Considérations géomorphologiques dans la cartographie des zones inondables

2024

Ressources naturelles Canada

Produit d’information générale 159f

Environnement et changement climatique Canada

Ressources naturelles Canada

© Sa Majesté le Roi du chef du Canada, représenté par le ministre des Ressources naturelles, 2024

Lien permanent : https://doi.org/10.4095/p39b9qrtr4

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Table des matières

Liste des tableaux

Tableau 3.1. Caractéristiques sédimentaires et géomorphologiques pour différents types de processus hydrogéomorphologiques

Tableau 3.2. Aperçu des considérations géomorphologiques dans la cartographie des zones inondables pour chaque processus hydrogéomorphologique. Les symboles « + » représentent l’importance relative de chaque considération relative à la cartographie

Tableau 4.1. Typologie des inondations de débris et caractéristiques associées (d’après Church et Jakob, 2020)

Liste des figures

Figure 3.1. Classification des cours d’eau de Church, 2006.

Figure 3.2. Effondrement d’un pont sur la route 5 dû à l’érosion et à l’affouillement de la rivière Coldwater en novembre 2021. Photo : BGC Engineering Inc.

Figure 3.3. Classification des processus hydrogéomorphologiques en fonction de la concentration en sédiments, de la pente, de la vitesse d’écoulement et de la morphologie des sédiments.

Figure 3.4. Ruisseau Cougar les (a) 19 et (b) 20 juin 2013, photos prises à environ un jour d’intervalle au même endroit sur le cône moyen à supérieur, en direction aval (sud). La largeur moyenne du chenal sur la photo du haut (a) est d’environ 6 m; sur l’image du bas (b), elle s’est élargie d’environ 30 m à 60 m. c) Le chenal du ruisseau Cougar après l’inondation de débris en aval de l’emplacement de (a/b) avec la route 1 bloquée (la « transcanadienne ») traversant le cône inférieur. Dans cette section, le chenal actif s’est élargi jusqu’à 90 m. Photo : Ville de Canmore.

Figure 3.5. Schéma des processus géomorphologiques dans un bassin versant d’un cours d’eau à forte pente. Le cône alluvial permet le stockage des sédiments sur une période de plusieurs milliers d’années. Croquis élaboré en se basant sur Schumm (1977), Montgomery et Buffington (1997) et Church (2013)

Figure 3.6. Schéma d’un chenal de ruisseau à forte pente avec avulsions en aval du sommet du cône. La surface du paléocône représente la partie du cône qui s’est déposée dans un passé lointain et qui n’est plus accessible au cours d’eau actuel.

Figure 3.7. Processus hydrogéomorphologiques dominants en fonction de l’indice de Melton et de la longueur du cours d’eau. Le regroupement des classes, tel qu’il apparaît dans les polygones ombragés, est fondé sur le jugement. Plusieurs cours d’eau sont également soumis à plus d’un processus. 17

Figure 3.8. Aperçu de la distribution géographique des zones exposées aux inondations de débris et aux laves torrentielles au Canada, basé sur la pente d’un modèle altimétrique numérique d’une résolution de 1 km..

Figure 4.1. Aperçu (a) de l’érosion et de la migration progressives des méandres sur un tronçon sinueux à lit de sable ou de limon de la rivière Beaver en Saskatchewan, en contraste avec (b) l’élargissement du chenal dans un tronçon sinueux à lit de gravier de la rivière Nicola en Colombie-Britannique après une crue extrême en novembre 2021. Avec le temps, les bancs exposés se végétaliseront, ce qui ramènera la rivière Nicola à sa largeur avant l’inondation.

Figure 4.2. Diagramme illustrant l’équilibre entre l’apport en sédiments et la capacité de transport d’un cours d’eau. Schéma adapté de Stein et coll. (2012) sur la base des concepts de Lane (1954), Rosgen (1996) et du Federal Interagency Stream Restoration Working Group (1998)

Figure 4.3. Exemples de mécanismes déclencheurs de la dégradation et de l’alluvionnement des rivières.

Figure 4.4. Types d’avulsion typique à différentes échelles de longueur d’après Olson et coll., 2014.

Figure 4.5. MER montrant le niveau du fond de la vallée par rapport au niveau des rivières Athabasca et Sakwatamau.

Figure 4.6. Détection des changements par lidar entre les ensembles de données d’avril 2018 et de décembre 2021 sur la rivière Nicola, en Colombie-Britannique. Les tons de bleu indiquent un changement vertical négatif et les tons de rouge un changement positif

Figure 4.7. Exemple de lit des méandres sur la rivière Annapolis en Nouvelle-Écosse. La largeur du lit varie en fonction de l’amplitude des méandres, et le lit des méandres du tronçon 1 est plus large que celui du tronçon 2.

Figure 4.8. Intensité modélisée des inondations de débris (où) pour la même ampleur d’inondation dans deux scénarios différents : a) à la suite d’un alluvionnement sur le cône inférieur, en aval du pont routier, et b) à la suite d’un alluvionnement plus sévère s’étendant au cône supérieur et bloquant le pont routier

Figure 4.9. Carte d’aléas composite montrant les aléas combinés de laves torrentielles pour toutes les ampleurs d’inondations modélisées. L’étendue de l’érosion des berges potentielle est également indiquée pour la plus grande coulée de débris modélisée et a été estimée à l’aide des méthodes décrites dans Jakob et coll. (2022)

Remerciements

Ressources naturelles Canada remercie les auteurs de ce bulletin technique : Sarah Davidson, Hamish Weatherly, et Haley Williams de BGC Engineering Inc. et le personnel d’Environnement et Changement climatique Canada.

Les documents dans la série « Guides d’orientation fédéraux sur la cartographie des zones inondables » sont destinés à aider les agences municipaux, provinciaux, et territoriaux ainsi que les communautés autochtones qui travaillent sur la délimitation des inondations. Il est reconnu que la gestion des inondations au Canada est réglementée au niveau des gouvernements provinciaux et territoriaux et que les provinces et les territoires se réservent le droit de créer leurs propres guides d’orientation spécifiques à leurs juridictions.

Avis

Exonération de responsabilité

Le présent document technique a été publié par Sa Majesté le Roi du chef du Canada, représentée par Ressources naturelles Canada (RNCan). RNCan n’offre aucune garantie et ne fait aucune représentation, expresse ou implicite, légale ou autre en ce qui concerne le document, son efficacité, son exactitude ou son intégralité. RNCan n’assume aucune responsabilité quant aux pertes ou dommages, directs ou indirects, engagés ou subis, en raison de l’utilisation faite du document, y compris la perte de profits, la perte de revenus ou de bénéfices, ou des réclamations par des tiers. En aucun cas RNCan ne sera tenu responsable de pertes de quelque nature que ce soit découlant d’erreurs, d’imprécisions ou d’omissions dans ce document. RNCan n’a aucune obligation, aucun devoir et aucune responsabilité en matière de contrat, de droit civil ou autre, y compris la négligence.

Renseignements supplémentaires

Pour plus de renseignements à propos de ce document, veuillez communiquer avec le Centre canadien de cartographie et d’observation de la Terre de Ressources naturelles Canada à l’adresse suivante : geoinfo@nrcan-rncan.gc.ca

1.0 Introduction

1.1 Objectif

Les cartes d’inondation sont une ressource intégrée pour les décideurs chargés de cibler, de caractériser et de gérer les aléas liés aux inondations. Les cartes d’inondation typiques présentent la zone d’inondation potentielle lors d’épisodes de débit élevé et peuvent également montrer l’intensité de l’inondation à l’aide d’une combinaison de tirants d’eau et de vitesses de l’écoulement, indiquant les dommages potentiels à l’infrastructure et la menace pour la sécurité publique. Les cartes d’inondation sont généralement produites à l’aide de modèles hydrauliques basés sur des données topographiques dont la résolution spatiale varie en fonction de la taille de la zone d’étude. Pour les cours d‘eau abrupts situés sur des cônes alluviaux, la cartographie des zones inondables peut également inclure des cartes d'aléas composites qui montrent l’intensité des inondations pour une gamme de probabilités de récurrence des crues (p. ex. Engineers & Geoscientists British Columbia, 2023).

Les méthodes actuelles de cartographie des zones inondables négligent souvent les interactions entre l’eau et les sédiments dans la caractérisation des aléas d’inondation. L’hydrogéomorphologie est une science interdisciplinaire qui est née pour combler cette lacune et qui se concentre sur l’interaction entre les processus hydrologiques et les formes de relief (Scheidegger, 1973; Sidle et Onda, 2004). On appelle les crues dont l’ampleur est suffisante pour entraîner des modifications locales du terrain les « crues hydrogéomorphologiques » ou « processus hydrogéomorphologiques », car celles-ci transportent l’eau (« hydro ») et les sédiments (« géo »). Les processus hydrogéomorphologiques peuvent être caractérisés de manière générale comme des crues d’eau claire, des inondations de débris ou des laves torrentielles.

L’ampleur des changements géomorphologiques survenant au cours de chaque crue varie en fonction du type de processus. Les changements géomorphologiques les plus importants sont généralement observés dans les cours d’eau abrupts soumis à des inondations de débris ou à des laves torrentielles, et les moins importants, sur les rivières méandreuses à pente faible soumises à des crues d’eau claire. Cela ne signifie pas que les rivières à faible pente ne sont pas soumises à des changements géomorphologiques pendant les crues, mais plutôt que ceux-ci ont tendance à s’y produire progressivement au fil du temps et dans des endroits plus prévisibles. La manière dont les considérations hydrogéomorphologiques doivent être intégrées à la cartographie des zones inondables varie donc en fonction de la situation géographique et des processus hydrogéomorphologiques dominants dans le bassin versant.

Le présent bulletin technique fournit des lignes directrices sur l’opportunité et la manière de prendre en compte la géomorphologie dans la cartographie des zones inondables. Les processus hydrogéomorphologiques influencent les inondations et l’intensité des crues en modifiant la densité de l’écoulement, en obstruant le chenal des cours d’eau ou les ponceaux, et en élevant ou abaissant le niveau du lit du cours d’eau par le dépôt de sédiments et l’affouillement. Ils peuvent également modifier la distribution spatiale des inondations en changeant la taille et la forme des cours d’eau par l’érosion des berges ou l’avulsion (la création d’un nouveau chenal), ainsi que réduire la stabilité des versants par le sapement des pentes.

1.2 Structure du document

Le présent bulletin technique s’adresse aux décideurs qui commandent et appliquent des études de cartographie des zones inondables et aux praticiens techniques qui effectuent le travail. Le document est structuré comme suit.

  • La section 2.0 présente la terminologie utilisée tout au long du bulletin technique, et sa lecture est recommandée à tous ceux qui utilisent ce document.
  • La section 3.0 présente les processus hydrogéomorphologiques (c.-à-d. les crues d’eau claire, les inondations de débris et les laves torrentielles) et décrit les moyens de déterminer le processus dominant sur la base d’évaluations de nature théorique et sur le terrain. Elle traite également de la distribution géographique générale de ces types de processus au Canada et des façons dont ils peuvent affecter la cartographie des zones inondables. Cette section est destinée à aider les praticiens techniques et les décideurs.
  • La section 4.0 fournit une description plus détaillée de chaque type de processus hydrogéomorphologique, ainsi que des lignes directrices à l’usage des praticiens techniques sur la manière de prendre en compte ces processus dans la cartographie des zones inondables. Les approches potentielles sont présentées de manière générale et les praticiens peuvent consulter les références citées pour obtenir des descriptions plus détaillées des méthodes appropriées.
  • La section 5.0 traite de la validité des cartes d’inondation et de l’opportunité de les mettre à jour. Elle présente également des considérations supplémentaires concernant les modifications futures des processus géomorphologiques associées aux changements climatiques. Cette section s’adresse à la fois aux décideurs et aux praticiens techniques.

1.3 Limites

Ce bulletin technique a pour but de souligner l’importance des considérations hydrogéomorphologiques dans la cartographie des zones inondables des zones riveraines et de fournir des pistes pour l’intégration des processus pertinents. Les limites suivantes doivent être prises en compte lors de la lecture de ce document.

