de bas de page 50. Le Conseil estime également que le gouvernement fédéral peut et doit se surpasser, notamment en facilitant et en soutenant activement le transport interrégional visant à réduire le coût de la décarbonation dans ces provinces. La recommandation 19 du Conseil aborde ce point.

Incidences sur les collectivités éloignées, autochtones et nordiques

Enfin, la modélisation de l’abordabilité commandée par le Conseil n’a pas permis d’examiner les incidences sur les collectivités éloignées, autochtones et nordiques. Le Conseil estime que ces collectivités pourraient être touchées de manière disproportionnée, ce à quoi le gouvernement fédéral doit remédier. Cela est particulièrement vrai lorsque l’accès à des équipements nouveaux et efficaces est limité ou onéreux, ou lorsque les politiques ne tiennent pas suffisamment compte des conditions uniques de ces collectivités. Les recommandations 20 et recommandation 21 du Conseil à la section « Soutenir la transition » abordent ce point.

« La transition ne se résume pas à la tarification du carbone. Le coût de la non-participation à l’évolution de l’économie et de la non-inclusion dans la transition, alors que le Nord subit de manière disproportionnée les effets des changements climatiques, doit être pris en compte. » [Notre traduction]

Inuit Tapiriit Kanatami

Incidences sur les entreprises et l’industrie

Des tarifs compétitifs et abordables sont importants non seulement pour les fournisseurs d’électricité (qui ont besoin de taux de rendement compétitifs pour attirer des capitaux), mais également pour les consommateurs commerciaux. La fourniture d’une énergie propre et abordable aux entreprises ainsi qu’aux consommateurs industriels d’électricité renforce non seulement leur compétitivité, mais aussi la capacité du Canada à attirer et à retenir ces entreprises, notamment celles qui travaillent dans des secteurs à forte consommation d’électricité, à forte intensité d’émissions et exposés aux échanges commerciaux, tels que les secteurs de l’aluminium, de l’exploitation minière et de la foresterie.

Une énergie abordable est également vitale pour les petites et moyennes entreprises qui ne sont pas toujours en mesure d’adopter elles-mêmes des mesures d’efficacité énergétique. De nombreuses petites entreprises et de nombreux fabricants sont des fournisseurs importants pour les grands projets et jouent un rôle essentiel dans l’écosystème de la transition énergétique. La majorité des recommandations du Conseil portent sur l’abordabilité (voir les recommandations).

Fiabilité

La fiabilité de l’électricité est essentielle à la réussite de l’économie du Canada et à la santé de tous les Canadiens. Les Canadiens nécessitent des réseaux électriques fiables pour satisfaire d’innombrables besoins quotidiens tels que la chaleur hivernale ou la réfrigération. La transition énergétique ne fera qu’allonger cette liste à mesure que de nouveaux équipements, véhicules et secteurs industriels passeront des combustibles fossiles à l’électricité. Ces changements renforceront l’ampleur des risques auxquels les réseaux électriques sont confrontés et conféreront une importance encore plus grande à la fiabilité.

Les politiques relatives à l’électricité carboneutre ont un rôle crucial à jouer dans l’atténuation de ces risques, d’autant plus que de nombreux réseaux électriques du pays sont déjà mis à rude épreuve en raison du vieillissement des infrastructures et des effets néfastes d’un climat de plus en plus instableNote de bas de page 51.

Le besoin de souplesse

Le défi de la décarbonation et de l’augmentation de la production d’électricité propre au Canada n’est pas seulement une question de rythme et de coût, il est également complexe d’un point de vue technique. Pour les provinces dotées de fortes interconnexions de transport et/ou d’une base solide de production hydroélectrique ou nucléaire, l’ajout de sources d’énergie variables telles que l’énergie éolienne et l’énergie solaire est relativement simple. En revanche, les provinces dotées de faibles interconnexions de transport et qui ne disposent pas d’une énergie propre et fiable rencontreront des difficultés plus importantes.

Les nouvelles technologies évoluent rapidement, qu’il s’agisse des progrès réalisés dans le domaine du nucléaire ou de nouvelles solutions telles que les batteries à grande échelle, les systèmes de stockage de longue durée et toute une série de technologies permettant d’ajuster la période de la demande. Malgré cela, la transition ne sera pas facile, principalement dans les régions dont les réseaux dépendent essentiellement des combustibles fossiles à l’heure actuelle.

Cela ne justifie pas la complaisance. Le Conseil estime néanmoins que, pour les régions tributaires des combustibles fossiles, le gouvernement fédéral doit faire preuve de suffisamment de souplesse dans ses exigences de décarbonation afin que les défis techniques puissent être relevés sans mettre en péril la fiabilité. La recommandation 5 du Conseil aborde ce point.

Le rôle du transport interrégional

La diversité du paysage électrique canadien accroît les risques pour la fiabilité. Dans les faits, il n’existe pas un seul réseau électrique canadien. L’électricité relève directement de la compétence provinciale et territoriale et chaque province et territoire gère son propre réseau indépendant, avec son propre bouquet énergétique, ses structures de marché, ses modèles de propriété, ses régimes de contrôle et ses mécanismes de tarification.

Cette décentralisation, l’une des caractéristiques de la fédération canadienne, doit être respectée. Toutefois, ces réseaux en vase clos peuvent donner lieu à des résultats peu optimaux, en particulier dans le cas du transport interrégional.

Selon le Conseil, le renforcement et l’expansion du transport interrégional sont des mesures essentielles pour garantir la fiabilité des réseaux électriques du Canada, notamment dans les régions tributaires des combustibles fossiles comme l’Alberta, la Saskatchewan et la Nouvelle-Écosse. Les réseaux de transport interrégionaux (souvent appelés « interconnexions ») peuvent améliorer la fiabilité (et limiter les coûts) en exploitant les synergies entre les réseaux adjacentsNote de bas de page 52,Note de bas de page 53 . Les interconnexions y parviennent notamment par les moyens suivants :

  • Élargir l’accès aux approvisionnements les moins coûteux : Les interconnexions permettent à un plus grand nombre de Canadiens d’accéder à des approvisionnements en électricité moins coûteuxNote de bas de page 54. L’Alberta dispose notamment de certaines des meilleures ressources éoliennes et solaires du pays, tandis que la Colombie-Britannique est dotée de certaines des plus importantes ressources hydroélectriques. Le renforcement des échanges pourrait permettre aux habitants de l’Alberta d’accéder à l’énergie hydroélectrique fiable de la Colombie-Britannique et à cette dernière de bénéficier de l’énergie renouvelable variable de l’Alberta à un coût inférieur à celui auquel elle pourrait prétendre si elle produisait cette énergie elle-même.
  • Atténuer les pointes de demande coûteuses : Le raccordement de réseaux présentant des profils de charge complémentaires permet de diversifier les événements de pointe (par exemple, les pointes liées aux conditions météorologiques), de diversifier les pointes quotidiennes (par exemple, grâce aux différences de fuseaux horaires) et d’élargir le bassin de contributions à la « réponse à la demande » apportées par les consommateursNote de bas de page 55.
  • Atténuer les risques liés à l’approvisionnement : Les interconnexions permettent de se prémunir contre les risques liés à l’approvisionnement à court, moyen et long terme, incluant, sans toutefois s’y limiter, la variabilité des ressources (due à la vitesse du vent, à la couverture nuageuse ou aux précipitations), les arrêts planifiés ou imprévus des centrales, les fluctuations inattendues de la demande, les retards dans la mise en œuvre des projets et les modifications réglementaires.

Malgré ces avantages et d’autres encore, le commerce de l’électricité au Canada est loin d’avoir atteint son plein potentiel. Bien que certaines améliorations interrégionales soient en cours, ces efforts ne sont ni aussi systématiques ni aussi avancés que dans d’autres pays où la gouvernance est également décentraliséeNote de bas de page 56.

L’absence d’une approche cohérente permettant d’accroître les échanges internes d’électricité rend la transition plus difficile, en particulier pour les régions tributaires des combustibles fossiles.

Le Conseil estime que l’expansion systématique du transport interrégional peut améliorer la fiabilité et profiter à toutes les provinces et à tous les territoires, principalement à ceux qui dépendent des combustibles fossiles. Ce point est abordé dans la recommandation 19.

Figure 16: Avantages des lignes de transport interrégionales

L’exemple d’une hypothétique ligne occidentale d’alimentation en courant continu a haute tension. Les icônes de la batterie et de l’argent indiquent respectivement les avantages en termes de fiabilité et d’abordabilité.

Une infographie montrant l’empilement de valeur potentielle, ou les avantages, de la transmission interrégionale
Version texte

Une infographie montrant l’empilement de valeur potentielle, ou les avantages, de la transmission interrégionale, en utilisant une hypothétique ligne de transport directe à haute tension occidentale comme exemple. Dix catégories d’avantages sont présentées, réparties en trois groupes : « Multiplier les options d’approvisionnement », « Baisse de la demande de pointe » et « Réduction des risques ». Dans le premier groupe, « Multiplier les options d’approvisionnement », les catégories d’avantages suivantes sont énumérées : accès aux options les moins coûteuses ; élargissement de l’accès aux approvisionnements américains ; déblocage de la capacité des lignes existantes; partage des réserves et équilibrage de la charge. Dans le deuxième groupe, « Diminution de la demande de pointe », les catégories d’avantages suivantes sont énumérées : diversification des scénarios de pointe, diversification des pointes journalières et élargissement de la réponse à la demande. Dans le troisième groupe, « Réduction des risques », les catégories d’avantages suivantes sont énumérées : atténuation des risques liés à l’approvisionnement à court terme, atténuation des risques liés à l’approvisionnement à moyen/long terme et atténuation des risques politiques.

Privilégier les solutions axées sur la demande

Pour garantir la fiabilité du réseau, il faut également donner la priorité à l’efficacité et aux autres ressources axées sur la demande. En réduisant la demande grâce à l’amélioration de l’efficacité et en permettant aux réseaux de gérer la consommation de manière plus dynamique, en particulier pendant les périodes de pointe de la demande, il est possible de préserver la fiabilité, de faire des économies et de gagner du temps pour la transition énergétique. La réactivité des charges sera essentielle pour la fiabilité, car elle permettra aux réseaux de réduire de manière significative la consommation d’électricité lors d’événements extrêmes et d’autres périodes de forte demande. Les ressources distribuées, y compris les ressources de production et de stockage, permettront également d’améliorer considérablement la résilience des réseauxNote de bas de page 57.

Le Conseil estime que les solutions axées sur la demande peuvent améliorer la fiabilité. Ce point est abordé principalement dans les recommandations à la section « Économiser pour alléger la charge ».

Les six principes du Conseil pour un réseau électrique fiable

  1. Approvisionnement fiable : La fiabilité exige l’accès à des approvisionnements sûrs auxquels il est possible de recourir dans pratiquement toutes les situations. Il s’agit de sources d’approvisionnement de base telles que le nucléaire et de sources de suivi des charges telles que l’hydroélectricité, les centrales thermiques et le stockage par batteries.
  2. Approvisionnement diversifié : Aucune source d’électricité n’étant sûre à 100 % (la sécheresse, les vents calmes, la couverture nuageuse, les tuyaux gelés et des travaux d’entretien imprévus peuvent tous perturber la production), il est essentiel de diversifier les sources afin de limiter les risques.
  3. Approvisionnement décentralisé : La production décentralisée et les ressources de stockage peuvent apporter des améliorations significatives à la résilience du réseau et des consommateurs.
  4. Charges efficaces : L’approvisionnement en électricité n’est que la moitié de l’équation; des mesures d’efficacité peuvent réduire de manière significative la demande et la vulnérabilité des consommateurs face aux perturbations de l’approvisionnement.
  5. Charges réactives : La fiabilité d’un réseau dépend de sa capacité à réduire ou à transférer une part importante de la demande d’électricité en cas d’événements extrêmes ou lors d’autres périodes de forte demande.
  6. Réseaux résilients : Les infrastructures de transport et de distribution sont plus résistantes aux phénomènes météorologiques extrêmes (incendies forestiers, vents et tempêtes de verglas) lorsqu’elles intègrent des redondances délibérées.

Participation des autochtones

L’historique

Les collectivités autochtones du Canada subissent depuis longtemps des préjudices injustes dans le développement des projets d’électricité au Canada. Qu’il s’agisse du déplacement des foyers, de la destruction de territoires de chasse et de pêche ou de l’exclusion des perspectives autochtones dans l’élaboration de projets, la relation historique et coloniale entre le secteur de l’électricité et les peuples autochtones du Canada (Premières Nations, Inuits et Métis) est inacceptable et ne doit pas être perpétuée.

L’histoire législative du Canada complique le changement nécessaire. La Loi sur les Indiens interdit aux nations autochtones de bénéficier des avantages économiques découlant de leurs terres ancestralesNote de bas de page 58, alors même que la Constitution canadienne reconnaît que les peuples autochtones ont des droits spécifiques et uniques, du fait qu’ils sont les premiers occupants du CanadaNote de bas de page 59.

Au cours des années précédentes, le Canada a reconnu et commencé à assumer la responsabilité de ces manquements historiques et s’est engagé à veiller à ce que les nations et les collectivités autochtones ne soient plus exclues du développement économiqueNote de bas de page 60. En réponse, les nations autochtones ont clairement exprimé leur volonté de participer à la transition énergétique, voire de la diriger, et de bénéficier de ses avantages.

Les défis

Pour atteindre son objectif de carboneutralité, le Canada devra se doter de nouvelles infrastructures électriques importantes. Dans l’ensemble, ces infrastructures devront être construites sur les terres ancestrales des peuples autochtones du pays.

En faisant des nations et collectivités autochtones des partenaires à part entière dans les projets d’électricité propre et en favorisant activement ces partenariats, le Canada aura là une occasion unique de commencer à remédier aux inégalités qui ont longtemps prévalu dans le développement de l’énergie et des ressources et de tirer parti d’un puissant moteur de réconciliation économiqueNote de bas de page 61.

De nombreuses organisations et collectivités autochtones ont déjà pris des mesures pour faire avancer les projets d’électricité propreNote de bas de page 62. Toutefois, d’importants obstacles subsistent, tant pour l’industrie que pour les nations et collectivités autochtones.

Pour garantir une participation significative et équitable, les promoteurs de projets qui construisent des infrastructures énergétiques doivent recenser les nations et collectivités autochtones concernées et collaborer avec elles en leur laissant suffisamment de temps et de marge de manœuvre pour leur permettre de façonner et d’influencer les projets de manière à en limiter les répercussions et à créer des possibilités de participation commerciale. Pour les collectivités autochtones, les obstacles comprennent un accès insuffisant au financement et aux connaissances techniques propres à l’industrie, ainsi qu’une capacité limitée de ressources humaines nécessaires pour participer activement au développement de projets.

Les possibilités

La participation commerciale des Autochtones aux projets d’électricité offre des avantages économiques considérables à leurs collectivités et à l’économie canadienne dans son ensembleNote de bas de page 63. La propriété des actifs, les ententes de partage des revenus, les partenariats en capital, la création d’emplois et les possibilités découlant de la chaîne d’approvisionnement contribuent au bien-être économique des collectivités autochtones et leur permettent de jouer un rôle plus important dans la prise de décision. La participation des Autochtones favorise également la diversification et la croissance du secteur canadien de l’électricité, tout en renforçant la certitude et en réduisant les risques. Dans les régions isolées, cette approche peut également contribuer à réduire la dépendance à l’égard du diesel polluant et coûteux.

En tenant compte des leçons tirées des effets négatifs et des mises à l’écart observés par le passé, le développement d’une infrastructure électrique carboneutre offre une occasion exceptionnelle de dégager des profits et de favoriser la réconciliation économique.

Le Conseil estime que grâce à une meilleure compréhension, ainsi qu’à la facilitation des droits des Autochtones, la transition énergétique offre une occasion en or d’accélérer la réconciliation économique. Recommandation 14 du Conseil, les recommandations 20 et 21 abordent ces points.

Projets énergétiques autochtones : Exemples de l’Alberta, de la Saskatchewan et de l’Ontario

Les collectivités autochtones mènent des projets d’électricité propre d’un océan à l’autre. Selon le groupe à but non lucratif Indigenous Clean Energy, pas moins de 2 100 systèmes d’énergie renouvelable à petite ou micro-échelle, 200 projets d’énergie renouvelable de moyenne à grande échelle et plus de 19 projets de transport impliquant des Autochtones sont soit en cours d’exploitation ou soit en phase finale de planification ou de mise en œuvreNote de bas de page 64.

Voici quelques exemples d’initiatives autochtones révolutionnaires :

  • Le projet de transport d’énergie de Wataynikaneyap Power est détenu majoritairement par 25 Premières Nations. Il s’agit d’un partenariat avec FortisOntario, qui reliera 17 collectivités éloignées, actuellement tributaires du diesel, au réseau électrique de l’Ontario par le biais de 1 600 km de lignes de transport. Le projet devrait permettre de réduire les tarifs de l’électricité, de diminuer les émissions, d’accroître la fiabilité et de soutenir le développement économique local.
  • La Première Nation de Cowessess, dans le sud de la Saskatchewan, a mené à bien le projet de centrale solaire Awasis (10 MW)Note de bas de page 65 et le projet d’énergie éolienne Bekevar (200 MW)Note de bas de page 66. Awasis est une centrale détenue majoritairement par la branche d’investissement de la Première Nation. En outre, le promoteur Elemental Energy a travaillé en étroite collaboration avec la collectivité sur le renforcement des capacités, l’emploi et les possibilités de formation. Le projet Bekevar est le plus grand projet d’énergie éolienne de la Saskatchewan. Il est détenu conjointement avec la société Innagreen, basée au Royaume-Uni, et offre des possibilités de participation au capital et de formation aux membres de la collectivité. Il permettra à plus de 100 000 foyers de bénéficier d’une électricité propre, à mesure que la province délaisse le charbon.
  • À Fort Chipewyan, dans le nord de l’Alberta, la Première Nation Athabasca Chipewyan (ACFN), la Première Nation crie Mikisew et l’Association métisse de Fort Chipewyan ont collaboré avec ATCO Electric pour construire un parc solaire de 2,2 MWNote de bas de page 67. Ce projet était le premier de ce type en Alberta et représentait une avancée majeure dans le cadre des partenariats entre les services publics et les nations et collectivités autochtones. Le projet a permis de réduire la consommation de près d’un million de litres de diesel par an et de répondre à un quart des besoins locaux en électricité. L’ACFN s’est ensuite associée au projet de développement de 3 grandes centrales solaires dans le sud de l’AlbertaNote de bas de page 68.

Partie 2 : Saisir l’occasion

Recommandations du Conseil

Le mandat du Conseil permet d’examiner les actions nécessaires à tous les ordres de gouvernement. Toutefois, étant donné qu’il a été créé par le gouvernement fédéral, le Conseil s’est efforcé de formuler des avis sur les options politiques fédérales en vue de la transition électrique. Bon nombre des politiques recommandées visent à soutenir les provinces et les territoires dans leur travail, tout en respectant leurs compétences et leur autorité suprême sur les réseaux électriques.

Quel devrait être le rôle du gouvernement fédéral et quels types de changements politiques faciliteront la tâche de chaque province et territoire?

Le Conseil a adopté une approche pragmatique. Les recommandations qui suivent sont axées sur la résolution des « points problématiques », c’est-à-dire des défis clairement déterminés et des obstacles potentiels au rythme, à l’ampleur, à l’abordabilité et à la compétitivité des coûts de la transition. Reconnaissant la diversité des réseaux électriques au Canada, le Conseil a choisi de ne pas mettre l’accent sur des technologies précises.

Les recommandations du Conseil s’articulent autour de 4 thèmes essentiels :

  1. Aligner sur les objectifs pour s’assurer que la voie à suivre est claire et que les décideurs peuvent s’engager
  2. Accélérer la croissance de manière à ce que les projets essentiels puissent progresser rapidement et avec la participation des Autochtones
  3. Soutenir la transition grâce à un financement supplémentaire des besoins ciblés afin que tous les Canadiens en tirent profit
  4. Économiser pour alléger la charge, réduisant ainsi au minimum les besoins d’investissement et augmentant les chances d’atteindre les objectifs du Canada de manière fiable et abordable

Le rôle principal du gouvernement fédéral dans cette nouvelle phase de la transition électrique est d’améliorer la préparation et de permettre aux décideurs, y compris les autres ordres de gouvernement, les titulaires de droits autochtones, l’industrie de l’électricité en général, les consommateurs et les intervenants, de prendre des décisions éclairées.

Figure 17 : Les étapes d’une transition plus abordable, plus fiable et plus inclusiveNote de bas de page 69

Graphique linéaire illustratif des scénarios de trajectoire de coûts de la transition vers la carboneutralité
Version texte

Graphique linéaire illustratif des scénarios de trajectoire de coûts de la transition vers la carboneutralité jusqu’en 2050, comparant une transition énergétique à coût élevé d’environ 2 billions de dollars à une transition énergétique à faible coût d’environ 1,1 billion de dollars. Le tableau indique que l’écart entre les deux scénarios peut être comblé en prenant les mesures suivantes : 1) Aligner sur les objectifs; 2) Accélérer la croissance; 3) Soutenir la transition; et 4) Économiser pour alléger la charge.

Aligner sur les objectifs

Figure 18 : Illustration de l’impact directionnel des recommandations liées à l’étape « ALIGNER sur les objectifs »

Graphique linéaire illustrant deux trajectoires pour les exigences de fonds propres
Version texte

Graphique linéaire illustrant deux trajectoires, élevée et basse, pour les exigences de fonds propres. Le graphique indique l’impact directionnel des recommandations liées à la mesure « Aligner sur les objectifs » au fil du temps, suggérant que la trajectoire plus élevée et les besoins en capitaux pourraient être réduits en alignant les politiques, les mandats et les plans qui offrent une plus grande certitude aux décideurs et soutiennent une transition moins coûteuse pour tous.

À première vue, le paysage climatique et énergétique actuel du Canada peut sembler solide, avec un ensemble de politiques adoptées et planifiées aux niveaux fédéral, provincial et territorial. Mais si l’on y regarde de plus près, on s’aperçoit qu’il est marqué par un manque de clarté, de cohérence et d’harmonisation qui empêche de progresser plus rapidement.

À l’avenir, le gouvernement fédéral devra prendre des mesures spécifiques pour atteindre les objectifs suivants :

  • Finaliser de toute urgence les règles du jeu, notamment en ce qui concerne le Règlement sur l’électricité propre (REP) et les programmes de CII, afin que la planification puisse être validée et que les décisions d’investissement puissent progresser
  • Déterminer clairement la marche à suivre, une série de trajectoires et de feuilles de route pour les différentes régions du pays, afin que tous les acteurs du secteur de l’électricité puissent planifier efficacement et limiter les erreurs coûteuses
  • Veiller à ce que les mandats des principales institutions soient alignés sur les besoins de la transition électrique, de manière à ce qu’elles travaillent en harmonie et non à contre-courant
  • Offrir suffisamment de souplesse afin que chaque région puisse définir la trajectoire la plus logique en fonction de sa situation, même si toutes les régions œuvrent à la réalisation du même objectif final
  • Veiller à ce que les données soient transparentes et facilement accessibles afin de faciliter une analyse et une planification adéquates et de renforcer la confiance et la coopération entre les différents ordres de gouvernement

Bien que le Conseil reconnaisse l’importance de trouver un équilibre entre une prise de décision réfléchie et une prise de décision rapide, il est essentiel d’accélérer la mise en œuvre des politiques de carboneutralité pour permettre aux personnes qui prennent des décisions d’investissement importantes d’avancer en connaissance de cause, principalement compte tenu de l’objectif fixé par le gouvernement fédéral pour 2035, à savoir un réseau électrique carboneutre.

Clarté des politiques aujourd’hui et à l’avenir

Constatations

Une orientation politique claire est cruciale pour permettre aux investisseurs, aux planificateurs et aux décideurs de mener à bien la transition énergétique

La clarté des politiques et des règlements est une condition préalable essentielle pour faciliter les investissements rentables visant à développer le secteur de l’électricitéNote de bas de page 70.

Le contexte politique actuel du Canada nécessite de toute urgence davantage de clarté pour permettre aux investisseurs, aux planificateurs, aux nations et collectivités autochtones, ainsi qu’aux autres décideurs de faire des choix judicieux en matière d’électrification, aujourd’hui et à l’avenir. En l’absence d’orientations plus précises sur les politiques et les trajectoires les mieux adaptées à la course vers l’atteinte des objectifs climatiques du Canada, les investisseurs pourraient hésiter à financer des projets au Canada. Non seulement la clarté des politiques est essentielle pour attirer les capitaux, mais elle améliorera également la compétitivité et renforcera l’efficacité du commerce international (voir la recommandation 15).

Le Conseil estime que les feuilles de route en matière d’énergie sont des outils essentiels permettant aux provinces et aux territoires de clarifier leurs politiques

Les feuilles de route en matière d’énergie sont des stratégies globales élaborées par les gouvernements provinciaux ou territoriaux qui exposent leur vision indépendante de l’évolution de leurs filières énergétiques en vue d’atteindre les objectifs climatiques d’ici 2050, en tenant compte des jalons quinquennaux et du point de vue des titulaires de droits autochtones. Elles fournissent des orientations aux organismes de réglementation et aux autres acteurs du marché sur la manière dont les gouvernements provinciaux ou territoriaux entendent gérer leur transition énergétique. Ces feuilles de route, lorsqu’elles s’appuient sur une modélisation complète des coûts et des compromis des différentes options, peuvent orienter les services publics, les organismes de réglementation, les investisseurs, les nations et collectivités autochtones, les promoteurs et les autres intervenants dans le choix des projets à entreprendre ou à soutenir. Les feuilles de route peuvent également aider les décideurs à classer les projets par ordre de priorité, par exemple en désignant certains projets comme étant d’intérêt national et méritant une approbation rapide.

Certaines administrations canadiennes utilisent déjà ces outils. À titre d’exemple, la feuille de route du gouvernement de l’OntarioNote de bas de page 71 examine l’état actuel du réseau électrique de la province et présente les moyens de le faire évoluer pour répondre aux besoins des années 2030 et 2050.

Les feuilles de route de ce type permettent de clarifier les politiques et d’asseoir les décisions réglementaires sur une base raisonnable. Par conséquent, elles sont essentielles à l’élaboration d’un mandat intégrant des objectifs climatiques pour les services publics de la Couronne, les organismes de réglementation, les opérateurs de réseaux et les autorités chargées de délivrer les permis et des approbations.

« De nombreux défis liés à l’élargissement du mandat des organismes de réglementation économiques pourraient être atténués par des politiques claires, des évaluations des trajectoires ou des feuilles de route en matière d’énergie carboneutre ». [Notre traduction]

Commission des services publics et d’examen de la Nouvelle-Écosse

Les évaluations des trajectoires peuvent contribuer à l’élaboration de feuilles de route en matière d’énergie

Les évaluations des trajectoires sont des études sur l’activité économique commandées ou élaborées par les gouvernements provinciaux et territoriaux afin d’éclairer la planification et la politique concernant la filière énergétique. Ces évaluations consistent à analyser les scénarios de ressources et les options de développement de la filière énergétique disponibles dans une région afin de s’aligner sur les objectifs climatiques, ce qui permet d’éclairer l’élaboration des feuilles de route en matière d’énergie. Elles peuvent également aider les gouvernements, les services publics, les organismes de réglementation et d’autres acteurs à dégager un consensus sur les compromis et les coûts, à évaluer les options et à déterminer les mesures prioritaires. Certaines provinces, dont le Québec et l’Ontario, s’appuient déjà sur l’évaluation des trajectoires pour orienter leur planification stratégiqueNote de bas de page 72,Note de bas de page 73.

Les évaluations des trajectoires viennent en complément des évaluations mieux ventilées réalisées par les services publics ou les opérateurs de réseaux. Elles peuvent être effectuées par chaque administration ou à un niveau régional plus large. Les évaluations menées au niveau régional peuvent contribuer à recenser des possibilités qui ne seraient pas manifestes sans une perspective régionale. Les évaluations peuvent également intégrer les ressources énergétiques distribuées (RED) et la GAD afin d’orienter la prise de décision de manière à refléter au mieux le rôle que toutes les options peuvent jouer.

Feuilles de route en matière d’énergie et évaluations des trajectoires

Les feuilles de route en matière d’énergie et les évaluations des trajectoires sont des outils importants à la disposition des provinces et des territoires pour clarifier les politiques de décarbonation de leurs filières énergétiques.

  • Une évaluation de trajectoire est une étude complète de toutes les trajectoires énergétiques crédibles permettant d’atteindre des objectifs de carboneutralité à une date donnée.
  • Une feuille de route en matière d’énergie est un document d’orientation qui permet de convertir les priorités gouvernementales en orientations concrètes pour les services publics et les opérateurs de réseaux. De même, elle fournit des orientations stratégiques permettant aux organismes de réglementation de prendre des décisions éclairées et cohérentes. Les feuilles de route comprennent des objectifs spécifiques et des mesures y afférentes.

