Innovations en télédétection
Révolutionner la surveillance et la gestion des forêts au Canada
Aujourd’hui, la quasi-totalité des industries, des secteurs des services et d’autres secteurs d’activité sont bien engagés dans une « révolution des données ».
Les façons dont les données sont collectées, acheminées et appliquées modifient profondément la façon dont tout un chacun — individus, gouvernements et entreprises — obtient l’information et l’exploite. Les technologies qui jadis relevaient de la science-fiction — comme les données satellites transmises instantanément à la Terre, cartographiées et prêtes à lire sur les mobiles et les afficheurs de tableau de bord — sont à présent monnaie courante.
Le secteur forestier du Canada tire profit de ces développements radicaux et apportent sa propre part d’innovations.
Grâce aux nouvelles technologies de télédétection, des quantités massives de données sont collectées plus rapidement et plus systématiquement que l’on n'aurait jamais imaginé. Les capteurs perfectionnés installés sur les satellites, les avions, les hélicoptères et même les drones (ou véhicules aériens non-habités) ont rendu la collecte de données sur les vastes forêts du Canada et sur leur dynamisme — non seulement plus efficace et plus rentable, mais également plus globale. Pour leur part, les technologies de traitement et d’analyse tout autant innovatrices transforment ces données en cartes, images et autres formes de visualisations très détaillées.
À l’ère de l'information, cette révolution des données alimentée par les technologies a également facilité la surveillance des forêts du Canada pour tout le monde — pas seulement les forestiers, les scientifiques et les techniciens. C’est là une bonne chose. Une plus grande somme d’informations, étayées par les connaissances sur le terrain, aide à soutenir une meilleure surveillance des forêts, à faire de meilleures prévisions et à prendre de meilleures décisions de gestion. Et plus nous en savons, plus nous voyons les possibilités d’optimiser et d’accroître les nombreux avantages que les forêts procurent aux Canadiens et Canadiennes.
L’importance de suivre comment et pourquoi les forêts changent
Les forêts changent sans cesse, et suivre de près les changements en cours au Canada s’inscrit dans l’engagement fondamental de ce pays à l’égard de l'intendance et de la gestion durable des forêts.
La collecte d’informations à intervalles réguliers — sur l’étendue du couvert forestier, la composition en espèces, les perturbations, la santé des forêts et d’autres facteurs — permet aux analystes de dégager les tendances et les modèles de changement, ainsi que d'en comprendre les raisons et les conséquences. Cet accès à de plus grandes connaissances améliore la gestion des forêts de tant de façons. Notre capacité à prédire les changements à venir s’en trouve améliorée, tout comme celle de prendre, sur le terrain, des décisions mieux éclairées.
Pourquoi les forêts changent-elles?
La plupart des changements observés dans les forêts tant au cours des saisons que dans tout leur cycle de vie sont prévisibles. Les perturbations attribuables aux feux de végétation et aux insectes, par exemple, font naturellement partie des cycles de vie des forêts. Les activités humaines façonnent également nos forêts au fil du temps. Il arrive que certaines activités contribuent à détruire les forêts de façon permanente (déboisement). Dans d’autres cas, la destruction est temporaire et on laisse la végétation forestière se régénérer naturellement ou avec l'aide de l’humain.
Les grandes avancées dans le domaine de la télédétection permettent aux scientifiques, aux gestionnaires de ressources et aux décideurs d’améliorer leur compréhension de la manière et de la façon dont les forêts du Canada changent.
Description détaillée
- Le schéma montre que la perte de couvert forestier résultant de causes naturelles et de causes humaines. Lorsqu’il y a perte de couvert forestier qui résulte de causes naturelles (feux de végétation, insectes), il s’agit d’un changement naturel même si les arbres repoussent ou ne repoussent pas. Lorsqu’il y a perte de couvert forestier qui résulte de causes humaines, il s’agit de déboisement si les arbres ne repoussent pas ou si les terres sont mises à l’usage non forestier. Lorsque les activités humaines causent la perte de couvert forestier de façon temporaire (les terres se régénèrent en forêts), il s’agit de la gestion des forêts.
Source
- Schéma et légende adaptés de Kurz, W. A. 2010. An ecosystem context for global gross forest cover loss estimates (Commentary), Proceedings of the National Academy of Sciences: 107 (20): 9025-9026, DOI: 10.1073/pnas.1004508107.
Télédétection et traitement des données : des outils puissants dans la surveillance des forêts
La télédétection, soit l’art et la science d’observer les choses de loin, n’est pas nouvelle. Les forestiers, comme d’autres gestionnaires de ressources, ont utilisé pendant longtemps des aéronefs (comme des avions et des hélicoptères) pour obtenir des images des paysages depuis les airs. Au fil des ans cependant, l’innovation technologique a connu une expansion considérable et a permis de perfectionner les outils à la disposition des forestiers. La télédétection par satellite est désormais pratique courante.
Les satellites tournent constamment autour de la Terre, collectant des gigaoctets de données numériques sur les forêts du monde. C’est le travail des scientifiques de la télédétection de passer en revue les données captées et stockées dans des entrepôts de données massives à l'aide de logiciels sur mesure installés sur de puissants ordinateurs.
La plupart de ces données disséminées à large échelle sont collectées grâce à des partenariats internationaux en recherche. Les scientifiques forestiers du Canada — au Service canadien des forêts de Ressources naturelles Canada (SCF-RNCan), dans les universités et d’autres organismes de recherche — collaborent à de nombreux projets avec d’autres organisations en recherche dans le monde pour étudier ce que les données révèlent sur les caractéristiques forestières, tant à l’échelle du pays que du monde. Les données satellites servent, par exemple, à mesurer la productivité de la végétation et à cartographier le couvert forestier et les perturbations forestières.