  • Ce bulletin technique se concentre sur les processus hydrogéomorphologiques dans la mesure où ils sont liés à la cartographie des zones inondables dans ou à proximité d’un cours d’eau.
  • Ce bulletin technique se concentre sur l’écoulement dans les cours d’eau et ne prend pas en compte les aléas se manifestant sur les versants (p. ex. les glissements de terrain), bien qu’il soit reconnu que les processus sur les versants se transforment souvent en inondations de débris ou en laves torrentielles.
  • Les considérations relatives aux laves torrentielles sont également incluses aux lignes directrices sur la cartographie des glissements de terrain dans certaines provinces et certains territoires. Les lecteurs sont invités à se familiariser avec toutes les lignes directrices pertinentes liées à la cartographie des aléas liés aux laves torrentielles.
  • Les lignes directrices relatives à la cartographie des zones inondables ne tiennent pas compte l’évaluation des risques, ce qui nécessite également la quantification de la vulnérabilité des infrastructures ou du public.
  • Différentes autorités compétentes peuvent utiliser des termes différents pour les cartes d’inondation ou pour les niveaux de cartographie. Les termes définis dans ce document reflètent les documents cartographiques généralisés et l’échelle des études.

La cartographie des zones inondables et les analyses hydrogéomorphologiques devraient être réalisées par des professionnels qualifiés.

2.0 Terminologie

Cette section présente les termes clés utilisés dans le reste de ce bulletin technique et qui ne sont pas définis dans les documents des Guides d’orientation fédéraux sur la cartographie des zones inondables.

Alluvionnement (ou aggradation) : Élévation du lit d’un cours d’eau en raison d’un apport en sédiments plus élevé que la capacité de transport solide. L’alluvionnement se produit par le dépôt de sédiments sur le lit du cours d’eau.

Avulsion : Formation d’un nouveau chenal à l’extérieur des limites du chenal existant par une coupure entre les coudes de méandres, la réoccupation d’un bras précédemment abandonné dans la plaine inondable ou la création d’un nouveau chenal dans la plaine inondable ou à la surface du cône.

Changement géomorphologique : Modification du terrain par l’érosion, le transport et le dépôt de sédiments. Dans les cours d’eau, cela se traduit par des changements latéraux (érosion des berges et avulsion) ou des changements verticaux du lit (alluvionnement et dégradation).

Cône alluvial (ou cône de déjection) : Forme de relief en forme de cône déposée par un cours d’eau et dont la pente ou le confinement diminuent, entraînant une réduction de la capacité de transport solide. Cette forme de relief est plus correctement appelée cône colluvial lorsqu’elle est formée par des laves torrentielles, mais par souci de simplicité, le terme cône alluvial est utilisé tout au long de ce document, quel que soit le type de processus.

Crue d’eau claire : Crue fluviale due à un excès de débit provenant de la pluie, de la fonte des neiges ou d’autres sources (p. ex. lâchers d’eau) qui n’entraîne pas suffisamment de sédiments pour faire « gonfler » l’écoulement.

Dégradation : Abaissement du lit d’un cours d’eau en raison d’un transport solide trop élevé par rapport à l’apport en sédiments.

Érosion des berges : Enlèvement de matériaux le long des berges du cours d’eau qui entraîne un élargissement du chenal du cours d’eau ou un déplacement de son emplacement.

Géomorphologie : Étude des formes de relief et du terrain, et des processus qui les créent et les modifient.

Gonflement du débit : Processus selon lequel l’écoulement rapide entraîne les matériaux du lit et des berges par érosion ou par « arrachement » préférentiel. Dans le cas des laves torrentielles, le gonflement peut entraîner la totalité des débris libres du lit.

Inondation de débris : Crue impliquant des taux exceptionnellement élevés de transport solide par charriage dans les cours d’eau à forte pente (typiquement avec une pente de 5 % à 27 %). Les inondations de débris sont une transition entre les crues d’eau claire et les laves torrentielles.

Intensité de l’inondation : Mesure de la force associée à une crue d’eau claire, à une inondation de débris ou à une lave torrentielle. Il s’agit d’une approximation des dommages potentiels aux infrastructures ou de la menace pour la sécurité, et elle peut être quantifiée sur la base du tirant d’eau () et de la vitesse de l’écoulement () (p. ex. dans Jakob, Stein et Ulmi, 2011).

Lave torrentielle : Écoulement rapide et canalisé de débris saturés contenant des sédiments à grains fins (c’est-à-dire du sable et des particules plus fines). En raison de leur forte concentration en sédiments, les laves torrentielles ont une consistance semblable à celle du béton humide. Elles sont généralement plus rapides que les inondations de débris et ont des débits de pointe et des forces d’impact nettement plus élevés que ceux des crues d’eau claire ou des inondations de débris.

Processus hydrogéomorphologique : Terme général utilisé pour décrire les interactions entre l’eau et les sédiments dans un cours d’eau, qui entraînent des changements géomorphologiques. Les principaux types de processus hydrogéomorphologiques sont les crues d’eau claire, les inondations de débris et les laves torrentielles.

Tronçon : Section d’un cours d’eau dont le débit, la pente, la taille des matériaux du lit, le confinement, les caractéristiques de la plaine inondable et la morphologie sont relativement constants.

3.0 Processus hydrogéomorphologiques au Canada

Les cours d’eau modifient le paysage par l’érosion et le dépôt de sédiments. Ces changements peuvent se produire de manière soudaine lors d’une seule crue ou progressivement au fil du temps. Pour évaluer l’incidence de la géomorphologie dans le cadre d’une étude de cartographie des zones inondables, il est d’abord nécessaire de cibler le ou les processus hydrogéomorphologiques dominants, car chaque processus peut être associé à différentes ampleurs et échelles de temps de changement géomorphologique. Cette section décrit les trois principaux types de processus hydrogéomorphologiques, fournit de l’orientation sur la façon de déterminer le processus dominant dans un site donné, examine la distribution géographique de chaque processus au Canada et présente les principales considérations relatives à la cartographie des zones inondables.

3.1 Types de processus hydrogéomorphologiques

On peut diviser les processus hydrogéomorphologiques en trois types principaux : les crues d’eau claire, les inondations de débris et les laves torrentielles. Différents processus hydrogéomorphologiques peuvent s’opérer dans le même système à des moments différents. Les crues d’eau claire peuvent se transformer en inondations de débris, par exemple, lorsque le débit devient suffisamment puissant pour transporter tous les matériaux présents sur le lit de la rivière. Les laves torrentielles résultent généralement de glissements de terrain sur des pentes raides (de plus de 27 %) avec de fortes concentrations en sédiments, mais elles peuvent aussi se diluer au fur et à mesure qu’elles se déplacent vers l’aval, se transformant en inondations de débris ou en crues d’eau claire. Ce phénomène peut être provoqué par des apports d’eau d’affluents ou par le dépôt de sédiments entraînant une diminution de la concentration en sédiments.

La plupart des ruisseaux à forte pente (de plus de 5 %) connaissent également des processus hydrogéomorphologiques différents au cours de différents épisodes de débit élevé. Par exemple, les cours d’eau classés comme sujets aux laves torrentielles peuvent également être sujets à des crues d’eau claire et à des inondations de débris lors de crues plus petites et plus fréquentes. Dans les systèmes sujets aux inondations de débris ou aux laves torrentielles, ces phénomènes plus rares et de plus grande ampleur entraînent généralement des dégâts plus importants que les crues d’eau claire plus fréquentes.

Crues d’eau claire

Les crues d’eau claire sont des épisodes de débit élevé ayant une faible concentration en sédiments par volume; bien que des charges de fond puissent être transportées, elles sont présentes en quantités insuffisantes pour faire « gonfler » l’écoulement. Dans les rivières à pente faible, les crues d’eau claire peuvent entraîner des changements importants du niveau du lit par alluvionnement ou dégradation, contribuer à l’érosion des berges et amplifier les aléas d’avulsion. La stabilité des cours d’eau est inversement liée à la pente et à l’apport en sédiments, de sorte que la probabilité (et l’ampleur) d’un changement géomorphologique varie en fonction de ces deux propriétés (Church, 2006; Figure 3.1).

diagramme illustrant la classification des cours d'eau en fonction de l'apport en sédiments
Version textuelle

Exemples de schémas de drainage et de l'interaction des processus et des caractéristiques des bassins versants qui régissent le comportement des cours d'eau.

Figure 3.1. Classification des cours d’eau de Church, 2006.

Les crues d’eau claire peuvent provoquer des inondations et des changements géomorphologiques importants et endommager les infrastructures. Les inondations des rivières Nicola, Coldwater et Coquihalla qui ont eu lieu en Colombie-Britannique en novembre 2021 en sont un bon exemple. Des crues d’eau claire résultant de pluies provoquées par des rivières atmosphériques ont emporté la route 8 le long de la rivière Nicola en plus de 25 endroits, et la réouverture de la route a nécessité près d’une année entière. La route 5 (la « route de Coquihalla ») a également été endommagée en de nombreux endroits, notamment par l’effondrement de sept ponts (Figure 3.2), et la route 1 a été fermée pendant plus d’une semaine en raison d’une inondation.

Une photo montrant l’effondrement d’un pont traversant la rivière Coldwater

Figure 3.2. Effondrement d’un pont sur la route 5 dû à l’érosion et à l’affouillement de la rivière Coldwater en novembre 2021. Photo : BGC Engineering Inc.

Inondations de débris et laves torrentielles

Dans les régions montagneuses, les cours d’eau ont généralement des pentes plus élevées et un apport en sédiments plus important que dans les cours d’eau situés en basses terres. Ces cours d’eau sont moins stables (Figure 3.1), et mobilisent des quantités croissantes de sédiments lors de crues d’envergure, ce qui entraîne une hausse de la concentration en sédiments (c’est-à-dire un gonflement du débit). Selon les conditions du bassin versant, ces cours d’eau à forte pente peuvent être soumis à un éventail de processus allant, avec l’augmentation de la concentration en sédiments, des crues d’eau claire aux inondations de débris et aux laves torrentielles (Figure 3.3).

Les inondations de débris se produisent le plus souvent dans des chenaux confinés ou sur des cônes alluviaux avec des pentes supérieures à 5 %, mais peuvent également survenir sur des rivières à lit de gravier à faible pente dont le bassin versant peut atteindre plusieurs milliers de km2 (Church et Jakob, 2020). Les laves torrentielles sont dominantes dans les cours d’eau à plus forte pente (plus de 27 %) avec des bassins versants plus petits (typiquement de moins de 10 km2). En raison des concentrations élevées en sédiments, les laves torrentielles peuvent atteindre une consistance semblable à celle du béton humide. Elles sont généralement plus rapides que les inondations de débris et ont des débits de pointe et des forces d’impact nettement plus élevés. Du fait de ces caractéristiques, elles sont particulièrement dangereuses pour la vie et les biens. L’ampleur du débit de pointe d’une coulée de débris peut être une à deux fois supérieure à celle d’une crue d’eau claire à récurrence de 200 ans dans le même réseau fluvial (Jakob, 2005).

illustrant les processus hydrogéomorphologiques
Version textuelle

Diagramme montrant la relation entre la pente, la teneur en eau, la concentration en sédiments et le type d'écoulement dans divers phénomènes géologiques.

Figure 3.3. Classification des processus hydrogéomorphologiques en fonction de la concentration en sédiments, de la pente, de la vitesse d’écoulement et de la morphologie des sédiments.

Le ruisseau Cougar, dans la ville de Canmore, en Alberta, est un exemple des effets potentiellement dommageables des inondations de débris (Jakob et Church, 2020). Une inondation de débris s’est produite sur le ruisseau Cougar lors d’un événement de pluie de plusieurs jours en juin 2013. Le débit de pointe de l’événement a été estimé à 100 m3/s, et environ 90 000 m3 de sédiments se sont déposés sur le cône alluvial. Le chenal s’est élargi d’environ 6 m à 30 m (ou plus) en une seule journée alors que l’enrochement a été sapé et s’est effondré dans tout le cône (Figure 3.4). De nombreux bâtiments situés le long du cours d’eau ont été endommagés par l’exposition des fondations et le sapement.

L’élargissement du chenal a réduit le tirant d’eau dans le ruisseau Cougar, réduisant ainsi la force associée à l’écoulement. En conséquence, plusieurs mètres de sédiments se sont déposés sur le lit du ruisseau, provoquant un alluvionnement important. La quantité élevée de sédiments a bloqué les ponceaux, redirigeant l’écoulement du cours d’eau le long de la route transcanadienne. Cela a entraîné le sapement et l’effondrement de l’autoroute (Figure 3.4).

Un ensemble de trois photos du ruisseau Cougar pendant l'inondation de débris de juin 2013 à Canmore, en Alberta

Figure 3.4. Ruisseau Cougar les (a) 19 et (b) 20 juin 2013, photos prises à environ un jour d’intervalle au même endroit sur le cône moyen à supérieur, en direction aval (sud). La largeur moyenne du chenal sur la photo du haut (a) est d’environ 6 m; sur l’image du bas (b), elle s’est élargie d’environ 30 m à 60 m. c) Le chenal du ruisseau Cougar après l’inondation de débris en aval de l’emplacement de (a/b) avec la route 1 bloquée (la « transcanadienne ») traversant le cône inférieur. Dans cette section, le chenal actif s’est élargi jusqu’à 90 m. Photo : Ville de Canmore.