Recommandation 1 : Accélérer la clarification des règles essentielles de la politique en matière d’électricité

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral d’accélérer la mise en place de cadres politiques et réglementaires, ainsi que de mesures fiscales et commerciales liées aux réseaux électriques, afin de clarifier les objectifs climatiques et de soutenir leur réalisation par le biais de cadres redditionnels relatifs au climat. Il s’agit notamment du Règlement sur l’électricité propre, des CII, du système de tarification fondé sur le rendement, des mesures fiscales et commerciales, de la Loi sur l’évaluation d’impact et d’autres mesures visant à stimuler l’électrification et l’expansion des réseaux électriques nécessaires pour la soutenir.

Détails sur la mise en œuvre

  1. Accélérer la mise en œuvre de plusieurs politiques et examens en cours qui ont une incidence sur l’offre d’électricité :
    1. Apporter des éclaircissements sur les derniers détails du Règlement sur l’électricité propre (REP) après avoir mené les consultations nécessaires et prévu une certaine souplesse d’ici à la fin de 2024
    2. Finaliser les CII pour les technologies propres et l’électricité propre au plus tard en décembre 2024
    3. Déposer devant le Parlement des modifications à la Loi sur l’évaluation d’impact d’ici mars 2025
    4. Entreprendre un examen immédiat du traitement de la production d’énergie dans le cadre du système fédéral de tarification fondé sur le rendement (STFR), avant l’examen plus général de ce dernier prévu pour 2026Note de bas de page 74
  2. Tenir à jour les politiques qui favorisent l’électrification au moyen de méthodes flexibles et rentables et, le cas échéant, déterminer les exigences futures et les rôles respectifs de ces politiques. Il s’agit notamment de politiques telles que :
    1. la taxe sur les carburants liée à la tarification du carbone
    2. les subventions et autres types d’aides (par exemple l’efficacité énergétique des bâtiments, les pompes à chaleur, les véhicules électriques)
    3. les codes et les normes (par exemple, les mandats pour les véhicules sans émissions, les normes relatives aux électroménagers [voir la recommandation 26] et les modifications proposées au code canadien de l’électricité [voir la recommandation 17])

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les administrations infranationales peuvent contribuer à la clarification des politiques fédérales en travaillant de manière collaborative et constructive avec le gouvernement fédéral par le biais de mécanismes de coopération et de consultations.

Recommandation 2 : Encourager l’élaboration de feuilles de route en matière d’énergie

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral d’encourager et de soutenir l’élaboration de feuilles de route provinciales et territoriales en matière d’énergie en vue d’obtenir une filière énergétique carboneutre d’ici 2050, d’y inclure les perspectives autochtones et, dans l’idéal, de s’appuyer sur des évaluations de trajectoires.

Détails sur la mise en œuvre

Pour aider les provinces et les territoires à élaborer leurs feuilles de route en matière d’énergie, le gouvernement fédéral doit :

  1. Participer régulièrement à des forums avec les décideurs politiques régionaux, les services publics, les organismes de réglementation et les titulaires de droits autochtones afin de partager les leçons apprises et de définir les pratiques exemplaires.
  2. Partager les pratiques exemplaires et fournir des orientations sur les renseignements à inclure dans les feuilles de route en matière d’énergie (voir la recommandation 6). Ces orientations devraient inclure des éléments clés de la feuille de route, tels que la détermination d’étapes quinquennales, une harmonisation entre les acteurs de la filière énergétique, y compris l’électricité et le gaz, la délimitation du champ d’application de manière à englober toutes les filières énergétiques, l’élaboration d’un processus d’engagement participatif et la prise en compte des besoins du marché du travail (voir l’annexe A).
  3. Apporter davantage de soutien (au-delà du seul financement) aux administrations et aux collectivités qui disposent de moins d’expertise et de ressources pour élaborer des feuilles de route en matière d’énergie.
  4. Lorsque des feuilles de route sont disponibles, le gouvernement fédéral devrait utiliser ces ressources pour éclairer ses initiatives d’élaboration de politiques dans chaque région ou administration, y compris pour définir les projets d’électricité propre d’intérêt canadien (voir la recommandation 9 et la recommandation 19).

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Pour aider le gouvernement fédéral à élaborer des politiques qui tiennent compte des besoins et des capacités variables des différentes administrations, les provinces et les territoires peuvent s’engager à produire et tenir à jour les feuilles de route en matière d’énergie à l’échelle des administrations et/ou des régions qui décrivent leurs plans concernant la filière énergétique sur des périodes de 5 ans à l’intention des intervenants provinciaux et territoriaux, et à en rendre compte régulièrement. Les provinces et les territoires détermineraient les trajectoires et les détails les plus pertinents à inclure dans les feuilles de route en matière d’énergie, en fonction des ressources dont ils disposent, y compris les possibilités liées au transport interrégional. (Les recommandations concernant les renseignements à inclure dans ces feuilles de route sont présentées à l’annexe A).

Recommandation 3 : Promouvoir l’évaluation des trajectoires afin d’éclairer les feuilles de route en matière d’énergie

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral de soutenir les provinces, les territoires, ainsi que les nations et collectivités autochtones dans l’élaboration et la mise à jour régulière d’évaluations de trajectoires économiques qui explorent les voies disponibles et crédibles pour parvenir à une économie carboneutre d’ici 2050. Ces trajectoires peuvent étayer l’élaboration de feuilles de route en matière d’énergie et offrir des possibilités de coopération interrégionale.

Détails sur la mise en œuvre

Le gouvernement fédéral peut jouer un rôle de catalyseur à travers les actions suivantes :

  1. Soutenir l’élaboration et la mise à jour régulières des évaluations des trajectoires à l’échelle des administrations et/ou des régions et contribuer à la coordination et à la réalisation d’évaluations qui prennent en compte les trajectoires interrégionales et d’autres possibilités, en apportant notamment un soutien financier en vue de la participation effective des Autochtones.
  2. Encourager les administrations, les services publics, les opérateurs de réseaux, les organismes de réglementation, ainsi que les nations et collectivités autochtones à participer à des forums où ils peuvent partager les leçons apprises. Le gouvernement fédéral peut financer et/ou organiser des forums à l’appui des efforts visant à préserver la fiabilité du réseau, à améliorer la résilience du système, à garantir la rentabilité et à favoriser le déploiement de technologies et de pratiques novatrices.
  3. Faciliter l’élaboration, la détermination et le partage des pratiques exemplaires en matière d’évaluation des trajectoires, de manière à en améliorer la qualité et à en accélérer le développement (voir l’annexe A).

Trajectoires du Nouveau-Brunswick vers la carboneutralité

Le gouvernement provincial du Nouveau-Brunswick a réalisé son évaluation des trajectoires des réseaux électriques dans le document intitulé Trajectoires vers la carboneutralité en 2023Note de bas de page 75. L’évaluation porte sur les options dont dispose la province pour atteindre son objectif de carboneutralité à l’échelle de l’économie à l’aide de l’électricité, de la bioénergie, de l’hydrogène et des sources d’émissions de nature non énergétique disponibles. L’évaluation a révélé que le pari le plus sûr pour toutes les trajectoires vers la carboneutralité consistait à utiliser des énergies à faible teneur en carbone, des énergies renouvelables et des systèmes de stockage pour répondre à la majeure partie des nouvelles demandes d’électricité dans la province. L’élimination du carbone est considérée comme nécessaire pour contrebalancer les émissions résiduelles, et l’économie de la province devrait continuer à croître parallèlement à la poursuite de cet objectif.

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les gouvernements provinciaux, territoriaux et municipaux peuvent collaborer avec les services publics, les organismes de réglementation et les opérateurs de réseaux pour réaliser des évaluations de trajectoires à l’échelle de l’économie qui complètent les évaluations mieux ventilées que certains de ces acteurs peuvent produire. Les ressources disponibles dans leurs administrations pourraient contribuer à éclairer des avis impartiaux sur les possibilités et les défis, ainsi qu’à garantir la prise en compte des perspectives autochtones, conformément aux objectifs de réconciliation du Canada.

Des mandats cohérents avec les objectifs climatiques

Constatations

Les cadres réglementaires et de gouvernance doivent être mis à jour

Pour aligner les réseaux électriques sur les objectifs climatiques, toute une série d’institutions publiques, y compris les organismes de réglementation de l’énergie, doivent coordonner leurs processus et leurs mandats. Quelquefois, les objectifs en matière de changements climatiques ne sont pas explicitement inclus dans les mandats des organismes de réglementation, ce qui peut constituer un obstacle à l’approbation de projets alignés sur les objectifs de carboneutralité. En conséquence, les organismes peuvent parfois fonctionner à contre-courant, chacun protégeant son domaine de compétence, ralentissant ainsi l’avancement des projets par manque de certitude.

Il est essentiel d’aligner les cadres réglementaires et de gouvernance qui régissent les décideurs canadiens en matière d’énergie sur les priorités actuelles, notamment la carboneutralité, pour parvenir au rythme, à l’échelle et à l’innovation qu’exigera une transition énergétique rentable.

« L’évolution du modèle réglementaire traditionnel du moindre coût vers un modèle qui valorise les avantages sociaux liés au climat sera peut-être le catalyseur le plus important pour accélérer la transition vers l’énergie propre. » [Notre traduction]

Fortis Inc.

Au Canada, les gouvernements provinciaux et territoriaux ont compétence en matière d’énergie sur leur territoire. Certaines provinces ont commencé à aligner les mandats de leurs organismes de réglementation (et/ou des services publics) sur les objectifs de carboneutralité. En effet, la Nouvelle-Écosse s’y est récemment attelée et au moins deux autres devraient faire de même au cours de l’année à venir.

S’il est impératif d’aligner les mandats des organismes de réglementation et de la Couronne dans toutes les provinces et tous les territoires, le gouvernement fédéral doit également faire sa part. À l’heure actuelle, les objectifs de carboneutralité ne figurent pas dans les mandats des principaux organismes de réglementation fédéraux impliqués dans le développement des projets d’électricité, notamment la Régie de l’énergie du Canada (REC), la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) et Pêches et Océans Canada (MPO).

Le MPO est un bon exemple : ses exigences en ce qui concerne l’étude des impacts sur les populations de poissons liés au développement de l’hydroélectricité ou de l’énergie marémotrice doivent notamment être évaluées par rapport à la menace que représentent les effets néfastes des changements climatiques pour certaines espèces de poissonsNote de bas de page 76. Le ministère pourrait donc avoir besoin d’être guidé dans la recherche d’un équilibre entre la protection des pêcheries et l’absence d’obstacles démesurés au développement des énergies renouvelables en mer.

Un examen des politiques climatiques et énergétiques dans les administrations présentant d’importantes similitudes avec le CanadaNote de bas de page 77 a révélé que certaines d’entre elles commencent à élargir le mandat de leurs organismes de réglementation de l’énergie. Le Royaume-Uni, par exemple, a adopté une nouvelle loi qui prévoit la modification des obligations de son organisme de réglementation de l’énergieNote de bas de page 78 afin d’y inclure des objectifs de carboneutralité et les bilans de carbone sur 5 ans.

Réforme du régime de réglementation de l’énergie au Royaume-Uni

En 2023, le gouvernement britannique a adopté la loi sur l’énergie pour transformer la filière énergétique du pays, en renforçant la sécurité énergétique, en soutenant la réalisation des objectifs de carboneutralité et en veillant à ce que les factures d’énergie des ménages soient abordables à long termeNote de bas de page 79. En outre, la loi vise à modifier les obligations de l’organisme de réglementation de l’énergie britannique afin de mentionner les objectifs de carboneutralité et les bilans de carbone sur cinq ans énoncés dans la loi sur le changement climatique du pays (2008). L’organisme de réglementation est ainsi tenu d’examiner la manière dont ses décisions peuvent aider le secrétaire d’État à atteindre l’objectif de carboneutralité fixé par le gouvernement, tout en protégeant les intérêts des consommateurs actuels et futurs. À la mi -2024, l’organisme de réglementation et le gouvernement britannique lanceront une société publique indépendante chargée de planifier la production d’électricité et de gaz dans le paysNote de bas de page 80.

Recommandation 4 : Aligner les mandats des autorités compétentes sur les objectifs de carboneutralité

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral, ainsi qu’aux gouvernements de l’ensemble du Canada, de mettre à jour et de clarifier les mandats des principales autorités, notamment les services publics, les organismes de réglementation de l’énergie, les opérateurs de réseaux et les autorités chargées de délivrer les permis et les approbations, afin que ceux-ci incluent l’objectif de carboneutralité, en plus de leurs objectifs.

Détails sur la mise en œuvre

Aux fins de mise en œuvre, le gouvernement fédéral devrait procéder comme suit :

  1. Modifier les mandats des entités réglementaires fédérales (la REC, la CCSN, MPO, Environnement et Changement climatique Canada [ECCC]) au moyen de directives, d’ordonnances ou (idéalement) d’une mise à jour des lois habilitantes, afin d’inclure l’objectif de carboneutralité dans leurs mandats réglementaires respectifs.
  2. Veiller à ce que les objectifs et les programmes des sociétés d’État telles qu’Exportation et développement Canada, la Banque de l’infrastructure du Canada (BIC) et la Corporation de développement des investissements du Canada tiennent compte des objectifs climatiques.
  3. Encourager et soutenir les provinces et les territoires désireux de confier des mandats similaires à leurs services publics, à leurs opérateurs de réseaux et à leurs organismes de réglementation, et les aider à déterminer les pratiques exemplaires en la matière (voir l’annexe A).
  4. Fournir aux autorités compétentes les ressources (financières et humaines) et les orientations politiques nécessaires, notamment les feuilles de route en matière d’énergie et les évaluations des trajectoires, pour qu’elles puissent s’acquitter de ces mandats actualisés.
  5. Ajouter des spécificités supplémentaires concernant la manière dont les autorités compétentes pourraient remplir ces mandats; par exemple, des ordonnances à l’intention des organismes de réglementation de l’électricité qui les obligeraient à prendre en compte de nouvelles ressources importantes en plus de la production, du transport et de la distribution dans leur prise de décision, y compris les RED et les mesures axées sur la demande.

La Nouvelle-Écosse aligne les mandats des organismes de réglementation sur les objectifs de carboneutralité

Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a créé en 2023 un groupe de travail sur les solutions d’électricité propre (Clean Electricity Solutions Task Force) afin d’étudier les moyens de moderniser le réseau électrique et le cadre réglementaire de la provinceNote de bas de page 81. Le groupe de travail a proposé de nombreux changements visant à moderniser le régime de réglementation de la Nouvelle-Écosse, notamment l’alignement sur les objectifs de réduction des émissions imposés par la loi, la mise en place d’un opérateur indépendant de la filière énergétique, la mise en œuvre des modifications en vue de l’adoption d’une approche holistique de la gestion des réseaux électriques, et l’amélioration de la politique relative aux coûts abordables de l’électricité résidentielle.

Sur les conseils du groupe de travail, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a adopté sa Loi sur la réforme de l’énergie en 2024, créant deux nouvelles lois et abrogeant l’ancienne Loi sur les services publics et le conseil d’examenNote de bas de page 82. Les changements comprennent la création immédiate d’un nouveau conseil de l’énergie de la Nouvelle-Écosse, chargé de prendre en compte les objectifs en matière d’environnement et de changements climatiques dans ses décisions. De plus, la nouvelle loi prévoit également la mise en place d’un opérateur de système indépendant chargé de l’approvisionnement en nouvelles énergies et de veiller à l’intégration des projets d’énergie renouvelable, qui devrait être opérationnel d’ici la fin de l’année 2025Note de bas de page 83.

Certaines provinces revoient actuellement les mandats de leurs organismes de réglementation dans la même optique d’alignement sur les objectifs de carboneutralité.

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les gouvernements provinciaux et territoriaux peuvent inclure un objectif de carboneutralité dans les mandats et les priorités de leurs organismes compétents, donnant ainsi une orientation au niveau provincial et territorial et s’alignant sur les changements au niveau fédéral pour coordonner les efforts en vue d’atteindre l’objectif commun. Les gouvernements provinciaux et territoriaux pourraient également fournir les ressources (financières et humaines) et les orientations politiques nécessaires (y compris les feuilles de route en matière d’énergie et les évaluations des trajectoires) pour remplir ces mandats actualisés.

Offrir une certaine souplesse aux administrations dans l’ensemble du Canada

Constatations

Une souplesse insuffisante peut nuire à l’atteinte des objectifs plus généraux de carboneutralité en influant sur les coûts, la fiabilité et le rythme de l’électrification

Les pressions auxquelles chaque province et territoire est confronté dans le cadre de la transition énergétique varient considérablement. Tout en restant concentré sur ses objectifs globaux de carboneutralité, le gouvernement fédéral devrait veiller à ce que les provinces et les territoires disposent d’une certaine souplesse dans le cadre des politiques fédérales pertinentes, pour décider des moyens d’atteindre ces objectifs, ainsi que pour élaborer et mettre en œuvre leurs propres politiques en tenant compte de leurs effets uniques sur chaque région.

« Les provinces et les territoires ont des considérations uniques en matière d’offre et de demande. Une solution universelle ne conviendra pas à tous. » [Notre traduction]

Gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador

Selon le Conseil, par exemple, la version initiale du règlement sur l’électricité propreNote de bas de page 84 n’offrait pas suffisamment de souplesse aux services publics, aux opérateurs de réseaux et aux acteurs du marché pour atteindre l’équilibre escompté entre la décarbonation, les coûts et la fiabilité. Cela pourrait entraîner des pressions sur les coûts ou des risques pour la fiabilité qui compromettraient la réalisation des objectifs plus généraux de carboneutralité, principalement en raison des incidences sur le rythme et l’ampleur de l’électrification des utilisations actuelles de l’énergie non électrique. Le Conseil souligne que le gouvernement fédéral a reconnu qu’une plus grande souplesse était nécessaire dans la mise à jour de son processus de consultation publiée en février 2024, mais que les règlements définitifs n’ont pas encore été publiés.

De même, les conditions initiales des CII pour l’électricité propre proposées dans le budget fédéral 2023Note de bas de page 85 comprenaient l’obligation pour une autorité compétente dans chaque province et territoire de prendre certains engagementsNote de bas de page 86 afin que les entités de ces administrations puissent demander les crédits d’impôt. Le gouvernement fédéral a révisé ces conditions dans son budget 2024, en limitant les conditions relatives à un approvisionnement en électricité carboneutre d’ici 2035 aux sociétés d’État et à leurs administrations respectives. Le Conseil estime que de nouvelles révisions sont justifiées (voir recommandation 6).

Recommandation 5 : Privilégier la souplesse dans l’élaboration des politiques

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral, lors de l’élaboration et de la mise en œuvre de politiques ayant une incidence sur le secteur de l’électricité, de donner la priorité aux mécanismes de souplesse dans la mesure du possible, tout particulièrement dans les administrations confrontées à des fardeaux financiers disproportionnés et à des défis liés à la fiabilité.

Détails sur la mise en œuvre

Aux fins de l’atteinte de ses objectifs, le gouvernement fédéral devrait procéder comme suit :

  1. Veiller à ce que la version publiée du Règlement sur l’électricité propre offre une meilleure souplesse aux entités visées par rapport à sa version initiale
  2. Examiner et atténuer les incidences en aval à mesure que des dispositions plus strictes et plus cohérentes sont introduites dans l’ensemble de la politique climatique fédérale, notamment la prise en compte des collectivités autochtones, nordiques et éloignées dans l’élaboration des politiques afin d’obtenir des résultats de carboneutralité équitables

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les provinces et les territoires peuvent collaborer activement avec le gouvernement fédéral afin de déterminer leurs besoins et exigences spécifiques en matière de souplesse de la politique climatique. En outre, ils peuvent élaborer des feuilles de route en matière d’énergie (voir la recommandation 2), idéalement soutenues par des évaluations des trajectoires (voir la recommandation 3), qui peuvent éclairer la manière dont les objectifs communs peuvent être atteints d’une manière qui soit plus conforme aux besoins provinciaux.

Recommandation 6 : Mettre l’accent sur les conditions des crédits d’impôt à l’investissement dans les feuilles de route en matière d’énergie

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral de modifier la condition proposée pour que les sociétés d’État provinciales et territoriales aient accès aux CII pour l’électricité propre en remplaçant la proposition actuelle, à savoir un gouvernement provincial ou territorial s’engageant publiquement à œuvrer en faveur de la mise en place d’un réseau électrique carboneutre d’ici 2035 et démontrant que les avantages profitent aux contribuables, par la seule exigence consistant à élaborer et à publier des feuilles de route en matière d’énergie dirigées par le gouvernement provincial ou territorial et alignées sur les objectifs de 2050.

Détails sur la mise en œuvre

  1. Le gouvernement fédéral devrait modifier la condition actuellement proposée relative aux CII pour l’électricité propre, selon laquelle un gouvernement provincial ou territorial doit s’engager à mettre en place un réseau électrique carboneutre d’ici 2035, afin de mettre l’accent sur l’élaboration de feuilles de route en matière d’énergie visant à mettre en place une filière énergétique carboneutre d’ici 2050. La modification de la condition des CII pour l’aligner sur la transition énergétique plus large permet aux gouvernements provinciaux et territoriaux de se concentrer sur la réduction des émissions dues à la consommation d’énergie en général, plutôt que de se limiter aux émissions dues à la production d’électricité. Cette approche pragmatique serait plus à même de favoriser une prise de décision conforme aux objectifs climatiques, tout en offrant aux administrations la souplesse nécessaire pour définir les trajectoires vers la réalisation de ces objectifs.
  2. Le gouvernement fédéral devrait supprimer la condition exigeant de démontrer que les CII profiteront aux contribuables. Le Conseil fait remarquer que cette condition n’est pas nécessaire (les structures réglementaires et de marché des provinces et des territoires visent déjà à garantir que les économies réalisées profitent aux consommateurs) et qu’elle n’est pas pratique dans sa formulation actuelle.

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Conformément à cette approche et à la recommandation 2, les administrations peuvent élaborer et publier des feuilles de route en matière d’énergie afin de faciliter l’accès de leurs services publics aux CII. De par sa conception, cette condition modifiée d’accès aux CII pour l’électricité propre reconnaît la compétence des provinces et des territoires sur les filières énergétiques, y compris leur pouvoir discrétionnaire sur les stratégies et les trajectoires qu’ils adoptent. En outre, cette condition plus souple tient implicitement compte de la diversité des filières énergétiques, des ressources disponibles et des considérations distinctes que chaque administration doit prendre en compte dans ses plans.

Transparence des données et confiance

Constatations

La transparence de la modélisation fédérale est une nécessité

La modélisation et les données sont utilisées pour éclairer la planification opérationnelle, l’élaboration des politiques et les décisions d’investissement. En effet, les fonctionnaires fédéraux s’appuient sur des modèles économiques et techniques de l’électricité pour étayer leurs décisions politiques. De même, les services publics et les opérateurs de réseaux utilisent des modèles techniques plus détaillés pour orienter leurs opérations quotidiennes, la planification des systèmes et les décisions d’investissement.

La confiance dans les modèles, les données d’intrants et les hypothèses utilisées pour éclairer les politiques publiques et les investissements dans le secteur de l’électricité est essentielle pour maintenir la confiance de l’industrie et du public dans la prise de décision et pour renforcer la certitude politique. Malheureusement, les préoccupations relatives à la confidentialité et à la sécurité limitent souvent la disponibilité et le partage des données entre les intervenants du secteur, ce qui nuit à l’élaboration de politiques efficaces, contribue à la confusion et à la frustration du secteur à l’égard du processus décisionnel fédéral, mine la confiance dans les décisions politiques et d’investissement du gouvernement fédéral et des services publics et accroît l’incertitude des investisseurs. En outre, les données sur l’intensité du carbone, qui sont de plus en plus importantes, ne sont pas disponibles actuellement en ce qui concerne les réseaux électriques au Canada.

Les intervenants ont exprimé leur frustration face au manque de transparence des données utilisées par le gouvernement fédéral pour prendre ses décisions. Malgré les engagements pris avec les provinces, les territoires et les acteurs du secteur, les fonctionnaires fédéraux refusent ou limitent parfois l’accès aux données, aux modèles et aux intrants utilisés dans ces exercices.

Le partage des données peut favoriser la collaboration et orienter les progrès

Les cadres de partage de données ouvertes peuvent favoriser l’innovation et accroître les possibilités d’investissement. L’utilisation croissante de la connectivité et de l’intelligence artificielle crée à la fois de nouvelles possibilités et des risques accrus pour les acteurs existants et nouveaux de l’industrie de l’électricitéNote de bas de page 87. Un meilleur accès à des données sécurisées sur les filières énergétiques, comme c’est le cas dans d’autres économies avancées, peut permettre de surmonter les obstacles au développement de la technologie de l’électricité, à l’innovation du marché, ainsi qu’à la planification et à la mise en œuvre de solutions. Il peut également encourager une participation plus importante des intervenants et l’augmentation des investissements dans l’énergie distribuée et dans d’autres technologies d’électricité permettant de réduire les coûts et de s’aligner sur l’objectif de carboneutralitéNote de bas de page 88.

L’électricité relève de la compétence des provinces et des territoires et il est important que ces derniers suivent leurs propres progrès. Toutefois, le gouvernement fédéral est responsable de la supervision des progrès nationaux. De plus, le partage de rapports d’étape au niveau national renforce la sensibilisation des partenaires de la transition, notamment en ce qui concerne les domaines où les progrès sont à la traîne et où davantage d’attention est nécessaire.

Il existe des mesures permettant d’évaluer les différents aspects de l’écosystème électrique canadien, supervisées par divers gouvernements nationaux et infranationaux et par des organisations de la société civile. Il serait opportun de disposer d’un guichet unique pour ces mesures au niveau national, afin d’accélérer la réalisation des objectifs de carboneutralité et d’abordabilité, de garantir la fiabilité du réseau, d’améliorer la confiance des investisseursNote de bas de page 89Note de bas de page 90 et de veiller à la parité tarifaire entre les différentes administrations.

La normalisation et le partage de données, de modèles, d’intrants et d’hypothèses de haute qualité, ouverts et transparents, d’une manière sûre et négociée, peuvent également améliorer la modélisation et la prise de décision réglementaire et politique. Cela renforce la confiance du secteur privé et du public dans les politiques fédérales, favorise une participation plus large des intervenants au marché de l’électricité et permet des discussions plus éclairées et plus transparentes entre les intervenants du secteur de l’électricitéNote de bas de page 91Note de bas de page 92,Note de bas de page 93.

Recommandation 7 : Favoriser l’ouverture et la transparence des données, ainsi que de la modélisation

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral ce qui suit : (i) mettre à la disposition du public, de manière ouverte et transparente, ses modèles économiques et de réseau électrique, ainsi que les données, les hypothèses et les autres données d’intrants des modèles qui s’y rapportent; (ii) collaborer avec les provinces, les territoires, les services publics (y compris les entreprises publiques, privées et autochtones) et les opérateurs de réseaux électriques, et envisager la possibilité de recourir aux autorités fédérales, pour élaborer et mettre en œuvre des méthodes de collecte, de regroupement et de publication des données sur les réseaux électriques, d’une manière conforme aux exigences en matière de confidentialité et de fiabilité des systèmes, et qui rend les données canadiennes ouvertes et accessibles d’une manière similaire à celle des autres économies avancées; et (iii) financer des entités de soutien aux fins de favoriser la collaboration et la mise en œuvre d’approches communes pour la collecte, l’agrégation et la publication de données sur les réseaux électriques.

Détails sur la mise en œuvre

Pour mettre en œuvre la recommandation, le gouvernement fédéral doit notamment :

  1. Enjoindre aux ministères et organismes fédéraux qui ont élaboré et géré à l’interne des modèles d’économie, d’énergie et de réseaux électriques de rendre systématiquement ces modèles, leurs hypothèses sous-jacentes et leurs données accessibles au public de manière ouverte, transparente et cohérente, conformément à la Directive du gouvernement fédéral de 2014 sur le gouvernement ouvertNote de bas de page 94.
  2. Enjoindre aux ministères et organismes fédéraux d’utiliser les mêmes données et hypothèses pour des modèles similaires dans tous les ministères et organismes fédéraux, lors de l’évaluation et de la conception de mesures politiques de même nature dans les domaines de l’économie, de l’énergie et des réseaux électriques (par exemple, l’impact du Règlement sur l’électricité propre sur les opérations et les coûts du réseau électrique devrait être modélisé à l’aide des mêmes hypothèses d’intrants technologiques).
    1. Les ministères et organismes fédéraux devraient en outre être tenus d’expliquer toute différence entre leurs intrants, hypothèses et résultats de modélisation uniques, le cas échéant (notamment les différences entre les modèles d’ECCC et de la REC).
  3. Convoquer les provinces et les territoires, les services publics et les organismes de réglementation pour élaborer des formats et des approches de collecte et de publication de données sur l’électricité qui soient communs, en temps quasi réel et sécurisés, tout en respectant les exigences en matière de sécurité des données, de confidentialité et de fiabilité des systèmes. Veiller à ce que les données soient publiées dans un emplacement commun et fiable, avec un accès contrôlé si nécessaire pour des raisons de sécurité, de confidentialité ou de fiabilité des systèmes, éventuellement par l’intermédiaire du Centre canadien d’information sur l’énergie (CCIE), en vertu des pouvoirs existants ou élargis conférés par la Loi sur la statistique.
    1. Envisager de lancer cette proposition de collaboration avec les provinces, les territoires, les services publics, les opérateurs de réseaux et les organismes de réglementation à l’occasion de la Conférence des ministres de l’Énergie et des Mines (CMEM).
  4. Examiner les politiques fédérales en vigueur, telles que la Loi sur la statistique, afin de déterminer les mécanismes déjà en place visant à garantir la disponibilité des données sur l’électricité pour améliorer la modélisation du secteur de l’électricité et des secteurs de l’énergie connexes et stimuler le développement et le déploiement de technologies novatrices sur le réseau.
  5. Prendre en compte les modèles de réseaux électriques (principalement les modèles d’expansion des capacités et de coûts de production détenus ou gérés par le gouvernement fédéral) et les données connexes lors de la mise en œuvre de la Stratégie de données pour la fonction publique fédéraleNote de bas de page 95 ainsi que des politiques et directives connexes.
  6. Élargir le financement, conjointement avec les nouvelles activités de concertation susmentionnées, aux entités suivantes :
    1. Les organisations de collecte de données et de modélisation, notamment le Carrefour de modélisation énergétiqueNote de bas de page 96, mais aussi d’autres organisations reconnues au Canada, afin de promouvoir une modélisation, des données et des hypothèses ouvertes et transparentes, de collaborer étroitement avec les services publics et les opérateurs de réseaux électriques, et de renforcer l’expertise et la collaboration en matière de modélisation au Canada.
    2. Les organisations de collaboration entre organismes de réglementation, notamment CAMPUT, pour aider ces derniers à collaborer sur des approches réglementaires qui permettent d’améliorer la collecte et la publication de données ouvertes et transparentes.

