Notre histoire
Les débuts de l'histoire de Ressources naturelles Canada (RNCan) nous ramènent au 14 avril 1842, date de la création de la Commission géologique du Canada, un bon quart de siècle avant celle de la Confédération.
En tant que précurseur de RNCan, la Commission a jeté les fondations à l'origine du succès de nos secteurs d'exploitation des ressources naturelles. Au fil des ans, à mesure que le territoire canadien s'élargissait, le mandat de la Commission a été fragmenté entre plusieurs organismes gouvernementaux. Aujourd'hui, avec la constitution de RNCan en 1994, il est possible de constater qu'à de nombreux égards, il est le reflet de la Commission originale : il est chargé d'un large éventail de questions liées aux ressources naturelles et il veille à l'exploitation durable de nos ressources naturelles au profit de la population canadienne.
Premières et faits fascinants tirés de notre passé illustre
La Commission a été créée dans le but exprès de préparer un inventaire et une évaluation des richesses minérales de la Province du Canada (qui comprenait alors le sud de l'Ontario et du Québec). Elle était également chargée d'observer ses sols et ses eaux. En fait, la Commission avait pour mandat de recueillir l'information qui permettrait le mieux de favoriser l'exploitation économique des ressources minérales, de stimuler la nouvelle industrie et d'attirer des immigrants sur des terres à vocation agricole.
Les géologues investis de cette mission avaient une importante tâche qui s'alourdissait à mesure que d'immenses territoires venaient s'ajouter à l'entité canadienne alors en formation. Le travail sur le terrain dans une nature sauvage encore inexplorée où il fallait se frayer un chemin comportait son lot d'épreuves, de privations et de dangers. En 1862, le Times de Londres cite sir William Logan, fondateur de la Commission :
Peu de gens peuvent imaginer la nature ardue de ce travail. Notre courageux géologue est souvent appelé à pénétrer dans la forêt vierge, à se frayer un chemin à travers les marais arborés de cèdres enchevêtrés et à braver les dangers des rapides canadiens dans un canot fragile; à ces difficultés s'ajoute le fait qu'à chaque pas, il doit lutter contre les ennemis les plus impitoyables et invincibles dans ces régions - des nuées de moustiques et de mouches noires. 1
La mission officielle des premiers géologues - recueillir des données sur la masse continentale du Canada - fut reléguée au second plan par le rôle plus vaste d'explorateur des nouvelles terres. Outre des roches, des minéraux, des fossiles, de la terre et de l'eau, ces hommes ramenaient de l'information sur la flore, la faune et les peuples qu'ils rencontraient au cours de leurs périples.
Leur moisson de spécimens et d'artefacts fait maintenant partie des collections administrées par RNCan, le Musée canadien de la nature, le Musée canadien des civilisations et le Musée des sciences et de la technologie du Canada. L'histoire des trois musées remonte à l'époque où sir William Logan ouvrit au public un petit musée géologique, dans les années 1850.
L'exploitation forestière
La Commission a été le premier organisme du gouvernement canadien à effectuer de la recherche sur les forêts et à recueillir des spécimens pour son musée dans le cadre de son étude de la géologie canadienne. Comme le déclare au Parlement Alfred Selwyn, directeur de la Commission, en 1885 :
On a passé du temps pendant l'année à recueillir de bons spécimens de bois canadiens, et, à la fin de 1884, le musée comptait 280 coupes, représentant 115 essences de nos arbres si précieux. Un catalogue élargi des arbres et arbustes du nord-ouest a été établi et remis, à sa demande, au ministre de l'Agriculture du Manitoba, en vue de sa publication dans le rapport de son ministère 2.
Même après que le gouvernement ait créé le Service forestier fédéral en 1899 sous la tutelle du ministère de l'Intérieur - doté d'un seul arpenteur et d'un budget de 1 000 $, la Commission a poursuivi certaines tâches dans le domaine forestier. En 1900, Jim Macoun, botaniste et topographe travaillant pour la Commission, a été nommé responsable du volet sur les forêts canadiennes à l'Exposition de Paris de 1900. Son patron, George Dawson, lui a demandé de faire le maximum pour promouvoir l'industrie forestière canadienne. Plus de 50 millions de personnes ont visité l'Exposition 3.
Pour sa part, le ministère des Mines, créé par une loi fédérale en 1907, a été chargé de cartographier les zones forestières du Canada, de faire des études utiles à la préservation des ressources forestières du pays et d'en rendre compte 4.