3.2 Bassins versants et cônes alluviaux de cours d’eau à forte pente

Avant de caractériser les effets des processus hydrogéomorphologiques dans le cadre d’une étude de cartographie des zones inondables, il est nécessaire de déterminer quels types de processus peuvent s’opérer dans un bassin versant. Les bassins versants des ruisseaux à forte pente sujets aux inondations de débris et aux laves torrentielles présentent une forme de relief distincte qui facilite leur identification. Ces bassins versants sont généralement constitués de versants, de petits chenaux d’apport, d’un chenal principal et d’un cône alluvial composé de sédiments déposés à l’extrémité inférieure du bassin versant (Figure 3.5).

À l’échelle du bassin versant, des zones distinctes de production, de transfert, d’érosion, de dépôt des sédiments et d’avulsion peuvent être mises en évidence (Figure 3.5). Dans les tronçons intermédiaires et supérieurs, les pentes abruptes des montagnes apportent des sédiments et des débris au chenal principal par le biais de divers mécanismes de mouvement de masse (p. ex. chutes de pierres, glissements rocheux, avalanches de débris, laves torrentielles, effondrements et désintégration). Ces sédiments sont ensuite transportés vers l’aval par les crues d’eau claire, les inondations de débris et les laves torrentielles pendant les périodes de débit élevé. Les inondations de débris et les laves torrentielles gagnent en vitesse et accumulent les sédiments à mesure qu’elles se déplacent vers l’aval, jusqu’à ce qu’elles s’étendent sur un cône alluvial quand le chenal atteint la vallée principale. Dans ce cas, la quantité de mouvement se dissipe par une diminution du confinement et une réduction de la pente du chenal, ce qui entraîne un dépôt de sédiments.

processus géomorphologiques dans le bassin versant d'une rivière à forte pente
Version textuelle

Un diagramme schématique illustrant la connexion entre les formes de relief et les processus géomorphiques dans un bassin versant d’un cours d’eau à forte pente.

Figure 3.5. Schéma des processus géomorphologiques dans un bassin versant d’un cours d’eau à forte pente. Le cône alluvial permet le stockage des sédiments sur une période de plusieurs milliers d’années. Croquis élaboré en se basant sur Schumm (1977), Montgomery et Buffington (1997) et Church (2013).

Un cône alluvial est une forme de relief à l’exutoire d’un bassin versant montagneux. Comme les cônes alluviaux se forment par dépôt de sédiments, ce sont des formes de relief dynamiques et potentiellement très dangereuses qui témoignent de l’étendue approximative des processus hydrogéomorphologiques passés et futurs. Le caractère épisodique et la relative rareté des grandes crues sur certains cônes alluviaux contribuent à leur dangerosité, car les infrastructures et les habitations sont souvent construites sur les cônes alluviaux dans l’intervalle entre les grandes crues.

Les cours d’eau sur un cône sont sujets aux avulsions, qui sont des changements rapides de l’emplacement du chenal, en raison des cycles naturels dans le développement du cône alluvial et de la diminution du confinement du chenal pendant les inondations de débris et les laves torrentielles (p. ex. Kellerhals et Church, 1990; van Dijk et coll., 2009; 2012; de Haas et coll., 2018) (Figure 3.6). Si le cône alluvial se forme au bord d’une étendue d’eau calme (lac, réservoir, océan), on l’appelle « delta sous-marin ». Ces formes de relief diffèrent des cônes alluviaux dans la mesure où l’accumulation de sédiments sur le bord de la forme de relief se produit dans des eaux calmes, ce qui favorise le dépôt de sédiments en raison d’un effet de remous (c’est-à-dire que l’étendue d’eau calme en aval réduit la pente de la rivière et la capacité de transport solide de l’écoulement). L’ampleur de l’effet de remous est sensible à la montée du niveau de l’eau dans l’étendue d’eau en aval; lorsque le niveau de l’eau est élevé, l’effet de remous est amplifié, et la fréquence et possiblement la gravité de l’alluvionnement (et des avulsions) en amont augmentent (van Dijk et coll., 2009; 2012).

Schéma d'un ruisseau à forte pente illustrant des avulsions en aval de l'apex de l'éventail

Figure 3.6. Schéma d’un chenal de ruisseau à forte pente avec avulsions en aval du sommet du cône. La surface du paléocône représente la partie du cône qui s’est déposée dans un passé lointain et qui n’est plus accessible au cours d’eau actuel.

3.3 Identification des processus liés aux aléas

Si le bassin versant considéré dans une étude de cartographie des zones inondables contient des terrains montagneux et des formes de relief indiquant des inondations de débris ou des laves torrentielles, la différenciation des processus hydrogéomorphologiques dominants est l’étape essentielle suivante. Le type de processus hydrogéomorphologique dominant peut être évalué sur la base de deux facteurs : (1) les caractéristiques du bassin versant et (2) la nature des dépôts de sédiments.

Caractéristiques du bassin versant

Wilford et coll. (2004) ont présenté un diagramme permettant de distinguer les processus hydrogéomorphologiques en fonction de la longueur du cours d’eau et de « l’indice de Melton » du bassin versant. La Figure 3.7 présente une version qui a ensuite été améliorée à l’aide d’ensembles de données plus importants par Holm et coll. (2016), Lau (2017) et de données non publiées de BGC Engineering Inc. L’indice de Melton est lié au relief total () ou à la différence de niveau entre le point le plus haut et le point le plus bas du bassin versant et à la superficie du bassin versant () (c.-à-d.). Il permet essentiellement de mesurer la pente du bassin versant.

Diagramme de dispersion illustrant les processus hydrogéomorphologiques dominants en fonction du ratio de Melton et de la longueur du cours d'eau

Figure 3.7. Processus hydrogéomorphologiques dominants en fonction de l’indice de Melton et de la longueur du cours d’eau. Le regroupement des classes, tel qu’il apparaît dans les polygones ombragés, est fondé sur le jugement. Plusieurs cours d’eau sont également soumis à plus d’un processus.

Bien que la Figure 3.7 présente un chevauchement important entre les processus, le diagramme fournit une méthode préliminaire pour évaluer si un processus a le potentiel de se produire dans un bassin versant. Dans un bassin versant à forte pente avec un indice de Melton de 0,8, par exemple, un cours d’eau dont la longueur en amont est de 0,2 km (relativement courte) est principalement susceptible d’être sujet aux laves torrentielles, tandis qu’un cours d’eau dont la longueur en amont est de 5 km peut être sujet aux laves torrentielles et aux inondations de débris.

Dépôts de sédiments

Un suivi sur le terrain est souvent nécessaire pour confirmer les processus hydrogéomorphologiques actifs à un endroit donné. Le Tableau 3.1 fournit un résumé des caractéristiques qui peuvent être observées sur le terrain et utilisées pour déterminer les laves torrentielles, les inondations de débris et les crues d’eau claire.

Alors que les dépôts de laves torrentielles peuvent ne pas être séparés ou présenter un granoclassement inverse (c’est-à-dire une augmentation de la granulométrie vers le haut du dépôt), les dépôts d’inondations de débris sont séparés et imbriqués ou alignés dans la direction de l’écoulement, comme les dépôts « normaux » de crues d’eau claire. Les laves torrentielles se distinguent également par le fait qu’elles sont à texture non jointive (c’est-à-dire qu’elles sont dominées par des matériaux à grains plus fins contenant des clastes) et qu’elles entraînent souvent la formation de levées alluviales le long de leurs bordures et de lobes de blocs à l’avant des dépôts qu’elles créent.

Les inondations de débris représentent une transition entre les crues d’eau claire et les laves torrentielles, et il peut donc être difficile de différencier les inondations de débris des autres types de processus. Bien que les dépôts d’inondations de débris ressemblent à certains égards aux dépôts de crues d’eau claire (p. ex. sédiments formés de clastes avec un étalement granulométrique normal), la teneur en sable des dépôts d’inondations de débris est généralement beaucoup plus élevée que celle des dépôts de crues d’eau claire en raison de la rapidité avec laquelle ces sédiments sont déposés, ce qui donne lieu à une séparation moins efficace (Blair et McPherson, 1994). Comme les laves torrentielles, elles peuvent contenir des terrasses couplées et de la végétation enfouie ou endommagée par des impacts, mais elles ne présentent généralement pas de dépôts de blocs bien définis ni de granoclassement inverse.

Tableau 3.1. Caractéristiques sédimentaires et géomorphologiques pour différents types de processus hydrogéomorphologiques.
Sédiments ou caractéristiques géomorphologiques Crues d’eau claire Inondations de débris Laves torrentielles
Stratigraphie des dépôts à texture non jointive Non Rarement Oui
Stratigraphie des dépôts formés de clastes Oui Souvent Rarement
Granoclassement inverse des dépôts Non Non Oui
Imbrication des clastes (c’est-à-dire grains alignés dans le sens de l’écoulement) Généralement Parfois Non
Dépôts de blocs définis à l’avant du lobe de sédiments déposés Non Parfois, mais avec des limites moins nettes que pour les laves torrentielles Oui
Levées alluviales de blocs sur le bord des dépôts Non Non Oui
Terrasses situées de chaque côté du chenal au même niveau (« terrasses couplées ») Seulement si le lit du cours d’eau est incisé dans la couche d’alluvions Souvent Rarement
Végétation enfouie Parfois Oui Oui
Végétation riveraine endommagée par des impacts Rarement Souvent Oui
Dépôts de débordement à grains fins Généralement Parfois Rarement
Pente du chenal (bassin versant) Généralement moins de 27 % Généralement moins de 27 % Généralement plus de 27 %
Pente du chenal (cône) Moins de 5 % De 5 à 9 % Plus de 9 %

3.4 Distribution géographique des types de processus

Comme le type de processus hydrogéomorphologique dominant varie en fonction de la pente de la rivière et du cône, ainsi que d’autres facteurs comme l’apport en sédiments, il est possible de caractériser globalement les zones exposées en se basant uniquement sur la topographie. La Figure 3.8 montre la distribution approximative des zones sujettes aux inondations de débris et aux laves torrentielles au Canada, simplement en fonction de leur pente. Étant donné que les crues d’eau claire peuvent se produire quelle que soit la pente du cours d’eau, elles se produisent partout au Canada.

La Figure 3.8 ne montre que les grandes tendances géographiques. Il est donc important de réaliser une évaluation plus détaillée afin de cibler tous les processus hydrogéomorphologiques pertinents dès le début d’une étude de cartographie des zones inondables en utilisant les méthodes décrites à la section 3.3.

Carte du Canada illustrant la distribution géographique des zones exposées aux inondations de débris et aux laves torrentielles

Figure 3.8. Aperçu de la distribution géographique des zones exposées aux inondations de débris et aux laves torrentielles au Canada, basé sur la pente d’un modèle altimétrique numérique d’une résolution de 1 km.

3.5 Considérations relatives à la cartographie

Une fois que le processus hydrogéomorphologique dominant a été déterminé dans une zone d’étude, il faut considérer les façons dont les processus géomorphologiques connexes peuvent avoir une incidence sur une étude de cartographie des zones inondables. L’érosion, le transport et le dépôt de sédiments peuvent influencer la cartographie des zones inondables de trois manières principales : en augmentant la densité des eaux de crue, en bloquant les voies d’écoulement avec des sédiments ou des débris végétaux et en modifiant le terrain sur lequel l’eau s’écoule. Le Tableau 3.2 résume les considérations relatives à la cartographie pertinentes pour chaque processus hydrogéomorphologique.