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les gouvernements provinciaux et territoriaux pourraient être amenés à demander aux autorités compétentes de leurs services publics d’électricité, opérateurs de réseaux et organismes de réglementation respectifs de collaborer avec le gouvernement fédéral sur le recensement, la communication et la normalisation des données.

Les services publics et les opérateurs de réseaux devront collaborer avec leurs gouvernements provinciaux ou territoriaux respectifs et avec les autorités fédérales pour mettre en œuvre des ententes juridiques, des politiques ou des protocoles de sécurité des données et de confidentialité, ainsi que d’autres aspects commerciaux, juridiques et techniques potentiels afin d’éclairer leur participation.

Les organismes de réglementation devront peut-être superviser et approuver la participation des services publics et des opérateurs de réseaux à une initiative d’ouverture et de transparence des données et de la modélisation, et fournir des ressources, des données, des modèles et d’autres intrants pour cette initiative, le cas échéant.

Recommandation 8 : Mettre en place des indicateurs pour suivre les progrès nationaux

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral de définir ou d’améliorer les indicateurs de suivi des progrès et les mesures connexes afin de fournir une vision complète et transparente de la situation nationale et des progrès accomplis : (i) la réduction des émissions; (ii) la fiabilité du réseau; (iii) la réconciliation avec les Autochtones; (iv) l’abordabilité et la parité tarifaire dans l’ensemble du Canada. Cette recommandation devrait inclure le regroupement et la publication des mesures existantes sur un portail Web fédéral unique. Ces outils de suivi permettraient également de recenser les administrations qui ont besoin d’aide dans la course vers la carboneutralité.

Détails sur la mise en œuvre

Pour mettre en œuvre la recommandation, le gouvernement fédéral doit notamment :

  1. Déterminer et exploiter les mesures et les outils de suivi existants utilisés par les gouvernements fédéraux, infranationaux et autochtones, les services publics, les opérateurs de réseaux, les organismes de réglementation et les organisations de la société civile
  2. Déterminer et combler les lacunes des outils de suivi des progrès existants pour donner suite à cette recommandation, en élaborant notamment les nouvelles mesures et les nouveaux outils de suivi nécessaires
  3. Inclure des mesures propres aux territoires canadiens en tenant compte de leur situation particulière et de l’absence d’interconnexions avec le réseau continental nord-américain
  4. Étudier le concept de « portefeuille énergétique »Note de bas de page 97 et publier des estimations nationales, provinciales et territoriales, ainsi que des mises à jour régulières pour un « portefeuille énergétique » moyen.
  5. Fournir un référentiel Web centralisé du gouvernement du Canada qui répertorie les différents outils de suivi et les mesures connexes afin d’en faciliter l’accès aux Canadiens et aux investisseurs internationaux
  6. Proposer des ressources stables pour la mise en œuvre et la maintenance du référentiel Web et de tout nouveaux outils de suivi et toutes nouvelles mesures connexes nécessaires

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les provinces, les territoires, les services publics, les opérateurs de réseaux, les organismes de réglementation et les gouvernements autochtones devront collaborer afin de fournir des données pertinentes pour les mesures et les outils de suivi existants et nouveaux, le cas échéant.

L’industrie et les organisations de la société civile peuvent collaborer avec le gouvernement fédéral pour rationaliser la collecte et la mise à disposition de leurs outils de suivi et données de mesures existantes dans un référentiel fédéral unique.

Accélérer la croissance

Figure 19 : Illustration de l’impact directionnel des recommandations liées à l’étape « ACCÉLÉRER la croissance »

Graphique linéaire illustratif utilisant deux trajectoires de capacité installée (GW)
Version texte

Graphique linéaire illustratif utilisant deux trajectoires de capacité installée (GW), élevée et basse, pour montrer l’impact directionnel des recommandations liées à la mesure « ACCÉLÉRER la croissance ». Le texte suggère que des niveaux plus élevés de capacité installée d’électricité propre peuvent être atteints au fil du temps en supprimant les obstacles à l’autorisation de nouveaux projets, à l’attraction de capitaux et à la participation des Autochtones.

Pour atteindre les objectifs de carboneutralité du Canada, il faudra ajouter en moyenne 10 GW de nouvelle production d’énergie propre par anNote de bas de page 98. La mise en place de cette capacité de production, ainsi que du réseau et de l’infrastructure de stockage associés, nécessitera un changement radical du rythme d’expansion du réseau électrique.

En raison du nombre croissant d’exigences réglementaires fédérales, provinciales, territoriales et municipales, il est difficile d’obtenir l’approbation d’un projet dans les délais impartis.

Par le passé, le développement économique et la protection de l’environnement ont souvent été considérés comme des compromis. Pour développer l’électricité propre comme cela est nécessaire à l’heure actuelle, il faut changer de logique : pour protéger l’environnement de sa plus grande menace, les changements climatiques à l’échelle mondiale, les projets d’électricité propre doivent être réalisés plus fréquemment et plus rapidement que jamais auparavant.

En d’autres termes, sans une réforme systémique des processus d’approbation des projets essentiels de production d’électricité propre, la capacité du Canada à atteindre ses objectifs climatiques sera gravement compromise.

Il est primordial d’accélérer la mise en œuvre des projets d’électricité propre, mais cela ne suffit pas. Le Canada doit également développer ces projets de manière plus inclusive, en mettant particulièrement l’accent sur des partenariats plus solides avec les nations et collectivités autochtones. Le Canada a accompli des progrès considérables dans ce domaine au cours des dernières années, mais il reste encore beaucoup à faire, notamment orienter l’industrie, afin de s’assurer que cette nouvelle vague de croissance implique la pleine participation et le consentement des peuples autochtones du Canada.

Enfin, cette nouvelle vague de développement d’infrastructures nécessitera du capital et de la main-d’œuvre, à une époque où la concurrence mondiale pour ces deux éléments est rude, particulièrement dans le secteur de l’électricité propre. Pour réussir, le Canada devra s’appuyer sur des politiques financières, fiscales, commerciales et du travail, compétitives.

Un champion de la réforme des approbations de projets d’électricité propre

Constatations

Le gouvernement fédéral doit faire preuve d’un leadership systémique pour réformer ses politiques et se faire le champion des projets de développement de l’électricité propre

Partout dans le monde, les gouvernements modifient les processus de délivrance de permis et d’approbation des projets afin de raccourcir les délais et d’attirer les investissements dans les projets d’électricité propre. Aux États-Unis, par exemple, le gouvernement fédéral a publié un plan d’action visant à renforcer et à accélérer les processus fédéraux de délivrance des permis et les évaluations environnementalesNote de bas de page 99. Ce plan s’appuie sur une mesure antérieure visant à soutenir les projets de grande envergure, complexes et à forte intensité de capital qui nécessitent l’approbation de plusieurs organismes fédérauxNote de bas de page 100.

Afin de réduire les chevauchements et les doublons, ainsi que d’accélérer l’examen des projets, les approbations et la délivrance de permis, le gouvernement du Canada doit éliminer les redondances entre ses ministères, puis entre le gouvernement fédéral et les autres ordres de gouvernement, tout en fournissant des directives claires sur la manière de respecter les droits des Autochtones. Ces mesures permettraient de raccourcir les délais d’approbation de l’examen fédéral, notamment pour les projets dont la nature générale des incidences potentielles est déjà bien définie et pour lesquels les ressources fédérales pourraient être mieux orientées vers des domaines de préoccupation ciblés ou vers d’autres projets nécessitant un examen plus approfondi.

En outre, les promoteurs de grands projets d’infrastructure d’électricité propre ont souvent du mal à s’y retrouver dans les exigences d’approbation et de délivrance des permis en raison de la complexité des processus, du manque de coordination entre les entités fédérales et de l’inadéquation de telles exigences avec les objectifs de carboneutralité du Canada. Le Bureau de la croissance propre, un groupe de travail au sein du Bureau du Conseil privé, tente actuellement de relever certains de ces défis concernant des projets majeurs en fournissant des conseils et en facilitant le soutien aux promoteurs de projets au sein du système fédéral.

Le Canada est à la traîne pour ce qui est du rythme des permis

En 2019, l’année la plus récente pour laquelle des données sont disponibles, le Canada s’est classé à l’avant-dernière place des pays de l’OCDE pour ce qui est du délai d’obtention d’un permis de construire général. Entre 2006 et 2019, le Canada est passé de la quatrième à la vingt-deuxième place dans le classement de la Banque mondiale sur la facilité de faire des affairesNote de bas de page 101.

Il n’existe pas actuellement de données canadiennes complètes sur les délais d’examen, de délivrance des permis et d’approbation des projets d’électricité (les renseignements figurant à la Figure 20 sont fondés uniquement sur les données relatives aux permis de construire généraux). Cette absence de données de suivi pour les projets d’électricité ne fait que souligner le problème, ainsi que la nécessité d’une approche plus systématique, y compris la mesure de l’amélioration du rendement au fil du temps, pour accélérer le rythme de développement des projets d’électricité propre.

Figure 20 : Délai d’obtention d’un permis de construire général, pays de l’OCDENote de bas de page 102

Diagramme à barres indiquant le nombre de jours nécessaires pour obtenir un permis général de construire
Version texte

Diagramme à barres indiquant le nombre de jours nécessaires pour obtenir un permis général de construire dans chacun des 38 pays de l’OCDE en 2019. Le tableau est présenté par ordre décroissant, en commençant par le chiffre le plus élevé, ou la plus mauvaise performance en haut de la page. Le Canada est le deuxième pays où le délai d’obtention d’un permis est le plus long (environ 250 jours), juste derrière la République slovaque.

Recommandation 9 : Désigner un champion chargé d’accélérer l’approbation des projets d’électricité

En s’appuyant sur les annonces faites dans le budget fédéral 2024, le gouvernement fédéral devrait officiellement désigner le Bureau de la croissance propre du Bureau du Conseil privé (BCP) comme autorité centrale chargée de promouvoir la rationalisation des examens des projets d’électricité propre dans les ministères et les organismes, tout en soutenant les grands projets d’infrastructure d’électricité propre considérés comme des projets d’électricité propre d’intérêt canadien. L’autorité centrale devrait mettre l’accent sur l’impartialité, une perspective interministérielle et l’examen de toutes les demandes de désignation de projets d’intérêt de manière impartiale. L’autorité centrale coordonnerait également la mise en œuvre des recommandations du Conseil liées à l’accélération de l’approbation des projets.

Le mandat de ce bureau serait double :

  1. Se faire le champion de l’examen et de la réforme systémique des politiques et cadres réglementaires et opérationnels fédéraux actuels s’appliquant aux projets d’électricité propre pour éliminer les redondances, définir des délais et des mécanismes efficaces et clairs, ainsi que rationaliser les processus. Le Conseil a formulé les recommandations 10 à 14 pour raccourcir les délais d’approbation de tous les projets d’électricité propre. Ce bureau serait principalement chargé de coordonner leur mise en œuvre.
  2. Élaborer un cadre objectif pour les projets d’électricité propre d’intérêt canadien afin de : (i) définir des critères pour les projets d’électricité propre d’intérêt canadien, axés sur l’impact (l’ampleur des avantages), le besoin (la complexité réglementaire) et l’alignement sur les feuilles de route provinciales ou territoriales (voir la recommandation 6); et (ii) fournir un soutien de type « concierge » à ces projets afin de faciliter et d’accélérer les approbations fédérales et autres pour les projets d’électricité propre d’intérêt canadien désignésNote de bas de page 103.

Le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles doit rendre compte des progrès réalisés par le Bureau de la croissance propre dans l’accomplissement de son mandat.

Détails sur la mise en œuvre

Pour mettre en œuvre la réforme systémique des politiques et cadres réglementaires et opérationnels fédéraux actuels, l’autorité centrale (idéalement le Bureau de la croissance propre et le coordinateur des permis fédéraux proposé, annoncé dans le budget fédéral 2024) lancerait un examen complet des exigences réglementaires et politiques relatives aux projets d’électricité propreNote de bas de page 104.

Cet examen viserait à :

  1. Examiner les rôles et les responsabilités des différents services, ainsi que les délais d’approbation et d’examen actuels, afin de déterminer les dépendances, les redondances et les possibilités d’optimisation
  2. Établir des processus d’approbation et d’examen de substitution appropriés, en fonction de la complexité des projets
  3. Déterminer les interdépendances entre les exigences de la demande et les conditions préalables d’approbation et d’examen entre les ministères fédéraux et les autres ordres de gouvernement
  4. Collaborer avec les provinces et les territoires pour rendre publiques les normes d’approbation et d’examen des projets, y compris les niveaux d’impact et les mesures d’atténuation acceptables pour les projets et les développements carboneutres

Le bureau central serait responsable de la réalisation d’objectifs mesurables en matière d’examen et d’approbation des projets d’électricité propre et il confierait aux autorités compétentes le soin de collaborer avec les organismes d’approbation en vue de franchir les principales étapes.

Pour mettre en œuvre le cadre relatif aux projets d’électricité propre d’intérêt canadien, le gouvernement fédéral devrait définir et rendre public une ébauche de cadre d’ici la fin de 2024. Le cadre devrait :

  1. Définir des critères spécifiques pour la désignation des projets d’électricité propre d’intérêt canadien
  2. Décrire les ressources d’appui qui seraient disponibles pour ces projets, en vue d’aider à hiérarchiser les projets, à rationaliser l’engagement fédéral et collaborer avec les entités fédérales compétentes afin d’accélérer leurs examens
  3. Examiner la possibilité que les projets d’électricité propre d’intérêt canadien fassent l’objet d’une prédétermination des besoins et/ou qu’ils soient examinés et autorisés rapidement
  4. Envisager la mise en œuvre d’un mécanisme ou d’une clause spécifique visant à garantir la participation du public aux projets d’électricité propre d’intérêt canadien, semblable aux articles 9 et 18 du Règlement de l’Union européenne concernant des orientations sur les infrastructures énergétiques transeuropéennes, en obligeant le gouvernement fédéral à communiquer les détails clés du projet et de la procédure d’approbation afin d’éviter toute inquiétude quant à la prise de décision dans une « boîte noire »

Le gouvernement fédéral doit également accorder une attention particulière aux répercussions potentielles sur les droits des Autochtones, ainsi que consulter les nations et les collectivités autochtones afin de rechercher et de définir les intérêts et les préoccupations des collectivités.

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Cette recommandation invite le gouvernement fédéral à entreprendre une révision des politiques et des processus et à mettre en place un cadre pour soutenir les projets importants pour l’ensemble du pays. Ces processus et projets doivent être conformes aux autorités et aux processus juridictionnels. Le Conseil encourage les provinces et territoires à réaliser des évaluations de leurs propres processus d’examen et de délivrance de permis afin de déterminer les possibilités de soutenir le gouvernement fédéral dans la rationalisation de ses processus. Une analyse plus spécifique des possibilités de collaboration intergouvernementale est fournie plus loin dans cette section afin de mettre en évidence les possibilités d’optimiser les processus et de minimiser les doublons.

Une approche de l’examen des projets fondée sur les risques

Constatations

Une prudence excessive en matière de délivrance de permis, d’examens et d’approbations au niveau fédéral compromet la transition vers l’énergie propre

Les systèmes d’examen réglementaire, d’approbation et de délivrance de permis en place au Canada à tous les ordres de gouvernement ne permettent pas de relever le défi lié à l’atteinte des objectifs climatiques. Le maintien du statu quo dans l’examen et l’approbation des grands projets compromettra la capacité du Canada à atteindre ses objectifs climatiques et à tirer parti des possibilités économiques liées à la transition vers une économie à faibles émissions de carboneNote de bas de page 105.

Une approche de l’examen des projets fondée sur les risques présenterait des avantages indéniables. Des examens et des approbations axés sur les risques importants propres au projet ou au site pourraient réduire les délais et les coûts pour les promoteurs de projets et les investisseurs.

En outre, les évaluations stratégiques, comme prévu par la Loi sur l’évaluation d’impact (2019) et déjà adoptées au sein de l’Union européenneNote de bas de page 106 et dans d’autres administrations, offrent au gouvernement et aux organismes de réglementation la possibilité de traiter les impacts de plusieurs projets par le biais d’une seule évaluation, permettant ainsi d’éclairer une politique plus large et de gagner du temps pour les projets futursNote de bas de page 107. Les évaluations stratégiques peuvent rationaliser le processus d’examen réglementaire et permettre d’aborder des questions clés telles que les effets cumulatifs et les effets positifs en avalNote de bas de page 108.

« L’Agence d’évaluation d’impact du Canada devrait mettre l’accent sur les questions relevant de l’autorité fédérale en veillant à ce que tous les ministères fédéraux participant à l’évaluation, à l’examen et au processus de délivrance de permis pour un projet, travaillent de manière coordonnée et en facilitant les évaluations et les examens conjoints réalisés avec les provinces. » [Notre traduction]

Hydroélectricité Canada

« L’accent mis par la Loi sur l’évaluation d’impact et l’évaluation stratégique des changements climatiques sur les effets positifs (et négatifs) des nouveaux projets de développement pourrait contribuer à faire progresser les projets et les infrastructures d’énergie propre en prenant soigneusement en compte leurs effets positifs en aval lors du processus d’évaluation d’impact. » [Notre traduction]

Institut Pembina

Le gouvernement fédéral peut raccourcir les délais d’examen de tous les processus fédéraux d’examen, d’approbation et de délivrance de permis liés aux projets carboneutres (y compris, mais sans s’y limiter, ceux relevant de l’Agence d’évaluation d’impact du Canada), lorsque la nature générale des impacts potentiels du projet est clairement définie, selon des critères tels que l’emplacement et le type de technologieNote de bas de page 109.

Le temps et les ressources consacrés à l’examen devraient être axés sur des considérations propres au site ou sur les répercussions potentielles liées à des considérations technologiques ou environnementales uniques et être assujettis à des exigences strictes en matière de délais maximums d’approbation (d’une manière similaire aux mesures mises en œuvre récemment en CalifornieNote de bas de page 110).

La récente proposition du gouvernement fédéral dans son budget 2024 de fixer des objectifs plus clairs pour les processus de délivrance des permis fédéraux est une bonne nouvelle pour le Conseil et devrait être rapidement mise en œuvreNote de bas de page 111.

Les délais d’examen réglementaire fédéral pour les grands projets d’électricité peuvent dépasser 5 ans

Le tableau ci-dessous présente les délais d’examen réglementaire fédéral pour plusieurs grands projets d’infrastructure électrique achevés entre 2010 et 2016, sur la base des renseignements tirés d’une étude de 2018Note de bas de page 112. Selon cette même étude, les approbations fédérales de projets d’électricité sont généralement accordées au bout de 49 mois pour les projets de nouvelle production et de 38 mois pour les projets de transport. Ces délais ne concernent que le processus d’examen fédéral et ne tiennent pas compte des processus provinciaux et municipaux, qui peuvent prendre autant de temps. Ces délais sont antérieurs à la Loi sur l’évaluation d’impact (2019).

Tableau 0-1 : Délais d’examen réglementaire fédéral pour les grands projets d’infrastructures électriquesNote de bas de page 113
Projet Type de projet Délai (mois)
Nouvelle centrale nucléaire de Darlington Production 68
Muskrat Falls Production 64
Ligne de transport d’énergie Labrador-Île Transport 57
Site C Production 41
Remise à neuf de la centrale de Darlington Production 36
Projet de centrale hydroélectrique Keeyask Production 35
Maritime Link Transport 19

Recommandation 10 : Rationaliser la portée des examens des projets d’électricité propre

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral de revoir les exigences réglementaires en matière d’examen et d’approbation des projets d’électricité carboneutre, en adoptant une approche fondée sur les risques pour déterminer la portée des examens de projets, qui tienne compte des risques majeurs liés aux différents types de projets, ainsi que du risque que les projets d’électricité propre ne soient pas mis en œuvre en temps opportunNote de bas de page 114.

Détails sur la mise en œuvre

Le gouvernement fédéral devrait :

  1. Donner une définition officielle d’un projet d’électricité carboneutre (par exemple, solaire, éolien, nucléaire, d’hydroélectricité, de transport, de stockage) et, pour les projets conformes à cette définition, définir :
    1. les risques majeurs propres au projet par type de projet connu, par région le cas échéant
    2. les exigences minimales en matière de délivrance de permis, d’examen et d’approbation pour chaque risque majeur propre au projet
    3. les exigences d’atténuation conformes aux pratiques exemplaires concernant les risques non essentiels liés aux projets et les impacts clairement définis des projets qui ne nécessitent pas de délivrance de permis, d’examen et d’approbation au niveau fédéral
  2. Limiter la portée des processus de délivrance de permis, d’examen et d’approbation requis pour les projets d’électricité carboneutre aux risques majeurs propres au projet ou au site ne disposant pas de stratégies d’atténuation connues ou largement acceptées.
  3. Tenir compte du risque de ne pas achever un projet donné en temps opportun (par exemple, les risques liés aux émissions et à la fiabilité).
  4. Donner suite aux annonces faites dans le budget fédéral 2024 en vue de réduire, de rendre publics et d’appliquer les délais d’examen et de délivrance de permis et établir des délais maximums pour les projets d’électricité carboneutre lorsqu’ils ne sont pas encore définis, et rendre compte à ce sujet.
  5. Collaborer avec les gouvernements provinciaux, territoriaux, municipaux et autochtones pour encourager l’adoption de réformes similaires.

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

La rationalisation de la portée ne s’applique pas exclusivement au gouvernement fédéral. Les provinces, les territoires et les municipalités peuvent examiner leurs propres processus, et déterminer les possibilités d’efficacité et de coordination.

Recommandation 11 : Passer à un cadre d’approbation fondé sur la conformité le cas échéant

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral d’élaborer et d’adopter une approche fondée sur la conformité afin de rationaliser la mise en œuvre de projets d’électricité carboneutre à faible risque en réduisant le nombre d’approbations préalables requises et en s’appuyant plutôt sur des mécanismes d’application pour vérifier et confirmer la conformité des projets avec les critères établis. Cette approche devrait être élaborée par l’autorité centrale proposée dans la recommandation 9.

Détails sur la mise en œuvre

Le gouvernement fédéral devrait définir un cadre pour :

  1. Déterminer les technologies éprouvées ou les types de projets dont les risques et les solutions d’atténuation sont connus
  2. Publier des directives claires concernant : i) les exigences en matière de données et de documentation; ii) les critères d’évaluation des risques; iii) les options d’atténuation connues requises pour des risques spécifiques; iv) les sanctions en cas de non-conformité
  3. Permettre aux promoteurs de projets admissibles d’entreprendre leur propre évaluation des risques au regard des critères et de mettre en œuvre l’option d’atténuation appropriée sans approbation préalable. Les promoteurs de projets devront en informer l’organisme concerné, ce qui permettra à cet organisme ou au ministère de vérifier la conformité des évaluations des risques effectuées par les promoteurs de projets et la mise en œuvre d’options d’atténuation des risques définis

Les promoteurs de projets pourront s’engager dans ce processus s’ils démontrent qu’ils sont aptes à évaluer les risques et à mettre en œuvre des mesures d’atténuation et qu’ils n’ont jamais été déclarés en situation de non-conformité.

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Le passage à un modèle fondé sur la conformité peut se révéler tout aussi important pour les gouvernements provinciaux et territoriaux, étant donné le rôle essentiel qu’ils jouent dans la délivrance des permis et l’approbation des projets. Les provinces et territoires peuvent évaluer leurs propres processus en vue d’adopter, le cas échéant, des cadres davantage fondés sur la conformité. En outre, ils peuvent collaborer avec le gouvernement fédéral pour aligner les processus, permettant ainsi à toutes les parties de s’appuyer davantage sur les cadres fondés sur la conformité.

Élimination proactive des doublons et exploitation des terres de la Couronne

Constatations

Les évaluations du gouvernement fédéral doivent être limitées aux questions relevant de la compétence fédérale

La duplication des processus d’évaluation environnementale et de délivrance de permis entre les différents ordres de gouvernement est devenue monnaie courante dans la gouvernance canadienne.

Cela est reconnu dans la réaffirmation par le gouvernement fédéral du principe "un projet, un examen" dans le budget fédéral 2024, avec des actions proposées telles que la modification de la Loi sur les études d’impact (2019) et le renforcement de la coordination entre les différents ordres de gouvernementNote de bas de page 115.

Comme l’a statué la Cour suprême du Canada dans son arrêt rendu en 2023 sur la Loi sur l’évaluation d’impact, le gouvernement fédéral doit recentrer ses analyses d’impact des « projets désignés » sur les questions relevant de ses compétences. Reconnaissant que le gouvernement a proposé des mesures visant à répondre à l’arrêt rendu par la Cour dans le budget fédéral 2024, le Conseil n’a pas fait d’autres recommandations à cet égard.

La réponse à l’arrêt rendu par la Cour suprême, bien qu’importante, ne permet pas de répondre efficacement à toutes les préoccupations relatives à la surveillance fédérale. Les lois qui tiennent compte des domaines de compétence fédérale, comme la Loi sur les pêches (1985) et la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs (2022), prévoient des exigences rigoureuses en matière de développement de projets d’électricité. Il existe des chevauchements entre les autorités fédérales et provinciales et les processus connexes qui visent à protéger la faune et son habitatNote de bas de page 116. En conséquence, de nombreux types de projets, y compris les projets essentiels de transport et d’hydroélectricité, peuvent subir des retards de plusieurs années voire plus : cela représente des années d’émissions supplémentaires non compensées par de l’électricité propre, en plus des coûts supplémentaires et des problèmes de fiabilité.

« Le cas échéant, les processus réglementaires et les approbations provinciales doivent être acceptés afin d’éviter des doublons inutiles. Si des approbations aux niveaux provincial et fédéral sont nécessaires, les processus provinciaux existants doivent être considérés comme le mécanisme approprié pour obtenir les renseignements nécessaires aux deux niveaux d’approbation. » [Notre traduction]

SaskPower et Saskatchewan Crown Investments Corporation

Il existe des possibilités d’amélioration de l’efficacité. La Loi sur les pêches (1985) prévoit une disposition autorisant l’adoption de mécanismes d’équivalence (article 4.1), mais ceux-ci sont rarement utilisés. Une disposition similaire de la version 2012 de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, qui autorisait le gouverneur en conseil à dispenser un projet du processus fédéral si l’évaluation provinciale était jugée équivalente, a été supprimée par la Loi sur l’évaluation d’impact (2019).

Pour atténuer ces responsabilités qui se chevauchent et sont parfois contradictoires, le Conseil recommande au gouvernement fédéral de passer d’un rôle de protection de première ligne à un rôle de soutien fédéral dans ses processus d’évaluation environnementale. Cette transition s’inscrit dans le contexte plus large d’un gouvernement fédéral qui souhaite concilier ses préoccupations historiques en matière de protection de l’environnement au niveau local et ses préoccupations plus récentes et plus urgentes liées aux changements climatiques à l’échelle mondiale. Grâce aux mécanismes d’équivalence, le gouvernement fédéral peut limiter son expertise de manière à intervenir principalement dans les cas où les mécanismes provinciaux ou territoriaux sont inadaptés.

« Collaborer avec les municipalités pour désigner des zones de développement préapprouvées permettrait de rationaliser l’approbation des projets futurs. » [Notre traduction]

Institut Pembina

Tirer parti des actifs de la Couronne pour promouvoir le développement de projets d’électricité propre

Outre les mécanismes d’équivalence, le gouvernement fédéral peut également mobiliser ses ressources pour stimuler le développement, les investissements et la participation des Autochtones. Les terres de la Couronne fédérale offrent notamment au gouvernement fédéral la possibilité de déterminer et d’approuver au préalable des zones désignées pour le développement de projets d’infrastructure électrique pour des technologies telles que les énergies éolienne et solaire, le stockage par batteries et l’infrastructure de transport. La désignation de terres de la Couronne pour le développement peut limiter les risques liés au développement, réduire les coûts initiaux, permettre de déterminer dès le départ les titulaires de droits autochtones et d’offrir plus de certitude quant aux délais de projets. Dans le budget fédéral 2024, des mesures ont récemment été proposées pour exploiter les terres fédérales en vue de la construction de logements, ce qui sert de modèle pour des actions semblables dans les projets d’infrastructure électrique indispensableNote de bas de page 117.

