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Tirer des leçons d’une tragédie – Le tsunami de 1929 (Demandez à RNCan)

Le chercheur Alexandre Normandeau et de retour pour discuter de l’énorme tsunami qui a eu lieu à Terre-Neuve en 1929. Alexandre fait partie d’une équipe qui a étudié le glissement de terrain qui a causé ce tsunami, et partage avec nous les résultats de cette recherche.

Transcription

Joel Houle :

Bonjour tout le monde et bienvenue à un nouvel épisode de notre émission Demandez à RNCan! Dans cette série de balados, nous discutons avec nos experts du travail qui se fait ici, à Ressources naturelles Canada. Je suis votre animateur, Joël Houle. Nos fidèles auditeurs se souviennent sans doute de notre entrevue avec le chercheur Alexandre Normandeau lors de l’épisode 12. Alexandre étudie les géorisques marins, et ses recherches sur l’énorme tsunami qui a eu lieu à Terre-Neuve, en 1929, indiquent que de tels événements se produisent plus fréquemment qu’on l’avait initialement prévu. Alexandre est de retour avec nous pour discuter des résultats de ses études. Avant de commencer, j’aimerais souligner que le balado s’appelle Demandez à RNCan pour la simple raison que nous voulons recevoir vos questions. À la fin de l’épisode, si vous avez des questions sur le sujet abordé aujourd’hui, vous êtes invités à nous en faire part sur Twitter avec le mot-clic #DemandezÀRNCan. J’aimerais souligner que je suis également sur Twitter, alors je vous encourage à me suivre à @JoelScience. Nous diffusons habituellement un épisode de l’émission Demandez à RNCan par mois. Alors abonnez-vous pour ne pas rater d’épisode! C’est bon? Parfait, allons-y…

Joel Houle :

Notre invité d’aujourd’hui est le chercheur Alexandre Normandeau. Alexandre, re-bienvenue!

Alexandre Normandeau :

Merci!

Joel Houle :

Dans notre dernière conversation, nous avons discuté de géorisques marins. Est-ce que tu peux nous rafraîchir la mémoire et nous donner un aperçu du genre de travail que tu effectues?

Alexandre Normandeau :

Oui! Donc, ici à la Commission géologique, on est une équipe qui travaille sur les risques naturels sous marins. On travaille sur les tremblements de terre et leurs effets au large, mais aussi sur tout ce qui est un risque naturel sur le fond marin. Donc ça peut-être les glissements de terrain. Il y a des avalanches sous-marines. Tout processus qui transporte les sédiments sur le fond marin. On est une équipe qui travaille là-dessus pour voir si ça représente un risque pour les infrastructures marines, mais aussi pour les communautés côtières.

Joel Houle :

Tu as étudié un incident en particulier, soit le tsunami qui a eu lieu à Terre-Neuve en 1929. Qu’est-ce qui a causé ce tsunami?

Alexandre Normandeau :

Il y a une équipe ici qui travaille depuis très longtemps sur 1929. Le tsunami a été causé par un mélange de tremblement de terre et de glissement de terrain. Autour de 17 h le 18 novembre 1929, il y a eu un tremblement de terre de magnitude 7,2 qui a eu lieu à près de 250 kilomètres au sud de Terre-Neuve. Ce tremblement de terre a généré un grand glissement de terrain dans le fond de l'eau. On sait qu'il y a eu un glissement de terrain parce que des câbles sous-marins qui reliaient l'Amérique du Nord à l'Europe ont été brisés de façon séquentielle. Donc on savait qu'il y avait un grand glissement de terrain qui se propageait dans le fond de l'eau et qui brisait les câbles sous-marins au fur et à mesure qu'il se déployait dans le fond de l'eau. Environ deux heures et demie plus tard, après le tremblement de terre, un tsunami a ensuite atteint la péninsule de Burin. Et ce tsunami-là, qui avait une hauteur de vague d'environ trois à sept mètres et même des pics de vague autour de 13 mètres, a causé beaucoup de dommages dans la péninsule de Burin, mais aussi un peu ailleurs à Terre-Neuve et en Nouvelle-Écosse. Mais la péninsule de Burin a été vraiment la partie la plus affectée, comptant environ 28 décès dus à ce tsunami. Il y a eu beaucoup de dommages matériels aussi – des maisons qui ont été emportées dans l'eau et qui ont été brisées également. Donc le plus grand nombre de victimes dus à un tremblement de terre au Canada, c'a été pendant l'événement de 1929 sur la côte est du Canada.