Minéraux et métaux
Le premier rapport officiel de William Logan au Parlement, présenté en 1843, renferme sa première analyse de la valeur économique d'un gisement. Dans le cadre de ce rapport sur les bancs calcaires de Marmora, en Ontario, M. Logan demande conseil à l'un des grands lithographes de Grande-Bretagne, William Standidge, qui qualifie la découverte d'importante.
Outre l'estimation de la valeur économique possible du calcaire, M. Logan considère qu'il s'agit d'une découverte d'une importance incontestable pour les arts. Son rapport relate brièvement l'histoire de la lithographie, qui avait vu le jour à peine 40 ans plus tôt, et l'auteur signale que la pierre convenant à la lithographie est devenue un article de commerce et que le gouvernement français offre depuis quelques années une prime pour sa découverte. 5
La Commission a rempli son mandat - découvrir les roches et les minéraux susceptibles d'être exploités et utilisés à des fins utiles -, comme l'illustre sa publication en 1863 intitulé Geology of Canada. Cet ouvrage détaillé, le premier rapport d'intérêt à avoir été publié sur la masse continentale du Canada, suscite des critiques enthousiastes. Le célèbre recteur de l'Université McGill, sir William Dawson, écrit ce qui suit :
Tout ce qu'on sait sur ce que produit notre pays est présenté de manière exhaustive dans chaque description des richesses minérales; l'homme pratique dispose donc d'un guide fiable sur l'entreprise minière ainsi que d'une protection contre l'imposture. Et advenant de nouvelles découvertes de minéraux utiles qui pourraient être faites ou revendiquées après la publication du rapport, l'ouvrage permet de déterminer leur nature et valeur probables, par rapport à celles qu'on connaissait auparavant. 6
En 1887, l'ingénieur des mines Eugène Coste établit le premier rapport statistique sur les minéraux du Canada. Intitulé Statistical Report on the Production, Value, Exports and Imports of Minerals in Canada, il donne un instantané intéressant de la richesse minérale du Canada, entre autres des statistiques sur la production annuelle d'or en Colombie-Britannique remontant à aussi loin que 1858 7.
Sécurité dans les mines et efficacité énergétique
En 1870, un jeune géologue du nom d'Edward Hartley à l'emploi du gouvernement entreprend l'examen et le levé du vaste bassin houiller du Cap-Breton et de Spring Hill en Nouvelle-Écosse. Il recommande d'accroître la production et d'améliorer la santé et la sécurité des mineurs, en plus de donner des avis avant-gardistes sur les avantages de l'efficacité énergétique. Il écrit :
La question de la fumée est encore plus importante que je ne le pensais. J'ai réussi à y intéresser tous les gestionnaires du charbon. M. Lawson a adopté l'une des suggestions que j'ai mises de l'avant dans mon dernier rapport et a installé des plaques de châssis perforées sur les portes de plusieurs de ses chaudières. Résultat : ces chaudières modifiées ne dégagent qu'un sixième de la fumée par rapport aux anciennes, et ce, sans la modification la plus importante : l'installation d'une plaque isolante derrière la grille. Je suis convaincu que je pourrais accroître les ventes de 150 000 tonnes la première année une fois que cette mesure sera bien comprise.
Pour améliorer la sécurité dans les mines, M. Hartley recommande l'utilisation de machines à concasser de préférence aux explosifs, car cette pratique dangereuse a entraîné de nombreux incendies et explosions. Il fait observer que si l'on avait utilisé ces machines deux ans plus tôt, l'explosion de la mine Foord aurait pu être évitée et l'on aurait pu épargner 15 000 ou 20 000 $.
Il fait également la promotion de l'utilisation de machines de ventilation dans les mines pour des raisons de sécurité, faisant remarquer avec un humour caustique que, dans ce pays, à quelques exceptions près, on pourrait dire que les mines sont ventilées grâce à l'intervention miraculeuse de la Providence, puisque personne d'autre ne s'en occupe. 8 Tragiquement, M. Hartley meurt inopinément dans les semaines qui suivent la publication de son rapport.
Cartes topographiques
En 1854, William Logan témoigne, devant un comité spécial de l'Assemblée législative qui se penche alors sur la Commission, sur les difficultés qu'il y a à réaliser des analyses géologiques sans cartes topographiques :
Les principales difficultés que j'ai rencontrées, indépendamment de celles inhérentes aux déplacements en canot dans des rivières peu profondes et à pied à travers les forêts, sont celles découlant de la volonté d'établir une bonne carte topographique du pays. Une topographie précise jette les bases d'une géologie précise 9.