La désignation des terres de la Couronne peut faciliter la construction en prévision de la demande future. Il peut s’agir notamment de la construction de systèmes de transport capables de gérer des augmentations significatives de capacité. Cela peut donner aux promoteurs une plus grande certitude quant à la viabilité financière de l’augmentation de la capacité éolienne et solaireNote de bas de page 118.

« Les zones d’énergie renouvelable, telles que celles utilisées au Texas et en Australie, peuvent servir d’exemple sur la façon de rationaliser le développement de l’infrastructure en conformité avec la délivrance des permis et le développement des projets. » [Notre traduction]

Energy Storage Canada

À l’étranger, les carrefours énergétiques et les zones d’énergie renouvelable ont été légiférés afin de faire progresser le développement de l’électricité de manière coordonnée et concertée pour obtenir des résultats économiques, sociaux et environnementaux. En effet, les gouvernements infranationaux des États-Unis et de l’Australie, notamment New YorkNote de bas de page 119, TexasNote de bas de page 120 et QueenslandNote de bas de page 121 ont définis des zones d’énergie renouvelable pour aider à coordonner le développement de l’infrastructure d’énergie propre dans les zones à fort potentiel, maximisant ainsi les avantages pour les communautés locales. En outre, les efforts déployés au Texas ont permis de relier les ressources éoliennes de l’ouest du Texas et du Panhandle aux régions les plus peuplées de l’État, ce qui a été facilité par le développement préalable d’un réseau de transport d’énergie à haute tension. L’importante et fructueuse industrie éolienne extracôtière européenne a tiré parti d’approches similaires, telles que l’utilisation par l’Allemagne de zones économiques exclusivesNote de bas de page 122.

Bien qu’elles ne soient pas officiellement désignées, plusieurs provinces canadiennes, dont Terre-Neuve-et-Labrador, le Nouveau-Brunswick, la Colombie-Britannique et l’Ontario, ont mis en place des politiques visant à promouvoir l’utilisation des terres de la Couronne pour les ressources renouvelables, qui sont généralement étayées par des critères d’aménagement du territoireNote de bas de page 123.

Exploitation des terres de la Couronne à Terre-Neuve-et-Labrador

En juillet 2022, le gouvernement de Terre-Neuve-et-Labrador a lancé un programme visant à exploiter les terres de la Couronne pour des projets d’énergie éolienne de manière à « garantir les meilleurs avantages à long terme pour les résidents de la province ». [Notre traduction]

La première phase de ce programme en plusieurs étapes a permis aux promoteurs de proposer des terres de la Couronne pour exploitation. 31 propositions de terrains ont été reçues et examinées afin de déterminer les sites qui seraient mis à disposition. La deuxième phase a donné lieu à un processus d’approvisionnement officiel, dans le cadre duquel les parties intéressées ont présenté des offres en vue de développer des projets d’énergie éolienne sur des terres de la Couronne préalablement approuvées.

Afin de garantir le fonctionnement sûr et fiable du réseau électrique de la province, Newfoundland and Labrador Hydro a soutenu le gouvernement dans son processus de sélection des terres de la Couronne et d’appel d’offres pour les projets d’énergie éolienne. À ce jour, 4 offres émanant de 4 entreprises distinctes ont reçu des lettres de recommandation pour leur demande et ont obtenu le droit exclusif de poursuivre le développement d’un projet dans le cadre du processus provincialNote de bas de page 124. Avant l’octroi définitif des permis d’exploitation des terres de la Couronne, une évaluation environnementale sera exigée pour tous les projets d’énergie éolienne d’une capacité supérieure à 1 mégawatt.

Recommandation 12 : Conclure des ententes d’équivalence pour limiter les doublons avec les provinces

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral de s’atteler à conclure des ententes d’équivalence relatives à la délivrance de permis, à l’examen et à l’approbation des projets d’électricité carboneutre lorsque les lois et règlements fédéraux chevauchent les mécanismes provinciaux.

Détails sur la mise en œuvre

Pour mettre en œuvre cette recommandation, le gouvernement fédéral devrait adopter des changements qui permettront ce qui suit :

  1. Définir les mécanismes d’équivalence comme étant ceux qui permettent à l’autorité fédérale de déterminer si les processus provinciaux sont globalement équivalents aux normes fédérales
  2. Exiger des autorités compétentes, y compris ECCC, le MPO et l’Agence d’évaluation d’impact du Canada, qu’elles cherchent, de façon proactive, à négocier de telles ententes d’équivalence avec les provinces intéressées, afin d’éviter les coûts, les retards et les incertitudes inutiles dans le développement de projets d’infrastructure d’électricité propre, tout en garantissant des mesures de protection adéquates pour la faune

Que peuvent faire les provinces?

Si le gouvernement fédéral peut contribuer à réduire les doublons, les provinces ont également un rôle important à jouer dans l’examen de leurs propres processus d’examen et de délivrance de permis. Cet examen serait effectué dans l’esprit de la recommandation susmentionnée, dans le but d’éliminer les doublons internes inutiles, de rationaliser les processus et de déterminer les possibilités d’harmonisation avec les règlements fédéraux.

Recommandation 13 : Mettre en valeur de manière proactive les terres de la Couronne fédérale

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral de mettre en place un mécanisme permettant de déterminer de manière proactive les terres de la Couronne fédérale et de mener les évaluations pertinentes pour les projets d’infrastructure électrique afin d’accélérer tout développement ultérieur sur ces propriétés, réduisant ainsi les délais et les risques pour les promoteurs de projets d’énergie propre.

Détails sur la mise en œuvre

Pour mettre en place un tel mécanisme, le gouvernement fédéral devrait envisager un cadre visant à :

  1. Examiner les terres de la Couronne fédérale afin de déterminer les critères et les types de terres susceptibles d’être exploitées
  2. Élaborer un processus permettant de recenser les types de projets réalisables, les sites viables, les mécanismes permettant de solliciter des propositions de développement de projets et de lancer des projets
  3. Il doit comprendre :
    1. Des mesures visant à mobiliser et à consulter les nations et collectivités autochtones concernées
    2. Des processus de consultation avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, les municipalités, les services publics, les promoteurs de projets et d’autres parties importantes afin de veiller à l’alignement

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Le Conseil encourage les gouvernements provinciaux et territoriaux à inciter le gouvernement fédéral à mettre en place des processus de consultation, de planification, de mise en œuvre et de mise en service en vue du développement de carrefours énergétiques, en collaboration avec les planificateurs provinciaux et territoriaux, les administrations municipales, les communautés locales, ainsi que les nations et collectivités autochtones.

Apporter des précisions sur la consultation et la mobilisation auprès des Autochtones

Constatations

Une bonne compréhension de l’origine et du cadre des droits autochtones permettra d’accélérer le développement des projets énergétiques en garantissant la prise en compte des perspectives autochtones dès les premières phases, en atténuant l’opposition au projet grâce à une meilleure communication et en maximisant les possibilités de réconciliation économique.

Les droits autochtones ont été intégrés dans les révisions de la Loi constitutionnelle de 1982, qui reconnaît et confirme « les droits existants, ancestraux ou issus de traités » des peuples autochtones du Canada. Il a fallu plus de temps pour déterminer ce que ces droits englobent et comment aborder la protection constitutionnelle, ce qui se traduit aujourd’hui par un nombre croissant de décisions de justice.

Un critère à trois volets, formulé pour la première fois dans une série d’arrêts rendus par la Cour suprême du Canada en 2004, a été établi pour déterminer l’existence de droits autochtones et comment trouver un équilibre entre ces droits et la nécessité du développementNote de bas de page 125. Il est notamment question de créer un éventail de droits et un outil permettant d’évaluer la primauté des droits sur la nécessité du développement. En bref, la protection constitutionnelle et les arrêts rendus par la Cour suprême exigent des discussions avec les nations et collectivités autochtones pour déterminer les droits concernés et les modifications à apporter au projet afin de minimiser l’impact potentiel sur ces droits.

Le statut constitutionnel des droits autochtones implique que leur respect n’est pas facultatif et que leur respect adéquat fait partie intégrante du chemin critique nécessaire à une transition énergétique réussie. Au fil des ans, les tribunaux ont retardé de grands projets d’infrastructure afin de s’assurer que les incidences sur les droits autochtones avaient bien été dûment prises en compte et que des modifications significatives avaient été apportées aux plans des projets afin de minimiser ces incidences.

Malgré cela, les promoteurs de projets ne comprennent pas souvent en quoi consiste précisément l’obligation de consulter, notamment les personnes habilitées à participer à ces processus aux fins du développement d’un projet. Par ailleurs, les nations et collectivités autochtones ne sont pas suffisamment informées de ce que les projets impliquent ou les renseignements sont fournis lorsque les changements apportés aux projets seraient trop coûteux.

Une plus grande clarté sur la manière dont le gouvernement fédéral détermine les entités à consulter et où elles se situent dans l’éventail des droits permettra d’établir de meilleures relations, de poursuivre les objectifs de réconciliation des relations nationales et de créer des possibilités adéquates de réconciliation économique.

Alors que les droits autochtones prévoient des paramètres d’évaluation et de respect dans la constitution canadienne et dans la jurisprudence, les discussions récentes sont portées sur la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA)Note de bas de page 126 au Canada. Il y a souvent un amalgame entre le régime juridique actuel et les révisions proposées, ce qui donne lieu à des malentendus quant à la meilleure façon de procéder. Plus précisément, la DNUDPA préconise la protection des cultures, des langues et de l’autonomie des peuples autochtones sur les terres et les ressources, en exigeant le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause des nations et collectivités autochtones avant que ces droits ne soient touchés. Les lois fédérales prévoient toujours l’élaboration d’un plan de mise en œuvre de la DNUDPA au Canada et la collaboration avec les nations autochtonesNote de bas de page 127 à cette fin. Même si les réformes législatives nécessaires prendront du temps, il serait judicieux, à court terme, que le gouvernement fédéral formule certaines définitions clés concernant le consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause.

« Les communautés, en particulier les collectivités autochtones, sont beaucoup plus enclines à soutenir les projets d’infrastructure électrique lorsqu’elles peuvent y participer en tant que partenaires. » [Notre traduction]

Électricité Canada

« Le fait d’exclure les Premières Nations d’une participation significative à la planification régionale et à la prise de décision présente des risques pour les projets, nuit à l’attractivité du Canada en matière d’investissement et est en contradiction avec l’engagement du gouvernement fédéral de veiller à ce que les lois fédérales soient conformes aux principes de la DNUDPA. » [Notre traduction]

Centre d’excellence des ressources naturelles des Premières Nations de la Saskatchewan

Une meilleure compréhension des droits constitutionnels dès le début du processus de développement permettra aux promoteurs d’établir de bonnes relations avec les nations et collectivités autochtones dès les prémices d’un projet, ce qui se traduira par une meilleure prise en compte des perspectives autochtones, un plus grand respect des droits autochtones et moins de retards dus à des engagements tardifs.

Recommandation 14 : Clarifier et mieux faire connaître les attentes en matière de consultation des Autochtones

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral d’élaborer et de publier des ressources pour aider les promoteurs de projets, les services publics et les autres acteurs du secteur de l’énergie à se conformer à l’obligation de consulter les titulaires de droits appropriés. Ces ressources doivent comprendre :

  1. Des précisions destinées au public sur la méthode d’identification des titulaires de droits ancestraux et sur le processus permettant aux promoteurs de recenser rapidement ces titulaires de droits afin de s’assurer que l’engagement de consultation préalable sera respecté
  2. Une description claire de l’évolution de la mobilisation et de la consultation, ainsi que des renseignements concernant les types de modifications du projet qui peuvent être considérées comme des mesures d’adaptation
  3. Le processus permettant aux promoteurs de demander à ce que les aspects procéduraux de l’obligation de consulter leur soient confiés afin d’accélérer le processus de consultation et de réduire leur dépendance à l’égard des ressources gouvernementales

Détails sur la mise en œuvre

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral ce qui suit :

  1. Élaborer une ressource en langage clair décrivant les droits ancestraux protégés par la Constitution et figurant à l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, qui explique en termes accessibles le critère de l’obligation de consulter et les différents types de détenteurs d’intérêts par rapport aux titulaires de droits, qui indique clairement les actions qui constituent des mesures d’accommodement et comment (et quand) un promoteur peut se voir déléguer les aspects procéduraux de la consultation par la Couronne
  2. Communiquer ces renseignements par le biais d’une campagne de sensibilisation destinée aux promoteurs d’entreprises, aux services publics et à tous les autres acteurs du secteur de l’énergie
  3. Clarifier les changements apportés aux droits protégés par la Constitution par la mise en œuvre de la DNUDPA, y compris l’élaboration de définitions législatives visant à soutenir l’interprétation de la DNUDPA, en mettant particulièrement l’accent sur la définition du consentement préalable, donné librement et en connaissance de causeNote de bas de page 128

Que peuvent faire les provinces et les territoires peuvent-ils faire?

Les provinces et territoires peuvent encourager la clarté et la sensibilisation aux consultations autochtones en élaborant, puis en diffusant des ressources éducatives adaptées aux contextes locaux. Ils peuvent également faciliter la mobilisation en proposant des plateformes de consultation préalable et des processus simplifiés d’identification des titulaires de droits, garantissant ainsi un cadre de consultation plus efficace et inclusif.

Attirer les capitaux et la main-d’œuvre

Constatations

Les besoins d’investissement pour la transition sont importants. De même, la concurrence pour attirer les capitaux et la main-d’œuvre afin de stimuler la croissance de ses réseaux d’électricité propre et de rester un leader mondial est rude et croissante

Le coût de la décarbonation, de l’expansion, de la modernisation et de l’amélioration de la résilience du secteur de l’électricité en vue de la transition vers la carboneutralité est estimé à environ 1,4 billion $ d’ici 2050 (comme indiqué dans Abordabilité : Modélisation de l’impact sur les ménages canadiens). Attirer les investissements en capital nécessaires sera essentiel pour la réussite du Canada.

Le secteur de l’électricité est confronté à une concurrence intense avec d’autres pays, en particulier les États-Unis, les membres de l’Union européenne et la Chine, qui offrent des incitatifs exceptionnels et accélèrent les processus d’approbation pour les investissements dans l’électricité propreNote de bas de page 129. L’impact de la concurrence mondiale n’est pas seulement financier; il englobe la concurrence pour la main-d’œuvre et la chaîne d’approvisionnement.

Dans un souci d’efficacité, les mesures actuelles du Canada en matière de politique financière, fiscale, commerciale et du travail doivent s’adapter à ce nouveau marché. Dans son rapport provisoire, le Conseil a invité le gouvernement fédéral à s’appuyer sur d’autres mesures pour relever les défis liés à la main-d’œuvre et à la chaîne d’approvisionnement pour l’économie propre en général et à mettre en place une initiative spécifique visant à surmonter de tels défis dans le secteur de l’électricité. Le Conseil réitère cet appel, en soulignant l’importance de relever ces défis pour atteindre les objectifs de carboneutralité du Canada.

« Les investissements canadiens et internationaux créeront une demande mondiale importante de travailleurs possédant des compétences et de l’expérience en matière d’électrification et dans toutes ses applications... Si le Canada ne prend pas de mesures pour remédier à cette pénurie, il ne pourra pas répondre aux besoins croissants des travailleurs dans ce secteur. » [Notre traduction]

Congrès du travail du Canada

L’obtention d’une main-d’œuvre qualifiée sera essentielle à la réussite de la mise en place du réseau électrique. De plus, le Canada est en concurrence avec d’autres pays pour attirer les travailleurs nécessaires. Près de 28 000 nouveaux employés seront nécessaires au niveau national d’ici 2028, soit un quart de la main-d’œuvre actuelle du secteur de l’électricité; une situation accentuée par la nécessité de remplacer les travailleurs qui partent à la retraite et de répondre à la demande croissanteNote de bas de page 130. Ces besoins en main-d’œuvre ne peuvent être dûment satisfaits en l’absence de politiques et de financements publics adéquats.

Conséquences de la pénurie de la chaîne d’approvisionnement

Le marché des transformateurs de transport a connu une augmentation considérable des délais d’approvisionnement et des prix au cours des 3 dernières années. SaskPower a notamment été confronté au triplement des délais de livraison des transformateurs de mise à la terre (coupleur neutre) à l’automne 2023, ainsi qu’à une augmentation de prix de plus de 50 % par rapport au contrat qu’elle avait négocié en 2020. Le service public a dû faire face à des coûts encore plus élevés pour les unités plus complexes. Ces retards dans la production et la fourniture d’équipements essentiels réduisent la capacité du service public à faire face aux augmentations de charge liées à la transition, soulignant la nécessité d’un soutien fédéral à la fabrication et au développement de projets.

La certitude politique est cruciale pour les promoteurs de projets, qui ont besoin de renseignements précis concernant la disponibilité, la quantité et le calendrier des soutiens financiers (voir les recommandations 1, 2 et 3). Les mesures doivent porter sur l’ensemble des projets nécessaires à la transition, à une échelle et à un rythme correspondant à la croissance nécessaire des investissements.

Les coûts des projets risquent d’augmenter en raison des propositions de règles sur la restriction des dépenses excessives d’intérêts et de financement (RDEIF)Note de bas de page 131 et de l’expiration imminente des taux d’amortissement accélérés pour les biens électriques au titre de la déduction pour amortissement (DPA)Note de bas de page 132.

D’autres politiques et mécanismes clés, tels que les contrats sur différence appliqués au carbone proposés par le Fonds de croissance du Canada (FCC)Note de bas de page 133, et la taxonomie verte et de transitionNote de bas de page 134 en cours d’élaboration par le ministère des Finances, sont également importants pour encourager les investissements à long terme dans le secteur de l’énergie propre.

Il est également important d’aligner les politiques commerciales sur les objectifs de carboneutralité tout en veillant au respect des droits de la personne et d’autres considérations essentielles. Par exemple, les droits antidumping ont contraint certains services publics à acheter des transformateurs et d’autres équipements à des fournisseurs plus chers lorsque les produits nationaux ne sont pas disponibles, plutôt que de se tourner vers des fournisseurs étrangers connus et fiables qui fournissent des équipements plus rentables.

Le gouvernement fédéral dispose d’autres mécanismes visant à soutenir la transition. Les codes et les normes peuvent uniformiser les règles du jeu pour les fournisseurs de technologies, les promoteurs et les fournisseurs de services. Une meilleure harmonisation des normes peut promouvoir l’interopérabilité mondiale, faciliter les échanges commerciaux et encourager les investissements transfrontaliers dans les infrastructures d’électricité propreNote de bas de page 135,Note de bas de page 136 . La nature réactive du Code canadien de l’électricité (CCE), bien que axée sur la sécurité, contribue à l’adoption de codes et de normes non harmonisés à travers le Canada. En outre, son manque d’harmonisation avec les objectifs de carboneutralité limite le rythme, l’ampleur et les avantages des technologies de l’électricité et des projets de normes de construction carboneutres, qu’ils soient nouveaux ou existants.

Recommandation 15 : Aligner les politiques financières, fiscales, du travail et commerciales sur les objectifs de carboneutralité

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral d’examiner et de réviser en temps opportun les mesures de ses politiques financières, fiscales, commerciales et du travail afin de réduire les coûts et les risques liés aux investissements, d’attirer les capitaux au rythme requis et d’améliorer la compétitivité. Pour ce faire, il peut : (i) aligner les mesures sur les objectifs et les priorités de carboneutralité en termes d’étendue de la couverture, d’échelle, de délais et d’admissibilité des promoteurs; (ii) soutenir la planification, la formation et la répartition de la main-d’œuvre; (iii) tenir compte de l’évolution du paysage économique, technologique et commercial; (iv) réduire au minimum les doublons et les lacunes en matière de financement. Des exemples spécifiques d’obstacles connus à l’investissement dans le secteur de l’électricité qui doivent être résolus de toute urgence, notamment les taux de DPA et les règles RDEIF, sont présentés ci-dessous.

Détails sur la mise en œuvre

Le gouvernement devrait :

  1. Modifier rapidement les catégories 43.1 et 43.2 relative à la DPA de l’annexe II du Règlement de l’impôt sur le revenu, qui permettent aux entreprises de réduire leur revenu imposable d’une plus grande proportion de leur investissement afin de : (i) prolonger jusqu’en 2035 les taux accélérés (50 %) et les déductions bonifiées la première année (100 %); et (ii) étoffer la liste des systèmes considérés comme des « biens d’énergie propre » pour y inclure d’autres équipements importants pour la transition énergétique
  2. Élargir la liste des projets d’énergie propre au-delà des projets des catégories 43.1 et 43.2 relative à la DPA pour inclure les projets dont les coûts peuvent être considérés comme des frais liés aux énergies renouvelables et à l’économie d’énergie au Canada en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, afin qu’ils puissent bénéficier de la déduction fiscale et des avantages liés aux actions accréditives
  3. Modifier rapidement la règle RDEIF proposéeNote de bas de page 137 dans le projet de loi 59Note de bas de page 138 afin d’exclure toutes les entités d’énergie propre qui paient des impôts, leurs sociétés de portefeuille et leurs investissements dans l’énergie propre et leur permettre de réduire leur revenu imposable de 100 % de leurs intérêts et autres dépenses
  4. Examiner et réviser la liste des marchandises assujetties aux règles sur les mesures antidumping et compensatoires en vertu de la Loi sur les mesures spéciales d’importation (LMSI)Note de bas de page 139 afin d’exclure celles qui sont essentielles à la transition énergétique
  5. Encourager les gouvernements provinciaux et territoriaux à envisager de conclure des contrats à long terme (par exemple, des ententes d’achat d’électricité) dans le cadre de leurs processus de planification des ressources, afin de garantir la sécurité des investissements
  6. S’appuyer sur les travaux du Conseil d’action en matière de finance durable et sur l’engagement pris dans l’Énoncé économique de l’automne 2023 et dans le budget fédéral 2024 pour élaborer un cadre taxonomique qui fournira une approche normalisée pour l’évaluation comparative des mesures « vertes » et « de transition » alignées sur les objectifs de carboneutralité à l’horizon 2050
  7. Élargir l’admissibilité au programme fédéral relatif aux contrats sur différence appliqués au carbone et au fonds pour une croissance propre, comme promis dans le budget fédéral de 2024, ainsi qu’à la BIC. L’admissibilité et le financement des projets devraient être élargis pour mieux soutenir l’ensemble des projets de transition énergétique, y compris les investissements dans la distribution et les solutions de GAD. L’attribution de fonds par l’intermédiaire du Fonds de croissance du Canada est un mécanisme prudent, peu coûteux et à faible risque pour stimuler les nouvelles technologies. Les contrats sur différence octroyés par le biais du FCC doivent viser à maintenir un équilibre sain entre les retours sur investissement et le soutien aux nouveaux projets émergents sur le marché, en reconnaissant que le retour sur investissement s’ajoute aux coûts du projet
  8. Examiner et réviser les mesures relatives au marché du travail afin de soutenir la planification, la formation, le maintien et la répartition de la main-d’œuvre. Cela devrait comprendre les mesures suivantes : 
    1. Conformément aux autres recommandations du Conseil concernant les données et la modélisation, soutenir la planification nationale, provinciale, territoriale et régionale par le biais de la collecte et de la diffusion de données sur le marché du travail, ainsi que de la détermination des moyens d’inclure les syndicats dans la planification des grands projets fédéraux
    2. Collaborer avec l’industrie, les syndicats et les établissements universitaires sur la formation, la mise à jour des programmes d’études, le perfectionnement des compétences et la certification
    3. Élargir les programmes, les investissements et l’accès équitable des peuples autochtones et d’autres personnes aux programmes de formation fédéraux tels que le Programme pour la formation et l’innovation en milieu syndical et le Programme de services d’apprentissage, et collaborer avec les principales parties sur d’autres programmes de formation et d’éducation
    4. Envisager de mettre en œuvre des accords de travail sur les projets aux niveaux fédéral et régional et des ententes sur les avantages pour la collectivité afin d’accroître la certitude des investisseurs, la disponibilité de la main-d’œuvre et les retombées économiques locales

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les provinces et territoires, ainsi que d’autres acteurs clés, sont essentiels pour faciliter l’examen par le gouvernement fédéral de ses politiques financières, fiscales et du travail. Par exemple, les autorités régionales peuvent participer à l’élaboration du plan de mise en œuvre de la taxonomie verte et de transition du Canada et au déploiement du cadre. De même, les organismes provinciaux et territoriaux de l’énergie peuvent intégrer les ententes d’achat d’électricité dans la planification de leurs ressources et l’exploitation de leurs réseaux.

Les provinces, les territoires, les organismes d’éducation et de formation et les autres intervenants peuvent également collaborer avec le gouvernement fédéral pour déterminer leurs besoins spécifiques et le meilleur moyen de les satisfaire.

Recommandation 16 : Mettre en place un guichet unique pour les soutiens financiers fédéraux

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral de regrouper et d’améliorer ses services d’information financière en un guichet unique, destiné à fournir aux promoteurs de projets de toute envergure des renseignements pertinents et des services consultatifs de type « concierge » pour soutenir et réduire les risques liés aux projets d’énergie propre (y compris la GAD et la modernisation du réseau).

Détails sur la mise en œuvre

Le gouvernement devrait :

  1. . Regrouper le Carrefour de la croissance propre, le groupe de décarbonation de l’industrie et d’autres services fédéraux d’information financière en un guichet unique pour les soutiens financiers. Ce guichet unique devrait comprendre un centre d’échange de renseignements, de ressources et d’outils Web et offrir des services consultatifs (de type « concierge ») personnalisés en vue d’orienter et de soutenir les recherches et les demandes des promoteurs de projets
  2. Ce service devrait être hébergé par un organisme du gouvernement fédéral responsable du financement et de la délivrance de permis et entretenant des liens étroits avec d’autres organismes clés, et/ou par un organisme d’où proviennent les principaux fonds
  3. Revoir les renseignements et les services offerts afin d’améliorer et de prioriser les services pour les projets importants, et élargir la portée et l’ampleur des services pour un plus large éventail de projets, y compris les projets d’efficacité énergétique, de GAD et de transport et de distribution d’électricité
  4. Élaborer et mettre à jour régulièrement un mécanisme de suivi unique et global pour le financement de l’énergie afin que le guichet unique ait accès à des renseignements actualisés sur les programmes financiers fédéraux, provinciaux et territoriaux dans l’ensemble du pays
  5. Procéder à un examen approfondi (grâce à des évaluations et des rapports annuels de suivi) des mesures fédérales en matière de financement de l’énergie eu égard à l’étendue de la couverture, aux chevauchements et lacunes, à la valeur financière, aux délais et à d’autres variables essentielles
  6. Élaborer et mettre en œuvre un plan de communication précisant que le guichet unique est le seul portail permettant aux promoteurs d’accéder aux renseignements et aux services de soutien financier, et comprenant un programme de sensibilisation à l’intention des promoteurs potentiels ciblés
  7. Fournir une orientation claire sur les priorités et un processus officiel de collaboration interministérielle et de soutien au programme

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les provinces et territoires peuvent aider le gouvernement fédéral à mettre en œuvre cette initiative en établissant des partenariats avec ce nouveau bureau et en fournissant régulièrement des renseignements sur leurs propres mesures financières, ce qui contribuera à améliorer la précision des services offerts par le bureau en ce qui a trait à la couverture des mesures financières.

Recommandation 17 : Harmoniser les codes et les normes en matière d’électricité

Le gouvernement fédéral devrait financer un organisme consultatif qui collaborerait avec le Conseil canadien des normes et les organismes de normalisation connexes (notamment l’Association canadienne de normalisation), afin de définir et d’élaborer des codes et normes minimales et ambitieuses relatifs aux futures technologies de réseau électrique qui pourraient être déployées au Canada, en vue (i) de guider et d’aider les organismes de normalisation canadiens dans l’élaboration et l’adoption de codes et de normes pertinents; (ii) d’orienter les travaux du Canada visant à aligner les codes et les normes canadiens sur ceux des organismes internationaux. Le gouvernement fédéral devrait également évaluer les mécanismes de gouvernance visant à accélérer l’élaboration et l’adoption de codes et de normes afin de favoriser le déploiement sûr et fiable de technologies de réseau résilientes aux changements climatiques, révolutionnaires et carboneutres.