Tableau 3.2. Aperçu des considérations géomorphologiques dans la cartographie des zones inondables pour chaque processus hydrogéomorphologique. Les symboles « + » représentent l’importance relative de chaque considération relative à la cartographie.
Processus hydrogéomorphologique dominant Emplacement Considération relative à la cartographie

Crues d’eau claire

A simple illustration of an area affected by clearwater floods on low-gradient floodplains and alluvial fans, with houses, water, and vegetation
Plaines inondables et cônes alluviaux à pente faible Blocage de sédiments/de débris végétaux (+)
Alluvionnement (+)
Dégradation (+)
Érosion des berges (+)
Avulsion (+)

Inondations de débris

A simple illustration of an area affected by debris floods on moderate gradient floodplains and alluvial fans, with houses, water, and displaced soil
Plaines inondables et cônes alluviaux à pente modérée Gonflement du débit (+)
Blocage de sédiments/de débris végétaux (++)
Alluvionnement (+++)
Dégradation (++)
Érosion des berges (+++)
Avulsion (++)

Laves torrentielles

A simple illustration of an area affected by debris flows on steep alluvial fans, with houses, water, and displaced soil
Cônes alluviaux à forte pente Gonflement du débit (++)
Blocage de sédiments/de débris végétaux (+++)
Alluvionnement (+++)
Dégradation (++)
Érosion des berges (++)
Avulsion (+++)

4.0 Lignes directrices pour l’établissement des cartes d’aléas hydrogéomorphologiques

4.1 Crues d’eau claire

4.1.1 Description du processus

Les crues d’eau claire se produisent sur les cônes alluviaux et les plaines inondables à pente faible (p. ex. chenal dont la pente est de moins de 5 %) où les sédiments mobilisés ne gonflent pas de manière importante l’écoulement. Les crues d’eau claire peuvent également se produire dans les cours d’eau à plus forte pente sujets aux inondations de débris ou aux laves torrentielles entre deux épisodes plus importants, lorsque les sédiments se rechargent après avoir été affouillés et transportés. Toutefois, comme le débit de ces crues d’eau claire est plus faible et que celles-ci sont moins érosives que les inondations à débit « gonflé », elles ne déterminent généralement pas l’ampleur des aléas d’inondation (ou des risques) dans les zones à plus forte pente.

Les crues d’eau claire peuvent provoquer des changements latéraux (c.-à-d. l’érosion des berges et l’avulsion) ou verticaux (c.-à-d. l’alluvionnement et la dégradation). La répartition des changements dépend de l’érodabilité relative du lit et des berges de la rivière (p. ex. Millar, 2005; Eaton, Millar et Davidson, 2010), ainsi que de l’équilibre entre l’apport en sédiments et la capacité de transport à l’intérieur du tronçon. Les berges non cohésives d’une rivière à lit de gravier peuvent particulièrement s’éroder, car elles sont plus érodables que le lit, alors que les rivières à lit de sable dont les berges contiennent des argiles cohésives peuvent être plus susceptibles à l’affouillement ou la dégradation. Chaque processus peut nécessiter d’importantes considérations relatives à la cartographie, comme décrit ci-dessous.

Érosion des berges

Les crues exercent de fortes contraintes de cisaillement sur le lit et les berges de la rivière, ce qui entraîne souvent l’érosion des berges et une modification de la taille ou de la position du chenal. L’érosion des berges se produit par le biais de deux mécanismes principaux : (1) l’érosion à l’extérieur d’un coude de méandre conduisant à sa croissance vers l’extérieur au fil du temps, et (2) l’élargissement soudain lors d’une crue (Figure 4.1). Le « type » d’érosion que subit une rivière varie principalement en fonction de sa morphologie et du milieu environnant, mais peut également être influencé par l’ampleur des inondations.

changements du tracé des rivières à deux endroits
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Comparaison des changements du tracé des rivières à deux endroits :

  1. (a) Rivière Beaver, Saskatchewan (2016) – Montre l'érosion et la migration des méandres dans une rivière à lit de sable/silt, avec le tracé de 1946 et une flèche indiquant le déplacement du corridor des méandres.
  2. (b) Rivière Nicola, Colombie-Britannique (2022) – Illustre l'élargissement du lit après une inondation en 2021, avec le tracé de 2015 et la végétation attendue des bancs de gravier pour rétrécir la rivière.

Les deux cartes incluent des barres d'échelle et des flèches du nord. Sources des images : (a) ESRI World Imagery, (b) Urban Systems.

Figure 4.1. Aperçu (a) de l’érosion et de la migration progressives des méandres sur un tronçon sinueux à lit de sable ou de limon de la rivière Beaver en Saskatchewan, en contraste avec (b) l’élargissement du chenal dans un tronçon sinueux à lit de gravier de la rivière Nicola en Colombie-Britannique après une crue extrême en novembre 2021. Avec le temps, les bancs exposés se végétaliseront, ce qui ramènera la rivière Nicola à sa largeur avant l’inondation. Photo : (a) Image satellitaire du monde ESRI (b) Urban Systems

Les rivières méandreuses à pente faible transportent généralement des matériaux fins de charriage (p. ex. du sable), la plupart des sédiments étant transportés en suspension (Church, 2006). Pendant les crues, les sédiments fins en suspension (c.-à-d. le limon et l’argile) s’accumulent sur les berges des rivières, assurant la cohésion de celles-ci et permettant aux rivières à lit de sédiments fins de développer une forme très sinueuse avec une géométrie profonde et étroite. L’érosion des berges dans ces rivières à pente faible est concentrée à l’extérieur des coudes de méandres, car le pied de la berge est sapé là où les contraintes de cisaillement sont les plus élevées, ce qui conduit finalement au sapement des matériaux cohésifs situés au-dessus (Eaton, 2006; Darby et coll., 2010). L’érosion est généralement compensée par le dépôt de matériaux érodés dans des barres de méandres le long de la rive intérieure des méandres à l’aval, ce qui permet à la rivière de conserver une largeur constante tout en évoluant latéralement à travers la plaine inondable (Church, 2006; Fuller, 2007; Olson, Legg, Abbe et Reinhardt, 2014).

Dans les rivières à pente faible, les coudes de méandres s’étendent généralement vers l’extérieur et migrent en direction aval (p. ex. Figure 4.1a) à l’intérieur d’un lit des méandres défini par les points les plus à l’extérieur des coudes de méandres existants (Olson et coll., 2014). Ce processus d’agrandissement et de migration des méandres est souvent progressif, s’étendant sur des années ou des décennies, mais il peut aussi être intermittent lors de crues importantes entraînant un effondrement soudain de la berge qui survient lorsqu’un bloc est sapé par l’érosion du pied de la berge (Darby et coll., 2010). En général, ces rivières à pente faible et à grains fins tendent à être plus stables latéralement que les cours d’eau à grains plus gros (Figure 3.1), l’érosion se produisant à des endroits prévisibles.

Les cours d’eau à forte pente transportent généralement une charge de fond dont les éléments constitutifs sont de plus grosse taille, et leur lit contient souvent des matériaux de la taille de graviers ou de galets. La cohésion des berges de ces systèmes est plus faible, car ils ne déposent pas de sédiments fins d’argile et de limon pendant les inondations. Les chenaux adoptent donc une géométrie plus large et moins profonde (Church, 2006). Les crues importantes peuvent également provoquer un élargissement soudain lorsque le chenal s’ajuste pour transporter un débit plus élevé par l’entraînement et l’érosion des matériaux non cohésifs des berges (Figure 4.1b). Ce changement géomorphologique survient souvent au cours d’une seule crue lorsque la résistance à l’entrainement des matériaux de fond est dépassée, ce qui provoque une mobilisation et une déstabilisation du lit à grande échelle (Langendoen et Simon, 2008; Pitlick, Marr et Pizzuto, 2013; Eaton, Mackenzie, Jakob et Weatherly, 2017).

Alluvionnement et dégradation du lit du chenal

L’alluvionnement et la dégradation du chenal reflètent une élévation ou un abaissement général du lit du chenal en raison d’un déséquilibre entre la capacité de transport de la rivière et l’apport en sédiments (Church, 2015) (Figure 4.2). L’alluvionnement et la dégradation peuvent être déclenchés par diverses perturbations naturelles et anthropiques d’un bassin versant (Figure 4.3). Les obstacles comme les barrages sont une cause fréquente de dégradation en aval, car ils réduisent l’apport en sédiments dans les tronçons en aval (Brandt, 2000; Williams et Wolman, 1984). Inversement, les tronçons situés en amont d’un barrage peuvent subir un alluvionnement en raison d’une augmentation du niveau d’eau à l’entrée d’un réservoir (Evans, Huxley et Vincent, 2007).

La gravité de la réponse du chenal à une fluctuation de l’apport en sédiments ou de la capacité de transport diminue généralement avec la distance par rapport à la perturbation initiale, mais peut se propager sur des centaines de kilomètres en amont ou en aval (p. ex. Andrews, 1986). La dégradation et l’alluvionnement peuvent persister pendant des décennies ou plus longtemps (p. ex. Weatherly et Jakob, 2014); plusieurs des rivières principales au Canada se dégradent encore par incision dans des couches épaisses de matériaux déposés par les glaciers en réponse au rebond isostatique associé à la fonte des glaciers après le dernier âge glaciaire il y a 11 000 ans (Ashmore, 1993; Church, Ham, Hassan et Slaymaker, 1999). Malgré le temps d’adaptation potentiellement long, le taux de modification du lit est généralement le plus rapide immédiatement après qu’il a été perturbé et diminue au fil du temps.

diagramme montrant l'équilibre entre l'approvisionnement en sédiments et la capacité
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Diagramme montrant l'équilibre entre l'approvisionnement en sédiments et la capacité de transport dans un système fluvial.

Le côté gauche (Approvisionnement en sédiments) montre la taille des sédiments, du grossier au fin, un chargement plus lourd provoquant l'érosion.

Le côté droit (Capacité de transport) représente la pente du cours d'eau, de plate à raide, une pente plus raide augmentant la capacité de transport, illustrée par un aquarium renversant de l'eau.

Le pivot central montre l'équilibre entre dégradation et aggradation.

Figure 4.2. Diagramme illustrant l’équilibre entre l’apport en sédiments et la capacité de transport d’un cours d’eau. Schéma adapté de Stein et coll. (2012) sur la base des concepts de Lane (1954), Rosgen (1996) et du Federal Interagency Stream Restoration Working Group (1998).

diagramme montrant les mécanismes de dégradation
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Diagramme illustrant des exemples de mécanismes déclencheurs de la dégradation et de l'aggradation des cours d'eau. La partie gauche (bleue) représente les déclencheurs de dégradation, tels que la diminution du niveau de base, l'augmentation du débit due au changement climatique, les coupures de méandres et le soulèvement tectonique. La partie droite (jaune) représente les déclencheurs de l'aggradation, notamment l'augmentation du niveau de base, la perte de confinement du chenal, l'allongement des méandres et la subsidence tectonique. Le chevauchement central (vert) met en évidence les influences communes telles que les barrages, la déforestation, la canalisation, les changements d'utilisation des terres, le retrait glaciaire et les incendies de forêt.

Figure 4.3. Exemples de mécanismes déclencheurs de la dégradation et de l’alluvionnement des rivières.

Avulsion

Les crues peuvent modifier le cours des cours d’eau, en se frayant une nouvelle voie d’écoulement ou en occupant un chenal latéral actif ou abandonné dans la plaine inondable. Ce processus, appelé avulsion, implique une combinaison de crues et d’érosion verticale. Les avulsions se produisent principalement par des coupures entre les coudes de méandres dans les rivières très sinueuses et à pente faible et par la création ou la réoccupation de chenaux latéraux dans les rivières sinueuses ou en tresses (Konrad, 2012) (Figure 4.4). Quel que soit le mécanisme, les avulsions tendent à se produire dans les limites de la migration historique des rivières (Olson et coll., 2014).

Les coupures de méandres dans les rivières à pente faible surviennent en réponse à l’érosion progressive des berges extérieures des coudes de méandres (Figure 4.4). Au fil du temps, la croissance des méandres vers l’extérieur entraîne une augmentation de la sinuosité du chenal. Lorsque la longueur de la rivière augmente par rapport à la longueur de la vallée, la pente du chenal et la capacité érosive de l’écoulement diminuent toutes deux. Lorsque la pente de la voie de coupure potentielle devient suffisamment élevée par rapport à la pente du coude de méandre, une avulsion se produit alors que la rivière abandonne le chenal principal et suit une nouvelle voie plus courte et plus abrupte entre les coudes de méandres (Slingerland et Smith, 2004). Les coupures de coudes de méandres peuvent se manifester sous forme de coupures de pédoncules de méandres ou de coupures de chutes. Les coupures de pédoncules de méandres ont lieu lorsque deux coudes de méandres se rejoignent en raison de l’érosion progressive des coudes de méandres, tandis que les coupures de chutes impliquent la formation d’un nouveau chenal dans la plaine inondable entre deux coudes de méandres (Figure 4.4).

Le changement de chenal dans les cours d’eau à forte pente implique les mêmes processus qu’une coupure entre deux méandres : le cours d’eau se fraie une nouvelle voie dans la plaine d’inondation ou occupe un chenal latéral actif ou abandonné. Toutefois, ce processus peut également avoir lieu en l’absence de coudes de méandres, en particulier dans les tronçons sinueux ou entrelacés latéralement actifs. Les importants dépôts de sédiments présents dans les tronçons sinueux et entrelacés, ainsi que la géométrie peu profonde et large associée à ces morphologies favorisent le débordement et la formation de nouveaux chenaux (Desloges et Church, 1989) (Figure 4.4). Les avulsions de chenaux sont donc fréquentes dans les environnements alluvionnants caractérisés par un apport important en sédiments, comme les cônes alluviaux.