Le comité spécial lui accorde son soutien à l'unanimité. « Votre comité croit pouvoir dire en toute confiance que nulle part ailleurs dans le monde, des dépenses aussi modestes (à peine 20 000 £ en tout) n'ont permis une contribution aussi importante à la géologie. » 10
Jusqu'à ce que la Commission établisse sa Division topographique en 1908, les géologues devaient souvent faire les levés topographiques et géologiques d'une région en même temps. Ce fut le cas pour Elfric Drew Ingall, qui établit en 1886 la première carte topographique à courbes de niveau du Canada de la région de Silver Mountain près de Thunder Bay tout en établissant une carte géologique 11.
Selon Albert Low, le directeur qui a supervisé la création de la Division topographique, la cartographie topographique constituait un domaine idéal pour accroître la collaboration avec les provinces. Il notait ainsi dans son rapport de 1908 :
Une carte topographique à courbes de niveau, bien que nécessaire pour la représentation adéquate des caractéristiques géologiques d'un district, est pratiquement indispensable du point de vue provincial, pour l'exploitation des ressources naturelles ainsi que pour l'étude et la réalisation de tous les projets techniques 12.
Le ministère de l'Intérieur a également réalisé des travaux topographiques dans son Unité de levé topographique en 1890.
Hommage au personnel
Des centaines de lieux et de caractéristiques géographiques importantes au pays ont été baptisés en l'honneur des pionniers qui ont travaillé pour la Commission, ce qui témoigne du rôle essentiel qu'ils ont joué dans le développement du Canada. En voici quelques exemples :
- Le mont Logan, point culminant du Canada, a été ainsi nommé en hommage à sir William Logan, directeur fondateur de la Commission;
- La chaîne de Selwyn en Colombie-Britannique rend hommage à Alfred Selwyn, deuxième directeur de la Commission; et
- La ville de Dawson commémore George Dawson, le troisième directeur de la Commission, dont les cartes du Klondike étaient les seules auxquelles pouvaient se fier les chercheurs d'or à l'époque de la ruée vers l'or.
Ces pionniers ont reçu d'autres honneurs, comme l'élévation à l'ordre de la chevalerie et des médailles. William Logan a été fait chevalier par la Reine Victoria et Chevalier de la Légion d'honneur par Napoléon III pour son travail exceptionnel de promotion du Canada aux grandes expositions internationales de Londres (1851) et de Paris (1855). Pour son travail scientifique, il a été élu membre de la prestigieuse Société royale en 1851, son nom ayant été proposé par l'un des géologues les plus influents de Grande-Bretagne, sir Roderick Murchison. Comme le déclare son biographe Bernard J. Harrington, « cet honneur semble avoir été fort flatteur pour lui, d'autant plus qu'il est le premier Canadien de naissance à avoir été admis pour son travail réalisé au Canada. » 13
Le rôle d'explorateur de nos géologues s'est poursuivi dans certaines régions du pays jusqu'à récemment. Yves Fortier, directeur de la Commission de 1964 à 1973, a reçu la Médaille Massey de la Société géographique royale du Canada en 1964 pour ses travaux dans l'Arctique, en particulier pour l'Opération Franklin, l'une des expéditions de reconnaissance menées dans l'Arctique dans les années 1950. En lui remettant la médaille, le gouverneur général Georges Vanier a observé que « quoique familier avec le canot et le traîneau à chiens, M. Fortier était le premier récipiendaire de la Médaille Massey à utiliser l'hélicoptère dans ses explorations ». Incidemment, la citation pour la médaille comprend une note intéressante disant que M. Fortier est l'un des premiers à avoir fait le tour de l'île Cornwallis à bord d'un canot en toile. M. Fortier, qui vit à Ottawa, a célébré son 90e anniversaire le 14 août 14.
Savoir traditionnel
Robert Bell, géologue dont la carrière s'étend sur 50 ans, a voyagé à bord du SS Neptune pour explorer la côte du Labrador et la baie d'Hudson en 1884-1885. L'un de ses rapports illustre comment le savoir traditionnel était mis à profit à l'appui des études. On y lit ce qui suit :
Je m'efforçais également d'obtenir des Autochtones de l'information sur la présence de minéraux utiles qui, même en l'absence de précisions, peut dans certains cas déboucher sur des découvertes importantes. Les Esquimaux sont intelligents, en plus d'être de bons observateurs, en particulier des choses qui touchent leur mode de vie, et bien qu'on ne s'attende guère à ce que les roches et les minéraux suscitent leur intérêt, j'ai trouvé malgré tout que dans certains cas, ils en avaient relevé la présence. Pour faciliter les recherches, j'avais fourni moi-même une collection de tous les minerais, minéraux et roches susceptibles d'être présents dans les régions que nous allions visiter, et les Autochtones à qui l'on permettait de les examiner pouvaient désigner ceux qui leur semblaient similaires à certaines sortes qu'ils avaient déjà observées dans leurs propres districts 15.