Détails sur la mise en œuvre

Pour le gouvernement fédéral, la mise en œuvre de cette recommandation devrait comprendre ce qui suit :

  1. Collaborer avec le Conseil canadien des normes et les organismes de normalisation connexes pour créer ce nouveau bureau et veiller à ce qu’il soit composé de représentants dévoués issus des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, des services publics d’électricité, des opérateurs de réseaux et des organismes de normalisation
  2. Envisager la mise en place d’un mécanisme de gouvernance pour l’élaboration des normes et des codes nationaux pour le Code canadien de l’électricité, conformément aux efforts nationaux similaires (tels que le Comité canadien de l’harmonisation des codes de construction)
  3. Instaurer des mandats renouvelables d’une durée de cinq ans exigeant une approche systémique plutôt qu’une approche par produit afin de déterminer et d’élaborer des ébauches de codes modèles et de normes, ainsi que d’autres exigences techniques concernant les équipements et les installations électriques afin de garantir la sécurité, la résilience aux changements climatiques et l’interopérabilité des nouvelles technologies de l’énergie distribuée
  4. Coordonner et nourrir l’engagement stratégique national du Canada vis-à-vis des organismes et processus internationaux de normalisation (par exemple, l’Institute of Electrical and Electronics Engineers) afin de faire valoir les intérêts du Canada dans les efforts d’élaboration et d’harmonisation des normes internationales
  5. Déterminer les ressources financières nécessaires pour soutenir l’élaboration des codes et des processus de codification et de normalisation au sein des organismes de normalisation
  6. Adopter une orientation future en ce qui concerne l’intégration de technologies nouvelles et en pleine évolution dans les réseaux électriques
  7. Fournir un soutien financier spécifique pour l’élaboration des codes et des normes (par exemple, le Fonds d’accélération des codes de RNCan), en accordant une attention particulière aux codes et aux normes pour les régions du Nord

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les représentants des provinces et territoires peuvent apporter les perspectives et les priorités propres à leur administration dans l’élaboration des codes et des normes (par exemple, un ensemble de codes et de normes spécifiques aux régions nordiques concernant les pompes à chaleur).

Les organismes de codification et de normalisation devraient participer à cet effort pour garantir la légitimité, veiller à la sensibilisation sectorielle et technique et prodiguer des conseils sur la meilleure façon de structurer les codes modèles et l’élaboration des normes.

Les services publics et les opérateurs de réseaux peuvent mettre à disposition des spécialistes techniques, de manière ciblée, qui participeront en permanence aux travaux de ce comité.

Soutenir la transition

Figure 21 : Illustration de l’impact directionnel des recommandations liées à l’étape « SOUTENIR la transition »

Graphique linéaire illustratif montrant l’impact directionnel des recommandations liées à la mesure « Soutenir la transition »
Version texte

Graphique linéaire illustratif montrant l’impact directionnel des recommandations liées à la mesure « Soutenir la transition » sur les variations futures en pourcentage des coûts de l’énergie pour les consommateurs. Le graphique présente des scénarios de coûts énergétiques élevés, moyens et faibles pour les consommateurs. Le texte indique qu’un financement fédéral ciblé peut réduire les coûts pour tous les Canadiens tout en réduisant la répartition inégale entre les ménages.

L’essentiel des recommandations du Conseil porte sur la réduction des coûts globaux, grâce à une meilleure planification, à des processus d’examen et d’approbation des projets plus rapides et à la réduction du gaspillage d’énergie, entre autres mesures.

Toutefois, il ne suffit pas de réduire les coûts totaux. Le gouvernement fédéral a également un rôle important à jouer en matière d’équité et de partage des coûts de la transition.

Même si le coût du passage à l’énergie propre sera probablement abordable pour le Canadien moyen, ces moyennes peuvent cacher des coûts inégalement répartis. Pour de nombreux Canadiens, principalement dans les provinces et territoires tributaires des combustibles fossiles, dans les ménages à faible revenu et dans les collectivités autochtones et isolées, le défi sera encore plus grand.

Le gouvernement fédéral peut contribuer à remédier à la répartition inégale des coûts et des avantages, et à assurer une transition réussie pour tous les Canadiens en apportant un soutien supplémentaire ciblé là où il est le plus nécessaire. Ces cibles devraient comprendre :

  • Le développement et l’optimisation des programmes de CII, afin de transférer une partie des coûts de l’assiette tarifaire à l’assiette fiscale (plus équitable)
  • Les projets interrégionaux de transport d’électricité, afin de tirer parti de forces complémentaires et de faciliter la décarbonation, principalement dans les provinces et territoires tributaires des combustibles fossiles
  • Les collectivités autochtones, nordiques et éloignées, afin de favoriser la réconciliation économique, notamment en permettant une participation financière aux nouveaux projets énergétiques
  • Les ménages à faible revenu, afin que tous les Canadiens puissent avoir accès aux possibilités d’économies d’énergie qui améliorent l’abordabilité

Le Conseil indique que ces priorités se recoupent avec des mesures clés des budgets fédéraux 2023 et 2024. Malgré l’importance de ces mesures, des efforts supplémentaires sont nécessaires pour que tous les Canadiens puissent tirer leur épingle du jeu dans ce projet unique.

Optimisation des crédits d’impôt à l’investissement

Les CII fédéraux annoncés peuvent contribuer à réduire les coûts et à remédier à leur répartition inégale

Au cours de la dernière année, le gouvernement fédéral a annoncé d’importants soutiens financiers pour un large éventail d’investissements dans les infrastructures d’électricité propre au moyen des CII. D’une valeur totale de plus de 60 milliards $ au cours des dix prochaines années, ces mesures comprennent des CII pour le captage, l’utilisation et le stockage du carbone, l’hydrogène propre, les technologies propres, l’électricité propre et le secteur manufacturierNote de bas de page 140. Ces CII visent principalement à soutenir la compétitivité de l’industrie en s’alignant sur les soutiens financiers prévus par la loi américaine sur la réduction de l’inflationNote de bas de page 141.

Ces soutiens devraient permettre de réduire le coût de construction de nouvelles infrastructures électriques à travers le Canada et, de par leur nature, ils visent à répondre proportionnellement aux besoins d’investissement, qui sont probablement les plus importants dans les provinces et territoires tributaires des combustibles fossilesNote de bas de page 142.

Le Conseil est tout à fait d’accord avec cette proposition et souligne qu’il est approprié que les provinces et territoires tributaires des combustibles fossiles bénéficient d’un soutien plus important, étant donné les coûts supplémentaires auxquels ils sont confrontés lorsqu’ils cherchent à décarboner la majeure partie de leur production d’électricité existante, tout en développant globalement leurs réseaux.

En outre, ces CII devraient permettre de transférer une partie du fardeau financier de la transition des usagers vers les contribuables. Le Conseil y est également favorable, pour plusieurs raisons : les avantages sociétaux de la transition vers l’énergie propre, la répartition plus équitable des coûts facilitée au moyen du financement par les contribuables, ainsi que le soutien essentiel apporté dans les secteurs où les fonds provenant des usagers sont rares, comme les premières étapes de l’innovationNote de bas de page 143.

Les CII devraient être alignés sur les objectifs de carboneutralité afin de stimuler les investissements dans les projets d’électricité propre

Des inquiétudes subsistent quant au fait que les CII proposés pourraient dissuader les investissements, en raison des retards de mise en œuvre et du manque de certitude politique, de l’inadmissibilité de certaines technologies et de certains investissements tels que les réseaux de transport et de distribution intraprovinciaux, de l’inadéquation entre l’échelle et les délais des CII et les projets qu’ils sont censés soutenir et des différences dans les niveaux d’incitatifs offerts aux promoteurs de projets qui paient des impôts et à ceux qui n’en paient pas (y compris les demandeurs autochtones).

« Compte tenu des incitatifs importants prévus par la loi américaine sur la réduction de l’inflation, les administrations publiques canadiennes doivent veiller à rester compétitives et à réduire les coûts pour les consommateurs en maintenant des investissements et des financements prévisibles dans le secteur de l’énergie par le biais de divers outils, notamment des subventions, des crédits d’impôt, des outils de financement et des partenariats. » [Notre traduction]

  • Emera (Nova Scotia Power)

Recommandation 18 : Harmoniser les programmes de CII avec les objectifs de carboneutralité

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral de concevoir et de mettre en œuvre dès que possible les CII pour l’énergie propre, de sorte que l’échelle, la portée, les calendriers et l’admissibilité des projets permettent d’attirer les investissements et de s’aligner sur les objectifs de carboneutralité. Les CII proposés devraient être révisés pour : (i) uniformiser les critères d’admissibilité et les limites de crédit entre les entités non imposables et imposables; (ii) élargir l’admissibilité aux projets de transport intraprovincial et intraterritorial; et (iii) accroître l’ampleur du crédit pour les projets de transport interrégional (ou interprovincial).

Détails sur la mise en œuvre

Le gouvernement fédéral devrait :

  1. Accélérer les processus législatifs et de mise en œuvre afin de favoriser les investissements en temps opportun dans les projets (voir la recommandation 1)
  2. Prolonger les CII pour les adapter à la réalité des calendriers des projets (prolonger les crédits jusqu’en 2040, afin qu’ils n’expirent pas avant que les projets ne deviennent opérationnels) et aux besoins d’investissement (afin qu’ils soient suffisants pour encourager l’investissement dans de grands projets tels que les infrastructures de transport).
  3. Élargir l’admissibilité des projets au titre du CII pour l’électricité propre afin d’inclure les infrastructures de transport à haute tension intraprovinciales et intraterritoriales.
  4. Uniformiser les critères d’admissibilité aux CII et les limites de crédit entre les entités et partenariats non-contribuables (y compris les groupes autochtones et les services publics de la Couronne) et contribuables, afin de mettre tout le monde sur un pied d’égalité.
  5. Permettre aux promoteurs de cumuler les CII avec d’autres mesures financières.
  6. Permettre aux petites communautés de regrouper des projets et de présenter collectivement une demande de CII lorsque ces projets ne sont pas admissibles individuellement.
  7. Envisager d’augmenter le CII pour l’électricité propre de 15 à 50 % pour les projets de transport d’électricité permettant de relier les provinces ou territoires canadiens, sous réserve de la conclusion d’un cadre visant à soutenir les projets de transport intergouvernementaux, compte tenu des défis importants liés au rythme et à l’échelle.

Voir les recommandations 6 et 19 pour consulter des mesures de soutien connexes.

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Comme indiqué dans la recommandation 6, les provinces et les territoires peuvent aider considérablement le gouvernement fédéral à administrer plus efficacement les programmes de CII en élaborant des feuilles de route et des stratégies officielles en matière d’énergie en vue d’une économie carboneutre d’ici 2050. Ce faisant, les administrations provinciales et territoriales peuvent améliorer de manière significative l’efficacité des CII tout en favorisant d’autres mesures de soutien propres aux projets (voir recommandation 9).

Un cadre pour l’infrastructure de transport interrégional d’éléctricite

Constatations

L’amélioration des interconnexions électriques entre les administrations canadiennes peut aider les régions tributaires des combustibles fossiles dans leur transition énergétique

Une meilleure coordination interrégionale et internationale sur le développement des réseaux de transport est une stratégie essentielle pour réduire les coûts, car elle peut contribuer à apporter des avantages économiques à long terme et à l’échelle du réseauNote de bas de page 144.

Le transport interrégional réduit les coûts en dégageant des synergies bénéfiques entre les réseaux, notamment en favorisant le développement à grande échelle de ressources variables (telles que l’énergie éolienne et solaire, là où elles sont les plus abondantes) et en les reliant à des sources d’énergie répartissables telles que les installations de production hydroélectrique. Le renforcement du transport interrégional peut également permettre de relier des régions dont les profils de demande sont complémentaires, en tirant parti de la diversité de la configuration des conditions météorologiques et de l’absence de coïncidence des pointes de demande d’électricitéNote de bas de page 145.

En plus de réduire les coûts, le transport interrégional améliore la fiabilité, diminue le besoin de stockage de l’électricité et atténue les risques qui pourraient découler de la dépendance à l’égard des importations internationales. Les interconnexions permettent en outre de se prémunir contre les phénomènes météorologiques extrêmes ou les périodes de faible production des sources renouvelables, notamment l’hydroélectricité, qui peuvent avoir une incidence sur une administration, mais pas sur les autresNote de bas de page 146.

Le développement du transport interrégional a été lent et inégal, malgré les efforts accrus du gouvernement fédéral

Le développement des interconnexions de transport d’électricité et des échanges entre les administrations canadiennes a été lent et inégalNote de bas de page 147, le volume d’électricité acheminé vers les États-Unis étant beaucoup plus importantNote de bas de page 148. Alors que le Québec et l’Ontario peuvent transférer des volumes relativement importants d’électricité dans les deux sens (la capacité de transfert combinée actuelle est de 2 775 MW)Note de bas de page 149, la Saskatchewan et les trois territoires disposent d’une capacité d’interconnexion faible ou inexistanteNote de bas de page 150. La tendance à privilégier les échanges avec les États-Unis par rapport aux provinces voisinesNote de bas de page 151 est davantage exacerbée par les rendements monétaires plus élevés offerts par les marchés américains et par la difficulté d’évaluer les avantages non monétaires d’un accroissement des échanges entre les provinces et territoires canadiensNote de bas de page 152.

Malgré l’attention accrue portée à cette questionNote de bas de page 153, le gouvernement fédéral n’a guère réussi à stimuler les projets de transport interrégionaux jusqu’à présent. Le Canada reste largement exportateur net d’électricité, même s’il a récemment importé un volume plus important d’électricité des États-Unis pendant les périodes de sécheresse dans les provinces de l’OuestNote de bas de page 154.

Soutenir le développement du transport interrégional exige un cadre commun

L’un des principaux obstacles au développement du transport d’électricité est l’absence d’une répartition des coûts communs et d’un cadre de comptabilisation des bénéficesNote de bas de page 155. Selon le rapport d’Energy and Environmental Economics (E3) commandé par Électricité Canada, le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle crucial dans l’élaboration et la mise en œuvre d’un tel cadre pour la planification du transport interrégional au Canada, soit en tant que bailleur de fonds pour des projets de transport précis, soit en tant qu’organe de convocation pour veiller à ce que le cadre soit mis en œuvre de manière équitableNote de bas de page 156.

« Nous exhortons le gouvernement fédéral à user de son pouvoir de convocation pour réunir les provinces dans un forum de collaboration permanent, où les idées et les connaissances peuvent être échangées entre les décideurs politiques et les organismes de réglementation fédéraux et provinciaux, et où la coopération et les échanges commerciaux interprovinciaux peuvent être encouragés. » [Notre traduction]

Fortis Inc.

Les projets d’intérêt commun (PIC) de l’Union européenne constituent un modèle potentiel qui pourrait être adapté au contexte canadienNote de bas de page 157. Similaire au Canada à certains égards, l’Union européenne est une fédération d’États membres, chacun ayant compétence sur son propre réseau électrique. Le modèle des PIC est conçu pour faciliter la coopération sur les projets énergétiques interrégionaux entre les nations membres grâce à une approche centralisée et concertée permettant de déterminer, d’attribuer et d’arbitrer les coûts et les avantages et en fournissant un mécanisme permettant de combler les asymétries de coûts.

Recommandation 19 : Élaborer un cadre pour soutenir les projets interrégionaux de transport d’électricité

Le Conseil recommande au ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles d’inciter ses homologues, lors de la Conférence des ministres de l’Énergie et des Mines (CMEM) de 2024, à élaborer conjointement et à présenter à temps pour la CMEM de 2025, un cadre de collaboration visant à déterminer et à soutenir financièrement les projets interrégionaux de transport d’électricité. En s’inspirant du cadre des PIC de l’Union européenne comme modèle de départ, il devrait définir les composantes de la gouvernance, de la répartition des coûts et du financement.

Détails sur la mise en œuvre

Le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles devrait entamer l’élaboration d’un cadre régissant l’identification et la construction d’un réseau de transport d’électricité interrégional avec les responsables provinciaux et territoriaux lors de la CMEM de 2024.

Compte tenu de leur compétence sur les réseaux électriques, la participation des provinces et des territoires à ce programme sera en fin de compte volontaire. Le Conseil encourage vivement les responsables des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux à s’engager à produire des plans de mise en œuvre qui tiennent compte des autorités et des compétences appropriées. Le plan peut inclure des recommandations détaillées à soumettre à l’approbation de la CMEM de 2025, décrivant la gouvernance et toute mesure de financement ou autre action nécessaire pour soutenir la définition, l’évaluation, la répartition des coûts et la construction d’une infrastructure de transport interrégionale bénéfique.

Le cadre, qui s’inspire du mécanisme des PIC de l’Union européenneNote de bas de page 158, devrait décrire les mécanismes de gouvernance et de répartition des coûts nécessaires, notamment :

  1. Des mécanismes de planification et de coordination, financés et soutenus par des organismes intergouvernementaux nouveaux ou existants, afin d’entreprendre des exercices de planification régionale, ainsi que de recenser et de hiérarchiser les projets d’intérêt. À cette fin, le gouvernement fédéral peut demander à la REC d’étudier dans quelle mesure elle pourrait utiliser ses pouvoirs existants pour jouer un rôle de facilitateur en vue d’une meilleure collaboration interrégionale, axée sur le transport de l’électricité
  2. Des critères et des processus de recensement et de mise en œuvre des projets de transport interrégionaux, et des mécanismes visant à accélérer les processus d’approbation de projets et de délivrance de permis, ainsi que le soutien financier
  3. Un mécanisme normalisé et transparent de répartition transfrontalière des coûtsNote de bas de page 159 (RTC) pour guider la répartition des coûts entre les participants au projet, y compris des lignes directrices et des autorités pour les décisions uniques ou conjointes et l’arbitrage sur la répartition des coûts du projet

Le cadre définirait également un ensemble complet de mesures fédérales de financement et de soutien spécifiques au transport interrégional, fondées sur les décisions de RTC, y compris :

  1. Un soutien financier fédéral visant à réduire le risque financier et à équilibrer la répartition inégale des coûts et des avantages des projets entre les administrations. Pour ce faire, le gouvernement fédéral peut :
    1. Réduire les risques liés à la demande en se réservant des droits d’utilisation de capacités de transport, lorsque cela est jugé utile pour favoriser des investissements anticipés ou
    2. Fournir un soutien financier par le biais d’une subvention directe ou d’une augmentation du CII pour l’électricité propre pour les projets de transport (voir la recommandation 18)

Parmi les exemples internationaux de modèles réussis, on peut citer le Connecting Europe Facility – EnergyNote de bas de page 160, qui s’efforce de remédier aux asymétries de coûts et d’avantages des projets déterminés au cours du processus de RTC, et le mécanisme des contrats de capacité du Transmission Facilitation Program (programme de facilitation de transport)Note de bas de page 161 du Department of Energy des États-Unis.

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les provinces et les territoires ont compétence sur leurs réseaux électriques et leurs ressources naturelles. Ainsi, leur soutien et leur collaboration sont essentiels à ces efforts. Le Conseil encourage notamment les provinces et les territoires à participer officiellement à ce cadre et à son développement. Les processus liés au cadre varieront probablement d’une administration et d’une région à l’autre, ce qui rend la participation cruciale pour définir les critères et les procédures qui répondent le mieux aux besoins et aux attentes de chaque administration.

En participant activement à l’élaboration du cadre, les provinces et les territoires pourraient s’assurer qu’il répond à leurs besoins et priorités régionaux et qu’il facilite l’accès des intervenants de leurs administrations aux incitatifs et aux programmes de soutien, tels que les CII, les subventions directes et d’autres programmes de financement.

Soutien aux collectivités autochtones, nordiques et éloignées

Constatations

Le gouvernement fédéral peut proposer une approche coordonnée de la réconciliation économique avec les nations et les collectivités autochtones dans l’ensemble du pays

Le Canada est un pays riche en ressources, mais les nations et les collectivités autochtones ont été systématiquement exclues du partage de cette prospérité. Étant donné qu’il est de plus en plus reconnu que l’adoption d’approches novatrices et durables est nécessaire pour améliorer cette situation, le gouvernement fédéral peut élargir les objectifs de réconciliation économique du Canada en mettant en place des solutions institutionnelles dotées de ressources suffisantes pour soutenir la participation significative des nations et des collectivités autochtones à la transition énergétique.

Les difficultés liées aux capacités et aux ressources ont longtemps empêché les nations et les collectivités autochtones d’accéder aux marchés et aux possibilités économiques. En effet, la Loi sur les Indiens (1985) interdit aux nations autochtones d’imposer leurs résidents, de vendre du bois sur les terres de réserve et d’utiliser les actifs qu’elles possèdent sur les terres de réserveNote de bas de page 162. Cela limite la capacité des nations et des collectivités autochtones à financer et à constituer des fonds propres pour les investissements.

En outre, lorsqu’il existe des exigences en matière de consultation des nations et des collectivités autochtones, ces dernières ne disposent pas toujours des ressources nécessaires pour évaluer correctement les avantages et les risques. En conséquence, la capacité à répondre de manière appropriée aux demandes de consultation, à effectuer des analyses de rentabilisation et à obtenir des prêts pour participer à des projets énergétiques à grande échelle est limitée.

Pour garantir le succès de la transition électrique, l’industrie de l’énergie doit veiller à ce que les nations et les collectivités autochtones disposent des ressources nécessaires pour répondre aux demandes de consultation. L’investissement initial dans les capacités autochtones garantira que le développement se fera au rythme nécessaire.

Dans son budget 2024Note de bas de page 163, le gouvernement fédéral a annoncé son intention de désigner un coordonnateur des consultations de l’État pour garantir une consultation efficace et significative de la Couronne avec les peuples autochtones sur la délivrance de permis réglementaires fédéraux pour des projets qui ne font pas l’objet d’évaluations d’impact fédérales. Il s’agit d’une mesure encourageante, mais les nations et les collectivités autochtones ont encore besoin de ressources et d’expertise pour répondre à tous les types de consultations. Une approche coordonnée, des premières consultations des Autochtones au soutien de la participation équitable aux nouveaux projets énergétiques, contribuera grandement à la réconciliation économique. Le financement adéquat de ces initiatives est essentiel et devrait inclure un financement durable et à plus long terme des consultations pour les nations et les collectivités autochtones, ainsi que le développement et le financement du Programme national de garantie de prêts pour les Autochtones.

Le Conseil a accueilli favorablement les annonces concernant le Programme national de garantie de prêts pour les Autochtones dans le budget fédéral 2024, tout en soulignant que le besoin anticipé de garanties dans le secteur de l’électricité dépasse de loin le montant total disponible. Le Conseil estime que le niveau requis de garanties pour la participation autochtone aux projets du secteur de l’électricité pourrait s’élever en moyenne à 2 milliards $ par an jusqu’en 2035.

Le manque de certitude et de soutien politique entrave considérablement la transition vers la carboneutralité dans les collectivités nordiques et isolées

Bien qu’une très petite partie des émissions globales du Canada provienne des collectivités nordiques et éloignées (le total pour les territoires combinés est inférieur à un pour cent)Note de bas de page 164, la transition vers la carboneutralité est une avancée importante dans ces régions pour des raisons de réconciliation économique et de bien-être social et environnemental. Des mandats de carboneutralité sont nécessaires dans le Nord (y compris de la part des gouvernements territoriaux) pour encourager la mise à jour des mandats des services publics et des organismes de réglementation et afin d’aligner des facteurs tels que l’accès au capital. En l’absence d’une inclusion proactive et de considérations judicieuses dans le cadre de politiques fédérales plus générales en matière de carboneutralité, ces collectivités pourraient être encore plus désavantagées.

Plus précisément, le prix de détail du diesel dans les régions éloignées et nordiques ne reflète pas son coût réel, qui comprend des frais de transport élevés et des dommages pour la santé et l’environnement, masquant ainsi les avantages du déploiement de sources d’énergie plus propresNote de bas de page 165.

La transition vers la carboneutralité a des répercussions considérables sur plus de 280 collectivités canadiennes qui ne sont pas reliées à des réseaux plus importants et qui sont obligées de dépendre principalement de la production d’électricité à partir de moteurs dieselNote de bas de page 166,Note de bas de page 167 . Bon nombre de ces collectivités sont confrontées à des coûts énergétiques faramineux et les usagers des régions nordiques doivent actuellement faire face aux coûts d’électricité les plus élevés au Canada. Ces régions ne peuvent souvent pas couvrir entièrement les coûts du réseau existant ou des nouveaux projets sans soutien financier fédéral et elles sont également confrontées à des problèmes de capacité, y compris la formation et le maintien de la main-d’œuvre nécessaire à l’appui aux projets et aux infrastructures d’électricitéNote de bas de page 168.

Liaison hydroélectrique et de fibre optique à Kivalliq

Le projet de liaison hydroélectrique et de fibre optique à KivalliqNote de bas de page 169 est un projet de transport de 150 MW mené par Nukik Corporation, une entreprise inuite qui vise à réduire les émissions et les risques environnementaux liés aux déversements de diesel et à stimuler les avantages socio-économiques futursNote de bas de page 170. S’étendant sur 1 200 km du Manitoba à la région de Kivalliq au Nunavut, le projet proposé devrait profiter à 5 collectivités tributaires du diesel en leur fournissant une énergie propre et un accès fiable à Internet, tout en soutenant les opérations minières et d’autres activités économiques.

Le gouvernement fédéral a mis en place une série de programmes et de politiques pour soutenir les régions nordiques et éloignées, y compris divers programmes de financement pour permettre aux collectivités de ne plus dépendre du diesel et pour favoriser la recherche énergétique axée sur le NordNote de bas de page 171. Cependant, les collectivités nordiques ont besoin d’approches et d’investissements plus novateurs et mieux adaptésNote de bas de page 172. Les régions les plus éloignées risquent d’être laissées pour compte par rapport aux régions plus proches de la ligne de transport.

« Trop souvent, les politiques et règlements fédéraux sont élaborés selon un modèle universel. Ainsi, les collectivités nordiques éloignées et isolées sont trop souvent simplement exclues ou dispensées de la planification de l’énergie carboneutre. » [Notre traduction]

Nukik Corporation

Les financements fédéraux existants, tels que ceux fournis par la BIC, et les futures sources de financement potentielles qui pourraient être soutenues par le Programme national de garantie de prêts et les CII, peuvent être difficiles à obtenir dans le Nord en raison de l’échelle réduite de nombreux projets, de l’absence de grands investisseurs, des capitaux disponibles limités et du fait que de nombreux projets en sont aux premières étapes de développement. Malgré ces obstacles, les nations et les collectivités autochtones, ainsi que les sociétés de développement économique dirigées par des Autochtones, mènent à bien des projets d’électricité propre dans le NordNote de bas de page 173. Il est particulièrement difficile de faire démarrer ces projets, car les collectivités ne disposent souvent pas de ressources suffisantes pour les faire avancer en raison d’assiettes fiscales et de taux d’imposition beaucoup plus faibles, de revenus des ménages plus bas et de problèmes plus généraux liés aux aspects économiques des projetsNote de bas de page 174.

La relation entre le gouvernement fédéral et les territoires est constitutionnellement différente de celle avec les provinces. En vertu de la Constitution, les provinces exercent des pouvoirs de plein droit, tandis que les territoires exercent des pouvoirs délégués. Au cours des dernières décennies, des changements significatifs dans la gouvernance ont eu lieu dans les territoires, le gouvernement fédéral ayant commencé à transférer certaines compétences aux territoires, ce qui a permis de renforcer la prise de décision et la responsabilité au niveau local, notamment tout récemment avec l’Entente sur le transfert des responsabilités liées aux terres et aux ressources du NunavutNote de bas de page 175. Le gouvernement fédéral a un rôle crucial à jouer dans le Nord pour faciliter sa transition énergétique en raison des relations fiscales actuelles, selon lesquelles une grande partie des ressources des territoires est obtenue par le biais de transferts territoriauxNote de bas de page 176.

Recommandation 20 : Accélérer la réconciliation économique avec les nations autochtones

Le Conseil recommande une approche coordonnée de la réconciliation économique qui soutienne la participation équitable aux nouveaux projets d’électricité propre. Cette approche coordonnée doit garantir une capacité adéquate pour passer des conversations consultatives initiales jusqu’à l’étape finale de soutien à la participation équitable dans les nouveaux projets énergétiques.

L’approche doit comprendre :

  1. Un financement adéquat, durable et à long terme des capacités des nations et des collectivités autochtones afin de développer et de conserver les ressources nécessaires à la consultation et à l’évaluation de l’impact des droits
  2. Des ressources consultatives et un soutien pour le processus d’élaboration de l’analyse de rentabilisation, y compris l’évaluation des projets et l’analyse commerciale
  3. L’expansion annuelle du Programme national de garantie de prêts pour les Autochtones nouvellement crée en partenariat avec les dirigeants autochtones et d’autres spécialistes

Détails sur la mise en œuvre

  1. Le gouvernement fédéral devrait fournir des ressources suffisantes et permanentes pour s’assurer que les nations et les collectivités autochtones disposent des ressources humaines nécessaires pour répondre aux demandes de consultation, en s’inspirant des programmes existants en Ontario et en Colombie-BritanniqueNote de bas de page 177. Le mécanisme devrait comprendre un poste de conseiller spécialisé qui devra aider les nations et les collectivités autochtones à évaluer l’impact des projets sur les droits autochtones. Le financement de ces ressources doit être proportionnel au volume des demandes de consultation que reçoivent les nations et les collectivités.
  2. Le gouvernement fédéral devrait apporter un soutien financier, directement ou par l’intermédiaire d’organismes existants, pour soutenir l’analyse économique et la viabilité des possibilités disponibles afin d’aider les nations autochtones à préserver leur expertise économique et juridique sur des projets qui font progresser la transition énergétique.
  3. Le gouvernement fédéral devrait mettre en œuvre le Programme national de garantie de prêts pour les Autochtones annoncé dans le budget fédéral 2024 dès que possible, tout en envisageant également des exigences à plus long terme au-delà des 5 milliards $ initiaux, tout particulièrement en ce qui concerne la participation dans les projets du secteur de l’électricité. Le Programme national de garantie de prêts pour les Autochtones doit viser à offrir une certaine souplesse en ce qui concerne (1) la répartition des risques entre les nations et collectivités autochtones et le promoteur du projet, (2) le niveau de participation des Autochtones (y compris jusqu’à 100 %), et (3) le type de projet (par exemple, la production d’énergie propre, le transport, le stockage).