Effets de la glace

Les changements géomorphologiques peuvent également être attribuables à l’affouillement mécanique du lit et des berges du cours d’eau par la glace, ou à l’érosion fluviale lors de la libération de l’eau endiguée par la glace. Les embâcles sont relativement fréquents sur les rivières canadiennes, les régions de l’est et du nord du pays étant généralement plus sujettes aux embâcles que les provinces de l’ouest (Rokaya, Budhathoki et Lindenschmidt, 2018). Les embâcles peuvent avoir une incidence sur la morphologie des rivières à la fois pendant le passage de la vague de libération de l’embâcle et pendant le mouvement des glaces associé à la débâcle (Beltaos, 2007, 2008). Lors d’une libération, les diminutions soudaines des niveaux d’eau en amont peuvent également conduire à des ruptures de berges résultant d’une diminution soudaine des pressions interstitielles (Beltaos, 2008). Les facteurs contribuant à la formation d’embâcles et l’ampleur des inondations associées à la débâcle varient souvent extrêmement (Pawlowski, 2020). Ces complexités indiquent que les changements dans la morphologie des rivières à la suite d’une débâcle sont généralement imprévisibles.

schémas illustrent les différents types d'avulsion
Version textuelle

Diagrammes schématiques illustrant les différents types d'avulsion typiques à différentes échelles de longueur.

Quatres photos illustrant les types d’avulsion typiques à différentes échelles de longueur.

Figure 4.4. Types d’avulsion typique à différentes échelles de longueur d’après Olson et coll., 2014. Photos : (a) Google Earth, 24 septembre 2014; (b) Ecoscape Environmental Consutlants Ltd, 18 octobre 2021; (c) Google Earth, 12 décembre 2021; (d) Google Earth, 6 may 2014.

4.1.2 Caractérisation géomorphologique

La nature et l’intensité des processus géomorphologiques en eaux claires qui s’opèrent dans un bassin versant ou un tronçon d’étude déterminent à la fois les méthodes d’analyse à utiliser et les produits cartographiques à élaborer. La première étape de l’intégration des considérations géomorphologiques dans la cartographie des zones inondables consiste à déterminer les processus géomorphologiques pertinents dans la zone d’étude. Des photographies aériennes, des images satellites ou d’autres images de haute qualité peuvent être utilisées pour évaluer les changements dans le bassin versant et la zone d’étude au fil du temps. À l’échelle la plus grossière, cela peut simplement inclure l’examen des images historiques pour cibler les changements dans l’emplacement des cours d’eau ou le style fluvial, ainsi que les sources d’apport en sédiments dans le bassin versant. Dans le cadre d’une étude plus détaillée ou dans les cas où une modification importante des rivières est relevée, le praticien peut souhaiter cartographier et quantifier les changements au fil du temps par le géoréférencement des photographies aériennes historiques et en délimitant l’emplacement des berges des cours d’eau pour les images de chaque année.

Compte tenu de la subjectivité inhérente à une évaluation historique, il est recommandé d’élaborer des protocoles standard à utiliser dans le cadre de l’étude afin de garantir l’uniformité entre les praticiens ou de confier l’examen des données historiques à un seul praticien. Les protocoles peuvent inclure la normalisation du nombre de points de référence à utiliser pour la géorectification, l’échelle des photographies aériennes à inclure et le processus de délimitation des berges des cours d’eau (p. ex. à la lisière de la végétation à une échelle définie). L’échelle requise pour les images varie en fonction de la taille du cours d’eau, mais généralement, le cours d’eau doit être clairement visible sur les images. Les photographies de faible résolution ou comportant des ombres ne doivent pas être utilisées afin de réduire la possibilité d’erreur associée à l’analyse. Il est recommandé aux praticiens d’utiliser les données les plus anciennes possibles; des photographies aériennes datant des années 1950, au minimum, et plus récentes sont disponibles dans la plupart des régions du Canada. Dans certains endroits, les photographies aériennes peuvent également être complétées par des cartes plus anciennes indiquant l’emplacement des cours d’eau ou les limites des parcelles cadastrales.

Les données lidar sont de plus en plus accessibles et abordables et peuvent également être utilisées pour déterminer les formes de relief qui indiquent la migration passée des rivières (p. ex. les lacs en croissant ou les bras abandonnés) ainsi que les sources de sédiments (p. ex. les glissements de terrain). Les modèles altimétriques numériques (MAN) générés à partir des données lidar peuvent être utilisés pour créer des modèles d’élévation relative (MER) qui montrent le niveau de la plaine inondable par rapport au niveau de la rivière, comme le montre la Figure 4.5, et fournissent des preuves de l’étendue latérale de la migration historique (voir Olson et coll., 2014 pour connaître les méthodes détaillées).

modèle d'élévation relative (REM)
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Modèle d'élévation relative (REM) décrivant les élévations du fond de la vallée par rapport à la rivière Athabasca et à la rivière Sakwatamau près de Whitecourt, en Alberta. Le gradient de couleur représente les différences d'altitude, le bleu plus foncé indiquant des altitudes plus basses, plus proches des cours d'eau, et les teintes plus claires représentant des terrains plus élevés. La carte donne un aperçu de la dynamique des plaines d'inondation, de la position historique des chenaux et des zones d'inondation potentielles.

Figure 4.5. MER montrant le niveau du fond de la vallée par rapport au niveau des rivières Athabasca et Sakwatamau.

Les formes de relief visibles sur le lidar peuvent être utilisées pour indiquer si un tronçon est en cours d’alluvionnement ou de dégradation. La présence de terrasses fluviales dans une vallée, par exemple, indique que la rivière a connu ou connaît actuellement une période de dégradation. Des taux de dégradation et d’alluvionnement peuvent être publiés pour certains chenaux en raison de l’incidence qu’ils peuvent avoir sur les infrastructures existantes, comme les ponts, et peuvent être utilisés pour caractériser le taux de changement vertical observé. De même, les données des courbes des débits jaugés des stations hydrométriques peuvent être exploitées pour quantifier les tendances du niveau du lit (p. ex. Stover et Montgomery, 2001).

Lorsque plusieurs ensembles de données lidar sont accessibles, la détection des changements peut également être utilisée pour quantifier les changements de niveau du lit de la rivière par alluvionnement ou dégradation, pour surveiller la progression en direction amont des ruptures de pente et pour déterminer l’érosion des berges, l’avulsion ou les ruptures de versant se produisant entre les ensembles de données lidar (Figure 4.6). Les levés bathymétriques effectués sur deux années ou plus peuvent également être comparés afin de quantifier les modifications du chenal.

carte de détection des changements lidar
Version textuelle

Carte de détection des changements par lidar illustrant les zones d’érosion ou de perte de sédiments en bleu et de dépôt ou d’accumulation de sédiments en rouge.

Figure 4.6. Détection des changements par lidar entre les ensembles de données d’avril 2018 et de décembre 2021 sur la rivière Nicola, en Colombie-Britannique. Les tons de bleu indiquent un changement vertical négatif et les tons de rouge un changement positif.

4.1.3 Méthodes de modélisation et de cartographie

La cartographie des zones inondables repose généralement sur la modélisation hydrographique, réalisée à l’aide de progiciels de modélisation hydraulique comme HEC-RAS (Brunner et CEIWR-HEC, 2021), afin de simuler l’étendue de l’inondation, les tirants d’eau et les vitesses. Bien que le gonflement du débit ne soit pas préoccupant pendant les crues d’eau claire, l’accumulation de sédiments peut devoir être prise en compte; les sédiments, les débris végétaux ou autres peuvent bloquer les infrastructures de lutte contre les inondations (p. ex. ponceaux, ponts, etc.) ou les chenaux, augmentant ainsi les hauteurs d’eau de crues par un effet de remous ou en élevant le niveau du lit de la rivière. L’érosion et l’avulsion peuvent également déplacer le chenal de la rivière ou en modifier sa taille, ce qui modifie l’hydraulique dans une plaine inondable.

En fonction des objectifs de l’étude cartographique et des processus hydrogéomorphologiques pertinents dans le tronçon, la modélisation de plusieurs scénarios d’inondation peut être justifiée pour chaque débit de crue. Quelques exemples de scénarios possibles :

  • Blocage des ponceaux : il peut être modélisé en supprimant simplement les ponceaux d’un modèle hydraulique, ce qui équivaut à un blocage complet, causant une hausse de la ligne d’eau et la création d’une nouvelle voie d’écoulement.
  • Alluvionnement : il peut être simulé en augmentant le niveau du lit de la rivière dans toute la zone d’étude ou dans des zones locales où un alluvionnement est prévu au cours d’une seule inondation ou progressivement au fil du temps (p. ex. sur la base des taux d’alluvionnement historiques). Dans le cas des crues d’eau claire, cela peut être particulièrement important dans les endroits où des ouvrages de protection sont en place (p. ex. des digues), car l’alluvionnement progressif réduit la revanche, ce qui peut entraîner le débordement ou la rupture de l’infrastructure de lutte contre les inondations.
  • Dégradation : semblable à l’alluvionnement, elle peut être simulée en abaissant le niveau du lit de la rivière. Bien que la dégradation réduise probablement l’étendue des inondations, elle peut augmenter la capacité érosive de l’écoulement en raison d’un confinement accru, ce qui risque d’accroître l’érosion des berges et les ruptures de versant. Ces processus doivent être considérés séparément, car ils ne sont pas correctement pris en compte par les modèles hydrauliques.
  • Avulsion : si une voie d’avulsion potentielle a été déterminée sur la base des emplacements des chenaux latéraux existants ou d’un MER, le terrain du modèle peut être ajusté pour refléter l’alignement futur prévu (p. ex. en incisant un nouveau chenal principal dans le terrain ou en remplissant le chenal principal existant).
  • Érosion ou élargissement des berges : ce phénomène peut être modélisé en ajustant le terrain pour refléter la géométrie élargie prévue de la rivière.

Les ajustements du modèle présentés ci-dessus doivent être utilisés pour comparer des scénarios hypothétiques futurs, et non pour prédire l’hydraulique exacte, car les emplacements d’avulsion et les étendues d’érosion sont difficiles à prédire sur la seule base de l’ampleur des inondations. Dans les études où la probabilité des aléas est quantifiée, une probabilité d’occurrence peut être attribuée à chaque scénario modélisé; la probabilité variera probablement avec l’ampleur de l’inondation dans la plupart des cas (p. ex. la probabilité de blocage d’un ponceau ou d’un pont augmente lors d’inondations plus importantes, tandis que la probabilité du scénario d’écoulement non obstrué diminue). Une étude de sensibilité est également recommandée pour évaluer la sensibilité des résultats aux valeurs du scénario (p. ex. la profondeur d’alluvionnement) et aux probabilités du scénario.

Dans les cas où l’érosion ou l’avulsion constituent un aléa, il peut être justifié de les prendre en compte dans des cartes d’aléas distinctes. L’établissement des cartes d’aléas d’érosion ou d’avulsion consiste à déterminer les zones d’une vallée ou d’un cône qui sont exposées à la migration des rivières (c.-à-d. l’avulsion ou l’érosion des berges). Cela doit être envisagé lorsqu’il existe un potentiel de changement latéral important en un seul évènement de crue ou lorsqu’il existe un potentiel de changements cumulatifs et progressifs importants sur l’horizon temporel considéré dans l’étude cartographique.

Une combinaison des approches suivantes est utilisée dans la plupart des méthodes de cartographie de l’érosion et de l’avulsion : (1) déterminer la zone active autour de la rivière, (2) caractériser l’ampleur de l’érosion pour définir une distance de recul ou la gravité de l’aléa, et (3) ajouter une distance de recul supplémentaire pour tenir compte de l’incertitude ou des exigences en matière d’accès. Les éléments à inclure dans une étude, ainsi que l’approche et le niveau de détail privilégiés, dépendent des objectifs de l’étude et du contexte géomorphologique. Des approches plus simples, comme la définition d’une distance de recul standard ou la définition de la distance de recul sur la base d’un certain débit caractéristique, ont été utilisées dans le passé (p. ex. Simons, Li et Associates, 1996 dans FEMA, 1999), mais ne sont pas recommandées dans les rivières latéralement actives, car elles ne tiennent pas compte des différences dans l’apport en sédiments ou la stabilité latérale entre différents milieux (p. ex. la Figure 3.1).