Vilhjalmur Stefansson a eu recours à la même technique dans son expédition dans l'Arctique en 1908-1912, qui a bénéficié d'un financement de 200 $ plus 300 $ pour les dépenses. Il s'agissait de la première expédition ethnologique financée par la Commission, et elle a établi un important précédent pour le financement futur de ce type de recherche par le gouvernement 16.
Refrain familier
Les niveaux de financement constituent une préoccupation constante pour les gestionnaires du gouvernement, et il est facile de comprendre Alfred Selwyn (directeur de la Commission de 1869 à 1895), quand il écrit en 1881 :
Le directeur souhaite attirer l'attention sur le fait que bien que le coût de publication des résultats des travaux du personnel du service géologique et les salaires du personnel augmentent chaque année, le budget annuel n'a pas été majoré en conséquence et est demeuré stable au cours des quatre dernières années à 50 000 $, somme qui, pour effectuer des explorations de l'Atlantique au Pacifique, financer un musée, un laboratoire et une bibliothèque, et publier les résultats des travaux, dans les deux langues, est, selon moi, tout à fait insuffisante 17.
Une tendance qui ne s'est guère répandue
Sir William Logan était en son temps l'un des citoyens les plus riches du Canada et, souvent, il puisait dans ses poches pour maintenir son employeur à flot. Au moment de son décès en 1875, le gouvernement canadien devait à sa succession la somme de 8 532 $ pour l'achat de sa bibliothèque et de ses instruments topographiques.
Son successeur, Alfred Selwyn, note :
Outre le coût de la bibliothèque et des instruments, il [Logan] a dépensé 8 434,38 $ pour divers articles pour la Commission; et les bureaux spacieux dans la rue St. James [à Montréal] construits à un coût supérieur à 30 000 $ et maintenant occupés par la Commission sont probablement aussi attribuables à sa générosité. 18
Et vous qui considérez que vous êtes extrêmement polyvalents!
Nos géologues comptaient parmi les premiers fonctionnaires à devoir faire preuve de polyvalence et ils excellaient dans toutes leurs fonctions. Ainsi, quand Robert Bell fait le tour de la côte du Labrador et de la baie d'Hudson à bord du SS Neptune en 1884-1885, il est à la fois géologue, minéralogiste, zoologiste, botaniste, médecin, taxidermiste et photographe. Et il a aussi emporté avec lui les instruments nécessaires pour diverses méthodes de levés au cas où l'occasion de les utiliser se présenterait. Pendant son temps libre, il correspond avec le célèbre anthropologue américain Franz Boas, qui, à l'époque, « étudiait les Esquimaux et explorait le sud de la Terre de Baffin pour étudier la géologie de l'intérieur de l'île » 19.
Notes en fin de texte
- Extrait d'un article sur William Logan par M. Percy de Londres paru dans The Times, le 24 juillet 1862, Life of Sir William E. Logan, B.J. Harrington, 1883, p. 348
- GSC Annual Review 1885, p. 30A
- The Field Naturalist, W.A. Waiser, 1989, p. 137
- The National Museum of Canada, W.H. Collins, 1928, p. 68
- GSC Annual Review 1843, p. 45
- Reading the Rocks, M. Zaslow, 1975, p. 80
- GSC Annual Review, 1887, p. 32S
- GSC Annual Review 1870-71, p. 2-4
- Life of Sir William E. Logan, B.J. Harrington, 1883, p. 284
- Life of Sir William E. Logan, B.J. Harrington, 1883, p. 283
- A Century in the History of the Geological Survey of Canada, F.J. Alcock, 1948, p. 65
- GSC Annual Review, 1908, p. 9
- Life of Sir William E. Logan, B.J. Harrington, 1883, p. 270
- Canadian Geographical Journal, vol. 68, 1964, p. 6-7
- GSC 1882-83-84 Annual Review, « Observations on the Geology, Mineralogy, Zoology, and Botany of the Labrador Coast, Hudson's Strait and Bay », p. 8
- GSC Annual Review 1908, p. 2
- GSC Annual Review 1879-80, p. 9
- GSC Annual Review 1875-76, p. 7
- 1882-83-84 GSC Annual Review, « Observations on the Geology, Mineralogy, Zoology, and Botany of the Labrador Coast, Hudson's Strait and Bay. 1884, on board the SS Neptune », p. 1, et Reading the Rocks, M. Zaslow, 1975, p. 171
Détails de la page
- Date de modification :