Veuillez vous référer à la recommandation 18-D pour consulter les mesures de soutien connexes.

Programmes de garantie de prêts pour les Autochtones au Canada

Outre le lancement du Programme national de garantie de prêts pour les Autochtones récemment annoncé dans le budget fédéral 2024, il existe trois autres programmes de garantie de prêts pour les Autochtones au Canada, chacun ayant ses propres conditions et sa propre orientation sectorielle :

  • L’Alberta Indigenous Opportunities Corporation (AIOC) fournit jusqu’à 3 milliards $ de garanties de prêt pour soutenir les groupes et les collectivités autochtones de la province dans des projets liés aux ressources naturelles, à l’agriculture, aux télécommunications et aux transports
  • La Saskatchewan Indigenous Investment Finance Corporation accorde des garanties de prêt d’au moins 5 millions $ chacune à des collectivités et entités autochtones pour des placements en actions dans des projets admissibles d’exploitation des ressources naturelles et de projets agricoles à valeur ajoutée
  • Le Programme de garanties d’emprunt pour les Autochtones de l’Ontario soutient les nouveaux projets d’infrastructure d’énergie renouvelable et d’autres projets d’infrastructure électrique, en offrant un financement de 5 à 50 millions $ par projet

Ces programmes contribuent à déployer des capitaux indispensables pour soutenir les nations et les collectivités autochtones. Ainsi, au 31 mars 2020, 10 garanties de prêt ont été approuvées dans le cadre du programme de l’Ontario, le capital total des prêts garantis s’élevant à 470 millions $Note de bas de page 178.

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Le Conseil prend acte de l’engagement des gouvernements provinciaux et territoriaux en faveur de la réconciliation et de leur reconnaissance des défis auxquels sont confrontées les nations et les collectivités autochtones. Dans la mise en œuvre de leurs propres programmes, les gouvernements provinciaux et territoriaux peuvent collaborer avec le gouvernement fédéral pour garantir l’adoption de mesures complémentaires et mettre en œuvre des programmes qui soutiennent les mêmes objectifs de renforcement des capacités, d’évaluation de projets et d’analyse de rentabilisation, et de participation équitable.

Recommandation 21 : Soutenir les collectivités nordiques et éloignées

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral d’accélérer et d’accroître considérablement son soutien aux systèmes énergétiques carboneutres et aux projets d’électricité propre dans les collectivités nordiques et éloignées, en particulier celles qui sont autochtones.

En s’appuyant sur les programmes actuels, le gouvernement fédéral devrait :

  1. Favoriser les trajectoires et les mandats de carboneutralité dans les provinces et les territoires pour les régions nordiques et éloignées
  2. Veiller à ce que les politiques nationales en matière d’électricité carboneutre comprennent des dispositions pour le Nord qui favorisent la réalisation d’objectifs similaires de carboneutralité
  3. Créer et faciliter les possibilités de partenariat entre les gouvernements, les services publics et les communautés, en particulier les collectivités autochtones, y compris les initiatives interrégionales
  4. Augmenter le financement et mieux le cibler en tenant compte des facteurs d’équité, notamment pour soutenir la recherche technologique et toutes les phases du cycle de vie des projets, en particulier le développement, l’exploitation et la maintenance, ainsi que la fin de vie
  5. Fournir des données et des orientations transparentes pour quantifier le coût réel du diesel et aider à transférer les subventions vers des projets d’énergie propre

Détails sur la mise en œuvre

  1. Le gouvernement fédéral devrait veiller à ce que les politiques élaborées pour guider et soutenir la transition vers la carboneutralité du Canada tiennent compte des circonstances particulières des collectivités nordiques et éloignées, en particulier les collectivités autochtones, et qu’elles énoncent les mesures adaptées à ces circonstances. Le gouvernement fédéral doit définir des mandats clairs et des mécanismes de soutien pour faciliter la transition dans ces régions. Il devrait également soutenir les gouvernements territoriaux et les services publics dans l’élaboration de mandats et de trajectoires de carboneutralité, notamment en organisant et en finançant des discussions régionales, en élargissant les activités de planification et de coopération régionales, en soutenant davantage les plans énergétiques communautaires dans le cadre de la transition vers un avenir carboneutre, avec des plans d’urgence pour améliorer la résilience et la fiabilité, et en proposant aux provinces, aux territoires, aux services publics et aux organismes de réglementation des pratiques exemplaires concernant les mandats et les trajectoires de carboneutralité qui tiennent compte du contexte unique des collectivités nordiques et éloignées.
  2. Le soutien aux collectivités nordiques et éloignées devrait permettre d’atteindre des résultats politiques similaires à ceux du reste du Canada, tout en prévoyant des échéances, des objectifs et des outils politiques différents, afin de refléter au mieux le contexte et les besoins uniques du Nord. Le financement fédéral spécifique aux collectivités nordiques et éloignées devrait intégrer, et idéalement rendre publiques, des données transparentes et des conseils sur la manière de quantifier le coût réel de la consommation de diesel dans le Nord. Une attention particulière pourrait être accordée aux mesures suivantes :
    1. Améliorer l’accessibilité et le cumul des financements pour les collectivités nordiques et éloignées
    2. Élargir le financement aux études de faisabilité sur mesure, à la recherche et au développement, ainsi qu’aux projets d’infrastructure d’électricité propre dans le Nord, notamment pour les projets à l’échelle communautaire
    3. Tenir compte des obstacles spécifiques et du cycle de vie complet des projets des régions nordiques et éloignées dans la conception des programmes

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les gouvernements provinciaux et territoriaux adjacents aux régions confrontées à ces défis peuvent collaborer avec d’autres gouvernements et partenaires afin de déterminer les possibilités de relever certains des défis décrits dans le présent rapport, notamment en explorant les possibilités de transport interrégional et en encourageant les possibilités d’investissement, dans la mesure du possible, afin de promouvoir le développement et la planification de l’industrie de l’électricité propre dans ces régions.

Soutien ciblé aux Canadiens à faible revenu

Constatations

Le gouvernement fédéral doit adopter une approche globale et nationale pour lutter contre la pauvreté énergétique au Canada.

Selon la manière dont elle est évaluée, la pauvreté énergétique concerne entre 6 et 19 % des ménages canadiensNote de bas de page 179. De nombreuses personnes en situation de pauvreté énergétique sont des locataires, qui ont moins de contrôle sur la consommation d’énergie et la mise en œuvre de mesures d’efficacité dans leur logement.

La pauvreté énergétique varie considérablement d’une province ou d’un territoire à l’autre et au sein de ceux-ci. À titre d’exemple, le taux de dépenses énergétiques en proportion du revenu est presque le triple de la moyenne nationale dans les provinces de l’Atlantique et le double de la moyenne en SaskatchewanNote de bas de page 180.

Alors que l’électrification est prête à réduire les coûts énergétiques pour le ménage canadien moyen, la proportion de ménages à faible revenu qui seront confrontés à des coûts énergétiques nets plus élevés devrait être supérieure à la moyenne de la population, en l’absence de politiques de soutien.

Il a récemment été annoncé dans le budget fédéral 2024 que 800 millions $ seraient consacrés aux rénovations écoénergétiques dans les ménages à revenu faible ou moyenNote de bas de page 181. Il s’agit d’une étape importante, bien qu’elle soit nettement inférieure aux estimations des besoins globauxNote de bas de page 182.

« Comme les utilisations finales passent de plus en plus à l’électricité, les facteurs relatifs à la pauvreté énergétique relèveront de plus en plus de ce secteur. Il faut mettre en priorité une programmation ciblée pour les ménages à revenus faibles ou modestes et les ménages en quête d’équité. »

Fondation David Suzuki

Le Canada ne dispose pas d’une définition établie de la pauvreté énergétique, d’indicateurs normalisés pour l’évaluer, ni des outils de collecte de données et d’analyse nécessaires pour utiliser les renseignements en vue d’élaborer et de mettre en œuvre des programmes efficaces. Ces lacunes constituent un défi majeur lorsqu’il s’agit d’aborder de manière cohérente la prévalence et l’impact de la pauvreté énergétique et de relever les défis uniques auxquels sont confrontés les groupes vulnérables à travers le pays, notamment les personnes à faible revenu, les nouveaux arrivants, les personnes âgées, les personnes en situation de handicap et les personnes souffrant d’autres problèmes de santé.

Le gouvernement fédéral peut jouer un rôle clé en soutenant les programmes provinciaux et territoriaux de lutte contre la pauvreté énergétique par le biais d’un financement direct, de l’élaboration conjointe d’un cadre pour la collecte et la diffusion des données, ainsi que d’autres lignes directrices et d’outils destinés à aider les administrations à suivre les progrès réalisés dans ce domaine.

L’établissement d’un cadre structuré sera essentiel à une compréhension plus nuancée du problème et à un meilleur ciblage des ressources pour y remédier. Un cadre global peut aider les provinces et les territoires à recenser les domaines nécessitant un soutien et à adapter leurs programmes de lutte contre la pauvreté énergétique en conséquence, ce qui se traduira par des interventions plus efficaces et une attribution stratégique des ressources.

Il est nécessaire de collaborer avec les provinces, les territoires et les organismes concernés, car ces entités sont mieux à même d’élaborer et de mettre en œuvre des programmes adaptés aux besoins uniques et aux considérations culturelles de leurs clients et d’exploiter l’infrastructure locale de livraison. Cependant, certaines provinces et certains territoires ne disposent pas de capacités suffisantes pour élaborer et mettre en œuvre de telles initiatives de lutte contre la pauvreté énergétique. Il est donc essentiel que le gouvernement fédéral octroie un financement direct à ces organismes pour que la question soit abordée de manière cohérente dans l’ensemble du pays.

Recommandation 22 : Accroître le financement des programmes d’efficacité énergétique destinés aux Canadiens à faible revenu

S’appuyant sur l’annonce faite dans le budget 2024, le Conseil recommande au gouvernement fédéral d’élargir son engagement de financement pour y inclure : (i) un financement supplémentaire pour les programmes provinciaux et territoriaux d’efficacité énergétique axés sur les besoins des Canadiens à faible revenu; (ii) un mécanisme visant à élaborer et publier des lignes directrices et des outils pour soutenir les programmes provinciaux et territoriaux et combler les lacunes dans les données fédérales; (iii) des lignes directrices pour la collecte, l’analyse et la diffusion de données pertinentes pour l’élaboration de programmes de lutte contre la pauvreté énergétique

Détails sur la mise en œuvre

Le gouvernement fédéral devrait :

  1. Établir des lignes directrices et des outils solides pour réaliser ce qui suit :
    1. Élaboration d’une définition de la pauvreté énergétique au Canada afin de soutenir des programmes cohérents et efficaces
    2. Élaboration de lignes directrices et d’outils cohérents et efficaces pour améliorer la collecte, l’analyse et la diffusion des données, afin de mieux déterminer les personnes dans le besoin et de mieux cibler la prestation des programmes
    3. Mise en œuvre d’outils similaires au tableau de bord énergétique géré par EfficiencyOne en Nouvelle-Écosse, qui fournit des exemples d’outils efficaces de collecte et d’analyse de données pour des programmes d’efficacité énergétique ciblés
    4. Mise en place d’indicateurs essentiels pour évaluer la pauvreté énergétique afin d’améliorer l’accès aux programmes d’efficacité énergétique et d’en optimiser la mise en œuvre
  2. Accorder un financement direct d’au moins 2 milliards $ sur 4 ans aux programmes provinciaux et territoriaux axés sur l’amélioration de l’efficacité énergétique pour les Canadiens à faible revenu, afin de permettre aux autorités locales (telles que les services publics et les organismes provinciaux ou territoriaux) d’adapter les initiatives aux défis uniques et de tirer parti de l’expertise locale pour trouver des solutions efficaces. Cela devrait inclure :
    1. Élaborer un mécanisme de financement visant à atteindre les objectifs fédéraux et axé sur la maximisation des avantages à long terme
    2. Continuer à permettre aux ménages à faible revenu et en situation de précarité énergétique de bénéficier de rénovations gratuites, en s’assurant d’inclure et de protéger les locataires au-delà des annonces faites dans le budget fédéral 2024. Ces rénovations devraient garantir la mise en place de mécanismes spécifiques pour les immeubles locatifs et les logements sociaux et non marchands et inclure des mesures d’efficacité énergétique et d’adaptation aux changements climatiques qui réduisent la demande d’énergie de chauffage et prévoient le refroidissement en cas de chaleur extrêmeNote de bas de page 183. Le gouvernement fédéral devrait également apporter un soutien accru et ciblé aux mesures d’amélioration du rendement énergétique et à la construction de logements adaptés aux changements climatiques dans les nations et les collectivités autochtonesNote de bas de page 184.
  3. Renforcer la collaboration entre les provinces, les territoires et les organismes concernés afin d’élaborer, de tenir à jour et de partager des données à l’appui des pratiques exemplaires en matière de programmes de lutte contre la pauvreté énergétique.

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les services publics peuvent jouer un rôle primordial dans l’atténuation de la pauvreté énergétique. Pour mieux comprendre les défis à relever par les ménages et atteindre efficacement les groupes vulnérables tels que les peuples autochtones, les nouveaux arrivants et les personnes âgées, il est impératif d’établir des lignes directrices concernant le partage des données des services publics avec Statistique Canada.

Cette collaboration permettra de combler les lacunes en matière de données, de recenser les ménages en situation de précarité énergétique et de veiller à ce que les ressources soient effectivement mises à la disposition de ceux qui en ont besoin. La mise à profit des données sur les services publics et la collaboration avec Statistique Canada permettront d’offrir des programmes de lutte contre la pauvreté énergétique mieux ciblés et plus efficaces afin de relever les défis uniques auxquels sont confrontées les collectivités vulnérables dans l’ensemble du Canada.

Économiser pour alléger la charge

Figure 22 : Illustration de l’impact directionnel des recommandations liées à l’étape « ÉCONOMISER pour alléger la charge »

Graphique linéaire illustratif avec deux trajectoires de la demande d’électricité
Version texte

Graphique linéaire illustratif avec deux trajectoires de la demande d’électricité jusqu’en 2050 pour illustrer l’impact directionnel des recommandations liées à la mesure « Économiser l’énergie pour alléger la charge ». Le texte indique que l’efficacité énergétique et la flexibilité de la charge peuvent réduire la demande d’électricité, minimiser les besoins d’investissement, réduire les factures des consommateurs et améliorer la fiabilité.

Il est essentiel de promouvoir l’efficacité énergétique et la GAD pour les raisons suivantes :

  • Réduire le besoin d’infrastructures électriques coûteuses : en rendant l’échelle et la vitesse de mise en place de l’énergie propre plus réalisables et plus abordables
  • Améliorer la fiabilité du réseau électrique : en réduisant les contraintes sur les réseaux électriques et en permettant aux services publics et aux opérateurs de gérer les pointes de demande grâce à des charges flexibles
  • Protéger les consommateurs de tous les secteurs : en réduisant leurs factures d’énergie et en améliorant l’abordabilité des logements et la compétitivité des entreprises
  • Protéger les ménages : en renforçant leur résilience face aux phénomènes météorologiques extrêmes et aux pannes d’électricité, notamment en réduisant les pertes de chaleur grâce à l’amélioration de l’enveloppe des bâtiments

En décembre 2023, le gouvernement fédéral a rejoint 123 autres nations en s’engageant à ce que « le principe de l’efficacité énergétique soit le « carburant premier » au cœur de l’élaboration des politiques, de la planification et des décisions d’investissement majeures »Note de bas de page 185 [Notre traduction].

Lors de cette même réunion, le gouvernement fédéral s’est engagé à prendre des mesures nationales globales pour contribuer à doubler le taux annuel des rénovations écoénergétiques au niveau mondial.

Le Canada ne dispose actuellement d’aucun plan concret pour respecter cet engagement en matière d’efficacitéNote de bas de page 186. En outre, alors que le budget fédéral 2023 prévoit des incitatifs importants pour encourager la croissance de l’énergie propre, il ne prévoit aucune mesure concernant le volet de la demande. Il est nécessaire d’y remédier.

Au Canada, les provinces, les territoires et les services publics se chargent de l’essentiel des solutions axées sur la demande, en fournissant leurs propres fonds, financements, programmes et pouvoirs réglementaires. Le gouvernement fédéral a trois rôles importants à jouer :

  1. Reddition de comptes et cohérence dans l’évaluation et la communication des progrès accomplis dans la réalisation des engagements
  2. L’élaboration de codes, de normes et de procédures d’approvisionnement pour favoriser un changement général, structurel et durable
  3. Un financement ciblé en complément des investissements provinciaux et territoriaux, comme c’est le cas pour la production d’électricité

Le Conseil estime qu’il s’agit là de tâches appropriées que le gouvernement fédéral doit assumer afin de stimuler des améliorations considérables en matière de GAD, d’améliorer l’abordabilité, la fiabilité et la résilience, et de limiter l’augmentation des besoins d’investissement dans le secteur de l’électricité.

Reddition de comptes et cohérence

Constatations

Le gouvernement fédéral a pris des engagements nationaux et internationaux en matière d’efficacité énergétique, mais ne dispose pas de mesures adéquates pour rendre des comptes

Le gouvernement fédéral a pris une série d’engagements en matière d’efficacité énergétique au fil des ans, notamment dans le cadre des stratégies fédérales de développement durable antérieures, conformément aux objectifs de développement durable des Nations unies, et dans les plans nationaux sur le climat. Le gouvernement fédéral s’est engagé, avec d’autres pays, à prendre des mesures nationales qui contribueront à doubler le taux des rénovations écoénergétiques à l’échelle mondiale d’ici 2030, en le faisant passer de 2,2 % actuellement à 4 % par anNote de bas de page 187.

Au Québec, le plan d’action d’Hydro-Québec prévoit que l’efficacité et la réponse à la demande permettront de réduire la demande de 3 500 MW d’ici 2032Note de bas de page 188. De même, l’Ontario a augmenté le financement de ses programmes d’efficacité énergétique, portant le financement total à plus d’un milliard $ pour la période actuelle du Cadre de conservation et de gestion de la demande 2021 à 2024Note de bas de page 189.

Le Conseil soutient ces engagements, car leur réalisation réduira considérablement les coûts et les risques liés à la transition vers l’énergie propre. Néanmoins, le gouvernement fédéral doit mettre à jour ses politiques pour mieux refléter ces engagements. Le Plan canadien de réduction des émissions pour 2030, qui a été promulgué par la Loi sur la responsabilité en matière de carboneutralité (2022), accorde notamment une place importante à l’efficacité énergétique, mais ne tient pas compte des engagements récents et des annonces de programmes et ne définit pas non plus un cadre d’action solide.

Le Canada est confronté à une crise du logement : la résolution de cette crise représente l’occasion générationnel afin d’améliorer l’efficacité des bâtiments pour la santé, le climat et l’abordabilité.

Pour résoudre la crise du logement au Canada, il faudra construire 5,8 millions de nouveaux logements dans tout le pays d’ici 2030Note de bas de page 190. Si les efforts déployés pour réduire le déficit de logements ne sont pas menés de manière réfléchie, ils pourraient perpétuer et intensifier le défi énergétique du pays, tout en entraînant des factures de chauffage inutilement élevées pour les propriétaires. D’autre part, si les nouvelles initiatives en matière de logement visent à encourager les pratiques de construction à haute efficacité énergétique, cela peut entraîner une normalisation de telles pratiques susceptibles d’améliorer le rendement du Canada en ce qui a trait à ses engagements internationaux en matière d’efficacité.

La crise de l’abordabilité et la crise climatique ne peuvent être abordées séparément et les Canadiens ne s’attendent pas à ce qu’elles le soient. Selon un sondage d’opinion publique, près de 9 Canadiens sur 10 sont préoccupés par l’abordabilité du logement, tandis que plus de trois quarts d’entre eux estiment qu’il est important que la construction de nouveaux logements réduise les émissions et renforce la résilience aux changements climatiquesNote de bas de page 191. Par ailleurs, la demande reste supérieure à l’offre, même sur le marché de la location, après les récentes vagues de construction d’appartementsNote de bas de page 192.

Le gouvernement fédéral a annoncé de nouvelles mesures visant à accélérer le rythme de la construction, notamment un complément de 15 milliards $ pour le Programme de prêts pour la construction d’appartements et le nouveau Fonds canadien d’infrastructure pour le logement, doté de 6 milliards $Note de bas de page 193. Le Conseil reconnaît ces progrès et approuve l’engagement de 6 milliards $ sous réserve de l’adoption par les bénéficiaires provinciaux et territoriaux des changements à venir dans le Code national du bâtiment. Le Canada dispose d’une occasion d’une génération de tirer davantage parti de ces nouveaux investissements afin d’aligner les objectifs en matière d’abordabilité, d’énergie et de climat.

« Les économies d’électricité n’améliorent pas seulement la fiabilité et l’abordabilité du réseau..., elles libèrent également plus d’électricité pour les besoins de l’électrification. » [Notre traduction]

Efficacité énergétique Canada

Les gouvernements fédéral, provinciaux, territoriaux et municipaux ont un rôle essentiel à jouer pour encourager la construction et la densification à faible émission de carbone et par conséquent éviter de bloquer davantage d’émissions dans le secteur du bâtiment, optimiser les avantages de l’électrification et garantir l’abordabilité. Le Conseil souscrit largement à l’esprit des recommandations du Groupe de travail pour l’habitation et le climatNote de bas de page 194, qui préconise que le gouvernement fédéral mobilise « le pouvoir de la bourse » pour soutenir conjointement le logement abordable et l’efficacité énergétique.

L’efficacité permet de réduire les coûts énergétiques domestiques

La comparaison des coûts énergétiques annuels moyens des différents types de logements révèle que des économies importantes peuvent être réalisées grâce à l’efficacité énergétique. Les maisons anciennes, qui ont tendance à être moins efficaces, sont confrontées à des coûts énergétiques annuels plus élevés de 29 % par rapport à la moyenne, et de 76 % par rapport aux maisons de même taille nouvellement construites. La rénovation des maisons anciennes pour les mettre au niveau d’une maison moyenne peut réduire les factures d’énergie de près de 800 $ par an. La construction selon les normes de maison passive peut également faire baisser les factures de plus de 900 $ par an par rapport à une nouvelle construction classique, ce qui se traduit par des coûts énergétiques annuels moyens de seulement 1 010 $ pour une maison de 1 500 pieds carrés. En d’autres termes, ne pas construire selon les normes de la maison passive peut ajouter près de 50 000 $ au coût d’exploitation à long terme d’une maison, en grande partie à cause de l’inefficacité du chauffageNote de bas de page 195.

Figure 23 : Coût annuel moyen de l’énergie domestique pour différents types de logements

Les coûts sont représentatifs d’une maison de 140 mètres carrés. Comprend le chauffage et la climatisation, le chauffage de l’eau, les électroménagers et équipements, ainsi que l’éclairage, mais n’inclut pas les coûts énergétiques liés au transport. L’expression « maison ancienne » désigne les maisons construites avant 1946, tandis que l’expression « nouvelle construction » désigne les maisons construites après 2019Note de bas de page 196.

Diagramme à barres comparant les coûts annuels moyens de l’énergie domestique
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Diagramme à barres comparant les coûts annuels moyens de l’énergie domestique entre différents types de logements au Canada. Les quatre types de logements représentés sont les suivants : « Maison ancienne (construite avant 1946) », « Moyenne », « Nouvelle construction (construite après 2019) » et « Maison passive ». Chaque type est représentatif d’une maison de 1 500 pieds carrés et comprend les coûts énergétiques liés au chauffage et à la climatisation, au chauffage de l’eau, aux appareils et équipements, et à l’éclairage. Les frais de transport ne sont pas inclus. Les coûts énergétiques annuels s’échelonnent entre la « maison ancienne » (3 420 $) et la « maison passive » (1 010 $).

Recommandation 23 : Créer un cadre de reddition de comptes en matière d’efficacité énergétique

Le gouvernement fédéral devrait, dans le courant de la prochaine année, adopter un cadre de reddition officiel relatif aux objectifs d’efficacité énergétique et de GAD connexes. Le cadre doit tenir compte des programmes existants aux niveaux provincial et territorial afin d’éviter les doublons.

Détails sur la mise en œuvre

Un cadre de reddition devrait viser les objectifs suivants :

  1. Déterminer l’entité responsable en dernier ressort de la réussite du projet (par exemple, RNCan) et clarifier les exigences en matière d’établissement de rapports au Parlement concernant les progrès réalisés par le Canada dans la mise en œuvre de ses engagements
  2. Établir une méthodologie pour mesurer systématiquement le succès de l’objectif consistant à doubler le taux d’amélioration de l’efficacité énergétique d’ici 2030, tout en adoptant simultanément un objectif connexe pour la flexibilité de la charge
  3. Définir des indicateurs de progrès de deuxième niveau (par exemple, le taux de rénovation domiciliaire, l’efficacité moyenne de la conception des nouveaux logements mis en chantier) qui, ensemble, permettraient d’atteindre l’objectif
  4. Mettre en place une stratégie globale, incluant, mais sans s’y limiter, les composantes abordées dans d’autres recommandations, y compris l’application du principe de primauté de l’efficacité énergétique, visant à atteindre ces objectifs

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les provinces et les territoires disposent des outils nécessaires pour établir leurs propres cadres et plans d’efficacité énergétique et de GAD, y compris la possibilité de fixer des objectifs de rendement élevé pour les nouvelles constructions (comme ce fut le cas en Colombie-Britannique). De même, les municipalités disposent des outils nécessaires pour imposer des exigences en matière de rendement échelonnées pour les bâtiments existants (par exemple, VancouverNote de bas de page 197 et MontréalNote de bas de page 198) et pour adopter des réformes en faveur de la densité afin d’augmenter le nombre de logements tout en réduisant l’étalement urbain.

Recommandation 24 : Aligner les investissements fédéraux dans le logement sur les normes écoénergétiques les plus strictes

À l’instar des récentes annonces faites dans le budget fédéral 2024 concernant le financement des transports en commun qui encouragent la planification de la densité, le Conseil recommande au gouvernement fédéral de veiller à ce que les nouveaux ensembles résidentiels qu’il subventionne (ou soutient de toute autre manière) respectent les exigences les plus strictes du Code modèle national du bâtiment (CMNB) du Canada, tout en incitant à l’adoption de réformes en faveur de la densité. Ces deux mesures sont essentielles pour garantir que les solutions à la crise du logement n’entraînent pas, directement ou par le biais des tarifs de l’électricité, des factures d’énergie trop élevées pour les ménages nouveaux et existants.

Détails sur la mise en œuvre

Veiller à ce que le financement fédéral pour les nouveaux logements :

  1. Exige ou encourage vivement la construction conformément aux exigences les plus strictes du CMNB
  2. Valorise les réalisations des municipalités qui ont adopté des règlements favorables à la densité et qui réduisent la demande d’énergie pour le logement et le transport

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Le Groupe de travail pour l’habitation et le climat a dressé une liste de mesures à prendre par les gouvernements provinciaux, territoriaux et municipaux. Ainsi, les gouvernements provinciaux et territoriaux peuvent adopter les codes du bâtiment les plus stricts et autoriser les municipalités à aller au-delà des dispositions du code du bâtiment en matière de résilience aux changements climatiques et d’efficacité énergétique, à condition qu’elles puissent démontrer qu’elles puissent démontrer la rapidité de l’obtention des permis et les économies réalisées par l’occupant du bâtiment. Les municipalités peuvent modifier le zonage local, ainsi qu’élaborer et mettre en œuvre des programmes incitatifs locaux en matière d’énergie propre.

Soutien fédéral à la gestion de la demande

Le gouvernement fédéral a annoncé un financement important pour accroître la capacité de production d’électricité propre, mais le soutien à la GAD est à la traîne

Dans le budget fédéral 2023, il a été annoncé un financement important pour l’énergie propre, l’accent étant mis sur l’augmentation de l’offre d’électricité renouvelable, notamment par le biais du CII pour l’électricité propre et du CII pour les technologies propresNote de bas de page 199. En outre, le Programme des énergies renouvelables intelligentes et de trajectoires d’électrification (ERITE) a été recapitalisé dans le budget fédéral 2023 avec une augmentation de 3 milliards $, répartis sur 13 ans, pour soutenir les priorités régionales essentielles et les projets menés par les AutochtonesNote de bas de page 200. Cette recapitalisation s’appuie sur le premier cycle de financement du Programme ERITE, annoncé dans les budgets fédéraux 2021 et 2022, qui a alloué plus d’un milliard $ à 106 projets approuvés axés sur le déploiement et le renforcement des capacités en matière d’énergies renouvelables et d’initiatives de modernisation des réseauxNote de bas de page 201.