La zone active autour d’une rivière peut être délimitée très simplement en définissant le lit des méandres, un corridor qui comprend l’étendue totale de tous les coudes de méandres à l’intérieur d’un tronçon (Figure 4.7) (p. ex. Parish Geomorphic, 27 septembre 2001; Rapp et Abbe, 2003). D’autres méthodes plus robustes consistent à définir la zone de migration historique (ZMH) de la rivière, parfois appelée fond de vallée moderne (FVM) (p. ex. Piégay et coll., 2005; Olson et coll., 2014). La ZMH (ou FVM) comprend toutes les zones qui ont été historiquement occupées par la rivière à chenaux anastomosés sur la base d’une analyse de photographies aériennes ou de formes de relief visibles dans le lidar et qui peuvent être déterminées le plus facilement en créant un MER du fond de la vallée ou du cône (en particulier dans les cours d’eau sinueux ou entrelacés). Olson et coll. (2014) fournissent des méthodes détaillées pour créer des MER et délimiter la ZMH.

Aérienne montrant le lit de méandres de la rivière Annapolis près de Middleton, en Nouvelle-Écosse

Figure 4.7. Exemple de lit des méandres sur la rivière Annapolis en Nouvelle-Écosse. La largeur du lit varie en fonction de l’amplitude des méandres, et le lit des méandres du tronçon 1 est plus large que celui du tronçon 2. Photo : Image satellitaire du monde ESRI, 12 octobre 2019.

L’approche utilisée pour caractériser l’ampleur de l’érosion future (ou le recul de l’érosion) dépendra du style fluvial – et de la stabilité latérale – de la rivière dans la zone d’étude. Dans le cas de certaines rivières méandreuses à pente faible soumises à une érosion progressive lente, il peut être suffisant de définir la zone d’érosion potentielle sur la base de la largeur du lit de méandres ou de la largeur à pleins bords. Par exemple, certaines lignes directrices recommandent de définir une « tolérance de lit des méandres » sur la base d’un nombre déterminé de largeurs à pleins bords à partir du centre du lit des méandres ou en ajoutant une seule largeur de lit des méandres à l’extérieur de l’existant (p. ex. Ontario Ministry of Natural Resources [OMNR], 2002). Ces approches ne prennent pas explicitement en compte le taux historique de migration latérale et doivent donc être utilisées avec précaution.

Dans les rivières actives latéralement, il est recommandé d’utiliser des méthodes plus robustes pour prédire l’emplacement et l’étendue de l’érosion. L’érosion future peut être estimée en projetant le taux d’érosion historique observé sur un horizon temporel défini, tandis que les zones susceptibles d’être exposées à l’avulsion peuvent être définies sur la base des MER ou de la modélisation hydraulique (p. ex. Olson et coll., 2014). Cette approche est la plus appropriée pour les rivières méandreuses subissant une érosion progressive. Des approches cellulaires ont également été proposées pour prédire l’emplacement de l’érosion future sur la base de la relation entre les caractéristiques des rivières et l’emplacement des érosions passées (Graf, 2000; Le Cozannet et coll., 2020).

Dans certains cas, l’ampleur de l’érosion doit être associée à la récurrence de la crue sous-jacente pour tenir compte de la probabilité d’érosion dans une zone au cours d’une crue donnée. Dans les rivières aux berges cohésives, l’érosion des coudes de méandres causée par des crues peut être modélisée à l’aide du modèle de stabilité et d’érosion du pied de la berge (Bank Stability and Toe Erosion Model, BSTEM), qui simule l’entraînement fluvial du pied des berges suivi d’une rupture de plaque des matériaux cohésifs de la berge sus-jacente et peut être exécuté par le biais de HEC-RAS (uniquement en mode unidimensionnel) ou indépendamment dans Excel © (voir Simon, Pollen-Bankhead et Thomas, 2011 pour une explication détaillée du modèle).

Dans les rivières à lit de gravier, la stabilité du lit et des berges est régie par la stabilité de la fraction grossière des matériaux de fond; lorsque l’extrémité grossière des matériaux de fond (p. ex.) est mobilisée, le lit du cours d’eau devient instable et son élargissement progresse jusqu’à ce que les matériaux grossiers se déposent à nouveau (Eaton, Mackenzie et Booker, 2020). L’élargissement des rivières à lit de gravier ou de galets dont les berges ne sont pas cohésives peut donc être estimé sur la base de l’hydraulique des inondations et de la granulométrie en utilisant les méthodes présentées dans Jakob et coll. (2022).

Pour prévoir l’emplacement ou l’ampleur de l’érosion future, il est important de tenir compte des sols et de la géologie dans la zone exposée à des aléas d’érosion. Il est peu probable que l’érosion progresse dans les zones contenant du substrat rocheux, et elle sera ralentie par des matériaux sédimentaires moins érodables comme le till de fond ou les dépôts de cônes colluviaux, par rapport à l’érosion historique observée dans les zones où l’on retrouve des plaines inondables ou des matériaux fluvioglaciaires. Les hautes terrasses de matériaux typiquement érodables peuvent également subir une érosion moins importante que prévu en raison du plus grand volume de matériaux présents (Bufe et coll., 2019).

Lors de la détermination des distances de recul ou des tolérances d’érosion, il peut être nécessaire d’ajouter une tolérance supplémentaire pour les ruptures de versant ou d’autres considérations comme les exigences en matière d’accès. Si les hautes terrasses peuvent limiter la progression de l’érosion au rythme historique observé, le sapement du pied peut provoquer des ruptures de versant susceptibles d’avoir une incidence sur les infrastructures situées en haut de la pente. Dans de tels cas, une distance de recul géotechnique doit être envisagée et variera en fonction de la géométrie de la pente, de la composition du sol et du mécanisme de rupture (p. ex. Olson et coll., 2014). Une marge de recul supplémentaire peut également être nécessaire pour les accès d’urgence ou de construction (p. ex. 6 m selon le OMNR, 2002).

Les mesures de protection contre l’érosion et les inondations doivent également être prises en compte, le cas échéant. Bien que ces mesures (p. ex. les digues enrochées) puissent limiter ou prévenir l’érosion pendant la plupart des écoulements, elles peuvent également échouer en cas d’inondation, en particulier si l’enrochement de protection est sous-dimensionné ou mal placé ou si l’ampleur de l’inondation est supérieure à celle de la crue nominale. Dans les études détaillées qui comprennent des infrastructures de protection contre les inondations, il peut être justifié d’évaluer la stabilité des ouvrages soumis à une gamme d’inondations (p. ex. en comparant les vitesses d’écoulement modélisées au dimensionnement des enrochements) ou de simuler des brèches dans les ouvrages de protection.

4.2 Inondations de débris

4.2.1 Description du processus

Au cours des 20 dernières années (Hungr et coll., 2001; Wilford et coll., 2004), le terme anglais « debris flood » (inondation de débris) a été utilisé pour décrire des inondations importantes impliquant des taux exceptionnellement élevés de transport de la charge de fond grossière dans des chenaux à forte pente, par rapport aux taux observés lors de crues d’eau claire. Les inondations de débris surviennent généralement dans les rivières dont la pente de chenal est comprise entre 5 et 27 %, mais elles peuvent également se produire dans les cours d’eau à lit de gravier dont la pente est plus faible.

Le transport de la charge de fond dans les rivières à lit de gravier a été caractérisé en trois étapes (Carling, 1988; Ashworth et Ferguson, 1989). À l’étape 1, les matériaux fins (généralement du sable) traversent un lit statique (c.-à-d. stable) ou sont mobilisés par vannage à partir d’un lit autrement statique. L’écoulement fluvial est insuffisant pour mobiliser les matériaux de fond à cette étape. À l’étape 2, le taux de transport de la charge de fond est faible, les clastes individuels étant mobilisés à partir de la surface du lit. Cet état est défini en tant que « transport partiel » par Wilcock et McArdell (1993), et une grande partie du lit reste stable. À l’étape 3, l’ensemble du lit du cours d’eau devient mobile, et l’activité peut s’étendre jusqu’à une profondeur de plusieurs granulométries médianes sous la surface, à la suite du transport de la quantité de mouvement par les collisions entre les grains. Une inondation de débris est alors un cas de transport de l’étape 3. Les inondations de débris sont des écoulements en deux étapes, avec de « l’eau claire » ou de l’eau ayant une charge solide en suspension importante, recouvrant un écoulement boueux contenant une forte concentration de matériaux de fond, dont les particules les plus fines peuvent être en suspension (Manville et White, 2003). Les inondations de débris sont relativement rares parce que le transport de l’étape 3 est rare dans les chenaux à lit de gravier.

Church et Jakob (2020) ont élaboré une typologie en trois parties pour les inondations de débris, qui n’avaient pas été bien définies auparavant. Les trois types dépendent des mécanismes de déclenchement, mais dans tous les cas, la mobilisation complète du lit est déclenchée par une force essentielle excédentaire agissant sur le lit.

  • Type 1 : une inondation de débris associée à un hydrogramme de crue d’eau claire initiale et dont l’augmentation du tirant d’eau et de la contrainte de cisaillement se produisent progressivement (c.-à-d. le transport solide à l’étape 3).
  • Type 2 : une inondation de débris survient brusquement par dilution à partir d’une lave torrentielle dans laquelle la mécanique d’écoulement passe de viscoplastique à newtonienne.
  • Type 3 : une inondation de débris est déclenchée par l’effondrement d’une moraine, de glace, d’un barrage de castor ou d’un barrage artificiel ou un glissement de terrain. Des détails supplémentaires sur les inondations de débris de type 3 sont fournis dans la publication de Jakob, Clague et Church (2015).

Bien que la mobilisation du lit à grande échelle et l’érosion des berges soient des résultats attendus, chaque type de processus d’inondation de débris générera différents volumes de débris, différents débits, différentes concentrations en sédiments et différentes échelles d’érosion des berges (Tableau 4.1).

Tableau 4.1. Typologie des inondations de débris et caractéristiques associées (d’après Church et Jakob, 2020).
Type Concentration typique en sédiments
(% en volume)
Facteur Qmax typique
(c.-à-d. le débit maximal par rapport au débit d’eau claire)
Période de retour typique
(années)

Type 1
(inondation de débris d’origine météorologique)

< 5 1,05 > 2 (probabilité de dépassement annuel [PDA] supérieure à 50 %)

Type 2
(dilution d’une coulée de débris à une inondation de débris)

< 50

2 à 5
(mais peut-être plus grand)

> 50 (PDA supérieure à 2 %)

Type 3
(ondes de submersion)

< 10

2 à 100
(en fonction de la taille du barrage et de la distance par rapport à la rupture du barrage)

> 100 (PDA supérieure à 1 %)

Les écoulements hyperconcentrés sont un cas particulier d’inondations de débris qui peuvent se produire sous forme d’inondations de débris de type 1, 2 ou 3. Le terme « écoulement hyperconcentré » a été défini par Pierson (2005) comme un type d’écoulement viscoplastique et multiphasique contenant des sédiments et d’eau qui se situe entre un écoulement normal (écoulement d’eau claire) et une lave torrentielle. Cependant, l’utilisation du terme d’écoulement hyperconcentré devrait être réservée aux boues liquides volcaniques ou sédimentaires faibles à grains fins, où la concentration de sédiments fins en suspension est suffisante pour conférer une limite d’élasticité au fluide et maintenir sa viscosité élevée (Pierson, 2005). Dans ce type d’écoulement, le sable et le gravier sont maintenus en suspension par la turbulence et les interactions dynamiques entre les particules.

4.2.2 Caractérisation géomorphologique

L’un des objectifs généraux de la caractérisation des inondations de débris est la création d’une relation fréquence-ampleur (F-A). La relation répond à la question « Quelle est la fréquence des inondations de différentes ampleurs? » L’objectif ultime d’une analyse F-A est d’élaborer un graphique qui relie la période de retour de l’aléa à son ampleur (p. ex. le débit de pointe ou le volume de sédiments). La courbe F-A qui en résulte constitue alors le facteur clé de la cartographie des aléas basée sur la modélisation.

La publication de Jakob et coll. (2022) propose une méthodologie complète pour évaluer les aléas d’inondation de débris et constitue une ressource recommandée pour les praticiens. Ces méthodes comprennent l’étude théorique et l’enquête sur le terrain. Cette dernière comprend l’interprétation et l’analyse des photographies aériennes et des images satellites, l’examen des données lidar et les comptes rendus historiques (voir les méthodes recommandées à la section 4.1.2). Les enquêtes sur le terrain comprennent la dendrogéomorphologie, des tranchées d’essai pour la diagraphie stratigraphique et la datation au carbone 14 des matières organiques dans les dépôts d’inondation de débris, et l’échantillonnage des matériaux de fond. Ces techniques peuvent être complétées par une relation empirique entre les sédiments nets déposés sur la surface des cônes et le ruissellement effectif et parfois la pente moyenne de la rivière, comme Rickenmann et Koschni (2010) l’ont déterminé et les travaux dans la vallée de Bow, Alberta, l’ont validé (Jakob et coll., 2022).