Joel Houle :

C'est un événement important! Pourquoi est-il essentiel d’étudier ce glissement de terrain-là en particulier?

Alexandre Normandeau :

La première évidence d'un glissement de terrain sous-marin qui a été vraiment enregistrée dans le monde, ç’a été cet événement de 1929. Puis, comme il a causé beaucoup de dommages et de décès, c'est important de savoir si ce genre d'événement arrive relativement fréquemment ou non. Le problème, c'est qu'on peut rarement associer des glissements de terrain que l'on observe dans le fond de l'eau… c'est rare de pouvoir les associer directement à des tremblements de terre. Parce que, généralement, on ne les enregistre pas de la même façon. Donc on va étudier le fond marin, on va voir des glissements de terrain dans le fond de l'eau, mais on ne saura pas si c'est un tremblement de terre qui les a causés. 1929 est un événement particulier qu’il est important d'étudier parce qu'on est capable de l'associer directement à un tremblement de terre, de voir comment il a réagi et quelles ont été les conséquences.

Joel Houle :

Tu as fait une découverte intéressante en étudiant le glissement de terrain de 1929. Peux-tu nous parler de tes résultats?

Alexandre Normandeau :

Oui donc, en fait, avec Calvin Campbell et une grande équipe de chercheurs ici, on a eu plusieurs missions en mer sur des bateaux. Ce qu'on fait, c'est qu’on cartographie le fond marin. On est capable de cartographier le fond marin jusqu'à cinq kilomètres de profondeur. Puis, en 2012, on a fait une découverte importante – on a vu qu'il y avait des grands glissements de terrain dans le fond de l'eau. Et on ne savait pas s'ils étaient associés à 1929 ou s'ils étaient plus vieux. Donc en prenant des carottes de sédiments dans le fond de l'eau de dix mètres de hauteur, on a pu identifier l'âge exact de certains de ces glissements de terrain. Et ce qu'on a vu, c'est que des événements comme 1929, il y en a eu dans le passé plus ou moins récent de la côte est du Canada. Donc au début, on pensait que 1929 était vraiment un événement unique dans les derniers 10 000 ans, mais ce qu'on a réalisé, c'est qu’en fait, dans les derniers 4 000 ans, on a eu environ un événement similaire à 1929 par 1000 ans. La seule chose, c'est qu'on ne sait pas si ces événements passés ont causé des tsunamis ou non. C'est encore des recherches qui sont à faire. Mais ce qu'on sait pour sûr, c'est qu'il y a eu des glissements de terrain similaires qui se sont produits dans le passé et qui sont énormes. On parle de volume et de superficie trois fois la taille de l'Île-du-Prince-Édouard. C'est vraiment des choses qu'on ne peut pas s'imaginer sur terre. Ce qui se passe sous l'eau, c'est vraiment, vraiment beaucoup plus gros que ce qu'on peut s'imaginer sur terre.

Joel Houle :

Incroyable! Alors, d’après les recherches, c’est seulement une question de temps avant que ce genre de phénomène se reproduise. Qu’est-ce que cela signifie pour les communautés côtières et nos infrastructures marines?