Le Conseil soutient pleinement ces mesures, ainsi que d’autres soutiens fédéraux en cours en faveur des énergies renouvelables et de la transition énergétique au sens large. Toutefois, le Conseil souligne que, par rapport à la capacité croissante d’électricité renouvelable, le gouvernement fédéral a accordé beaucoup moins d’attention aux initiatives de GAD et de modernisation du réseau, qui sont essentielles pour gérer la demande, optimiser les économies d’énergie et minimiser les besoins d’investissement.

Étant donné que les ressources fédérales sont limitées, le Conseil estime qu’il est nécessaire d’accorder la priorité à la GAD dans les soutiens fédéraux.

Recommandation 25 : Accorder la priorité à la gestion de la demande dans les aides fédérales

Compte tenu des contraintes budgétaires actuelles, le Conseil recommande au gouvernement fédéral de réorienter le Programme ERITE vers le soutien de solutions axées sur la demande, notamment l’efficacité énergétique, la flexibilité de la demande et les initiatives connexes de modernisation du réseau. Comme solution de substitution, ou en complément, le gouvernement fédéral pourrait allouer des fonds supplémentaires spécifiquement pour la modernisation du réseau et les initiatives de GAD, en complétant les programmes existants.

Détails sur la mise en œuvre

Pour ce faire, le gouvernement fédéral devrait :

  1. Veiller à ce que la mise à jour du Programme ERITE après recapitalisation dans le budget 2023 comprenne une réduction progressive du soutien aux projets d’énergie renouvelable établis, en réaffectant progressivement ces fonds à des solutions de GAD, y compris l’efficacité énergétique des systèmes de distribution, la flexibilité de la demande et les technologies connexes de modernisation du réseau de distribution; et veiller à ce que les entités consommatrices d’électricité et les entités de regroupement de projets soient des promoteurs admissibles
  2. Inclure des exigences imposant aux promoteurs de partager les données et les résultats de la mise en œuvre des projets, y compris la diffusion publique dans un format de données normalisé, afin de faciliter une large adoption de technologies éprouvées et novatrices qui améliorent l’efficacité énergétique des systèmes de distribution et la flexibilité de la demande, après l’achèvement des projets de démonstration, de déploiement et des projets pilotes soutenus par le gouvernement fédéral
  3. Lors de l’établissement des priorités pour l’évaluation des demandes de projet, il convient de tenir compte de l’harmonisation avec les priorités des feuilles de route provinciales et territoriales en matière d’énergie liées à la GAD

Voir la recommandation 22 pour en savoir plus sur les mesures de soutien connexes.

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

La plupart des provinces et des territoires mènent déjà, à des degrés divers, des actions en faveur de la GAD. À l’avenir, ils peuvent soutenir la priorisation de la demande en veillant à ce qu’elle soit pleinement évaluée et intégrée dans les feuilles de route et les plans énergétiques qu’ils publient, et en apportant un financement suffisant, directement ou par l’intermédiaire des services publics réglementés, pour garantir la mise en œuvre de toutes les mesures de GAD rentables.

Pour permettre au gouvernement fédéral de procéder à l’évaluation continue de ses programmes, les gouvernements provinciaux et territoriaux peuvent également faciliter le partage des résultats des projets soutenus par leurs programmes dans des formats de données normalisés. Cela peut contribuer à l’évaluation de l’efficacité du programme, ce qui permet d’évaluer la conception du programme, notamment en ce qui concerne l’impact du financement public et du soutien au secteur de l’électricité.

Exploiter au maximum les leviers fédéraux

Constatations

Des changements structurels à l’échelle du marché sont nécessaires pour réaliser des économies à long terme dans le cadre d’actions visant à promouvoir des solutions axées sur la demande

Les services publics, les opérateurs de réseaux et les organismes provinciaux et territoriaux offrent depuis de nombreuses années des programmes destinés à encourager l’adoption de solutions énergétiques axées sur la demande. De nombreux services publics investissent dans des programmes de GAD lorsque ceux-ci permettent de réaliser des économies à un coût inférieur à celui des investissements liés à l’offre que ces programmes permettent d’éviter. La politique fédérale peut compléter ces initiatives au moyen des changements structurels nécessaires à l’échelle du marché en vue de favoriser des économies à long terme, notamment des normes d’efficacité relatives aux équipements consommateurs d’énergie, des codes du bâtiment que les provinces et les territoires peuvent adapter et adopter, des règles d’approvisionnement qui tirent parti du pouvoir d’achat du gouvernement fédéral pour encourager le développement de chaînes d’approvisionnement, lesquelles peuvent ensuite s’étendre aux marchés du secteur privé, et des efforts ciblés pour relever les défis communs liés à la chaîne d’approvisionnement.

Les normes d’efficacité énergétique applicables aux équipements peuvent permettre aux Canadiens de réaliser des économies d’énergie et améliorer la compétitivité économique

L’amélioration de l’efficacité des produits consommateurs d’énergie, tels que les équipements de chauffage, les moteurs électriques et d’autres appareils, peut réduire de manière significative les émissions de gaz à effet de serre et d’autres polluants. En effet, les pompes à chaleur à haut rendement pour climat froid offrent une occasion unique de s’assurer que le réglage de systèmes de climatisation centrale permet également d’assurer le chauffage, offrant ainsi un chauffage très efficace à des coûts différentiels peu élevésNote de bas de page 202.

Toutefois, les différences entre les normes d’efficacité énergétique ou d’essai de ces produits peuvent entraver les échanges et les investissements transfrontaliersNote de bas de page 203, ce qui augmente les coûts pour les Canadiens. Les normes du Canada sont généralement harmonisées avec celles des États-Unis, son principal partenaire commercial, mais sont quelquefois à la traîne. Dans l’ensemble, il est nécessaire de mieux suivre l’évolution des technologies et des marchés afin qu’elle soit dûment prise en compte dans les normes de consommation relatives aux produits consommateurs d’énergie.

La réduction des émissions des bâtiments est également une mesure essentielle pour atteindre les objectifs du Canada en matière de climat et d’abordabilité. (Les bâtiments du Canada représentent 13 % des émissions nationales de gaz à effet de serre, ou 18 % si l’on inclut les émissions liées à l’électricitéNote de bas de page 204.)

Les mesures requises englobent l’amélioration de l’enveloppe des bâtiments et des appareils de chauffage et de refroidissement, ainsi que le remplacement des combustibles fossiles (mazout, diesel et gaz naturel) par l’électricité propre. Le gouvernement fédéral peut contribuer de manière significative à l’amélioration de l’efficacité énergétique à travers l’élaboration de codes nationaux du bâtiment. Le fait d’encourager l’adoption de ces codes par les provinces et les territoires permet de promouvoir l’électrification, ainsi que de réaliser des économies et de réduire les émissionsNote de bas de page 205.

Codes du bâtiment de la Colombie-Britannique

L’Energy Step Code de la Colombie-Britannique est pionnier dans l’adoption d’une approche novatrice de l’efficacité énergétique dans les bâtiments au Canada.

Le nouveau code est structuré en « étapes » qui fixent des exigences de rendement de plus en plus strictes pour les bâtiments, la finalité étant de rendre toutes les nouvelles constructions carboneutres d’ici 2032Note de bas de page 206. Cette approche permet non seulement de promouvoir une meilleure efficacité énergétique, mais aussi d’encourager l’innovation et l’utilisation de technologies avant-gardistes dans le domaine de la construction. Les autorités locales de la Colombie-Britannique sont habilitées à encourager ou à imposer le respect de ces mesures, ce qui leur confère une certaine souplesse et favorise leur adoption à grande échelle.

Élaboré conjointement par les administrations locales, les intervenants de l’industrie, les services publics et le gouvernement provincial, l’Energy Step Code de la Colombie-Britannique constitue la référence en matière de codes du bâtiment progressifs permettant de réaliser des économies d’énergie considérables et de jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre les changements climatiques. Il constitue également un modèle pour les autres régions désireuses d’améliorer leur rendement énergétique et de parvenir à la décarbonation.

Le gouvernement fédéral peut donner l’exemple en adoptant la Stratégie pour un gouvernement vert

Le gouvernement fédéral possède le plus grand nombre de biens immobiliers au Canada, dont 38 870 bâtiments d’une superficie totale de 27,6 millions de mètres carrésNote de bas de page 207. Grâce à ce patrimoine important, le gouvernement fédéral est en excellente position pour donner l’exemple. La Stratégie pour un gouvernement vert a déjà été mise en place pour soutenir cet effort et pour permettre au gouvernement fédéral de se positionner en tant que leader mondial en matière de gestion et d’exploitation de biens immobiliers carboneutres.

Bien que la Stratégie définisse des objectifs clés visant à améliorer la performance environnementale des biens immobiliers et de leurs activités, elle présente d’importantes lacunes en termes de couverture, d’établissement de rapports et de partage des pratiques exemplaires. En effet, la Stratégie ne prévoit pas de cadre pour l’établissement de rapports permettant d’évaluer le rendement. Bien qu’elle s’applique aux ministères fédéraux les plus concernés, elle ne concerne pas les sociétés d’État fédérales (y compris les ports et les aéroports), qui représentent 13 % des biens immobiliers fédéraux.

Recommandation 26 : Mettre à jour les normes relatives aux appareils électroménagers et aux équipements

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral d’accélérer le développement et l’adoption de produits écoénergétiques en prenant les mesures suivantes : i) moderniser la loi et les règlements canadiens sur l’efficacité énergétique, afin d’inclure les électroménagers et équipements « intelligents » qui permettent de gérer les pointes de demande, ainsi que s’aligner sur les États-Unis et inclure les coûts évités du système liés aux économies d’énergie dans la prise de décision sur les normes; et ii) appuyer la mise à jour, l’élargissement et l’adoption de normes volontaires de rendement des produits, y compris le programme ENERGY STAR Canada.

Détails sur la mise en œuvre

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral ce qui suit :

  1. Réviser les règlements en vigueur en matière d’efficacité énergétique pour :
    1. Favoriser la flexibilité des charges grâce à la normalisation des exigences relatives à l’interopérabilité des principaux équipements et électroménagers avec les dispositifs et les commandes intelligents
    2. Étendre la portée des règlements afin d’exiger des fonctions de chauffage dans les climatiseurs centraux lorsque cela s’avère rentable
    3. S’aligner au minimum sur les normes américaines pour la plupart des électroménagers, sauf pour les appareils de chauffage et les équipements connexes pour lesquels les spécifications canadiennes méritent d’être améliorées
  2. Modifier la Loi sur l’efficacité énergétique afin de créer les outils permettant d’intégrer la valeur des coûts d’investissement à long terme évités dans le cadre d’un scénario carboneutre dans les analyses de normalisation et de coûts-avantages
  3. Maximiser l’utilisation de normes d’efficacité énergétique supérieures aux exigences réglementaires concernant les électroménagers et autres produits consommateurs d’énergie. Il est notamment question de mettre à jour et d’élargir les normes volontaires de rendement des produits, y compris le programme ENERGY STAR Canada. Pour stimuler l’adoption de ces normes, le gouvernement fédéral pourrait également fournir des conseils ou un soutien financier aux fabricants canadiens pour qu’ils obtiennent la certification ENERGY STAR pour les produits conformes à des normes d’efficacité plus élevées que celles exigées par le règlement, ce qui leur donnerait un avantage concurrentiel.

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les gouvernements provinciaux et territoriaux, ainsi que les autres utilisateurs peuvent adopter des politiques visant à promouvoir l’achat de produits certifiés ENERGY STAR. Les provinces, les fabricants et les organismes de normalisation peuvent collaborer à l’élaboration de la loi sur l’efficacité énergétique et aux modifications du règlement.

Le secteur privé a également un rôle important à jouer. Les fabricants peuvent accroître l’efficacité énergétique de leurs produits au-delà des exigences réglementaires de la Loi sur l’efficacité énergétique et les faire certifier ENERGY STAR afin d’améliorer leur compétitivité et leur rendement en matière d’électricité.

Recommandation 27 : Faire avancer la modernisation des codes du bâtiment

Prenant acte de la proposition de financement de la modernisation des codes du bâtiment formulée dans le budget fédéral 2024, le Conseil recommande au gouvernement fédéral de moderniser les codes nationaux du bâtiment dans le cadre de la Stratégie pour des bâtiments verts afin d’y intégrer des exigences plus ambitieuses en matière de technologies existantes, d’efficacité énergétique et de résilience aux changements climatiques, tout en apportant un soutien financier et autre accru aux provinces et territoires aux fins de l’adoption de tels codes.

Détails sur la mise en œuvre

  1. Moderniser le CMNB afin de tenir compte des technologies et des pratiques existantes et d’intégrer des exigences plus ambitieuses en matière de codes modèles, tout en simplifiant et en harmonisant ces exigences. Veiller à ce que le CMNB intègre au maximum les avantages connexes liés à l’efficacité énergétique et à la résilience aux changements climatiques, notamment en ce qui concerne le chauffage et les limites de température intérieure sûre. Plus précisément, il sera essentiel de mettre à jour le code aux fins suivantes :
    1. Évaluer les avantages en termes de réduction des émissions des équipements électriques efficaces dans les nouveaux bâtiments
    2. Évaluer l’ensemble des avantages pour les réseaux électriques, les consommateurs et les objectifs de réduction des émissions des bâtiments écoénergétiques interactifs avec le réseau électrique, notamment en vue de la réduction des demandes de pointe, de l’intégration de l’énergie renouvelable variable et de l’amélioration de la fiabilité du réseau
  2. Améliorer le programme du Fonds d’accélération des codes afin de fournir un soutien financier et autre accru aux provinces et territoires pour encourager l’adoption de codes ou des codes les plus stricts en élargissant le contenu du programme et en augmentant le financement disponible
  3. Renforcer la capacité du Comité canadien de l’harmonisation des codes de construction à élaborer de nouvelles dispositions relatives à l’atténuation des changements climatiques et à l’adaptation à ses effets pour l’adoption des codes de 2030Note de bas de page 208
  4. Tirer parti des investissements réalisés par la BIC pour soutenir des codes plus stricts et veiller à ce que les développements et les rénovations durables respectent les codes et les normes en matière de consommation énergétique nette zéro et de résilience aux changements climatiquesNote de bas de page 209

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les provinces et les territoires peuvent adopter les normes réglementaires de codes du bâtiment strictes afin de s’assurer que les nouveaux logements construits sont à consommation énergétique nette zéro, résilients aux changements climatiques et durables. Les municipalités peuvent soutenir la décarbonation des bâtiments à travers la mise en œuvre des normes et d’autres politiques telles que celles relatives à l’aménagement des terres.

Recommandation 28 : Élargir la Stratégie pour un gouvernement vert

Le Conseil recommande au gouvernement fédéral : i) d’améliorer sa Stratégie pour un gouvernement vert afin de rendre obligatoire la participation des sociétés d’État et d’autres organismes et propriétés qui ne sont pas couverts actuellement; ii) d’intégrer les normes obligatoires de rendement des bâtiments et d’accélérer la mise en œuvre des achats écologiques; et iii) d’améliorer les rapports d’étape et le partage des pratiques exemplaires.

Détails sur la mise en œuvre

Le gouvernement fédéral devrait :

  1. Obliger les sociétés d’État fédérales et les autres entités gouvernementales à participer au programme si elles ne sont pas couvertes actuellement et fournir un soutien financier supplémentaire pour la mise en œuvre si nécessaire
  2. Intégrer les normes de rendement des bâtiments dans la Stratégie pour un gouvernement vert afin de montrer l’exemple, tout en atténuant les risques de manière proactiveNote de bas de page 210
  3. Améliorer les rapports d’étape, notamment en ce qui concerne les données régionales et les émissions des sociétés d’État, ainsi que l’approvisionnement, afin de mieux communiquer les résultats aux Canadiens. Partager les pratiques exemplaires avec les gouvernements infranationaux et d’autres institutions à travers le pays
  4. Adopter une approche systémique afin de fixer des jalons pour le suivi du rendement et des progrès

Que peuvent faire les provinces et les territoires?

Les provinces, les territoires et les municipalités peuvent adopter, mettre en œuvre et accélérer des stratégies similaires dans leurs propres administrations (comme déjà le cas pour certains) afin de montrer l’exemple et de tirer parti des dépenses opérationnelles, de l’approvisionnement et d’autres activités pour optimiser la performance environnementale et l’efficacité énergétique. Les sociétés d’État et autres organismes gouvernementaux peuvent être concernés, le cas échéant.

Annexe A : Planification énergétique

Caractéristiques proposées pour les instruments de planification énergétique

L’annexe suivante présente les caractéristiques suggérées pour les mandats et les instruments des agences de l’énergie, tels que les évaluations des trajectoires et les feuilles de route en matière d’énergie. Comme indiqué dans le présent rapport, la clarté de la vision peut orienter les intervenants du secteur dans l’exercice de leurs fonctions et faciliter leur accès aux mécanismes de soutien.

Pour de nombreuses institutions publiques clés du secteur de l’électricité, ce sont les gouvernements provinciaux ou territoriaux qui s’appuieraient sur ces caractéristiques suggérées. Ces caractéristiques ne constituent pas des exigences officielles ou obligatoires, mais des suggestions visant à soutenir l’élaboration de ces instruments. Le Conseil fournit ces éléments à titre d’aide au travail, tout en reconnaissant fermement l’autorité et la compétence des provinces et des territoires dans l’administration de leurs organismes conformément à leurs droits constitutionnels.

Feuilles de route en matière d’énergie

Caractéristiques proposées pour les feuilles de route en matière d’énergie

Définition : Une feuille de route en matière d’énergie peut être définie comme une stratégie globale ou un plan de haut niveau élaboré par un gouvernement provincial ou territorial qui oriente le développement d’une filière énergétique carboneutre. Elle devrait présenter clairement la vision et les objectifs globaux prévus par le gouvernement dans le cadre de la transition énergétique, tout en mettant l’accent sur les mesures prioritaires nécessaires à court termeNote de bas de page 211.

Principes fondamentaux des feuilles de route en matière d’énergie

Le Conseil recommande les lignes directrices suivantes pour définir le champ d’application d’une feuille de route efficace :

  1. Être axée sur l’objectif de carboneutralité. La feuille de route en matière d’énergie doit clairement énoncer l’objectif de carboneutralité d’ici 2050. Cet objectif devrait également se refléter dans les lois et les directives qui définissent le mandat des organismes de réglementation, des opérateurs de réseaux, des autorités chargées de la délivrance des permis et des approbations, et des services publics de la Couronne (voir la recommandation 4).
  2. Expliquer clairement la vision, les objectifs et les actions du gouvernement. Présenter clairement les objectifs qui sous-tendent la feuille de route, les résultats que la feuille de route tente d’atteindre d’ici 2050, les étapes quinquennales et les actions réglementées à court terme.
  3. Effectuer des mises à jour régulières. Veiller à ce que la feuille de route et les priorités qu’elle définit soient mises à jour au moins tous les 5 ans. (Lorsque de nouvelles solutions ou options sont proposées entre les mises à jour, les gouvernements devraient pouvoir émettre des directives connexes ou apporter des modifications ciblées aux feuilles de route.) Cela sera essentiel pour s’assurer que les feuilles de route restent pragmatiques, qu’elles entraînent les changements spécifiques nécessaires et qu’elles restent pertinentes par rapport à l’évolution de la filière énergétique.
  4. Garantir une harmonisation entre les acteurs de la filière énergétique. Exiger des entités ou organismes responsables qu’ils rendent compte publiquement, au moins deux fois par an, au gouvernement provincial ou territorial, de la manière dont ils soutiennent les objectifs de l’administration et, recenser les progrès et les obstacles afin d’éclairer les gouvernements provinciaux dans l’élaboration des politiques en cours.
  5. Moderniser la gouvernance et le règlement en matière d’énergie. Déterminer et fournir des orientations sur les réformes clés nécessaires pour faire progresser les cadres réglementaires et de gouvernance en matière d’énergie existants afin de les aligner sur les objectifs visant à parvenir à une filière énergétique carboneutre.
  6. Le champ d’application doit comprendre toutes les filières énergétiques. Fournir des orientations sur les mesures et les réformes nécessaires pour l’ensemble de la filière énergétique (par exemple, les réseaux d’électricité et de gaz), en encourageant la planification intégrée et le déploiement des ressources et en abordant l’ensemble du bouquet énergétique national qui sera nécessaire en 2050. Les exportations d’énergie vers d’autres pays peuvent être considérées comme hors du champ d’application d’une feuille de route.
  7. Élaborer un processus d’engagement participatif. Veiller à ce que les titulaires de droits autochtones, les intervenants clés et le grand public disposent du soutien et des ressources nécessaires pour participer de manière significative à l’élaboration de la feuille de route en matière d’énergie, et aient la possibilité de donner leur avis sur les mises à jour régulières.
  8. Procéder à l’évaluation régulière des actions. Outre les étapes quinquennales et les mises à jour périodiques de la feuille de route, le gouvernement devrait s’engager à rendre compte de manière transparente, au moins deux fois par an, des actions décrites dans la feuille de route et à faire le point sur les progrès réalisés.
  9. Déterminer et planifier les besoins du marché du travail. Décrire l’ampleur prévue des besoins en main-d’œuvre pour appuyer la feuille de route en matière d’énergie, y compris les mesures spécifiques, le financement et la collaboration avec les organisations syndicales qui contribueront à assurer une formation adéquate et la disponibilité des compétences requises.
Avis sur les objectifs et les actions

Les conseils suivants portent sur certains des enjeux majeurs qui devraient être abordés dans une feuille de route en matière d’énergie afin d’offrir la certitude nécessaire aux acteurs de la filière énergétique et aux autres intervenants. Certes les feuilles de route en matière d’énergie doivent être spécifiques cependant, elles sont destinées à orienter, et non à remplacer, le travail plus détaillé des planificateurs de systèmes, des services publics et des organismes de réglementation.

  1. Fournir des orientations sur l’étendue et le calendrier de l’électrification dans des secteurs tels que les transports, l’industrie et les bâtiments, en tenant compte des meilleurs renseignements disponibles sur les trajectoires de décarbonation rentables et en tirant parti de l’évaluation des trajectoires et d’autres connaissances en matière de modélisation dans la mesure du possible.
  2. Préciser le rythme souhaité de décarbonation du réseau électrique, l’ampleur prévue de la croissance de la charge et, si possible, donner des indications sur les secteurs spécifiques qui nécessiteront des solutions autres que l’électrification (par exemple, les industries ou les utilisations finales du secteur des transports qui peuvent privilégier la consommation d’hydrogène ou de gaz naturel renouvelable).
  3. Le cas échéant, formuler des intentions concernant le bouquet énergétique et préciser les technologies de production dans lesquelles le gouvernement souhaite jouer un rôle (et celles qu’il souhaite éviter). (Dans certaines administrations, cette clarté peut concerner davantage la manière dont le marché ou le modèle d’approvisionnement doit exploiter les forces du marché pour orienter le bouquet énergétique.)
  4. Déterminer les zones géographiques prioritaires pour des investissements spécifiques dans les infrastructures, y compris des délais de haut niveau.
  5. Donner la priorité à l’intégration du stockage d’énergie, de la GAD et des RED et la renforcer, en définissant des stratégies visant à lever les obstacles réglementaires et politiques et à garantir qu’elles seront considérées comme une catégorie de ressources.
  6. Faire part des intentions en matière de collaboration et d’intégration interrégionales, notamment en établissant des processus pour explorer et développer le transport interrégional.
  7. Définir et utiliser des indicateurs et des objectifs pour évaluer les progrès (notamment les émissions, l’intensité des émissions, la part de l’électricité dans le potentiel d’expansion de la capacité d’utilisation finale).
  8. Lorsque les détails sur les trajectoires restent incertains ou inexistants, il convient de préciser quand des décisions plus spécifiques devraient être prises, ainsi que les conditions et les résultats qui éclaireront la prise de décision.
  9. Le cas échéant, fournir des orientations sur la manière dont les services publics et les organismes de réglementation doivent garantir l’abordabilité et l’équité (en particulier pour les collectivités à faible revenu, marginalisées et rurales), et indiquer le rôle que jouera la politique gouvernementale. Les feuilles de route provinciales et territoriales en matière d’énergie peuvent définir une fourchette d’impacts tarifaires acceptables. Cette fourchette ne représente pas une approbation présumée, mais indique aux organismes de réglementation que, si tous les autres aspects d’une proposition servent l’intérêt public, les incidences sur la facture dans la fourchette ne doivent pas justifier à elles seules le rejet d’une demande.
  10. Définir clairement le rôle de la mobilisation publique dans l’information et la mise en œuvre de la feuille de route en matière d’énergie. Cela devrait inclure :
    1. La participation du public à l’élaboration de la feuille de route en matière d’énergie du gouvernement
    2. Mobilisation proactive auprès des Autochtones et engagement à promouvoir la réconciliation et l’équité
    3. Des précisions sur la manière dont la participation des collectivités doit être prise en compte dans la planification des services publics et la prise de décision des organismes de réglementation
  11. Inclure des orientations pour faire face aux impacts des changements climatiques, par exemple l’amélioration de l’adaptation et de la résilience de l’infrastructure et des opérations.
  12. Fournir des orientations pour le partage de données et de renseignements avec des homologues d’autres provinces et territoires.
  13. Évaluer les incidences sur le marché du travail, y compris les projections concernant les besoins en main-d’œuvre nécessaires pour entreprendre la construction des infrastructures et les autres actions décrites dans la feuille de route. Proposer des orientations claires, des engagements de financement et des actions de collaboration avec les syndicats, l’industrie et les établissements de formation afin de garantir la disponibilité, le maintien et l’accroissement de la main-d’œuvre. Envisager également de mettre en place des mécanismes spécifiques pour garantir la disponibilité de la main-d’œuvre, tels que des accords de travail sur les projets.

Évaluations des trajectoires

Caractéristiques proposées pour les évaluations des trajectoires

Définition : Les évaluations des trajectoires peuvent être définies comme des études des trajectoires disponibles et crédibles pour parvenir à la carboneutralité d’ici 2050. Leur réalisation est essentielle pour assurer une transition énergétique ordonnée, car elles permettent d’évaluer les choix et les compromis, de déterminer les actions prioritaires et de réunir les intervenants clés pour mener des discussions fondées sur des données probantes et parvenir à une compréhension commune de l’avenir du bouquet énergétique d’une administrationNote de bas de page 212.

Pratiques exemplaires

Les gouvernements qui souhaitent placer l’évaluation des trajectoires au cœur de leur stratégie de transition énergétique devraient tenir compte des pratiques exemplaires suivantes :

  1. Exhaustivité : Une évaluation des trajectoires doit prendre en compte toutes les trajectoires crédibles vers l’objectif de carboneutralité comme des scénarios, indépendamment des préférences établies en matière de technologies ou de trajectoire, en tenant compte de l’incertitude inhérente à la transition. Pour ce faire, il est possible de commander une évaluation des trajectoires à des spécialistes indépendants ou de déployer un effort gouvernemental qui englobe tous les scénarios potentiels et prenne en compte des incertitudes liées notamment aux coûts et à la disponibilité des technologies, ainsi qu’à l’action climatique mondiale et aux prix du pétrole.
  2. Une modélisation complète : La modélisation de l’évaluation doit comprendre une évaluation des émissions de gaz à effet de serre associées à tous les aspects de l’économie, y compris les interactions entre tous les types d’énergie (pas seulement l’électricité).
  3. Transparence : La sélection des modèles, l’élaboration des scénarios et le choix des données d’intrants et des hypothèses doivent être transparents. De plus, les résultats de tous les scénarios envisagés doivent être soumis à l’examen du public.
  4. Haut niveau : Une évaluation des trajectoires ne devrait pas viser à remplacer la planification et la modélisation plus détaillées du réseau électrique effectuées par les opérateurs de réseaux et les services publics (qui, par exemple, auront une représentation plus détaillée de l’adéquation des ressources, de l’exploitabilité et des besoins de transport). Une évaluation des trajectoires à l’échelle de l’économie peut notamment s’appuyer sur la modélisation plus détaillée spécifique à un réseau électrique, une région ou un secteur donné pour améliorer les données d’intrants et les hypothèses qu’elle formule dans le cadre de l’examen de différents scénarios.
  5. Récurrence : Pour s’assurer que la stratégie énergétique d’une administration reste pertinente, une évaluation des trajectoires doit être commandée à nouveau à intervalles réguliers (très probablement tous les 2,5 à 5 ans). Cela permet d’inclure de nouveaux scénarios et de prendre en compte l’évolution des coûts et de la disponibilité des technologies, les changements macroéconomiques et l’évolution des connaissances issues d’une modélisation plus détaillée portant sur des secteurs, des technologies et des régions spécifiques.
  6. Consultation : Il est essentiel de bien réfléchir aux données d’intrants, à l’élaboration des scénarios et aux hypothèses utilisées lors d’une modélisation. De nombreux choix ou hypothèses sont très subjectifs et doivent être déterminés en consultation avec les spécialistes et les intervenants locaux (y compris les organismes de réglementation du réseau électrique, les distributeurs d’énergie, les administrateurs gouvernementaux, les organisations syndicales et de la société civile, les organisations de défense des intérêts des consommateurs, et les spécialistes en politique municipale et extérieure), ainsi qu’avec les titulaires de droits autochtones.
Avis sur la portée de la modélisation

Le Conseil donne les conseils suivants lorsqu’il s’agit de commander ou d’entreprendre une évaluation des trajectoires.