Engineers & Geoscientists British Columbia (EGBC, 2018) a publié des lignes directrices qui traitent précisément des évaluations des aléas d’inondation de débris. Ces lignes directrices servent pour les nouveaux aménagements et comprennent le niveau d’effort suggéré, les produits à livrer typiques et les périodes de retour à prendre en compte. Le niveau d’effort requis et les périodes de retour considérées varient en fonction du type de demande d’aménagement.

4.2.3 Méthodes de modélisation et de cartographie

L’évaluation des aléas d’inondation de débris implique généralement l’utilisation de modèles hydrodynamiques pour simuler les zones d’inondation potentielles et l’intensité du débit. Les progiciels de modélisation hydraulique comme HEC-RAS (Brunner et CEIWR-HEC, 2021), FLO-2D (FLO-2D Software inc., 2017) et BASEMENT (Vetsch et coll., 2020) peuvent déterminer la zone d’inondation et prédire le tirant d’eau et la vitesse d’écoulement avec une précision raisonnable, compte tenu d’hydrogrammes de crue crédibles. Les algorithmes de transport solide peuvent également être utilisés dans ces modèles avec plus ou moins de succès pour simuler les zones d’alluvionnement et de dégradation.

L’érosion et l’avulsion sont généralement à l’origine de la plupart des dommages associés aux inondations de débris (Jakob, Clague et Church, 2015), et il est donc essentiel de les prendre en compte dans les systèmes exposés aux inondations de débris. En raison de leur fraction volumique d’eau plus élevée, les inondations de débris sont généralement plus érosives le long des berges des cours d’eau à lit à fond mobile que les laves torrentielles. L’érosion des berges et les quantités excessives de charges de fond introduisent une quantité importante de sédiments dans le réseau fluvial. Ces sédiments s’accumulent (s’alluvionnent) dans les tronçons à pente faible, entraînant souvent des avulsions. Comme les hydrogrammes de crue fluctuent généralement plusieurs fois au cours d’un évènement donné, on peut s’attendre à plusieurs cycles d’alluvionnement et de remobilisation des sédiments déposés sur les tronçons du chenal et du cône.

Compte tenu du taux élevé de transport solide et du potentiel d’avulsion lors d’une inondation de débris, il est recommandé de modéliser plusieurs scénarios. Voici quelques exemples de scénarios :

  • Blocage des ponts ou des chenaux : il peut être modélisé en supprimant les ouvertures du pont pour obtenir un blocage total de l’écoulement ou en simulant un obstacle à l’écoulement à l’intérieur du chenal (p. ex. un barrage formé par un glissement de terrain).
  • Alluvionnement : il peut être simulé en augmentant le niveau du lit de la rivière dans l’ensemble de la zone d’étude ou dans des zones locales où l’on prévoit un alluvionnement au cours d’une seule inondation, car l’alluvionnement peut provoquer une avulsion, y compris dans les tronçons protégés contre les inondations (p. ex. des digues) en augmentant la probabilité de débordement. Certains modèles hydrauliques peuvent modéliser le transport solide, l’utilisateur pouvant choisir parmi un éventail d’équations empiriques. Toutefois, plusieurs de ces équations de transport de la charge de fond tendent à surestimer les taux de transport dans les cours d’eau exposés aux inondations de débris, car elles ont été élaborées pour des rivières à pente faible.
  • Avulsion : de même, si une voie d’avulsion potentielle a été déterminée sur la base de l’emplacement des chenaux latéraux existants ou d’un MER, le modèle de terrain peut être ajusté pour refléter l’alignement futur prédit (p. ex. en incisant un nouveau chenal principal ou en remplissant le chenal principal existant).
  • Gonflement du débit : lors de la simulation d’inondations de débris, il est généralement nécessaire de faire gonfler le débit pour tenir compte de la forte concentration en sédiments (comme décrit dans la section 4.1.3). Compte tenu de l’incertitude des valeurs de gonflement, il est prudent de modéliser la même inondation avec plusieurs valeurs de gonflement (c.-à-d. en procédant à des analyses de sensibilité).
  • Érosion des berges ou élargissement du chenal : ce phénomène peut être modélisé en ajustant le terrain pour refléter la géométrie élargie prévue du cours d’eau.
  • Ouvrages de protection : la puissance spécifique des cours d’eau associée aux inondations de débris peut déstabiliser par érosion et sapement les ouvrages de protection (p. ex. les enrochements), qui sont généralement conçus pour les crues d’eau claire. Les effets de la rupture des ouvrages de protection contre les inondations peuvent être modélisés en ouvrant des brèches artificielles ou en enlevant des structures comme les digues.

La Figure 4.8 donne un exemple de cartographie de l’intensité des inondations de débris pour des scénarios d’inondation de débris de la même ampleur. L’alluvionnement plus important modélisé à la Figure 4.8b entraîne une inondation plus étendue à travers le cône tout en réduisant l’intensité de l’inondation dans le chenal principal.

 
Deux images aériennes montrant l'intensité modélisée des inondations de débris pour le même événement sous deux scénarios différents

Figure 4.8. Intensité modélisée des inondations de débris (où) pour la même ampleur d’inondation dans deux scénarios différents : a) à la suite d’un alluvionnement sur le cône inférieur, en aval du pont routier, et b) à la suite d’un alluvionnement plus sévère s’étendant au cône supérieur et bloquant le pont routier. Photo : Google Earth, 12 août 2020.

L’érosion des berges constitue un aléa important dans les systèmes exposés aux inondations de débris, et les dommages potentiels dus à l’érosion des berges peuvent justifier un examen distinct. L’érosion des berges est un processus complexe qui dépend de nombreux facteurs, notamment les matériaux de la berge, la hauteur et la pente de la berge, la géométrie du chenal, la distribution granulométrique du lit et de la berge, la quantité et le type de végétation et la durée de l’inondation (Church et Jakob, 2020).

Les modèles hydrodynamiques ne sont pas encore en mesure de simuler l’érosion des berges lors d’une inondation de débris, et il convient donc de l’envisager séparément de la modélisation hydrodynamique décrite ci-dessus. Les chenaux exposés aux inondations de débris ont généralement des matériaux de fond grossiers et des berges non cohésives; l’érosion dans ces contextes se produit donc généralement par un élargissement rapide du chenal et peut être estimée en utilisant l’approche décrite dans Jakob et coll. (2022). Cette méthode peut être utilisée pour prédire l’étendue de l’érosion pour un éventail de périodes de retour sur toute la longueur d’une rivière et se prête donc à la cartographie des zones exposées aux aléas d’érosion.

Dans la mesure du possible, la modélisation de l’érosion doit être calibrée sur l’érosion observée à partir d’une évaluation historique. Dans les cas où un enrochement de protection est présent, l’hydraulique modélisée peut être utilisée pour évaluer la stabilité potentielle de la protection des berges sous un éventail de débits. S’il existe un risque de déstabilisation de l’enrochement de protection, il peut être simulé en modélisant l’érosion potentielle sans enrochement de protection.

4.3 Laves torrentielles

4.3.1 Description du processus

Les laves torrentielles ont été reconnues pour la première fois au Canada dans les années 1940, mais la plupart des études sur le sujet ont été réalisées depuis le début des années 1980. Une bibliographie sur les laves torrentielles canadiennes est fournie dans VanDine et Bovis (2002). Cette bibliographie contient 295 citations classées selon différents sujets et régions géographiques.

Une lave torrentielle, comme définie par Hungr, Leroueil et Picarelli (2014), est un écoulement très rapide et canalisé de matériaux saturés contenant des sédiments à grains fins (c.-à-d. du sable et des particules plus fines) dont l’indice de plasticité est inférieur à 5 %. Les laves torrentielles sont généralement déclenchées par une avalanche de débris en pente latérale qui frappe le chenal principal à un angle oblique et transfère sa quantité de mouvement dans le chenal. La liquéfaction se produit peu après le début du glissement de terrain en raison du mélange turbulent de l’eau et des sédiments, et la boue liquide commence à s’écouler en direction aval, « gonflant » en entraînant de l’eau et des sédiments supplémentaires jusqu’à ce que la saturation soit atteinte (souvent à une concentration en sédiments par volume de 60 à 70 %). Le gonflement peut provoquer l’entraînement de l’ensemble du substrat meuble du chenal, ce qui conduit souvent à un affouillement jusqu’au substrat rocheux dans la zone de transport. Les laves torrentielles à grains grossiers nécessitent une pente de chenal d’au moins 27 % pour être transportées sur de grandes distances (Takahashi, 1991). Le transport est possible à des pentes plus faibles, la fraction limon-argile étant le contrôle le plus important de la mobilité des laves torrentielles (Jakob et coll., 2015).

Les laves torrentielles après un incendie sont un cas particulier dans lequel le manque de végétation et de résistance des racines peut conduire à une érosion en rigoles et en ravins abondante. Ces processus acheminent les sédiments vers le chenal principal où ils se mélangent à l’eau, entraînant la formation de laves torrentielles. Dans ces cas, aucune source unique ou liquéfaction soudaine n’est nécessaire pour déclencher ou maintenir la mécanique des laves torrentielles.

Contrairement aux avalanches de débris, qui se déplacent sur des pentes non confinées, les laves torrentielles se déplacent dans des chenaux confinés bordés par de fortes pentes. Le front de l’écoulement qui progresse rapidement est abrupt et généralement suivi de plusieurs vagues secondaires qui se forment en raison de la ségrégation des particules et de la migration des rochers vers le haut ou vers l’extérieur. Par conséquent, l’une des caractéristiques distinctives des laves torrentielles à grains grossiers est le granoclassement inverse vertical, dans lequel les particules les plus grosses sont concentrées au sommet du dépôt. Ce comportement caractéristique conduit à la formation de levées alluviales latérales le long du chenal, lesquelles font partie de l’historique de dépôt des laves torrentielles. De même, des lobes de dépôt se forment là où la résistance de frottement des fronts non saturés à gros grains ou riches en bois est suffisamment élevée pour ralentir et finalement arrêter le mouvement des débris liquéfiés qui suivent.

4.3.2 Caractérisation géomorphologique

Comme pour les inondations de débris, un objectif général de la caractérisation des laves torrentielles est la création d’une relation F-A, qui relie la fréquence des laves torrentielles à un éventail d’ampleurs. La fréquence et l’ampleur des laves torrentielles peuvent être reconstituées en appliquant un grand nombre des mêmes méthodes que celles utilisées pour les inondations de débris. De plus, (1) Griswold et Iverson (2014) ont élaboré des relations empiriques entre la zone inondée par une coulée de débris et le volume, (2) la corrélation des dépôts datés entre les tranchées d’essai peut fournir une résolution tridimensionnelle de l’architecture du cône et des estimations des volumes d’inondations (Jakob, 2005; 2013), (3) Jakob et coll. (2020) ont élaboré des relations fréquence-ampleur régionales pour le sud-ouest de la Colombie-Britannique et le sud de l’Alberta, et (4) lorsque seuls les débits de pointe ou les volumes de laves torrentielles peuvent être mesurés, des relations empiriques entre ces deux paramètres peuvent être utilisées (Mizuyama, Kobashi et Ou, 1992; Jakob et Bovis, 1996; Rickenmann, 1999). D’autres orientations canadiennes sont fournies par Hungr et coll. (1984), VanDine (1985), Bovis et Dagg (1992) et Bovis et Jakob (1999), entre autres.

La courbe F-A qui en résulte constitue le facteur clé de la cartographie des aléas basée sur la modélisation. Comme pour les inondations de débris, EGBC (2023) a publié des lignes directrices qui traitent expressément de l’évaluation des aléas liés aux laves torrentielles.

4.3.3 Méthodes de modélisation et de cartographie

Il existe de nombreux progiciels capables de modéliser la rhéologie non newtonienne des laves torrentielles, notamment HEC-RAS et FLO-2D. D’autres modèles de laves torrentielles comprennent RAMMS (Frank et coll., 2017), D-Claw (George et Iverson, 2014; Iverson et George, 2014) et ProDF (Gorr et coll., 2022). Un aperçu de l’état actuel de la modélisation des laves torrentielles est fourni dans Trujillo-Vela et coll. (2022).

