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Empreintes de sabots et empreinte écologique : les effets d’une mine sur le caribou sont mesurés

Savoir ancestral et études scientifiques concordent : le caribou de la toundra est très sensible aux modifications de son environnement. Des perturbations peuvent l’amener à interrompre son alimentation ou à se déplacer, dépensant ainsi une précieuse énergie qui serait nécessaire à sa croissance, à sa santé et à sa reproduction.

Le stress chez le caribou

Au cours des 40 dernières années, on estime que l’effectif de la harde de caribous de Bathurst, dont l’aire de répartition couvre des parties du Nunavut, des Territoires du Nord-Ouest et de la Saskatchewan, est passée d’environ 450 000 têtes à 20 000. Les chercheurs examinent les modifications dans l’environnement de la harde pour mieux comprendre les facteurs de stress. La qualité de l’habitat, les changements climatiques, la prédation, l’importance des récoltes et les incendies de forêt pourraient être en cause. Parmi les facteurs anthropiques, des perturbations causées par l’exploitation minière, comme le bruit et la poussière, pourraient également jouer un rôle.

L’empreinte écologique d’une mine

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Caribou aperçu près d’une route de transport de la mine de diamants Ekati, dans les Territoires du Nord-Ouest (photo prise par Wenjun Chen).

Le savoir ancestral et la recherche scientifique nous apprennent tous deux que le caribou a tendance à éviter les secteurs tels que les sites miniers. Basée au site de la mine de diamants Ek’ati (lac de Gras) et aux alentours, dans les Territoires du Nord-Ouest, une équipe de recherche dirigée par Wenjun Chen, Ph. D., de Ressources naturelles Canada, effectue des études sur le terrain et utilise la télédétection par satellite et des analyses en laboratoire pour en apprendre davantage sur l’importance de l’empreinte écologique de complexes miniers.

« Nous fournissons les données objectives requises pour des décisions éclairées, explique M. Wenjun. D’autres pourront ensuite examiner l’impact des mines sur le rétablissement de la harde et chercher des moyens d’atténuer les répercussions éventuelles. »

La recherche vise notamment à mesurer la poussière produite par l’activité minière et ses effets potentiels sur la nourriture des caribous, c’est-à-dire les lichens et les plantes.

Collecter la poussière

Les populations locales ont souvent observé de la poussière sur la nourriture des caribous. La poussière est constituée de terre sèche et d’autres minuscules particules solides dispersées ou en suspension dans l’air, remuées par le passage des véhicules ou transportés par le vent. Les grosses particules tombent du ciel presque immédiatement, près de leur source, alors que les particules plus fines restent dans l’air plus longtemps et retombent plus loin.

Aux fins de leur recherche, M. Wenjun et son équipe ont d’abord établi que la poussière qu’ils mesuraient ne provenait pas de sources autres que l’activité minière, par exemple les roches. Ils ont prélevé des feuilles, les ont lavées et ont ensuite mesuré la turbidité, ou l’aspect trouble, de l’eau, créant une « carte de poussière » qui peut être lue et mesurée. Ils ont également mesuré la quantité de poussière sur les feuilles à l’aide de l’imagerie par télédétection hyperspectrale, qui détecte les plus infimes changements de couleur. Les résultats sont sans équivoque : la quantité de poussière sur les feuilles de bouleau collectées à moins d’un kilomètre du site minier Misery est de deux à huit fois plus élevée que la valeur de référence.

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Des chercheurs collectent des échantillons de végétaux et de sol, mesurent la réflectance hyperspectrale de la végétation et consignent précisément des positions GPS près de la mine de diamants Ekati (photo prise par Wenjun Chen).

Comment la poussière perturbe le sol et la végétation

Une autre manière de détecter la poussière est d’étudier le pH (l’acidité ou l’alcalinité) du sol, car la poussière rend habituellement le sol plus alcalin. L’équipe de recherche a noté que le pH du sol avait changé notablement près de la route minière à grande circulation, mais à peine près d’une autre route peu fréquentée.

Le pH du sol influe sur la flore et, par conséquent, sur le régime alimentaire du caribou, car certaines plantes, dont le bleuet et le lichen, préfèrent des conditions acides tandis que d’autres plantes ont besoin de sols plus alcalins.

Lichen

Le lichen, qui occupe une grande place dans le régime alimentaire du caribou, est particulièrement sensible à la pollution de l’air et du sol. À l’aide de la télédétection et d’observations visuelles au sol, l’équipe de recherche a mesuré la quantité de feuillage et la hauteur de divers types de plantes à différentes distances du site Misery. Pour étudier l’effet de la poussière sur les lichens, on a calculé le pourcentage de sol couvert de lichens à différents endroits. Une fois compilés sous forme graphique, les résultats ont révélé qu’il y avait moins de lichens près de la route. Selon ces observations initiales, l’effet de la poussière sur les lichens se fait sentir jusqu’à un kilomètre du site minier.

En combinant ces résultats avec ses mesures du pH du sol à différentes distances de la mine, l’équipe a ensuite créé un graphique qui montre la relation entre le pH du sol et la couverture de lichen. Les résultats préliminaires montrent que les lichens sont plus abondants là où le sol est légèrement acide et complètement absents là où le sol est très alcalin. 

Plantes vasculaires

L’équipe a également examiné des arbres, des arbustes, des graminées et des plantes à fleurs à différentes distances du site Misery et a constaté que le pH du sol avait sensiblement le même effet sur ces végétaux que sur le lichen. Les plantes vasculaires absorbent l’eau et les nutriments par les racines et les tiges. L’équipe a constaté qu’à l’instar des lichens, les plantes vasculaires étaient peu nombreuses près de la route, mais de plus en plus communes à mesure qu’on s’éloignait de celle-ci. Toutefois, les plantes vasculaires poussaient beaucoup plus proches de la route que les lichens, ce qui donne à penser qu’elles résistent mieux à la poussière que les lichens.

Prochaines étapes

« Dans les prochaines étapes de l’étude, j’espère déterminer si nos observations aident à expliquer le déclin du caribou, ajoute M. Wenjun. Il s’agit d’un travail important... C’est gratifiant de faire un travail qui peut avoir une incidence sur l’économie et la population locale. »

D’après un article de Susan Beaumont, de l’Office des ressources renouvelables du Wek’èezhìı.

 


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