Elle devrait :

  1. Être définie par un exercice de modélisation à l’échelle de l’économie, qui évalue la demande potentielle d’énergie de tous les secteurs dans le cadre d’un ensemble de scénarios établis et crédibles qui examinent toutes les trajectoires crédibles permettant d’atteindre la carboneutralité
  2. Fournir des preuves suffisantes pour éclairer les décisions et évaluer les solutions qui permettent d’atteindre les objectifs en matière d’émissions tout en privilégiant le rapport coût-efficacité
  3. Être menée en tenant suffisamment compte du secteur de l’électricité, de manière détaillée et précise, que ce soit au cours de l’évaluation elle-même ou par le biais d’une modélisation distincte des services publics (et idéalement les deux), afin d’éclairer les futures itérations de l’évaluation. Cela implique de faciliter la compréhension des impacts de la demande de pointe, des incidences de la distribution et du transport, ainsi que de l’exploitabilité et des besoins d’adéquation des ressources
  4. Intégrer une représentation du commerce de l’énergie avec les administrations extra-provinciales (les hypothèses utilisées pour déterminer cette représentation doivent être déterminées en consultation avec les partenaires commerciaux). Cela peut être pris en compte dans l’élaboration des scénarios et les hypothèses utilisées pour représenter la disponibilité des importations et la demande d’exportations
  5. Inclure une représentation des principales influences macroéconomiques, telles que les hypothèses sur les prix de l’énergie à l’échelle mondiale, la croissance démographique, la rigueur de la politique climatique mondiale, les taux d’intérêt, etc.
  6. Prendre en compte la prise de décision financière et les choix comportementaux réalistes, en tenant notamment compte de l’hétérogénéité du marché et des préférences des consommateurs
  7. Être capable de représenter les trajectoires de réduction actuelles et émergentes, y compris le remplacement de combustible et le mélange de combustibles, l’efficacité énergétique, la GAD, les ressources énergétiques distribuées (RED), le stockage de l’énergie, le captage et le stockage du carbone, la gestion des émissions des procédés et les procédés industriels à faible teneur en carbone. Le modèle devrait également tenir compte de la baisse des coûts d’investissement des technologies grâce à l’apprentissage par la pratique et aux économies d’échelle
  8. Fournir des résultats chaque année jusqu’en 2050
  9. Prendre en compte les effets des changements climatiques sur la disponibilité des différentes ressources et les répercussions financières des phénomènes météorologiques (ainsi que les dépenses connexes pour améliorer la fiabilité et la résilience de la filière énergétique)
Avis sur la création et l’analyse de scénarios

Le Conseil donne les conseils suivants pour la conception et l’analyse des scénarios d’évaluation des trajectoires :

  1. Utiliser une combinaison de scénarios descriptifs et normatifs pour explorer les trajectoires permettant d’atteindre la carboneutralité
  2. Si une approche descriptive est adoptée, l’objectif est de modéliser les interventions politiques et technologiques existantes et futures, et de décrire leur impact sur la transition de la filière énergétique :
    1. Modéliser un scénario de référence qui comprend les politiques fédérales et provinciales/territoriales existantes
    2. Comparer le scénario de référence à un scénario qui s’appuie sur les politiques existantes et en accroît l’ambition afin de parvenir à la carboneutralité d’ici 2050
    3. Continuer à ajuster les hypothèses politiques et technologiques du scénario ambitieux jusqu’à ce qu’il permette d’atteindre la carboneutralité en 2050
  3. Si une approche normative est adoptée, l’objectif est de fixer un objectif en matière d’émissions et de comprendre les trajectoires vers l’atteinte de cet objectif :
    1. Modéliser un scénario de référence qui comprend les politiques fédérales et provinciales/territoriales existantes
    2. Appliquer des contraintes en matière d’émissions (c’est-à-dire la carboneutralité d’ici 2040, 2045 ou 2050) et observer l’évolution de chaque secteur économique en réponse à ces contraintes
  4. Les hypothèses sur lesquelles repose la conception des scénarios doivent être cohérentes dans chaque scénario. Ainsi, dans un scénario où l’on suppose que des objectifs de carboneutralité seront atteints au niveau mondial, la demande de combustibles fossiles devrait être faible et les prix des produits de base devraient refléter cette situation.
  5. De nombreuses incertitudes sont liées aux technologies et aux ressources qui joueront un rôle important dans la transition de l’économie vers la carboneutralité. Une analyse de sensibilité doit être réalisée dans le cadre des exercices de modélisation afin de prendre en compte et de comprendre l’impact de ces incertitudes sur les trajectoires. Les paramètres suivants sont associés à des incertitudes importantes et doivent être testés et évalués dans le cadre de différents scénarios afin de garantir des analyses de sensibilité appropriées :
    1. Les coûts et les délais de mise sur le marché des technologies émergentes telles que les technologies d’utilisation finale de l’hydrogène, les petits réacteurs modulaires et la capture directe dans l’air
    2. Le taux d’adoption des technologies, y compris la coproduction et d’autres formes d’approvisionnement décentralisé
    3. Les contraintes liées à l’approvisionnement en biomasse et autres combustibles, ainsi que les limites liées à l’offre de main-d’œuvre ou aux chaînes d’approvisionnement et inhérentes à des technologies spécifiques, le cas échéant (la capture directe dans l’air, le captage et le stockage du carbone, etc.)
    4. La demande d’exportations d’énergie et de produits par les États-Unis et d’autres pays, y compris l’électricité, le pétrole, le gaz naturel liquide, l’hydrogène, les métaux et les minéraux, principalement à mesure que les processus de production deviennent de plus en plus électrifiés
    5. La politique intérieure, y compris les politiques fédérales annoncées et les politiques annoncées dans d’autres provinces et territoires
    6. L’action climatique mondiale et les prix du pétrole à l’échelle mondiale, car ils ont un impact majeur sur le secteur pétrolier et gazier du Canada
Avis sur les résultats et les paramètres

Afin d’éclairer les décisions politiques et de fournir des renseignements aux intervenants clés, tels que les opérateurs de réseaux, les paramètres suivants devraient être inclus dans les rapports sur les résultats des modèles pour chaque scénario examiné :

  1. La consommation d’énergie finale par type de combustible dans chaque secteur économique
  2. Les émissions annuelles et cumulées de gaz à effet de serre par secteur
  3. Les coûts totaux actualisés des filières énergétiques
  4. Les incidences économiques (notamment le PIB)
  5. Les parts de marché des technologies d’utilisation finale dans chaque secteur économique (par exemple, le pourcentage de véhicules électriques dans le secteur des transports ou de pompes à chaleur dans le secteur du bâtiment)
  6. Les délais, l’ampleur et la combinaison des ajouts de capacité (y compris la production, le transport et le stockage) dans le secteur de l’électricité
  7. La production d’électricité par type
  8. Une représentation de haute qualité des différents profils de charge et des répercussions sur les besoins du réseau (par exemple, des journées typiques)

Réformes des mandats actualisées et clarifiées

Caractéristiques proposées pour les mandats actualisés et clarifiés

Définition : La modernisation des cadres réglementaires et de gouvernance régissant les activités des organismes de réglementation de l’énergie, des services publics et des planificateurs de systèmes est une mesure importante visant à parvenir au rythme, à l’échelle et à l’innovation nécessaires pour assurer de manière rentable la transition énergétique tout en atteignant les objectifs climatiques.

Principes fondamentaux

Les gouvernements peuvent prendre en compte les principes fondamentaux suivants lorsqu’ils cherchent à moderniser les cadres réglementaires et de gouvernance régissant leurs filières énergétiquesNote de bas de page 213 :

  1. Objectif d’énergie carboneutre : Intégrer de nouveaux objectifs dans les lois et les directives d’habilitation des organismes de réglementation, des opérateurs de réseaux de services publics de la Couronne et des autorités chargées de la délivrance des permis et des approbations, qui exigent la prise en compte des objectifs climatiques dans les règlements, la gestion et l’exploitation de la filière énergétique.
  2. Règlement global sur l’énergie : Assurer la coordination de la planification de la filière énergétique entre les différentes sources d’énergie (y compris l’électricité et le gaz naturel, ainsi que les sources émergentes comme l’hydrogène). Cela pourrait nécessiter l’intervention d’un organisme de réglementation unique pour toutes les sources d’énergie réglementées.
  3. Mettre en place des cadres réglementaires solides et flexibles : Veiller à ce que les organismes de réglementation, les opérateurs de réseaux et les services publics puissent adopter des approches et des technologies novatrices pour pallier l’incertitude et déployer les ressources nécessaires au rythme et à l’échelle requis. Les organismes de réglementation devront définir des cadres novateurs sur lesquels les entités réglementées pourront s’appuyer pour soumettre des propositions d’investissements nettement supérieurs à la moyenne nécessaires à la production d’énergie carboneutre (par exemple, la tarification incitative personnalisée de la Commission de l’énergie de l’Ontario, les applications pluriannuelles du coût du service), pour soutenir le déploiement de nouvelles technologies et pour développer l’offre et l’infrastructure de soutien en prévision de la demande.
  4. Production de rapports : Exiger des organismes de réglementation qu’ils présentent au moins deux fois par an au gouvernement provincial ou territorial un rapport public expliquant comment leurs décisions et processus s’alignent sur la feuille de route de la province en matière d’énergie carboneutre. Les organismes de réglementation devraient également rendre compte des défis ou des obstacles à la mise en œuvre, ce qui peut contribuer à améliorer l’élaboration des politiques par les gouvernements.
  5. Faciliter le déploiement de solutions axées sur la demande et de solutions non câblées : Demander aux organismes de réglementation, aux opérateurs de réseaux, aux sociétés d’État et aux autorités chargées de la délivrance de permis et des approbations d’adopter de nouveaux instruments de marché, de nouveaux cadres réglementaires et de nouvelles approches en matière d’analyses coûts-avantages qui facilitent le déploiement rentable de solutions axées sur la demande et de solutions non câblées.
Avis sur les réformes réglementaires et de gouvernance

Les gouvernements peuvent entreprendre les actions suivantes pour s’assurer que leurs cadres réglementaires et de gouvernance sur l’énergie sont alignés sur les objectifs d’atteinte d’une filière énergétique carboneutre d’ici 2050 :

  1. Revoir les rôles et les mandats fondamentaux des organismes de réglementation, des opérateurs de réseaux et des services publics de la Couronne
    • En collaboration avec les organismes de réglementation, les opérateurs de réseaux et les services publics, veiller à ce que les mandats reflètent clairement la réalisation des objectifs de planification de carboneutralité, et proposer des directives ou des lois, le cas échéant, visant à s’assurer que leurs actions, décisions et politiques sont compatibles avec la réalisation des objectifs en matière d’émissions
    • Veiller à ce que les rôles et les responsabilités des organismes de réglementation, des opérateurs de réseaux, des services publics et du gouvernement soient clairement définis et à ce que ces derniers disposent des moyens et des ressources nécessaires pour mener à bien cette tâche
  2. Donner la priorité à l’intégration des différentes sources d’énergie
    • Revoir les mandats et les structures de gouvernance des organismes de réglementation pour s’assurer que leur champ d’action est élargi aux nouveaux types d’énergie (gaz naturel renouvelable, hydrogène, chauffage urbain, air comprimé, etc.)
    • Fournir des orientations sur la manière dont les organismes de réglementation doivent gérer la planification et la réglementation des services publics de gaz et d’électricité (et leur intégration et/ou leur concurrence)
    • Enjoindre aux organismes de réglementation de procéder à des examens et à des approbations intégrées qui tiennent compte des besoins globaux en matière de développement des infrastructures, afin d’assurer une fonction de coordination et d’intégration
  3. Établir des cadres qui soutiennent et favorisent l’innovation
    • Exiger des organismes de réglementation qu’ils définissent les cadres réglementaires souples sur lesquels les entités réglementées peuvent s’appuyer pour soumettre des propositions d’investissements supérieurs à la moyenne nécessaires pour obtenir une énergie carboneutre
    • Enjoindre aux organismes de réglementation d’établir des processus et de fournir des orientations pour les propositions non standard, les types de demandes à utiliser avec chaque processus et les processus pour les demandes en dehors des cycles de soumission réguliers, le cas échéant
  4. Renforcer la transparence
    • Exiger des organismes de réglementation qu’ils rendent publiques les hypothèses de base utilisées dans les propositions (par exemple, la croissance économique et démographique supposée) et dans l’examen des demandes et les décisions, afin de favoriser la transparence et la normalisation
  5. Renforcer la coordination entre l’organisme de réglementation, la planification du système et les organismes gouvernementaux concernés afin d’accélérer l’examen des projets
    • Donner des orientations pour assurer la liaison avec les services de type concierge qui facilitent d’autres aspects de l’examen des projets et aident à déterminer les projets prioritaires qui nécessitent un examen immédiat
  6. Innover dans les barèmes de tarification et la conception du marché
    • Enjoindre aux organismes de réglementation et aux services publics d’adopter des barèmes de tarification qui incitent à l’électrification (ou tout au moins ne la découragent pas)
    • Orienter la détermination, l’examen et la mise en œuvre de réformes de la conception du marché (dans les administrations le cas échéant) pour soutenir le déploiement de ressources carboneutres
    • Enjoindre aux organismes de réglementation de prendre en compte toutes les options de ressources disponibles, y compris la GAD, les RED, le stockage de l’énergie, les technologies émergentes et les options hybrides, et déterminer la valeur réelle qu’elles apportent au réseau
  7. Adopter de nouveaux outils d’évaluation et veiller à harmoniser les feuilles de route en matière d’énergie, les évaluations des trajectoires et les processus de planification des systèmes
    • Demander aux organismes de réglementation d’exiger et d’obtenir des analyses coûts-avantages générales (y compris le coût de l’inaction, le coût évité des émissions et les solutions non câblées) :
      • En fournissant des orientations et des règles sur l’analyse coûts-avantages
      • En exigeant que les propositions en tiennent compte
      • En demandant aux organismes de réglementation d’examiner les résultats eux-mêmes
    • Fournir aux organismes de réglementation les ressources nécessaires pour concilier de manière proactive et continue les résultats des évaluations des trajectoires avec les modèles plus spatiaux et techniques utilisés par les opérateurs de réseaux et les services publics
  8. Soutenir le renforcement de la sécurité et du partage des données
    • Pour faciliter le partage des données entre les administrations et gérer le déploiement à grande échelle des ressources distribuées, les gouvernements devraient demander aux organismes de réglementation d’exiger des services publics et des opérateurs de réseaux qu’ils donnent la priorité aux investissements dans la numérisation de leurs réseaux et qu’ils soutiennent les cadres de partage de données collaboratifs et sécurisés

Annexe B : Ce que le Conseil a entendu

Cette annexe résume les contributions que le Conseil a reçues dans le cadre du processus de mémoires écrits et de tables rondes virtuelles supplémentaires organisées au cours de son processus de mobilisation externe. Les commentaires des intervenants et des partenaires ont permis d’éclairer les recommandations du Conseil en vue de l’élaboration de la politique en matière d’électricité. Le processus de soumission de mémoires écrits s’est déroulé de décembre 2023 à janvier 2024. Ceux-ci ont été sollicités par le biais d’un guide de discussion envoyé à 350 organisations et rendu public. Le guide de discussion comprenait 28 questions correspondant aux 5 groupes de travail du Conseil :

  1. Améliorer la planification et la surveillance des réseaux électriques pour soutenir la carboneutralité
  2. Bâtir une infrastructure électrique dans les meilleurs délais tout en procurant des avantages aux partenaires autochtones
  3. Attirer les investissements de capitaux et maintenir l’abordabilité de l’électricité pendant la transition
  4. Renforcer la coopération régionale pour tirer parti des trajectoires efficaces et peu coûteuses menant à la carboneutralité
  5. Favoriser les innovations dans le secteur de l’électricité tout en maintenant la fiabilité et la résilience du réseau

Les intervenants ont pu choisir les questions auxquelles ils souhaitaient répondre. Pour éviter toute lassitude, le Conseil a analysé et intégré les engagements antérieurs et en cours que RNCan a menés et évalués à l’aide des paramètres du processus d’engagement du Conseil. Les initiatives examinées comprennent les Tables régionales sur l’énergie et les ressources (2023), le Cadre national sur le partage des avantages avec les peuples autochtones (2022 à 2023), la consultation sur la Stratégie pour les bâtiments verts (2022), l’initiative Innovation et la réglementation de l’électricité (2022 à 2023), Génération Énergie (2017) et le comité consultatif des services publics et l’engagement connexe pour les collectivités nordiques et éloignées (2020 à 2022).

Les personnes entendues par le Conseil

En plus des 66 réunions virtuelles et en personne avec les intervenants, le Conseil a reçu 72 mémoires écrits de la part d’intervenants du secteur de l’électricité représentant toutes les provinces et tous les territoires du Canada. Compte tenu de la complexité de certaines des questions posées par le Conseil dans le cadre du guide de discussion, 1 intervenant a été invité à compléter son mémoire et 2 autres ont été invités à discuter de leurs points de vue lors d’une séance virtuelle (au lieu de présenter un autre mémoire) afin d’approfondir la compréhension du Conseil à l’égard de leurs points de vue.

Mémoires écrits et séances connexes par type d’intervenant
Gouvernements (y compris les organismes, les sociétés d’État et les organismes consultatifs) 8
Services publics, organismes de réglementation et opérateurs de réseaux 16
Producteurs d’électricité indépendants et associations connexes 9
Organisations autochtones 6
Organisations syndicales 4
Utilisateurs industriels 7
Organisations non gouvernementales du secteur de l’énergie
(par exemple, les autres associations, les groupes de réflexion)
16
Milieux universitaires 3
Personnes 5
Total des répondants (mémoires écrits et séances connexes) 74

Faits saillants : Ce que nous avons entendu

Dans l’ensemble, la majorité des commentaires reçus s’inscrivent dans la lignée des discussions du Conseil sur ses principales pistes de réflexion. Tous les répondants n’ayant pas répondu à toutes les questions, les chiffres ci-après indiquent les réponses les plus fréquentes. Les principaux domaines mis en avant sont les suivants :

  • Mandats de carboneutralité pour les organismes de réglementation : Près de 40 % des répondants ont souligné la nécessité de mettre à jour les mandats des services publics et des organismes de réglementation, en insistant sur l’importance d’inclure des objectifs de carboneutralité et en soulignant quelquefois la nécessité de modifier d’autres mandats (par exemple, l’intégration de la GAD et des RED, notamment l’adoption d’un modèle d’opérateur total de distribution, l’adoption d’un règlement fondé sur le rendement et de modèles de substitution au coût du service). Seuls sept répondants, notamment certains gouvernements et services publics, se sont opposés aux changements; la plupart d’entre eux ont déclaré que les mandats actuels étaient suffisamment souples.
  • Feuilles de route et évaluations des trajectoires de carboneutralité : Plus de 30 % des répondants ont mentionné la nécessité d’établir des feuilles de route et des évaluations de trajectoires provinciales et territoriales de carboneutralité; de nombreuses suggestions ont été formulées quant aux éléments à y inclure. Certains répondants ont également souligné la nécessité d’aligner les politiques sur les objectifs en matière d’émissions définis au niveau international et fondés sur des données scientifiques. Un thème récurrent, en particulier chez les gouvernements, les services publics et les organismes de réglementation, est que le gouvernement fédéral devra tenir compte du fait que les trajectoires seront très différentes d’une administration à l’autre.
  • Accélérer l’approbation des projets : Plus de 30 % des répondants ont souligné que les délais d’approbation actuels sont trop longs et ont formulé des suggestions pour les accélérer. Au moins 10 répondants ont fait part de leurs inquiétudes quant aux conséquences imprévues de l’accélération des approbations sur la participation des Autochtones, l’acceptabilité sociale et la mobilisation publique.
  • Donner la priorité à l’efficacité énergétique et à la GAD : Plusieurs répondants ont souligné la nécessité de gérer l’abordabilité pendant la transition. Environ un quart des répondants ont cité l’efficacité énergétique et la GAD comme des domaines nécessitant un soutien accru; plusieurs répondants ont exprimé le souhait que ces aspects soient pris en compte dans les mandats des organismes de réglementation et des services publics.
  • Atténuer l’impact des coûts sur les contribuables : La majorité des répondants sont favorables à une approche financée par des fonds publics pour aider à transférer une partie des coûts de transition de l’électricité aux contribuables. De nombreuses raisons ont été invoquées, notamment le fait que les avantages concerneraient l’ensemble de la société et que le soutien du contribuable peut contribuer à une répartition plus équitable des coûts et est essentiel dans les domaines où les fonds des contribuables sont moins courants (comme le soutien à l’innovation dès les premières étapes). Au moins 13 répondants ont formulé des recommandations spécifiques sur l’élargissement des CII récemment annoncés, bien que les demandes de politiques varient. Plusieurs répondants ont réclamé des seuils plus élevés pour les programmes de financement public et des options plus ouvertes ou pluriannuelles.
  • Améliorer la coopération et la planification régionales : Près de la moitié des répondants ont exprimé leur soutien quant au renforcement de la coopération régionale et au rôle du gouvernement fédéral pour la faciliter. Seuls 3 répondants sont opposés à une coopération régionale accrue ou à un rôle du gouvernement fédéral.
  • Conditionnalité du financement fédéral : Au moins 16 répondants ont indiqué qu’ils souhaitaient vivement que des conditions soient appliquées au financement fédéral de l’électricité, sans que celles-ci soient nécessairement exclusives aux CII. Les conditions suggérées visaient les provinces et territoires et étaient très variées (les conditions les plus souvent citées comprenaient l’exigence de plans de GAD et de toutes les solutions d’efficacité énergétique rentables, la pleine participation des peuples autochtones à la planification et l’accélération des processus d’approbation). Certaines conditions suggérées concernaient les promoteurs de projets (comme l’association avec des partenaires autochtones ou l’engagement à respecter les pratiques exemplaires en matière de mobilisation publique). Un plus petit nombre de répondants (7) se sont opposés aux conditions de financement, principalement les services publics et l’industrie.

D’autres sujets ont été mentionnés de façon constante en vue d’une action politique fédérale, notamment : réunir les acteurs provinciaux/territoriaux et ceux du secteur de l’électricité; fournir une orientation sur les pratiques exemplaires (par exemple, pour les mandats, les données et la modélisation); améliorer la collecte et la modélisation des données fédérales; soutenir l’innovation réglementaire et technologique au moyen de mécanismes tels que les bacs à sable d’innovation, le soutien à la recherche et au développement et le partage des connaissances; apporter un soutien supplémentaire aux RED; favoriser une plus grande participation des consommateurs au réseau électrique, y compris la propriété locale et communautaire des projets, le financement du soutien technique et de la planification pour les collectivités, et l’éducation des consommateurs; donner la priorité à certains types de projets carboneutres en ce qui concerne les approbations (tels que les technologies éprouvées à faible risque).

Rétroaction sur l’inclusion des Autochtones et les avantages

De nombreux répondants, notamment des services publics, des producteurs d’électricité et des organisations autochtones, ont fait des commentaires sur les questions d’électricité liées aux Autochtones. La plupart d’entre eux ont exprimé leur soutien à un Programme national de garantie de prêts, mais ont également souligné qu’un tel programme ne suffirait pas à garantir la participation économique des Autochtones, car de nombreuses collectivités ne disposent probablement pas des ressources financières ou humaines nécessaires pour faire avancer des projets dans le cadre d’un tel mécanisme. De nombreux appels ont été lancés en faveur de formes supplémentaires de soutien fédéral, notamment des subventions, des financements par emprunt à faible taux d’intérêt, des investissements directs dans les coûts d’investissement, des fonds discrétionnaires pour tirer parti de l’expertise de tiers, et un soutien pour les tarifs de rachat garantis. Les répondants autochtones ont souligné que les mécanismes de financement actuels pourraient être plus accessibles grâce à un financement cumulable, à des financements plus souples et à la possibilité d’utiliser le financement de projet pour le renforcement des capacités, la formation et le développement de projets. Comme l’a fait remarquer l’un des répondants, « il est important de reconnaître que la pleine participation des collectivités autochtones aux projets d’électricité est souvent entravée par les processus lents et itératifs sur lesquels s’appuient les gouvernements et les institutions financières pour déployer les capitaux. » [Notre traduction]

Ré́troaction sur la transition électrique dans le Nord

Les répondants des régions nordiques ont souligné que les décisions prises dans le reste du Canada en matière de planification et de technologies de carboneutralité et connexes ont d’importantes répercussions dans le Nord. Comme l’a fait remarquer l’un des répondants, « la transition ne se résume pas à la tarification du carbone. Le coût de la non-participation à l’évolution de l’économie et de la non-inclusion dans la transition, alors que le Nord subit de manière disproportionnée les effets des changements climatiques, doit être pris en compte. » Les répondants des régions nordiques ont fait part de leurs préoccupations quant au suivi de la transition et ont souligné que les dispenses de la politique pour le Nord, tant au niveau fédéral que provincial, ne sont pas des signaux pertinents, principalement si des mesures de substitution visant à atteindre des objectifs similaires ne sont pas mises en place. Tout en reconnaissant les progrès réalisés dans le cadre des programmes existants, les répondants ont déclaré que, dans l’ensemble, peu d’efforts ont été déployés pour mettre à la disposition des régions nordiques des fonds suffisants pour atteindre l’objectif de carboneutralité de la production électrique en 2035. Ils ont souligné que les décideurs (y compris les gouvernements, les services publics et les organismes de réglementation) ne prennent pas actuellement en compte le coût « réel » du diesel dans leur prise de décision. Les répondants ont également souligné le rôle essentiel du gouvernement fédéral dans le soutien au financement, étant donné que les projets sont actuellement menés par des organisations dont les capacités et les ressources financières sont limitées. La collaboration régionale a été évoquée comme une excellente occasion pour le gouvernement fédéral de jouer un rôle déterminant, que ce soit au niveau des interconnexions, de la planification et du partage des connaissances, de l’approvisionnement en matériaux en vrac ou d’autres aspects.

Autres commentaires

Les répondants ont également soulevé des questions jugées essentielles pour le Conseil, mais qui n’entraient pas dans le cadre de leurs recommandations. Elles sont énumérées ci-après afin de refléter les réponses et de souligner l’importance d’un soutien politique à ces sujets pour faire progresser la transition électrique.

Acceptabilité sociale

L’acceptabilité sociale a été un thème important soulevé en réponse aux questions du Conseil sur l’approbation des projets. Près de la moitié des répondants, tous types d’intervenants confondus, ont indiqué que la mobilisation, la participation et l’adhésion des collectivités sont essentielles à la transition électrique. Les répondants ont souligné que le soutien du public est primordial pour l’approbation des projets et la réduction des retards, tout en indiquant qu’il existe des possibilités de retombées économiques au niveau local. Les mesures politiques les plus fréquemment citées sont les suivantes : 1) fournir une aide fiscale et des conseils aux collectivités afin qu’elles participent aux processus d’approbation et les comprennent; 2) proposer des orientations aux promoteurs sur les pratiques exemplaires en matière de mobilisation et d’ententes sur les avantages; 3) encourager ou exiger des ententes sur les avantages pour la collectivité (telle que celles mises en œuvre en Colombie-Britannique, en Nouvelle-Écosse et à New York); 4) intégrer la participation du public dans la planification de la carboneutralité, les approbations de projets et le choix des sites; 5) soutenir les projets et la planification au niveau communautaire (par exemple, les plans énergétiques communautaires); 6) collaborer avec les municipalités sur la planification du système, le développement de projets et le choix des sites.

Main-d’œuvre

Environ un tiers des répondants, tous types d’intervenants confondus, ont souligné l’urgence de relever les défis liés à la main-d’œuvre. Les répondants ont fait remarquer que sans une action proactive axée sur des emplois de bonne qualité, le Canada rencontrera des difficultés à attirer et à retenir des travailleurs dans un marché concurrentiel à l’échelle mondiale. Ils ont également ajouté que la main-d’œuvre du secteur de la construction est très mobile, que la planification préalable est essentielle pour garantir la réussite des projets et que les mesures visant à soutenir la main-d’œuvre peuvent accroître la confiance des investisseurs, stimuler l’acceptabilité sociale et améliorer les résultats en matière de diversité, d’équité et d’inclusion. Les trois mesures politiques les plus citées sont les suivantes : 1) la planification de la main-d’œuvre en collaboration avec les syndicats pour garantir la disponibilité et les qualifications; 2) l’augmentation des investissements dans la formation et la collaboration entre l’industrie, les établissements universitaires et les syndicats sur la certification, en privilégiant les groupes dignes d’équité; 3) la promotion de l’adoption d’accords de travail sur les projets (similaires à ceux visés par le décret américain).

Chaîne d’approvisionnement

Au moins 13 répondants ont évoqué la nécessité de relever les enjeux liés à la chaîne d’approvisionnement en soutenant les mesures nationales et en tirant parti des chaînes d’approvisionnement mondiales, bien que les mesures politiques recommandées varient considérablement. La majorité d’entre eux ont mis l’accent sur le soutien aux chaînes d’approvisionnement nationales et à la commercialisation des technologies locales, notamment par le biais de subventions, d’incitatifs et d’un soutien au développement commercial de la capacité de production du Canada. Les répondants ont souligné que les chaînes d’approvisionnement constituent un goulet d’étranglement important pour le développement de l’électricité, mais qu’elles pourraient devenir un moteur de la croissance économique si l’on y remédiait de manière appropriée.

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