La perte soudaine de confinement et la diminution de la pente du chenal entraînent la décélération des laves torrentielles, l’évacuation de l’eau intergranulaire et l’augmentation de la résistance au cisaillement, ce qui ralentit l’avancée du front d’écoulement de blocs et bloque le chenal. L’écoulement secondaire plus fluide (écoulement hyperconcentré) est alors souvent dévié par le front qui ralentit, ce qui entraîne des avulsions secondaires. Comme les laves torrentielles présentent souvent un comportement de déferlement, dans lequel les fronts de blocs alternent avec un écoulement secondaire hyperconcentré, le cycle de formation de lobes et de levées alluviales de blocs grossiers et de déviation de l’écoulement secondaire peut se répéter plusieurs fois au cours d’une même crue. Ces anomalies d’écoulement et ces caractéristiques rhéologiques variables posent un défi aux modélisateurs numériques qui cherchent à créer un fluide équivalent (Iverson, 1997, 2014).

Malgré ces difficultés, les chercheurs ont de plus en plus de succès dans l’utilisation de modèles hydrodynamiques non newtoniens pour modéliser l’étendue de l’inondation des laves torrentielles (p. ex. Jakob et coll., 2013; Gibson et coll., 2022; Yilmaz et coll., 2022). Les chercheurs ont constaté que la performance du modèle est plus sensible au volume des laves torrentielles et moins sensible aux propriétés de l’écoulement (p. ex. Barnhart et coll., 2021), ce qui illustre l’importance de caractériser les aléas avec précision.

Comme pour les crues d’eau claire et les inondations de débris, il est recommandé aux praticiens d’envisager différents scénarios lors de la modélisation. Ces scénarios pourraient inclure les suivants.

  • Blocage des ponts ou des chenaux : il peut être modélisé en supprimant les ouvertures du pont pour obtenir un blocage total de l’écoulement ou en simulant un obstacle à l’écoulement à l’intérieur du chenal (p. ex. un barrage formé par un glissement de terrain).
  • Alluvionnement : il peut être simulé en augmentant le niveau du lit de la rivière dans toute la zone d’étude ou dans des zones locales où un alluvionnement est prévu au cours d’une seule inondation. Compte tenu du comportement de déferlement des laves torrentielles, l’alluvionnement au cours des premières étapes de l’inondation peut augmenter la probabilité d’avulsion au cours des phases ultérieures.
  • Avulsion : si une voie d’avulsion potentielle a été déterminée sur la base des voies d’écoulement montrées dans la modélisation des laves torrentielles ou des lieux d’avulsion historiques connus, le terrain du modèle peut être ajusté pour refléter l’alignement futur prévu (p. ex. en « creusant » un nouveau chenal principal ou en remplissant le chenal principal existant).
  • Rhéologie de l’écoulement : la concentration en sédiments est élevée dans les laves torrentielles, et la rhéologie de l’écoulement varie en fonction de la concentration de sédiments et du pourcentage de particules fines. Il existe généralement une incertitude importante dans la rhéologie de l’écoulement, et la modélisation doit être effectuée avec un éventail de valeurs.
  • Ouvrages de protection : la puissance élevée des cours d’eau et les forces d’impact associées aux laves torrentielles peuvent déstabiliser les ouvrages de protection (p. ex. les enrochements), qui sont généralement conçus pour des crues d’eau claire d’ampleur beaucoup plus faible. Les effets de la rupture des ouvrages de protection contre les inondations peuvent être modélisés en ouvrant des brèches artificielles ou en enlevant des structures comme les digues.

Les berges des chenaux peuvent être sévèrement érodées pendant les laves torrentielles, bien que l’érosion latérale soit souvent associée à la phase d’écoulement hyperconcentré qui se caractérise par des concentrations en sédiments volumétriques plus faibles. Les dommages les plus graves résultent de l’impact direct de gros rochers ou de bois transporté contre des structures qui ne sont pas conçues pour résister aux forces d’impact. Il est néanmoins important de prendre en compte les voies d’avulsion potentielles et les étendues d’érosion sur la base des voies d’écoulement observées à partir des modèles hydrauliques et de l’érosion prévue à partir d’un modèle physique d’érosion des berges (p. ex. Eaton et coll., 2017; Jakob et coll., 2022), combiné à un jugement géoscientifique (p. ex. la Figure 4.9).

composite
Version textuelle

Carte d’aléas composite montrant les aléas combinés de laves torrentielles pour toutes les ampleurs d’inondations modélisées, avec l’étendue de l’érosion des berges potentielle délimité pour la plus grande coulée de débris modélisée.

Figure 4.9. Carte d’aléas composite montrant les aléas combinés de laves torrentielles pour toutes les ampleurs d’inondations modélisées. L’étendue de l’érosion des berges potentielle est également indiquée pour la plus grande coulée de débris modélisée et a été estimée à l’aide des méthodes décrites dans Jakob et coll. (2022).

5.0 Considérations supplémentaires

5.1 Validité des cartes

Les cartes d’inondation reflètent l’état des bassins versants, des plaines inondables et des rivières au moment où l’étude cartographique a été réalisée. En général, les cartes doivent être mises à jour lorsque des changements importants interviennent dans le régime hydrologique des bassins versants, l’apport en sédiments ou la morphologie ou l’emplacement des rivières. Dans la mesure du possible, les praticiens doivent fournir aux décideurs des recommandations détaillées sur le moment auquel les cartes doivent être mises à jour, y compris un suivi permettant de déterminer les changements qui nécessiteront une mise à jour des cartes.

Les praticiens doivent prendre en compte les changements de terrain qui affectent la pertinence des cartes d’inondation sur un lieu d’étude donné. En fonction de l’emplacement et du type de processus hydrogéomorphologique dominant, les circonstances suivantes peuvent avoir une incidence sur la validité de la carte :

  • Occurrence de crues d’eau claire, d’inondations de débris ou de laves torrentielles rares (c.-à-d. de grande ampleur);
  • Feu incontrôlé;
  • Infestation de ravageurs (p. ex. le dendroctone du pin ponderosa);
  • Modification de l’apport en sédiments (p. ex. construction d’un bassin de rétention des sédiments ou alluvionnement cumulatif);
  • Modification du style fluvial (p. ex. passage d’un chenal méandreux à un chenal en tresses);
  • Modification de l’emplacement du chenal par l’érosion des berges ou l’avulsion;
  • Modification des structures de protection contre les inondations ou l’érosion (p. ex. les digues);
  • Ajout, remplacement ou enlèvement de ponceaux.

Les changements de végétation dans le bassin versant modifient l’écoulement de l’eau et l’apport en sédiments au cours d’eau et peuvent être une considération importante, en particulier dans les régions montagneuses. Les feux incontrôlés, par exemple, affectent à la fois le régime hydrologique et l’apport en sédiments au cours des trois à cinq premières années suivant un incendie, augmentant la fréquence et l’ampleur des laves torrentielles dans les bassins versants touchés. Leur incidence dépend à la fois de la gravité et de la couverture des incendies, et un praticien peut donc recommander d’effectuer une nouvelle étude cartographique si plus d’une certaine proportion (p. ex. 20 %) de la zone du bassin versant en amont est incendiée.

Compte tenu de la disponibilité de l’imagerie satellitaire, les changements observés dans la rivière et les versants environnants peuvent également nécessiter des mises à jour des cartes d’inondation. Un praticien pourrait recommander qu’une nouvelle cartographie soit effectuée en cas d’avulsion ou de déplacement de la rivière en dehors de la zone de migration historique ou du lit des méandres. Un changement du style fluvial peut également justifier une mise à jour des cartes, car elle indique des changements dans l’apport en sédiments et le comportement futur de la rivière; une transition d’une forme sinueuse à une forme entrelacée, par exemple, peut indiquer une augmentation de l’apport en sédiments et de l’alluvionnement, et peut à son tour augmenter l’étendue des inondations ainsi que le potentiel d’érosion et d’avulsion.

Les modifications apportées à l’infrastructure de drainage et de protection contre les inondations peuvent également influencer la validité des cartes d’inondation, en particulier en milieu urbain où il y a probablement le plus d’éléments à risque. Un praticien peut donc recommander une mise à jour de la cartographie en cas de modification de l’infrastructure de drainage ou de la protection contre les inondations (p. ex. la longueur des digues) dans une zone d’étude.

5.2 Changements climatiques

Les changements climatiques ont une incidence sur la température et les précipitations dans le monde entier et modifient le moment et l’ampleur des débits de pointe dans certaines régions du Canada. Les effets des changements climatiques sur les processus géomorphologiques sont intrinsèquement complexes, car les réactions géomorphologiques sont assez éloignées des changements de température, ce qui accroît l’incertitude quant au comportement futur. Toutefois, les recherches suggèrent que certains processus géomorphologiques sont susceptibles de se produire plus fréquemment ou avec une plus grande ampleur à mesure que les changements climatiques évoluent en raison de l’augmentation de l’intensité et de la durée des précipitations, des changements dans les régimes hydrologiques, ainsi que d’autres facteurs comme le dégel du pergélisol.

Les aléas posés par les crues d’eau claire sont susceptibles d’augmenter avec les changements climatiques dans certaines régions du Canada. Les zones à régime hydrologique mixte – où les plus grandes inondations de l’année peuvent résulter de la fonte des neiges ou d’évènements pluvieux – sont susceptibles d’être les plus sensibles aux changements climatiques (p. ex. Schnorbus, Werner et Bennett, 2014). Ce régime mixte est le plus courant dans les bassins versants côtiers de la Colombie-Britannique, où les inondations résultent à la fois de la crue printanière (c’est-à-dire de la fonte des neiges) et des épisodes intenses de pluie sur neige souvent provoqués par les rivières atmosphériques à l’automne et en hiver.

Il est prévu que les changements climatiques entraînent une augmentation de la fréquence des crues d’une ampleur donnée (p. ex. le passage d’une crue à récurrence de 200 ans à une crue à récurrence de 50 ans) et puissent potentiellement augmenter l’ampleur des crues dans les bassins versants concernés (Curry, Islam, Zwiers et Déry, 2019). Ces changements sont susceptibles d’augmenter la fréquence ou l’ampleur de l’érosion des berges associée aux crues d’eau claire et aux inondations de débris. Les changements climatiques peuvent également avoir une incidence sur la dynamique des embâcles; par exemple, des températures douces périodiques en hiver peuvent conduire à des cycles multiples de gel et de débâcle au cours d’un seul hiver, avec un potentiel d’affouillement et d’érosion accru (p. ex. Turcotte, Burrell et Beltaos, 2019).

Les changements climatiques peuvent également avoir une incidence sur la fréquence des laves torrentielles en modifiant les processus de versant, car les laves torrentielles se forment généralement à partir de glissements de terrain sur les versants abrupts des vallées. Des recherches menées dans le sud-ouest de la Colombie-Britannique ont montré que la fréquence des glissements de terrain dépassant 10 000 m3 a augmenté depuis le début des années 2000, et une augmentation de 300 % des glissements de terrain peu profonds est prévue d’ici 2100 (Jakob et Owen, 2021). Le volume des laves torrentielles a également augmenté au cours de la même période historique. Dans l’ensemble, la fréquence accrue des pluies intenses et la transition ascendante de la ligne de gel devraient entraîner des petites laves torrentielles plus fréquentes, car le seuil de mobilisation totale du lit est dépassé plus fréquemment.

Les recherches sur les avalanches de débris, qui peuvent entraîner des laves torrentielles très importantes, suggèrent également que les changements climatiques pourraient modifier leur fréquence. La fréquence des avalanches de débris a diminué au fil du temps depuis la glaciation, à mesure que les effets de la détente des contraintes latérales dues à la fonte des glaces s’estompent et que le terrain se stabilise. Cependant, plusieurs ruptures récentes dans le sud-ouest de la Colombie-Britannique (au mont Meager en 2010, au mont James Turner en 2015, au mont Currie en 2017 et au pic Joffre en 2019) suggèrent que la fréquence des avalanches de débris (et des laves torrentielles très importantes) pourrait augmenter avec le dégel du pergélisol.

Compte tenu de l’incidence possible des changements climatiques sur l’hydrologie, il est désormais habituel, dans de nombreuses études, d’utiliser des valeurs projetées de l’écoulement fluvial futur dans la modélisation hydraulique et la cartographie des zones inondables. Toutefois, les répercussions géomorphologiques potentielles des changements climatiques doivent également être prises en compte (p. ex. le risque accru de blocage par des barrages formés par des glissements de terrain). Cela peut être réalisé par la modélisation d’un éventail de scénarios, comme décrit dans les sections 4.1.3, 4.2.3 et 4.3.3. Les changements climatiques sont également susceptibles d’avoir des effets émergents qui ne sont pas encore bien compris ou quantifiés, et les praticiens et les décideurs doivent être prêts à mettre à jour les études cartographiques lorsque les conditions des bassins versants changent (voir la section 5.1).

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