Une interprétation prudente : essentielle pour bien comprendre les données de surveillance
Ces avancées en télédétection ont-elles rendu inutiles les technologies de collecte des données au sol et dans les airs? Aucunement. C’est une chose d’observer les changements dans le couvert forestier, mais c’en est une autre de comprendre ce qu'indiquent réellement ces changements et pourquoi ils surviennent. Même la qualité des images à haute résolution maintenant produites avec les données satellites ne peut expliquer ce qu'elles montrent. Pour interpréter les images avec exactitude, il faut pouvoir « descendre sur terre » pour vérifier ce qui est « vu des airs ». Pour interpréter les données avec exactitude, il est nécessaire d’avoir des compétences scientifiques et techniques sur les écosystèmes forestiers, les processus naturels et les conditions locales.
C’est certainement le cas en ce qui concerne les taux de surveillance du déboisement, une préoccupation mondiale. Si l’on peut observer la perte du couvert forestier à partir de l’imagerie satellite, une interprétation bien fondée est requise pour la véritable compréhension du comment et du pourquoi de la perte survenue. La perte de couvert forestier ne signifie pas toujours qu’il y a déboisement (c’est-à-dire la conversion de la forêt en une autre utilisation des terres).
Ce n’est qu’en distinguant changement naturel et changement causé par l’humain, qu’en comprenant la nature de la perturbation observée, et qu’en connaissant les taux de remise en état des forêts que les analystes peuvent faire des évaluations éclairées des taux de déboisement dans une région. De telles évaluations leur permettent, par exemple, de savoir qu’au Canada, les taux annuels de déboisement ont diminué au cours des deux dernières décennies. Aujourd’hui, moins de 0,02 % des terres forestières du Canada sont déboisées annuellement.
De meilleures données permettent de prendre des décisions mieux éclairées et plus efficaces
À l’échelle mondiale, les données satellites aident les analystes forestiers à caractériser avec plus d’exactitude les changements dans le couvert forestier, à évaluer comment ces changements au couvert forestier perturbent les services écosystémiques (telles que la filtration de l’eau), et à quantifier les taux de déboisement et de boisement. Par exemple, de telles données servent, à l’échelle du Canada, pour :
Surveiller le déclenchement et la propagation des feux de végétation.
- Le suivi en temps réel de l’activité quotidienne liée aux incendies est utilisé dans les programmes, les plans, et les logiciels de prévision de la gestion des feux de végétation pour le soutien aux décisions relatives à leur suppression.
- La cartographie détaillée des zones incendiées utilisée dans l'analyse des répercussions des incendies.
Surveiller le type de couvert forestier et l’étendue du couvert forestier.
- Les données sur le couvert forestier tirées de l’Inventaire forestier national sont combinées aux données satellites dans la production de cartes nationales détaillées des attributs forestiers, tels que le volume, les espèces et la hauteur.
- L’information est utilisée dans la recherche pour l'étude des effets des changements climatiques sur les forêts et pour l'élaboration des prévisions.
Des scientifiques canadiens collaborent également avec d’autres dans le monde entier à l’élaboration de nouveaux produits de données (tels que les programmes de cartographie et les applications interprétatives) pour venir en aide à la surveillance des forêts à l’échelle mondiale. Au même moment, les chercheurs au Canada élaborent des méthodes propres à l’étude des forêts dans ce pays. Par exemple, les équipes scientifiques internationales élaborent des cartes mondiales sur les changements observés dans le couvert forestier. Des scientifiques canadiens élaborent des cartes plus détaillées et les utilisent pour étudier la raison pour laquelle les changements observés par les programmes de surveillance mondiaux sont survenus.
À l’horizon : améliorer notre capacité à prédire les changements dans le couvert forestier
Plus les chercheurs et les aménagistes forestiers comprennent comment et pourquoi les forêts du Canada sont en train de changer, mieux ils sont préparés à s’adapter à tous les autres changements qui surviennent, que ce soit dans les produits forestiers du Canada, dans la demande pour ces produits sur les marchés mondiaux, que dans les attentes du public à l’égard de ce qui constitue une bonne politique forestière.
Les nouveaux outils renforcés de données en usage améliorent considérablement l’expérience quotidienne de la gestion des forêts, et non seulement dans leur application à la surveillance du couvert forestier.
Les nombreuses bases de données mises en commun offrent un potentiel énorme dans de nombreux aspects de la planification et de la gestion des ressources forestières. Par exemple, les systèmes intégrés déjà en usage permettent de prédire les demandes en ressources de lutte contre les feux de végétation. La mise en commun de grosses bases de données notamment sur le climat, le couvert forestier, le paysage, et le comportement des incendies offre aux gestionnaires un instantané pleine grandeur de la situation, ce qui les aide à prendre des décisions de déploiement urgentes concernant les ressources en équipement et en personnel de lutte contre les feux de végétation.
Beaucoup d’autres applications de données collectées par télédétection sont également en cours de développement. À l’avenir, par exemple, il est à espérer que la cartographie de l’infestation des forêts par les espèces envahissantes et de la répartition des arbres hôtes permettra de repérer rapidement les espèces envahissantes et de prédire les éclosions potentielles et les modèles probables de leur propagation.
Avec la révolution des données en cours dans le secteur forestier, une période prometteuse s'ouvre pour les gestionnaires de ressources, les scientifiques et d’autres engagés dans le développement responsable des ressources forestières vastes et précieuses du pays — tant dans l’intérêt national que dans l’intérêt mondial.
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