Alexandre Normandeau :

C'est très difficile de prédire le futur; en fait, c'est impossible de prédire si d'autres événements comme ça vont se produire dans un avenir rapproché ou non. Tout ce qu'on peut faire, c'est de voir si c'est récurrent ou non dans le passé. Ce qu'on sait pour sûr, c'est qu'il y a eu des tremblements de terre dans le passé, des glissements de terrain dans le passé, et il faut juste savoir que c'est quelque chose qui peut se produire. Donc avoir des plans au cas où un événement similaire se reproduirait. Je ne pense pas qu'on a besoin d'être trop concernés, de craindre que ça va se produire dans notre vie, mais il faut être au courant que ça existe et que des événements similaires à ça peuvent se produire, parce qu’il s’en est produit en 1929 et peut-être avant. Mais il faut aussi comprendre que des glissements de terrain peuvent être associés à des tremblements de terre, mais peuvent être aussi associés à d'autres phénomènes. Donc ce n'est pas parce qu'on a vu des glissements de terrain dans le fond de l'eau qu'ils sont nécessairement associés à des tremblements de terre et qu'ils vont nécessairement engendrer des tsunamis. Il y a encore beaucoup de recherche à faire à ce niveau-là pour essayer de voir quels sont les risques pour les communautés côtières. Mais ce qui est sûr, c'est que ça représente des risques pour les infrastructures sous-marines. Il y a des câbles sous-marins qui transportent 95 % des données. Netflix et Internet sont transportés par des câbles sous-marins dans le fond de l'eau. Des événements comme ça peuvent briser ces câbles sous-marins et causer des dommages économiques assez importants. Comme on a pu le voir aux Îles-de-la-Madeleine quand il y a eu une tempête l'année dernière : si je me souviens bien, les câbles sous-marins avaient été retirés. C'est surtout ça qu’il est important de retenir pour les infrastructures sous-marines, mais il faut aussi être prêts au cas où ça arriverait pour les infrastructures côtières.

Joel Houle :

Tu as mentionné plus tôt qu'en 1929, il y avait des câbles sous-marins également?

Alexandre Normandeau :

Oui. Des câbles de communication. De télégraphes.

Joel Houle :

Avez-vous des ressources à suggérer à nos auditeurs qui veulent en savoir plus sur les glissements de terrain sous-marins?

Alexandre Normandeau :

Oui. Deux ressources qui sont importantes. On a à Ressources naturelles Canada une base de données de publications qui s'appelle GEOSCAN. Puis ensuite, il y a aussi toutes les ressources sur Séismes Canada pour ceux qui sont plus intéressés par les tremblements de terre.

Joel Houle :

Parfait. Nous allons inclure les liens dans la description de notre balado d’aujourd’hui. Si les auditeurs sont intéressés, ils peuvent vérifier la description. Merci beaucoup d'avoir pris le temps de nous rencontrer Alexandre.

Alexandre Normandeau :

Un plaisir!

Joel Houle :

On arrive à la fin de l’émission, mais ça ne veut pas dire que le sujet est fermé. On vous invite à poursuivre la conversation dans les réseaux sociaux. Si vous avez des questions pour nos experts ou des commentaires sur cet épisode, vous pouvez nous les adresser sur Twitter, accompagnés du mot-clic #DemandezÀRNCan. Également, si vous souhaitez en apprendre davantage sur les activités scientifiques de Ressources naturelles Canada, nous vous encourageons à visiter notre cybermagazine La science, tout simplement! Vous y trouverez une mine d’informations intéressantes, incluant les épisodes précédents de notre balado, des articles et des vidéos. La page spécifique à cette émission contient des liens électroniques vers des ressources pertinentes pour en apprendre davantage sur le sujet discuté aujourd’hui. Vous pouvez accéder à La science, tout simplement directement à partir de notre site Web à rncan.gc.ca, ou en effectuant une recherche sur Google. Si vous nous écoutez sur Apple Podcast, Google Play, Stitcher ou SoundCloud, nous vous invitons à écrire un avis et à vous abonner à notre émission pour prendre connaissance des épisodes antérieurs et futurs. Voilà qui conclut cet épisode de Demandez à RNCan. Merci de nous avoir écoutés aujourd’hui et revenez-nous au prochain épisode!

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